Faut-il Tuer Sister George ? (Robert Aldrich - 1968)
Publié : 24 janv. 04, 17:15
The Killing of Sister George (1968)
Faut-il le rappeler, oui sans doute, Robert Aldrich était un immense metteur en scène, sans que le succès des Douze Salopards ne change quoi que ce soit à l'affaire.
Les plumes étriquées qui avait porté aux nues sa production des années cinquante, furent les mêmes à sanctionner ce qu'elles s'imaginaient être un déclin dans la décennie suivante.
Pourtant Aldrich, lui, n'avait pas changé.
Si l'on met de côté Les Quatre du Texas - pochade languissante au service du Rat Pack de Sinatra - son cinéma gagne en intransigeance, en férocité, en audace et en liberté.
Après Attack!(1956), Aldrich donnait le sentiment d'épuiser son cinéma dans des réalisations dénuées de réelle conviction. Et on ne le retrouve en pleine possession de ses moyens qu'avec l'hallucinant Whatever Happened to Baby Jane?(1962)
Le succès des Douze Salopards - extraordinaire pamphlet qui subit les foudres d'une certaine critique bien pensante - permet à Aldrich de fonder sa propre compagnie de production,et de se tourner vers des projets qui lui tiennent particulièrement à coeur.
Au premier rang desquels, l'adaptation d'un succès théâtral de Frank Marcus, Faut-il tuer Sister George?
La "Sister George" du titre est l'héroïne toute d'écoeurante bonté et de pommettes rubicondes d'un feuilleton familiale produit par la BBC. Le meurtre , c'est la décision d'éliminer le personnage en question du programme, en raison des frasques et de la personnalité incontrôlable de son interprète June Buckridge (Beryl Reid) Son franc-parler, son tempérament volatile et son goût prononcé pour l'alcool , en font une antithèse par trop voyante de la consensuelle Sister George.
June partage un appartement confiné avec son amante "Childie" (Susannah York); une jeune femme naïve qui se voudrait poétesse et vit entourée de poupées. Childie est l'objet de la jalousie hystérique et de la cruauté occasionnelle de June, qui peut aller jusqu'à un rituel d'humiliation.
Pour compléter le tableau, il y a la voisine, ancienne prostituée et confidente du vague à l'âme. Mais surtout, Mercy Croft (Corale Browne), représentante de la BBC, Némésis à la distinction affectée, dont chaque intervention vient saper un peu plus l'univers de June, et qui convoite secrètement "Childie".
"George" - ainsi qu'elle est appelée durant tout le film - appartient à cette galerie de monstres chère à Robert Aldrich. Elle n'est ni aimable , ni convenable, et ne fait rien pour y remédier. Mais le réalisateur lui réserve toute sa sympathie.
Son lesbianisme assumé, son humour cru, détonent dans un environnement régi par l'hypocrisie. Elle se fraye un chemin à coups d'épaules (littéralement) dans un monde qui tolère à peine les êtres hors- normes.
"George" s'avère être la seule personne authentique dans un univers de faux-semblants, que symbolise la télévision et qu'illustrent à merveille les coulisses d'un tournage. Une fois de plus, Aldrich s'attache à faire tomber les masques et nous montrer l'envers du décors (de tous les décors).
Formellement, il tient son film de bout en bout, sans jamais faillir, enfermant les protagonistes dans une atmosphère oppressante, traduite à la perfection par la photographie de Joseph Biroc.
En grand cinéaste, Aldrich n'a pas peur de son sujet; qu'il filme dans le refus de tout pittoresque une soirée dans un bar gay, ou qu'il mène son récit jusqu'à une paroxystique séquence de masturbation lesbienne.
Il ne restera plus à une "George" esseulée, dans un ultime sursaut dérisoire et bouleversant, qu'à saccager nuitamment le décors des ses exploits télévisuels passés, avant de s'effondrer, résignée.
Les trois actrices principales sont dignes de tous les éloges.
Faut-il le rappeler, oui sans doute, Robert Aldrich était un immense metteur en scène, sans que le succès des Douze Salopards ne change quoi que ce soit à l'affaire.
Les plumes étriquées qui avait porté aux nues sa production des années cinquante, furent les mêmes à sanctionner ce qu'elles s'imaginaient être un déclin dans la décennie suivante.
Pourtant Aldrich, lui, n'avait pas changé.
Si l'on met de côté Les Quatre du Texas - pochade languissante au service du Rat Pack de Sinatra - son cinéma gagne en intransigeance, en férocité, en audace et en liberté.
Après Attack!(1956), Aldrich donnait le sentiment d'épuiser son cinéma dans des réalisations dénuées de réelle conviction. Et on ne le retrouve en pleine possession de ses moyens qu'avec l'hallucinant Whatever Happened to Baby Jane?(1962)
Le succès des Douze Salopards - extraordinaire pamphlet qui subit les foudres d'une certaine critique bien pensante - permet à Aldrich de fonder sa propre compagnie de production,et de se tourner vers des projets qui lui tiennent particulièrement à coeur.
Au premier rang desquels, l'adaptation d'un succès théâtral de Frank Marcus, Faut-il tuer Sister George?
La "Sister George" du titre est l'héroïne toute d'écoeurante bonté et de pommettes rubicondes d'un feuilleton familiale produit par la BBC. Le meurtre , c'est la décision d'éliminer le personnage en question du programme, en raison des frasques et de la personnalité incontrôlable de son interprète June Buckridge (Beryl Reid) Son franc-parler, son tempérament volatile et son goût prononcé pour l'alcool , en font une antithèse par trop voyante de la consensuelle Sister George.
June partage un appartement confiné avec son amante "Childie" (Susannah York); une jeune femme naïve qui se voudrait poétesse et vit entourée de poupées. Childie est l'objet de la jalousie hystérique et de la cruauté occasionnelle de June, qui peut aller jusqu'à un rituel d'humiliation.
Pour compléter le tableau, il y a la voisine, ancienne prostituée et confidente du vague à l'âme. Mais surtout, Mercy Croft (Corale Browne), représentante de la BBC, Némésis à la distinction affectée, dont chaque intervention vient saper un peu plus l'univers de June, et qui convoite secrètement "Childie".
"George" - ainsi qu'elle est appelée durant tout le film - appartient à cette galerie de monstres chère à Robert Aldrich. Elle n'est ni aimable , ni convenable, et ne fait rien pour y remédier. Mais le réalisateur lui réserve toute sa sympathie.
Son lesbianisme assumé, son humour cru, détonent dans un environnement régi par l'hypocrisie. Elle se fraye un chemin à coups d'épaules (littéralement) dans un monde qui tolère à peine les êtres hors- normes.
"George" s'avère être la seule personne authentique dans un univers de faux-semblants, que symbolise la télévision et qu'illustrent à merveille les coulisses d'un tournage. Une fois de plus, Aldrich s'attache à faire tomber les masques et nous montrer l'envers du décors (de tous les décors).
Formellement, il tient son film de bout en bout, sans jamais faillir, enfermant les protagonistes dans une atmosphère oppressante, traduite à la perfection par la photographie de Joseph Biroc.
En grand cinéaste, Aldrich n'a pas peur de son sujet; qu'il filme dans le refus de tout pittoresque une soirée dans un bar gay, ou qu'il mène son récit jusqu'à une paroxystique séquence de masturbation lesbienne.
Il ne restera plus à une "George" esseulée, dans un ultime sursaut dérisoire et bouleversant, qu'à saccager nuitamment le décors des ses exploits télévisuels passés, avant de s'effondrer, résignée.
Les trois actrices principales sont dignes de tous les éloges.