The Master (Paul Thomas Anderson - 2012)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Borislehachoir
Machino
Messages : 1344
Inscription : 17 févr. 06, 14:34
Contact :

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Borislehachoir »

G.T.O a écrit :Je remarque que ceux qui n'aiment pas le film font preuve dans leur jugement d'une extrême délicatesse, voir de scrupule.
:shock: :shock: :shock:
Avatar de l’utilisateur
poet77
Assistant opérateur
Messages : 2657
Inscription : 12 août 11, 13:31
Contact :

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par poet77 »

Thaddeus a écrit :
Borislehachoir a écrit :Non, Poet ne dit pas ça.
Poet dit que les aveugles portent des lunettes noires, et que ceux qui voient sauront par contre apprécier la lumière ( ou pour quitter le domaine de la métaphore, que les paresseux n'aimeront pas le film mais que LES AUTRES apprécieront, ce qui de facto implique que ceux qui n'aimaient pas étaient paresseux ). Donc peut-être que Poet n'a pas voulu dire ça, je n'en sais rien mais je ne le connais pas personnellement aussi pour deviner ce qu'il a voulu dire je dois me contenter de ce qu'il a effectivement dit. Donc peut être est-ce juste une formulation maladroite mais en l'état les mots ont un sens précis.
C'est vrai, après relecture. J'en étais resté à la citation mise en gras par G.T.O, qui n'est pas tout à fait la même.
Mais je pense qu'il faut accepter parfois une certaine latitude dans l'expression des intervenants, se souvenir que la précision des mots écrits n'est pas tout à fait conforme à la pensée de leur auteur, et reconstituer par nous-même ce qui a voulu être signifié. Chose plus facile à dire qu'à faire, c'est vrai. :)
Que de commentaires et que d'exégèses autour de deux phrases que je croyais bien anodines! Ne vous querellez pas au sujet de mon texte, c'est lui faire trop d'honneur! Enfin, pour contenter tout le monde et pour tout clarifier (je l'espère, en tout cas!), je reformule les phrases qui font débat:

Certes, voilà un film complexe, qui ne conviendra pas à ceux qui vont au cinéma pour paresser devant l'écran. Parmi les autres, ceux qui auront aimé le film n'auront qu'une idée: le revoir et le revoir encore, car ils ne sont pas près d'en épuiser toute la signification.

Est-ce suffisamment clair à présent?............. Ouf!
Gounou
au poil !
Messages : 9768
Inscription : 20 juil. 05, 17:34
Localisation : Lynchland

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Gounou »

G.T.O a écrit :Messieurs, "les peine-à-jouir", c'est à vous que je m'adresse : sommes-nous pas dupés par le label "oeuvre majeure" estampillé sur le film ?
Quel label ? Celui qui précède la réputation de P.T.A ? Celui de l’accueil presse ? Ou celui qu'on s'impose inconsciemment dès lors qu'un film diffuse des sensations antagonistes, qui désorientent...
Je n'ai personnellement pas eu l'impression de voir un film qui chercherait à être grand à chaque image... et ce fut d'ailleurs la première surprise que de me retrouver devant un film qui privilégie la sourdine à l'éclat, qui ménage des dérapages (contrôlés) inhabituels, qui use de sa durée différemment... un film qui surprend sans faire le beau, qui garde une ligne "claire", ténue, mais la malmène pour en faire émerger quelque chose d'unique et ouvert, pour diffuser un mystère et une étrangeté qu'on ne reprocherait pas à d'autes cinéastes. J'ai l'impression que The Master est autant un mélo que Punch Drunk-Love était une comédie romantique... mais il arrive après There Will Be Blood et il le paye de toute évidence par une certaine défiance (qui heureusement s'estompera avec le temps, qu'on déconsidère le fim ou qu'on le consacre d'ailleurs).
Et puis je ne suis pas d'accord avec toi sur un point : je vois bien moins d'avis "contrastés" que je ne l'aurais imaginé et assez peu de détestation comme d'adoration...
Image
Avatar de l’utilisateur
G.T.O
Egal à lui-même
Messages : 4844
Inscription : 1 févr. 07, 13:11

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par G.T.O »

Gounou a écrit :
G.T.O a écrit :Messieurs, "les peine-à-jouir", c'est à vous que je m'adresse : sommes-nous pas dupés par le label "oeuvre majeure" estampillé sur le film ?
Quel label ? Celui qui précède la réputation de P.T.A ? Celui de l’accueil presse ? Ou celui qu'on s'impose inconsciemment dès lors qu'un film diffuse des sensations antagonistes, qui désorientent...
Je n'ai personnellement pas eu l'impression de voir un film qui chercherait à être grand à chaque image... et ce fut d'ailleurs la première surprise que de me retrouver devant un film qui privilégie la sourdine à l'éclat, qui ménage des dérapages (contrôlés) inhabituels, qui use de sa durée différemment... un film qui surprend sans faire le beau, qui garde une ligne "claire", ténue, mais la malmène pour en faire émerger quelque chose d'unique et ouvert, pour diffuser un mystère et une étrangeté qu'on ne reprocherait pas à d'autes cinéastes. J'ai l'impression que The Master est autant un mélo que Punch Drunk-Love était une comédie romantique... mais il arrive après There Will Be Blood et il le paye de toute évidence par une certaine défiance (qui heureusement s'estompera avec le temps, qu'on déconsidère le fim ou qu'on le consacre d'ailleurs).
Et puis je ne suis pas d'accord avec toi sur un point : je vois bien moins d'avis "contrastés" que je ne l'aurais imaginé et assez peu de détestation comme d'adoration...
Je ne me réfère ni à la réputation d'Anderson ni à l'accueil presse réservé à The Master. Mais, plutôt à mon ressenti qui nuance ma vision de PTA, en accréditant, à ma grande surprise, l'idée que j'ai, à une époque, combattu : à savoir que son cinéma est un cinéma de copiste superficiel, où la virtuosité tente de brouiller l'emploi d'une recette supposée originale, artistique ( label, donc ), composé de ruptures et autres dissonances, dans l'unique but est de "subjuguer pour subjuguer". Au profit de quoi ? Je me pose la question.
Le refus en bandoulière, PTA, grand cinéphile devant l'Eternel, connait les caractéristiques de la modernité cinématographique. Elle consiste à refuser la psychologie, à dédramatiser, à créer une narration non-linéaire, un récit lacunaire où font jeu égal temps forts-temps faibles, à privilégier les plans-séquences, la durée, la musique en contre-emploi...etc Mais, comme l'étudiant d'une manif qui, par souci d'appartenir à une communauté, va être amené à copier ses congénères en jetant un pavé, Anderson a recours à des procédés non-conventionnels, signes de modernité, pour entrer dans le cercle très fermé des réalisateurs exigeants, sans en comprendre la raison d'être. Il ne motive pas cet emploi par l'histoire racontée. Il la colle, et l'applique, comme l'étudiant zélateur, va balancer un pavé. Je ne lui reproche pas d'utiliser ses outils mais en interroge la légitimité. Mais, à quoi correspond-ils ? Pour moi, tous ces procédés narratifs ne sont que des effets de sens.
En quoi consistent t-ils ?
De manière superficielle et arbitraire : à ôter les scènes les plus fonctionnelles du récit, comme le révèle PTA lui-même, dans une interview éclairante accordée aux Cahiers du cinéma. À "les écrire puis à les enlever", quitte à rompre la cohérence interne de l'ensemble dont l'équilibre résidait précisément dans la solidarité et relation des parties. Les « trous »viennent après. Ils sont "conférés" au scénario de manière très artificielle.
Résultat : il y a une disharmonie de l'ensemble qui, à défaut d'être motivé et conçue dés la départ, est produite de manière arbitraire. Un peu comme un « membre-fantôme » : malgré l'amputation, la patient ressent encore la présence du membre manquant. De la même manière, j'ai ressenti ces manques constitutifs mais sans savoir pourquoi. C'est cela, que je qualifie de tentative superficielle de déstabilisation. :wink:
Blue
subMarine
Messages : 5410
Inscription : 13 sept. 06, 13:32

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Blue »

G.T.O a écrit :De manière superficielle et arbitraire : en enlevant, comme le révèle PTA lui-même, dans l'interview accordée aux Cahiers, à "soustraire" des scènes à un édifice muni d'une progression dramatique classique dont l'équilibre réside dans la relation entre les parties. Les « trous »viennent après. Ils sont "conférés" au scénario de manière très artificielle.
Résultat : il y a une disharmonie de l'ensemble qui, à défaut d'être motivé et conçu dés la départ, est produite de manière arbitraire, dû à un manque de soutien de la charpente. Un peu comme dans les cas de « membre-fantôme » : malgré l'amputation, la patient ressent encore la présence du membre manquant. De la même manière, j'ai ressenti ces manques constitutifs mais sans savoir pourquoi. C'est cela, que je qualifie de tentative superficielle de déstabilisation. :wink:
Récit fragmenté ? Ellipse suggestive ?
Dans tous les cas le procédé ne fonctionne pas dans "The Master" AMHA.
Problèmatique chez PTA ? Donner du liant à quelque chose de délié, d'évasif voire insolent à l'égard du classicisme, de la dramaturgie classique.
Avec ses avantages et inconvénients (je ne paraphrase pas les posts plus hauts, les défenseurs et détracteurs du film ont chacun de solides arguments).
Je reste pour le moment sur l'idée que le film n'est pas raté pour autant, mais qu'il échoue en partie à revêtir ce caractère exceptionnel qu'on attend maintenant à chaque nouvelle oeuvre signée PTA. D'autant plus que quand le film parvient à être grand, c'est dans les moments où PTA dilate les séquences où le tensiomètre est à son comble, ou lorsqu'il élance ses personnages à moto dans l'immensité de la nature. Bref, quand il met la dose, un peu quand même.
En même temps, c'est le genre de film qu'il faut laisser décanter pour le réévaluer peut être plus tard. Et ça vaut pour tout le monde : le tout venant, la critique, les historiens, etc.
D'ailleurs je regardais tout à l'heure le top 1000 de "They Shoot Pictures, Don't They"... PTA y est représenté par 4 films, tout de même. Son oeuvre s'inscrit dans le temps mine de rien, et fédère autour d'elle un nombre important de spécialistes.
Je préfère réfléchir à deux fois avant de le traîner dans la boue.
Mon top éditeurs : 1/Carlotta 2/Gaumont 3/Studiocanal 4/Le Chat 5/Potemkine 6/Pathé 7/L'Atelier 8/Esc 9/Elephant 10/Rimini 11/Coin De Mire 12/Spectrum 13/Wildside 14/La Rabbia-Jokers 15/Sidonis 16/Artus 17/BQHL 18/Bach
Strum
n'est pas Flaubert
Messages : 8464
Inscription : 19 nov. 05, 15:35
Contact :

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Strum »

Toujours pas vu. La vie est injuste.
Gounou
au poil !
Messages : 9768
Inscription : 20 juil. 05, 17:34
Localisation : Lynchland

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Gounou »

Merci d'avoir étayé G.T.O... mais en somme, tu n'aimes pas la démarche artistique de P.T.A et tu considères donc There Will Be Blood comme un "heureux accident" ? Mais génial quand même ? Hmm...
L'angle d'attaque que tu choisis aujourd'hui et que je résume à "il ne sait pas ce qu'il fait mais il sait que ça le fera", me semble totalement transposable à son précédent film (et certains ne se sont pas privés).
Image
Avatar de l’utilisateur
G.T.O
Egal à lui-même
Messages : 4844
Inscription : 1 févr. 07, 13:11

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par G.T.O »

Gounou a écrit :Merci d'avoir étayé G.T.O... mais en somme, tu n'aimes pas la démarche artistique de P.T.A et tu considères donc There Will Be Blood comme un "heureux accident" ? Mais génial quand même ? Hmm...
L'angle d'attaque que tu choisis aujourd'hui et que je résume à "il ne sait pas ce qu'il fait mais il sait que ça le fera", me semble totalement transposable à son précédent film (et certains ne se sont pas privés).
Il sait ce qu'il faut faire pour que cela fasse sens. Tu as raison, le G'nou, c'est transposable sur TWB, et certains ne se sont pas privés de le signaler. Cela me trouble car, cela remet en question ma vision, comme je le disais, du réalisateur. Mais, pourquoi est-ce que ça fonctionne avec Punch et TWB ? Pour tout dire, je ne sais pas. Je n'ai pas ressenti cela. Mais peut-être suis-je trop dur avec The Master. Ne faut-il pas au minimum deux visions pour juger d'un film ? Je vais le laisser décanter...peut-être me révélera t-il d'autres saveurs.

@ Strum : qu'est-ce que tu fous ?
Strum
n'est pas Flaubert
Messages : 8464
Inscription : 19 nov. 05, 15:35
Contact :

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Strum »

G.T.O a écrit :@ Strum : qu'est-ce que tu fous ?
Trop de travail en ce moment pour avoir eu l'opportunité de voir le film.
Avatar de l’utilisateur
El Dadal
Producteur Exécutif
Messages : 7301
Inscription : 13 mars 10, 01:34
Localisation : Sur son trône de vainqueur du Quiz 2020

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par El Dadal »

G.T.O a écrit :De manière superficielle et arbitraire : à ôter les scènes les plus fonctionnelles du récit, comme le révèle PTA lui-même, dans une interview éclairante accordée aux Cahiers du cinéma. À "les écrire puis à les enlever", quitte à rompre la cohérence interne de l'ensemble dont l'équilibre résidait précisément dans la solidarité et relation des parties. Les « trous »viennent après. Ils sont "conférés" au scénario de manière très artificielle.
Processus communément employé par certains cinéastes, David Lynch en tête. Pourtant, personne ne vient le lui reprocher.
Ici, le manque et les ellipses font sens à mes yeux, car ils répondent par la mise-en-scène au besoin de clarté, de solidité, d'assurance, de Freddie. Chaque leçon qu'on lui offre n'amène en définitive pas de réponse concrète, n'éclairant pas d'une lumière frontale toutes les zones d'ombre. Après tout, pour un film sur le doute et la méfiance, la technique employée me semble au contraire opportune.
lowtek
Idiot du vintage
Messages : 1142
Inscription : 9 juin 03, 19:13

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par lowtek »

Le cinéma américain contemporain peut être vu comme une immense machine à ré-intégrer l'autre, le loser, le malade, le travelo, le solitaire, dans une grande communion d'embrassement des différences comme nouveau socle possible à la société. The Master raconte exactement l'histoire inverse. En ce sens il est l'exact opposé du récent Silver Linings, qui a cartonné aux US, et où Bradley Cooper incarne un névrosé mignon et propre sur lui. Mais on pourrait tout aussi bien opposer the Master à Wall-e ou Transamerica. De ce point de vue, on voit bien ce qui a pu motiver P.T.Anderson, à partir du moment où on considère que la secte du film (the Cause) est une métaphore crédible de l'Amérique d'aujourd'hui et l'incarnation new age de sa doctrine du "born again" (le "Phoenix"du film).
L'autre approche possible est de considérer The master comme un biopic comme les autres, ou justement en opposition à cette mode actuelle. Pourquoi pas? Sur le papier, on pourrait le rapprocher du Jung de Cronenberg ou du futur film de Desplechin. C'est certainement une mauvaise piste mais le film est certainement un biopic plus passionnant dans sa forme elliptique que la plupart des films du genre.
Pourtant, quelque soit le point de vue qu'on adopte, the Master peine à convaincre. C'est assez étonnant de voir ce cinéaste qu'on aimait justement pour son lyrisme gamin, ses outrances, la dimension athlétique de sa mise en scène, retenir en permanence ses effets pour étouffer toute montée d'émotion, même quand il nous fait, le temps d'une scène, un remake condensé de Lawrence d'Arabie (la moto dans le désert).
P.T.Anderson ne serait-il pas lui même en thérapie? Voir au purgatoire depuis qu'il a renoncé à l'influence de ses "Masters"?
Vu l'échec du film, nul doute qu'il reviendra bientôt à une forme plus ample et débridée qui nous mettra tous d'accord.
Vanning
Assistant(e) machine à café
Messages : 116
Inscription : 1 août 12, 02:33

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Vanning »

Sentiments vraiment mitigés pour ma part. Alors que je m'intéresse au cinéma de Paul-Thomas Anderson depuis quelques années (j'avais été scotché à la vision de Magnolia -8/10-, bouleversé et terrassé par There Will Be Blood -9/10- et carrément enthousiaste après avoir vu Boogie Nights -9/10-), ici, je n'ai pas trouvé le souffle des précédents (cela dit, Punch Drunk Love m'avait laissé de marbre). Dans The Master, des idées, certes, mais trop peu hélas. Quant à la mise en scène, mouais (l'apport de quelques flashbacks m'est apparu très anecdotique, et le montage pour servir le récit pas forcément très original)... The Master semble s'inscrire dans un cadre formel où le réalisateur a voulu faire oeuvre personnelle (c'est peut-être là son mérite) mais qui pèche par trop d'académisme. Aussi, pour moi, un film ne se doit pas d'être parfait. Ou disons, qu'un cinéaste à vouloir être perfectionniste pèche souvent par excès et l'effet produit tombe un peu à plat (et puis tout le monde ne s'appelle pas Mankiewicz ou Stanley Kubrick, hein?). Aussi, il est des films que je note 10/10 même s'ils ne sont pas considérés comme des chefs-d'oeuvre du septième art (The Big Combo par exemple qui est loin d'être parfait tient une place privilégiée dans mon top 100). Un film même imparfait peut être une oeuvre forte (Gran Torino d'Eastwood est un autre exemple), avec une démarche artistique convaincante. Dans The Master, PTA fait preuve d'Art et de savoir faire certes mais c'est loin de me convaincre. D'abord parce qu'il y manque (pour moi) pas mal d'émotions. Trop de levure dans la pâte : ça gonfle mais ça retombe vite à plat. Cela dit, pour tempérer mon propos, la réflexion sur les manipulations et les servitudes volontaires méritent réflexions (d'ailleurs, à un moment, on entend je ne sais plus qui, Philly Seymour Hoffman peut-être, lâcher un "yep, that's food for thought" = "il y a matière à réflexion")... Mais globalement, c'est bien trop peu. Bref, je suis resté sur ma faim malgré l'interprétation réussie de Joaquim Phoenix (qui était cela dit beaucoup plus touchant dans Two Lovers de James Gray)... Mon verdict : entre 5 et 6/10...
Strum
n'est pas Flaubert
Messages : 8464
Inscription : 19 nov. 05, 15:35
Contact :

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Strum »

J'ai trouvé ça assez beau et émouvant dans l'ensemble. C'est moins intense et plus sinueux que There will be blood certes, mais l'intensité n'est heureusement pas le seul critère sur lequel on doit juger de la qualité d'un film. C'est aussi plus émouvant et moins superficiel que les premiers films de P.T. Anderson, qui m'apparaissaient parfois un peu creux derrière leur virtuosité formelle. Malgré la lenteur voulue du film (et des scènes d'introduction peu aimables), je me suis trouvé constamment impliqué par la relation quasi-filiale existant entre Freddie et le Maitre. La scène de questionnements où Freddie commence son traitement avec le maitre est très forte. Je me demandais pendant le film si Freddie irait mieux en sortant de la Secte, qui l'a accueilli avec bonne grâce, lui évitant la mort, l'asile ou la prison. Malgré l'épilogue, qui le voit reboire et singer la méthode du Maitre, je dirais que c'est le cas et que Freddie en sortant va mieux et contrôle davantage ses émotions (belle scène où la mère de Doris lui dit qu'elle est mariée depuis 3 ans). C'est un film assez ambigu, enfin, sur l'importance et le réconfort que peut apporter une croyance - de manière assez étonnante, le film décrit la Secte du film sous un jour nettement plus favorable que l'Eglise de There Will Be Blood, comme si Anderson choisissait la Secte face à l'Eglise. A cet égard, P.T. Anderson semble parfois assez attendri par le Maitre. La musique est très bien.
Gounou
au poil !
Messages : 9768
Inscription : 20 juil. 05, 17:34
Localisation : Lynchland

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Gounou »

Strum a écrit :la relation quasi-filiale existant entre Freddie et le Maitre.
J'aurais plutôt dit "relation filiale quasi-autre chose"...
Image
Vanning
Assistant(e) machine à café
Messages : 116
Inscription : 1 août 12, 02:33

Re: The Master (P.T. Anderson - 2012)

Message par Vanning »

Strum a écrit :J'ai trouvé ça beau et émouvant dans l'ensemble. C'est moins intense et plus sinueux que There will be blood certes, mais l'intensité n'est heureusement pas le seul critère sur lequel on doit juger de la qualité d'un film. C'est aussi plus émouvant et moins superficiel que les premiers films de P.T. Anderson, qui m'apparaissaient parfois un peu creux derrière leur virtuosité formelle. Malgré la lenteur voulue du film, je me suis trouvé constamment impliqué par la relation quasi-filiale existant entre Freddie et le Maitre. La scène de questionnements où Freddie commence son traitement avec le maitre est très forte. Je me demandais pendant le film si Freddie irait mieux en sortant de la Secte, qui l'a accueilli avec bonne grâce. Malgré l'épilogue, qui le voit reboire et singer la méthode du Maitre, je dirais que c'est le cas. C'est un film assez ambigu sur l'importance et le réconfort que peut apporter une croyance - de manière assez étonnante, le film décrit la Secte du film sous un jour nettement plus favorable que l'Eglise de There Will Be Blood, comme si Anderson choisissait la Secte face à l'Eglise. A cet égard, P.T. Anderson semble parfois assez attendri par le Maitre. La musique est très bien.
J'aime beaucoup cette analyse. Il est clair qu'on est à l'opposé de There Will Be Blood (d'une intensité peu commune) ou d'un Elmer Gantry (la flamboyance, le rythme). Et je suis bien évidemment d'accord pour dire que The Master est plus subtil qu'il n'y paraît. Hélas, pour moi cela ne suffit pas. Il y a des moments de flottements qui m'ont agacé je dois dire (le face à face final entre JP et Seymour, les larmes de trop, un gimmick façon Actor's Studio?, des silences un peu lourdingues d'où le sentiment que le mouvement ou l'alchimie entre les deux acteurs ne fonctionne pas vraiment...).. Aussi, j'ai regretté le traitement des journalistes (More et le dernier, j'ai oublié son nom). A mon avis, ils auraient mérité un meilleur traitement. Du moins, le film eût été peut-être plus intéressant de leur point de vue (???)... J'en sais rien... Par contre, je ne suis pas sûr que Anderson ait plus de sympathie pour la Secte. Pas de partie pris dans The Master, même si en comparaison, effectivement, le gourou de There Will Be Blood, sorte de Harry Powell (cf. La Nuit du Chasseur) est carrément malmené. Dans le traitement du personnage de Philip Seymour Hoffman, j'y vois plutôt une indifférence de la part de l'auteur... qui n'hésite pas, néanmoins, à ridiculiser son personnage (quand celui-ci chante, danse, ou se fout en pétard). Ce qui est bien rendu, c'est qu'on a là un type qui n'accepte pas la contradiction. La dialectique, il ne connaît pas. Enfin, pour la B.O., je suis tout à fait d'accord. Les thèmes chantées par Ella Fitzgerald s'inscrivent bien dans la trame. Et puis j'ai été heureux de retrouver "Lotus Blossom", superbe composition de Billy Strayhorn, l'ater ego de Duke Ellington. Si l'on a aimé ce thème, l'on ne manquera pas d'écouter la version sublimée de Joe Henderson (cf. l'album Lush Life)... :wink:

PS. Dans le même genre (dérives sectaires), l'on pourra toujours songer au film de et avec Robert Duvall, The Apostle (Le prédicateur) que j'avais vu lors de sa sortie en salles il y a quelques années. Le film était moins subtil que The Master, mais néanmoins intéressant (5/10).
Répondre