En dépit d'aléas de production, de mauvaises critiques (comme tout le long de sa carrière, quoi), et, malheureusement, de nombreux défauts bien réels hélas, et bien... non, ce n'est pas le ratage intégral. Ouf ! D'emblée, on prend peur en voyant le titre moche qui apparaît sur un premier plan sans générique autour, et qui indique que nous sommes bien dans l'ère post-2000 de De Palma où le cinéaste ne s'emmerde même plus à faire des génériques convenables. Une titraille dégueue et le film démarre (il le pratique depuis
Le Dahlia noir avec ce titre qui sort de nulle part en plein sur la scène de bagarre de rue entre marins, Mexicains et flics). Pour la suite, il faut tout de même avouer que le cinéaste a de sacrées bollocks de s'attaquer à un sujet aussi chaud (le terrorisme islamiste) intégré dans une intrigue criminelle façon série noire Gallimard. Une idée séduisante si, hélas, le récit n'était pas aussi paresseux avec son décorum bourré de clichés d'usage (jusqu'au collègue et ami qui se fait attaquer dès le départ et l'histoire de vengeance qui suit). Mais bizarrement, on peut se laisser prendre. Si on oublie ses préjugés, on arrive à se laisser vagabonder dans un décor de cinéma graffé du "M" de
M le Maudit, et heureusement plusieurs scènes sauvent le film (surtout la séquence ibérique finale, mais on y reviendra). Arrivé à la moitié, une chose était déjà sûre: les premières quarante minutes sont déjà largement meilleures que tout
Passion (pour moi son pire film avec
Wise Guys, quelle bonne idée de remaker un film français déjà pas terrible). On y retrouve quelques gimmicks typiques du cinéma depalmien: plans aériens, inclinés, split-screens, split-focuses, des références au cinéma notamment d'Hitchcock bien sûr, mais aussi
L.A. Confidential (avec Guy Pearce qui rejoue la scène de l'interrogatoire pour en faire craquer un autre) et même de petites auto-références dont une deuxième variation du "Boléro" de Ravel (après
Femme fatale) que j'avais déjà évoqué dans le topic sur le cinéaste en écoutant la B.O. seule (pour dire que Pino Donaggio a composé une version que je trouve meilleure que celle de Sakamoto), ou la référence sur
Les Incorruptibles qui ouvre ce post, entre autres. Plus qu'un problème de photographie (ce n'est pas fameux, on attend mieux il est vrai d'un gars comme De Palma, mais j'ai vu bien pire), c'est surtout un problème de montage et d'écriture. De Palma n'est définitivement pas un dialoguiste. Son histoire est nettement plus inventive et inspirée que ses précédents films, mais il lui manque définitivement un vrai scénariste solide à ses côtés. Les acteurs ? Pas extraordinaires, mais pas si mauvais non plus (Guy Pearce tire son épingle du jeu). On parlait d'Argento, au jeu des comparaisons cette fois le cinéaste américain emporte la manche facile, marquant une remontée que le cinéaste italien est parti pour ne jamais connaître. Le final ? Très bon en fait. Meilleur que celui de
Raising Cain dont il est la version "inversée". On y retrouve l'ironie depalmienne jusqu'à oser un humour qui peut décontenancer ("On est Américians, on lit vos emails"
). Seule la fin (la séquence pré-générique de fin) est de trop et je ne vois pas son utilité à part rappeler l'époque de craintes des attentats ultra-médiatisés dans laquelle nous vivons, mais ça, le film l'évoquait déjà.