The Master (Paul Thomas Anderson - 2012)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Flol
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Flol »

G.T.O a écrit :La mue d'Anderson n'est pas encore finie.
Et heureusement : le type n'a que 43 ans et seulement 6 films à son actif...et pourtant, quelle filmo ! :o
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BaronLundi
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par BaronLundi »

Vu le film (en BR) pour la première fois. Formellement, et compte tenu de mes goûts personnels, j'ai trouvé qu'on touchait le sublime. Le cadrage, les couleurs, les contrastes, la profondeur de champ. Limite syndrome de Stendhal. L'interprétation est tout aussi exceptionnelle (Phoenix et Hoffmann sont décidément parmi les tout meilleurs acteurs en activité). Sur le fond, si j'ai trouvé la première heure passionnante (j'ai vu l'heure après 52 minutes de film et je me suis fait la réflexion que j'avais l'impression qu'on était encore dans les 20 premières minutes et qu'il s'était passé tellement peu mais de façon tellement dense), la deuxième moitié du film m'a un peu déçu (notamment la loooonnnnggue scène des allers et retours, pénible et inutilement répétitive) et j'ai trouvé le propos un peu simpliste (peut-être parce que j'imaginais que le film allait traiter d'enjeux d'une autre envergure qu'une simple relation Hegelienne - ou de deux alcoolos passablement illuminés à des niveaux différents). Et le lien avec la scientologie est trop (ou trop peu) appuyé.

Mais bon dieu que c'est beau. :shock:

8/10
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tenia
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par tenia »

Plus qu'une étude de la scientologie, c'est avant tout une étude des liens d'asservissement qui est faite ici.
Personnellement, c'est justement ce qui tend à m'intéresser dans le film, et du coup, je préfère plutôt la 2e moitié du film, une fois que tout le monde est introduit, même si la 1ere moitié du film récèle la meilleure scène du film, où Hoffmann et Phoenix jouent des jeux d'influence dans la cale d'un bâteau.

Au final, notamment, le film traite d'un homme qui est littéralement irrécupérable, même par un gourou illuminé et plutôt beau parleur, mais lui même mené par le bout par sa femme. On a tous notre gourou, en fait.
Hieronim
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Hieronim »

J'étais limite déçu moi aussi que le film ne soit pas plus "polémique" concernant la scientologie mais avec le temps, j'ai considéré la clef de lecture "maître & chien" beaucoup plus touchante et se suffisant à elle-même.

Quand je les vois jouer, j'ai l'impression de voir des gamins qui font que des conneries. Et en poussant le bouchon un peu loin, plus qu'un film mettant en scène des amis en mode amour-haine (mais inter-dépendants chacun pour des raisons différentes qu'ils ne se découvrent pas), on peut également y voir une histoire d'amour somme-toute assez classique.

C'est d'ailleurs assez amusant à quel point la scène du retour d'Eddie (de prison) à la maison ou loge Lancaster (quand dans l'avant-jardin, ils se serrent dans les bras puis se jettent au sol tel un maître jouant avec son chien) rappelle celle de Reservoir Dogs lorsque Madsen et le fiston du commanditaire se batte comme des enfants contents de se revoir dans le bureau de ce dernier.

A part ça je rematte des extraits et je me dis qu'en effet, du point image et direction d'acteur, Anderson c'est quand même ce qui se fait de mieux par moment.
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Ouf Je Respire
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Ouf Je Respire »

Bon, je viens de voir ce film.

Il m'a fait l'effet d'un caillou dans la chaussure. La première heure est magistrale (beauté de l'image, puissance des acteurs et des situations, tout ça...), on sent que PTA veut atteindre Son Grand Film. Puis je trouve que ça se délite. La relation Maître-Elève est bizarroïde, manque de tension, et à mon goût les desseins du Master sont floues en plus d'être fumeuses (mais pourquoi donc lui fait-il toucher le mur et la vitre des milliers de fois? Ca dure une éternité, et je n'en comprends pas le sens), voire vidées de leur sens pour mieux jouer les entomologistes. Et puis la fin m'a paru incompréhensible, et j'ai eu in fine cette impression que PTA me prenait un peu de haut avec son intelligence un peu supérieure.

Donc mon premier avis à chaud fut une terrible frustration doublée d'un petit début de colère.

Puis je me suis rappelé du texte d'un critique concernant "The Changeling" d'Eastwood, que je n'avais également pas aimé au premier abord, mais pour lequel mon avis fut revu à la hausse suite à la lecture dudit texte qui disait en substance ceci: "The Changeling" serait un film qui expliquerait avant tout pourquoi les Etats Unis ne sont pas devenus un pays fasciste.

"Pourquoi les Etats Unis ne sont pas devenus un pays fasciste". Cette phrase m'a fait prendre conscience de l'importance d'un film comme the Master, et confirme également celle de There will be blood, qui s'inscrit également dans cette thématique. Selon moi, The Master ne parle pas tant d'une relation psycho-mystico-dominatrice entre une personne forte et une personne faible, mais de la mécanique, rouage par rouage, de l'appropriation de la douleur d'un peuple, douleur symbolisée ici par le corps et l'esprit du personnage de Joaquin Phenix. Celui de Philip Seymour Hoffman n'est ni plus ni moins qu'un type fasciste aux théories fumeuses et foireuses dont les circonstances à un instant donné ont moins réussi qu'à Staline ou Hitler ou Mussolini ou etc... Et la raison qui fait que ce pays ne soit pas tombé dans un régime totalitaire, malgré l'esclavage, malgré la Guerre de Sécession, malgré tout ça, réside à mon sens dans le face à face final, où le fragile individu semble écraser le maître de par sa liberté de fou (également le cas dans la scène de la moto: le Maître ne Maitrise pas le Faible), exact inverse du final de There Will Be Blood.

Ainsi, alors que There Will Be Blood traitait comme "Greed" de Von Stroheim de la rapacité qui a servi de socle à la construction d'une Nation, The Master se révèle davantage la radiographie subconsciente d'un pays qui ne comprend toujours pas comment il s'est réellement bâti, qui se cherche encore et toujours, perdu après la disparition de ses pionniers, et qui ne sait pas quoi faire de sa liberté, sa chère liberté. C'est intelligent, mais d'une tristesse infinie.

Le film est donc sacrément casse-gueule, car plus théorique que narratif (j'avoue que son côté abscont m'a gâché le plaisir immédiat, malgré la puissance de la mise en scène). Mais ce risque vaut le coup d'être pris car le fond du film est plus passionnant que son parti-pris scénaristique.
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Jeremy Fox
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Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Jeremy Fox »

Vous mélangez les avis de El Dadal et de Gounou en page 3 avec, comme Ratatouille une admiration sans bornes pour la BO absolument phénoménale, et vous aurez à peu près mon ressenti sur ce film qui, également du point de vue de la mise en scène et de l'interprétation (Joaquin Phoenix est décidément l'un des plus grands comédiens actuels) m'a paru d'une maîtrise confondante. Un film qui m'a envouté et que je suis loin d'avoir trouvé froid et désincarné, tout au contraire. Sa richesse thématique, ses ellipses et ses zones d'ombres me font penser que de multiples visions ne seront pas de trop pour l'appréhender dans son ensemble. Chef-d’œuvre !
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Message par Supfiction »

Jeremy Fox a écrit :de multiples visions ne seront pas de trop pour l'appréhender dans son ensemble.
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Revu il y a quelques jours. Première heure toujours aussi formidable. Après c'est du grand n'importe quoi, comme si PTA faisait du remplissage, tournant des séquences dispensables ou étirant des scènes à l'infini. Et je crois que de multiples visions n'y changeront rien : les allers-retours de Phoenix du mur à la vitre seront toujours aussi exaspérants. Néanmoins, ce côté abscons fait aussi partie de l'attrait du film. Le casting grand luxe (Philip Seymour Hoffman, Joaquin Phoenix, Amy Adams, peut-on avoir mieux ?) permet de maintenir le spectateur à flot.
Le film m'avait énervé au cinéma, et pourtant je l'ai acheté en Blu ray. Et il est très probable que je le revois en dépit de cet avis négatif. Un peu comme une peinture contemporaine qu'on ne comprend pas et qui vous énerve, mais qu'on s'obstine à regarder à chaque fois que l'on passe devant..


Je conseille le film de John Huston en bonus, qui illustre la méticulosité du réalisateur pour décrire au début du film le suivi psychiatrique des vétérans.
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Re: The Master (Paul Thomas Anderson - 2012)

Message par Max Schreck »

J'adore sans réserve tous les précédents films du cinéaste. Mais si ici je ne me suis pas ennuyé (le film est beau et imprévisible, donc fascinant tout du long), je n'ai pas été convaincu par la démarche d'Anderson. Le récit, le parcours des personnages est relativement lisible, malgré une vraie volonté de fabriquer de l'hermétisme. Mais je n'ai pas eu suffisamment de points d'accroche. Un peu l'impression que le réalisateur a éliminé tout ce qui pourrait ressembler à des scènes pivots, des moments qui font avancer ou basculer le film. Et que ce qui reste sert surtout de super véhicule (comme disent les anglo-saxons) pour les comédiens, au premier rang desquels Joaquin Phoenix est méconnaissable. Le film a quand même réussi à m'émouvoir, et cette émotion a évidemment été permise par toute la patiente construction du metteur en scène. Et il se peut que ce soit le genre de film qui gagne à mûrir dans la tête, dans le souvenir. Mais là, au bout de déjà plusieurs jours, je n'ai pas vraiment d'arguments pour le défendre ou me l'approprier.

There will be blood était aussi à sa façon une proposition de cinéma singulier, s'efforçant de créer de nouveaux codes. Mais j'y avais trouvé davantage mon compte. Restrospectivement, les dialogues m'y semblent mieux écrits, les personnages mieux incarnés, le récit plus romanesque (donc plus immédiatement séduisant).
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Jeremy Fox
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Re: The Master (Paul Thomas Anderson - 2012)

Message par Jeremy Fox »

Max Schreck a écrit :malgré une vraie volonté de fabriquer de l'hermétisme. .
Si c'était le cas, je pense que je n'aurais pas autant adoré.
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