Hong Sang Soo

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Tutut
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Re: Hong Sang Soo

Message par Tutut »

Si vous pouvez m'expliquer en quoi HSS serait plus universel qu'Ozu qui parlait de la famille, de l'évolution de la société et de sentiments, pour ma culture perso.
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MJ
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Re: Hong Sang Soo

Message par MJ »

Tutut a écrit :Si vous pouvez m'expliquer en quoi HSS serait plus universel qu'Ozu qui parlait de la famille, de l'évolution de la société et de sentiments, pour ma culture perso.
On peut penser que pour toucher à l'universel, la meilleure voie est encore de s'approcher au plus vraie d'une expérience particulière. De ce point de vue, HSS et son petit monde estudiantin (pour une fois qu'un cinéaste filme bien la vie universitaire!) n'est en tout cas pas moins universel qu'Ozu, Ford ou Rohmer... et pas non plus un cinéaste moins important imho.
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Ben Castellano
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Re: Hong Sang Soo

Message par Ben Castellano »

Hong Sang-soo assume totalement filmer essentiellement des profs et étudiants en cinéma parce qu'il ne veut parler que de ce qu'il connait. Je ne vais pas faire ensuite une hiérarchie de l'universalité et des valeurs universelles(et j'adore Ozu), mais comme dans un roman de David Lodge par exemple, on peut trouver que les personnages évoluent dans le même microcosme social, ça ne l'empêche pas de toucher à des choses qui dépasse largement ça du point de vue existenciel ou des sentiments... Hong Sang-soo est pour moi le réalisateur qui retranscrit le mieux la partialité cruelle de nos points de vue, l'incertitude permanente, mais aussi celui qui va chercher le mieux une certaine poésie et hébétude devant le quotidien... Et pour moi c'est universel. Du point de vue de la Corée et si on aime qu'il y ait sa part de "social", c'est aussi une critique assez virulente des postures néo-confucianistes, des hiérarchies rigides restantes et malades. Là bas en soit la figure du professeur est encore infiniment respectée, limite sacrée.
Et puis même s'ils sont professeurs et étudiants en cinéma, on ne les voit jamais... faire du cinéma, ils parlent souvent juste de processus créatif. Donc pour moi ça dépasse largement ce cadre.
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Re: Hong Sang Soo

Message par Gounou »

AtCloseRange a écrit :J'ai précisé plus haut en quoi ce n'était pas comparable à l'universalité des films d'Ozu. Fin de la discussion pour moi.
Voyons, je crois savoir lire correctement et ton renvoi ne clôt en rien cette discussion. Il ne fait qu'appuyer ta méprise : le fait d'un cadre restreint (ici le monde universitaire et le milieu du cinéma, récurrents mais pas exclusifs pour autant) n'empêche en rien l'universalité d'un (des) sujets, d'autant que ceux-ci touchent à des sentiments les plus simplement (ridiculement/tragiquement/pathétiquement...) humains !
Démontre-moi en quoi, toute sensibilité mise de côté, la répétitions de motifs chez HSS est, dans l'absolu, plus nuisible à l'universalité de son propos que chez Ozu... Ou, si tu veux clore plus rapidement, contente-toi de dire que son radotage t'ennuyais avant de l'avoir même éprouvé.
Dernière modification par Gounou le 11 juil. 14, 23:29, modifié 1 fois.
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Tutut
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Re: Hong Sang Soo

Message par Tutut »

Donc le minimalisme touche à l'universel, le thème des étudiants en cinéma participe à la critique sociale et le langage cinématographique tient pratiquement du génie.:)
Chacun son truc, je ne suis même pas sur que je mettrais un film d'Hong Sang-soo dans un top 5 coréen, peut être dans un top 10. Je ne suis pas un défenseur acharné d'Ozu
non plus, je préfère Naruse ou Mizoguchi.:)
Ben Castellano
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Re: Hong Sang Soo

Message par Ben Castellano »

Bon, pour sortir des clichés:


1996 : Le Jour où le cochon est tombé dans le puits (돼지가 우물에 빠진 날)
Un écrivain, un cadre commercial, une employée, une femme adultère : c'est un premier film

1998 : Le Pouvoir de la province de Kangwon (강원도의 힘)
étudiante(s) en vacance / Prof de littérature en vacance avec un ami

2000 : La Vierge mise à nu par ses prétendants (오! 수정)
Un cinéaste en peine, son assistante, le patron d'une galerie d'art

2003 : Turning Gate (생활의 발견)
Un acteur en vadrouille (rencontre une danseuse et une femme de prof qui reste "en province")

2003 : La femme est l'avenir de l'homme (여자는 남자의 미래다)
Un cinéaste et un prof d'art plastique, leur ex devenue barmaid

2005 : Conte de cinéma (극장전)
Deux jeunes cinéastes et une actrice, deux jeunes qui veulent se suicider

2007 : Woman on the Beach (해변의 여인)
Un cinéaste, son chef décorateur, la petite amie de ce dernier, en week-end "écriture de scénario"

2008 : Night and Day (밤과 낮)
Un peintre coréen perdu Paris pour fuir la police après avoir fumé un joint

2009 : Les femmes de mes amis (잘 알지도 못하면서)
Un cinéaste en peine dans un festival, puis chez un peintre

2010 : Hahaha (하하하)
Un cinéaste en peine et un critique. une maman patronne de bar/restaurant

2010 : Oki's Movie (옥희의 영화)
étudiants et profs de cinéma

2011 : Matins calmes à Séoul (북촌방향, The Day He Arrives)
Un cinéaste en peine retrouve ses vieilles connaissances. Patronne de bar

2012 : In another country (다른 나라에서)
une réalisatrice de documentaire / La femme d' un homme d'affaire avec un amant coréen réalisateur / une femme larguée par un professeur coréen

2013 : Haewon et les hommes (누구의 딸도 아닌 해원)
prof et son élève, plus orienté littérature et jeu d'acteur

2013 : U ri Sunhi (Our Sunshi, 우리 선희)
prof de cinéma, un scénariste, un jeune réal en peine, une étudiante en cinéma. Patronne de bar
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Re: Hong Sang Soo

Message par Gounou »

A noter que de mémoire, à part un bout de conférence - assez cocasse dans mon souvenir - dans Les Femmes de mes Amis, on ne voit pratiquement jamais ces profs/acteurs/réalisateurs/scénaristes/peintres, exécuter ce qui les définit (les réalisateurs, en particulier, sont toujours saisis dans le creux de la vague)...
Ça créé essentiellement un postulat et une condition préalable à des rapports systématiquement renversés ou au minimum mis à mal.
Dernière modification par Gounou le 11 juil. 14, 23:59, modifié 1 fois.
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Ben Castellano
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Re: Hong Sang Soo

Message par Ben Castellano »

Gounou a écrit :A noter que de mémoire, à part un bout de conférence dans Les Femmes de mes Amis, on ne voit pratiquement jamais ces profs/acteurs/réalisateurs/scénaristes/peintres, exécuter ce qui les définit (les réalisateurs, en particulier, sont toujours saisis dans le creux de la vague)...
Ça créé essentiellement un postulat et une condition préalable à des rapports systématiquement renversés ou au minimum mis à mal.
Dans Oki's Movie il y a une scène cauchemardesque d'échanges avec spectateurs après projos qui intensifie celle de Les femmes de mes amis... Dans ce film on voit une discussion sur un scénario en ouverture et une porte ouverte laisse deviner le matos de la fac où c'est tourné... c'est celui où on en voit le plus! Et le dernier sketch est un "film d'étudiant fantasmé"
Dans "La vierge mise à nue par ses prétendants" il y a des discussion devant tables de montage, mais on ne voit rien des films... Souvent ça parle de difficultés financières dans une production en cours ou échouée
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Re: Hong Sang Soo

Message par Gounou »

Ben Castellano a écrit :c'est celui où on en voit le plus!
...et c'est le seul qu'il me reste à voir :) (avec le dernier, évidemment)
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Tutut
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Re: Hong Sang Soo

Message par Tutut »

Pour sortir des clichés aussi, montrer constamment des hommes laches, faux culs et indécis n'a pour moi rien d'universel, la hiérarchisation de la société coréenne, ce côté très stratifié et codifié se retrouve dans n'importe quel drama ou manwha de base et on doit bien trouver une description réaliste du milieu universitaire ailleurs que chez HSS.
Et si vous voulez voir les conditions à peu près normales de tournage d'un film en Corée achetez des DVD coréens avec des making of dans les bonus.
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Re: Hong Sang Soo

Message par Ben Castellano »

Je ne connais quasiment rien en drama coréen car je ne tiens pas devant, mais s'il y a des longues scènes de gêne du genre de celle du repas avec le prof "doyen" dans Oki's Movie je prends. Ce n'est pas seulement retrouver les "strates". Et si la hiérarchie sociale peut être particulièrement mise en exergue chez Lee Chang-dong ou Im Sang-soo, l'écriture est plus classique voir très démonstrative pour ce dernier. HSS se focalise sur ses univers artistiques et universitaires, mais à mon sens ça lui évite bien des généralités tout en touchant à quelque chose de plus large que son microcosme. C'est plus efficace pour moi que les provocations de Kim Ki-Duk ou la noirceur de jeon Soo-il.
Sinon les hommes lâches, fauxculs et indécis, déjà depuis quelques films ce sont des défauts qui rejoignent aussi les femmes, d'autre part je ne vois pas par exemple dans un film comme HaHaHa comment ça se justifie pour les relations du couple principal. Le héros de de The Day he arrives a un certain idéalisme aussi dans sa vision des choses, en essayant de fuir vainement la répétition : il est à la fois irritant et captivant dans ses propos.
Là vu comme tu l'édicte on dirait toujours qu'on ne parle que de défaut des personnages mis en exergue et de cynisme, appuyés, mais c'est retranscrit avec nettement plus de subtilité... Dans Turning Gate, il ne s'agit pas d'assommer le héros, de le punir par exemple...Pour ma part je ne les trouve jamais détestable ces personnages, ils sont ordinaires, ce ne sont pas des personnages de romans.

Sinon je ne vois pas quel est l'état de supériorité d'un tournage "normal" par ailleurs... HSS en a réalisé aussi dans sa première partie de carrière, il est passé radicalement à ce système parce qu'il a perdu la moitié de son budget sur Night and Day (et le système de subvention a évolué pour le cinéma d'auteur coréen), et depuis il se sent plus libre et créatif par ce biais. Puis il n'écrit plus de scénario avant de tourner...
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Re: Hong Sang Soo

Message par bruce randylan »

Tutut a écrit : Et si vous voulez voir les conditions à peu près normales de tournage d'un film en Corée achetez des DVD coréens avec des making of dans les bonus.
Ou regardez Passerby #3 de Shin Su-won qui un petit film indépendant sur une réalisatrice qui ne parvient pas à se faire produire. C'est tout aussi modeste et moins "complaisant" et auto-suffisant que ce que je connais de HSS (qui reste limité j'en conviens - j'enregistre in Another country cette semaine sur le câble d'ailleurs)
Gounou a écrit : Démontre-moi en quoi, toute sensibilité mise de côté, la répétitions de motifs chez HSS est, dans l'absolu, plus nuisible à l'universalité de son propos que chez Ozu... Ou, si tu veux clore plus rapidement, contente-toi de dire que son radotage t'ennuyais avant de l'avoir même éprouvé.
Sans parler de son cinéma et de son approche, je trouve l'univers et les personnages de HSS bien trop restrictifs pour être considéré comme universel. Ozu a quand même le grand avantage de proposer dans ses films une vision autrement plus large de la société par les relations inter-générationnels. On peut pas dire qu'on trouve de personnes âgées ou d'enfant dans le cinéma HSS.
Les problèmes de coucheries entre un prof/réalisateurs et ses élèves/maîtresses, j'ai du mal à considérer ça aussi profond que les problèmes de communication entre 3 générations qui présentent chacun des désirs, des envies, des peurs, des craintes différents... sans parler de leur vision de la vie qui n'a rien à voir. Ca donne une portrait sociétal plus complexe.

Et accessoirement, je ne comprends pas en quoi l'universalité devrait se construire (ou s'atteindre) sur un longueur et la durée. Il suffit d'une oeuvre pour atteindre cette universalité (et heureusement d'ailleurs). Ozu atteint immédiatement (pour moi) cette impression de sérénité, de plénitude, d'intemporalité, d'absolu et d'une justesse totale (ce qui ne l'empêche pas d'avoir à user de comportements un peu artificiels pour y arriver)... Aussi parce que cette universalité passe par le regard du cinéaste ; une fois son style affiné avec des années de recherches, la mise en scène de d'Ozu me parait bien plus mature et sophistiquée que celle de HSS actuellement (qui reste un "jeune" cinéaste).

Par ailleurs, John Ford, qui n'est certainement pas mon réalisation préféré, est loin d'avoir réalisé que des westerns (de 1929 à 1945, il en a pas fait des masses par exemple) et nombre de ses films les plus "universels" n'en sont pas. Et puis, le western permet une dimension fable/conte/allégorie/mythologie fondatrice qu'il n'y a pas forcément dans des conversation d'étudiants/profs de fac.
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Re: Hong Sang Soo

Message par Ben Castellano »

bruce randylan a écrit :
Sans parler de son cinéma et de son approche, je trouve l'univers et les personnages de HSS bien trop restrictifs pour être considéré comme universel. Ozu a quand même le grand avantage de proposer dans ses films une vision autrement plus large de la société par les relations inter-générationnels. On peut pas dire qu'on trouve de personnes âgées ou d'enfant dans le cinéma HSS.
Les problèmes de coucheries entre un prof/réalisateurs et ses élèves/maîtresses, j'ai du mal à considérer ça aussi profond que les problèmes de communication entre 3 générations qui présentent chacun des désirs, des envies, des peurs, des craintes différents... sans parler de leur vision de la vie qui n'a rien à voir. Ca donne une portrait sociétal plus complexe.
Pour être exacte, il y a deux relations inter-génértationelles fortes dans ses films, l'une dans Hahaha et l'autre dans Haewon et les hommes, mêre/fils et mêre/fille. La figure du père est problématique, car lui-même est un enfant de divorcé qui a sans doute peu connu le sien. HSS a lui même une fille, mais sans doute qu'il ne s'estime pas prêt encore à parler du rôle de père, de même il n'a jamais osé filmer des enfants, et des relations d'adulte avec des enfants.
L'essentiel des relations chez le réalisateur sont de l'ordre de l'amitié et sa durée dans le temps, leur solidité et les rivalités, sur des relations hommes / femmes différentes forcément du contexte d'Ozu... Puis la solitude et l'errance. Plein de choses qui touchent aussi à l'universel, dans des cadres différents de chez Ozu.

Sur quinze films, il y a trois profs qui couchent avec leur élève dans sa filmo (Kangwon, Oki's movie et c'est implicite, Haewon), faut pas pousser
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AtCloseRange
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Re: Hong Sang Soo

Message par AtCloseRange »

Bah, vous voyez, je dis peut-être des conneries :mrgreen: mais au moins ça attise le débat.
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Re: Hong Sang Soo

Message par Gounou »

bruce randylan a écrit :je trouve l'univers et les personnages de HSS bien trop restrictifs pour être considéré comme universel. Ozu a quand même le grand avantage de proposer dans ses films une vision autrement plus large de la société par les relations inter-générationnels. On peut pas dire qu'on trouve de personnes âgées ou d'enfant dans le cinéma
Je pige pas trop l'analogie universalité/amplitude du spectre générationnel sociétal... Pour moi, et comme l'a bien précisé Ben, des thèmes comme la solitude, la frustration professionnelle qui se répercute sur les rapports humains, l'errance mélancolique, la réminiscence, etc. sont universels. Que l'on discute après de leurs spécificités culturels ou d'effets de répétitions (d'un film à l'autre ou au sein même d'in film, presque un thème en soi) est une autre question.
J'ai l'impression que tout le monde s'accorderait à dire que, de loin, les films de Ozu se ressemblent et peuvent se confondre... Mais bizarrement, lorsqu'il s'agit d'amoindrir la richesse du cinéma de HSS, on privilégie le contenant (univers estudiantin/artistique d'un côté, moeurs de familles japonaises de l'autre) au contenu.
Pratique. :mrgreen:
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