MJ a écrit :Il décrit une véritable culture du viol, mais en partant d'un cas aberrant, qui n'a aucune valeur d'exemplarité. S'en indigner (à vrai dire je trouve moi-même le film aux limites par moments de l'irresponsabilité) c'est ne pas voir que la victime ici est folle
Je ne suis pas sûr de comprendre. Si la victime (Huppert) est folle, alors ça relativiserait la portée du viol ?
Terrain glissant, là.
Et puis, je ne partage pas cette lecture du personnage d'Isabelle Huppert. Le film cherche à jeter le trouble sur sa psychologie
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- (qu'elle éclate gratuitement le pare-choc de son ex, qu'elle se touche en épiant avec des jumelles, qu'elle fricote avec son violeur, qu'elle se réjouisse d'avoir indirectement tué son père...),
mais ça révèle plutôt pour moi une insensible au sens pathologique du terme, quelqu'un pétrie de verrous et de refoulements, peut-être une apathique, qui a dû se construire avec et contre son passif traumatisant avec son père ("je t'encule, je t'encule, je t'encule!!!"). De façon tordue, ce passif donne paradoxalement pour moi une certaine humanité à un personnage "au masque indéchiffrable" pour reprendre le papier de critikat, car c'est le péché originel qu'elle a toujours cherché à laver, et qui reviendra quoi qu'elle fasse. Son équilibre se situe dans le détachement et le cynisme d'une femme de poigne, ce qui donne ces réactions décalées qui amusent quand elles ne mettent pas mal à l'aise (ou les deux : "baisse ton pantalon"). La caractériser comme une folle aurait au contraire été un truc douteux puisque ça aurait mis la victime et le violeur dans un même sac, et, en tirant la pelote, "nuancé" les séquelles d'un tel drame. On ne peut pas tenir avec un truc pareil.
MJ a écrit :... autant que se révèle l'être l'ensemble de son entourage. Une psychose collective poussée aux paroxysmes du grotesque (la déclaration d'Efira à la fin, grandiose dans un style de satire typique de son auteur).
J'ai du mal à voir en quoi l'entourage serait fou. Ils ont tous un côté pathétique, avec leurs histoires privées merdiques et leurs névroses (de cul ou de crucifix), mais psychose collective ? Sérieux ? On est juste dans une caricature (encore que) comme on peut en voir dans des tas de comédies (avec des passages obligés comme "le dîner de famille qui dérape").
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- Quant à la déclaration d'Efira, je trouve que c'est presque le seul moment où Verhoeven fait montre d'une certaine pitié, en faisant implicitement entrevoir une horreur intime contre laquelle seule la foi (jusqu'ici moquée - les grandes figurines de Rois mages...) existe comme échappatoire.