Grave (Julia Ducournau - 2016)
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Bon voilà, Anorya : ça, c'est fait.
Petite parenthèse : le film acquiert une petite saveur supplémentaire lorsque l'on a vu Le Concours, passionnant docu de Claire Simon consacré à l'examen d'entrée à la Femis, école dont sort Julia Ducournau (je me demande d'ailleurs si la présence de Marion Vernoux dans un petit rôle du film n'y est pas liée). Extrait de l'entretien que lui consacre le numéro de Positif de ce mois-ci :
"Philippe Rouyer : Grave remet en cause l'image qu'on du premier film Fémis.
JD : Oui, mais je pense que l'image qu'on en a est super désuète. Je suis sortie de l'école en 2008 et je n'étais pas la seule de ma promotion à vouloir faire du cinéma de genre. Trois élèves aimaient la science-fiction ou l'heroic fantasy. Et il faudrait ajouter les nombreux amateurs de polar. Moi en tout cas, je n'ai pas vécu à la Fémis un irait dans le genre d'une Nouvelle vague mal digérée. Au contraire, je pense que mon intérêt pour le genre a favorisé ma candidature. Au grand oral, je leur ai expliqué pendant une demi-heure en quoi Salo était, selon moi, un film d'horreur. Depuis, je pense que cette ouverture s'est accentuée. J'ai fait une présentation de Grave à l'école et j'y ai rencontré de nouveaux élèves dingues de cinéma de genre. Ils s'intéressaient de près aux destinées économiques de mon film parce qu'ils projetaient en moi leur trajet futur."
Pour l'anecdote, une scène (savoureuse) du Concours montre un groupe d'examinatrices en pleine délibération qui prospectent sur ce qu'aurait été leur réaction si elles s'étaient trouvées à juger de la candidature de Cronenberg... référence avouée de Ducournau.
Petite parenthèse : le film acquiert une petite saveur supplémentaire lorsque l'on a vu Le Concours, passionnant docu de Claire Simon consacré à l'examen d'entrée à la Femis, école dont sort Julia Ducournau (je me demande d'ailleurs si la présence de Marion Vernoux dans un petit rôle du film n'y est pas liée). Extrait de l'entretien que lui consacre le numéro de Positif de ce mois-ci :
"Philippe Rouyer : Grave remet en cause l'image qu'on du premier film Fémis.
JD : Oui, mais je pense que l'image qu'on en a est super désuète. Je suis sortie de l'école en 2008 et je n'étais pas la seule de ma promotion à vouloir faire du cinéma de genre. Trois élèves aimaient la science-fiction ou l'heroic fantasy. Et il faudrait ajouter les nombreux amateurs de polar. Moi en tout cas, je n'ai pas vécu à la Fémis un irait dans le genre d'une Nouvelle vague mal digérée. Au contraire, je pense que mon intérêt pour le genre a favorisé ma candidature. Au grand oral, je leur ai expliqué pendant une demi-heure en quoi Salo était, selon moi, un film d'horreur. Depuis, je pense que cette ouverture s'est accentuée. J'ai fait une présentation de Grave à l'école et j'y ai rencontré de nouveaux élèves dingues de cinéma de genre. Ils s'intéressaient de près aux destinées économiques de mon film parce qu'ils projetaient en moi leur trajet futur."
Pour l'anecdote, une scène (savoureuse) du Concours montre un groupe d'examinatrices en pleine délibération qui prospectent sur ce qu'aurait été leur réaction si elles s'étaient trouvées à juger de la candidature de Cronenberg... référence avouée de Ducournau.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Rester mesuré, ce n'est pas sale.Thaddeus a écrit :Bon voilà, Anorya : ça, c'est fait.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Ce n'est pas un reproche, juste un constat qui se vérifie un peu plus chaque jour.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Thaddeus a écrit :Ce n'est pas un reproche, juste un constat qui se vérifie un peu plus chaque jour.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Thaddeus a écrit :Bon voilà, Anorya : ça, c'est fait.
Je propose que Demi-Lune arrête de voir des films pendant une période donnée pour y revenir avec un oeil neuf.
C'est parfaitement faisable mais j'en suis pas forcément le meilleur exemple.
Sinon merci pour l'anecdote de la Femis, ça fait plaisir à lire.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Anorya a écrit :Si tu as lu les avis disséminés ça et là sur le film sur le forum, personne ne l'a trouvé flippant hein.poet77 a écrit :Grave: 3/10
Je ne trouve pas du tout ce film flippant mais plutôt risible et racoleur!
Quand au racoleur, ne concerne t-il pas plutôt la publicité qui en est faite, un brin agressive et qui fleurit un peu près partout ?
J'ai l'impression que tu avais construit des attentes sur ce film et le genre qui y est rattaché du coup dès le départ (d'autant plus que ce cinéma ne semble pas particulièrement être ton favori) et donc que d'emblée c'était plié, c'est dommage.
poet77 a écrit :C'est sûr que ce genre de films ne fait pas partie de mes favoris. Mais ce n'était pas pour autant plié d'avance car je suis toujours prêt à me laisser surprendre positivement. Pour ne prendre qu'un exemple, je ne suis pas non plus un grand amateur de films de zombies et pourtant, à mon propre étonnement, j'ai plutôt apprécié "Dernier train pour Busan".
Pour en revenir à "Grave", je ne suis pas le seul à avoir trouvé le film risible car, à la séance à laquelle j'étais, il y a eu beaucoup de ricanements dans la salle pendant la projection!
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Un point que je voudrais évoquer, aussi. De mémoire, j'ai rarement vu un film restituer avec une telle authenticité la violence sociale, communautaire et psychologique exercée par les rituels de bizutage, par ces exercices de harcèlement et d'humiliation répétés dont on ne comprend même pas qu'ils puissent encore exister. C'est presque ça qui fait le plus froid dans le dos, dans ce film.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Parce que tu penses vraiment qu'on peut juger de la qualité d'un film en se basant sur les réactions du public ? Surtout s'il s'agit de ricanements, qui ne veulent absolument plus rien dire tant les gens ont tendance à ricaner bêtement pour rien (ou pour mieux camoufler leur malaise). Et puis de toute façon, le film est aussi volontairement drôle à plusieurs reprises...poet77 a écrit :Pour en revenir à "Grave", je ne suis pas le seul à avoir trouvé le film risible car, à la séance à laquelle j'étais, il y a eu beaucoup de ricanements dans la salle pendant la projection!
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Ça existe encore pour des raisons de "traditions" stupides.Thaddeus a écrit :Un point que je voudrais évoquer, aussi. De mémoire, j'ai rarement vu un film restituer avec une telle authenticité la violence sociale, communautaire et psychologique exercée par les rituels de bizutage, par ces exercices de harcèlement et d'humiliation répétés dont on ne comprend même pas qu'ils puissent encore exister. C'est presque ça qui fait le plus froid dans le dos, dans ce film.
Le film me semble effectivement assez intègre sur ce plan, sinon en-deçà de la réalité.
Moi, un truc sur lequel j'aimerais revenir, c'est sur
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Oui, et je trouve très fort le fait que cette violence ne se situe pas seulement dans la représentation du bizutage à proprement parler, mais dans plein d'autres détails du film : l'injonction à la fête, les codes vestimentaires, la séance d'épilation... Dès la scène de cafétéria du début, il y a quelque chose de cette violence qui s'exprime, et qui est lié au poids du regard social sur soi.Thaddeus a écrit :Un point que je voudrais évoquer, aussi. De mémoire, j'ai rarement vu un film restituer avec une telle authenticité la violence sociale, communautaire et psychologique exercée par les rituels de bizutage, par ces exercices de harcèlement et d'humiliation répétés dont on ne comprend même pas qu'ils puissent encore exister. C'est presque ça qui fait le plus froid dans le dos, dans ce film.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Le "encore" sous-entendait qu'il s'agit en effet d'une question de tradition. C'est assez flippant, et à se demander quelles sont les mesures prises, à tout les niveaux, pour éviter que ces usages se perpétuent. Mais on quitte ici le cadre du cinéma...Demi-Lune a écrit :Ça existe encore pour des raisons de "traditions" stupides.
Moi, un truc sur lequel j'aimerais revenir, c'est sur
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
En effet, toute une série de signes et d'impératifs sont exprimés qui contribuent à créer autour de l'héroïne un climat d'oppression lié au groupe, et qui viennent redoubler ce qu'elle expérimente à l'intérieur d'elle-même. A moins que cela en soit justement la cause, mais on entre alors dans le domaine de l'interprétation personnelle. Le film est vraiment remarquable à ce niveau-là, et fait éprouver d'une façon très physique le ressenti de Justine. J'ai vraiment morflé avec elle, à tous points de vue.LordAsriel a écrit :Oui, et je trouve très fort le fait que cette violence ne se situe pas seulement dans la représentation du bizutage à proprement parler, mais dans plein d'autres détails du film : l'injonction à la fête, les codes vestimentaires, la séance d'épilation... Dès la scène de cafétéria du début, il y a quelque chose de cette violence qui s'exprime, et qui est lié au poids du regard social sur soi.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
De mémoire, il y eut Le plus bel âge (Didier Haudepin, 1995), qui se passait dans une classe préparatoire (khâgne ou hypokhâgne), et dont le point de départ était le suicide d'une étudiante, en pleine période de bizutage . Pas vu, je me fie aux articles sur ce film...Thaddeus a écrit :Un point que je voudrais évoquer, aussi. De mémoire, j'ai rarement vu un film restituer avec une telle authenticité la violence sociale, communautaire et psychologique exercée par les rituels de bizutage, par ces exercices de harcèlement et d'humiliation répétés dont on ne comprend même pas qu'ils puissent encore exister. C'est presque ça qui fait le plus froid dans le dos, dans ce film.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
Entièrement d'accord avec ce qui a été écrit que le bizutage, autant dans le film que dans la "vraie vie"
J'ai vu le film hier dans une petite salle à Montparnasse mais elle était pleine, fête du cinéma oblige (sûrement).
J'ai bien aimé le film, même s'il fait assez téléfilm et que les acteurs sont bons sans être extraordinaires. Et les scènes un peu gores ou dérangeantes sont bien dosées. J'ai passé un bon moment de cinéma, ce qui était pour moi l'essentiel.
J'ai vu le film hier dans une petite salle à Montparnasse mais elle était pleine, fête du cinéma oblige (sûrement).
J'ai bien aimé le film, même s'il fait assez téléfilm et que les acteurs sont bons sans être extraordinaires. Et les scènes un peu gores ou dérangeantes sont bien dosées. J'ai passé un bon moment de cinéma, ce qui était pour moi l'essentiel.
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Re: Grave (Julia Ducournau - 2017)
J'ouvre une parenthèse et vais exceptionnellement raconter quelque chose de privé. A 17 ans, j'avais été pris en classes prépa pour Saint-Cyr Coëtquidan dans une prestigieuse école militaire dont je tairai le nom. Par recoupements oraux et intimidations dont j'ai été témoin, j'ai compris assez rapidement que le prestige de l'institution était monté à la tête de certains élèves, qui perpétuaient des traditions de bizutage principalement dirigées contre les filles (facilitées par l'internat). Moins par misogynie que parce que ces dernières réussissaient mieux au concours d'entrée à Saint-Cyr. Tout ça se savait, et l'adjudant chargé de notre filière (puisque l'école était divisée en filières comme au lycée) en était malade, il avait mis tout le monde en garde de façon très cash dès le départ. Je me souviens encore de mon entretien d'arrivée avec lui où je l'avais titillé sur cette question, dès le premier jour. J'étais kamikaze... Je n'ai pas eu le temps d'assister à quoi que ce soit de véritablement dégradant ou humiliant : mon destin était finalement ailleurs, et je suis parti, non sans avoir accompli une dernière chose : voir certaines filles de ma filière et leur dire de se battre jusqu'au bout. Quelques temps plus tard, j'apprenais que la fameuse filière problématique avait été fermée par l'école. Les mecs avaient fini par scier la branche sur laquelle ils étaient assis. Tout ça pour dire que je crois que ça se sait malheureusement souvent, mais que l'encadrement peut avoir du mal à sévir car tous ne considèrent pas forcément ces pratiques ou traditions comme méchantes.Thaddeus a écrit :Le "encore" sous-entendait qu'il s'agit en effet d'une question de tradition. C'est assez flippant, et à se demander quelles sont les mesures prises, à tout les niveaux, pour éviter que ces usages se perpétuent. Mais on quitte ici le cadre du cinéma...
Je dois être trop vieille France pour trouver ça banal.Thaddeus a écrit :
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Autant je comprends le cheminement chez le personnage de Justine, puisqu'il y a un attachement sentimental et du désir, autant je ne comprends pas trop ce qui pousse le coloc à l'action. Il y a une ellipse bien commode entre, de mémoire, le "oui, c'est grave" et la scène d'amour, qui rend l'enchaînement plus maladroit qu'autre chose pour moi. On a l'impression que le coloc lui fait l'amour simplement parce qu'il avait été chauffé par son porno juste avant.