A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Colqhoun
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A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Colqhoun »

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Après des années d'un cinéma organique, gore, dérangeant, Cronenberg a progressivement opté pour une nouvelle approche. Son obsession de la mutation des corps l'a amené à s'interroger sur des mutations sociales, psychologiques, émotionnelles. A Dangerous Method en est une nouvelle étape. On peut dire que l'on touche ici à l'essence même de la mutation, de la transformation de l'humain. De sa transition d'un état à l'autre. Car non content de nous présenter une Keira Knightley en piteux état (mais totalement possédée d'un jeu impressionnant), Cronenberg théorise en long, en large et en travers sur ce qui peut pousser un être humain à changer. A adopter un comportement contre-nature, excessif, violent, j'en passe et des meilleurs.

Car passé une première demie-heure brillante, au montage vif, aux dialogues percutants, où tout se met en place avec une économie de moyens saisissante, le film part ensuite en vrille dans l'exposé. Un exposé certes bien réalisé, interprété par un trio d'acteurs délicieux et accompagné d'une belle partition de l'immuable Howard Shore, mais un exposé quand même. Certes c'est vaguement sulfureux (Vincent Cassel qui pelotte une paysanne, Keira Knightley qui se prend des coup de cravache, Michael Fassbender qui dit "bite"), mais le malaise n'est jamais présent et Cronenberg se contente d'illustrer les théories des deux célèbres psychanalystes d'une scène à l'autre pour nourrir ses propres thématiques. On en vient finalement à s'ennuyer devant cette biographie qui reste intéressante uniquement grâce aux faits qu'elle relate et non via le travail cinématographique. Le film a même le malheur de se terminer sur quelques cartons explicatifs qui n'apportent rien au vague propos mis en place.

Parfaitement frustrant après ces deux belles réussites que furent History of Violence et Eastern Promises.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg, 2011)

Message par riqueuniee »

Flm qui devrait sortir en France en décembre. Tu l'as vu en avant-première, ou il est déjà sorti en Suisse ?
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Colqhoun
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg, 2011)

Message par Colqhoun »

Il est sorti de mon côté de la Suisse.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par riqueuniee »

OK. Avis aux frontaliers : pas besoin d'attendre encore un mois pour voir le film...
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Colqhoun
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Colqhoun »

Il n'est pas encore sorti dans la partie francophone de la Suisse par contre. J'habite dans une ville à majorité suisse-alémanique et les dates de sorties sont différentes.
La suisse-romande a des sorties identiques à la France.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par riqueuniee »

OK. Juste pour savoir : les films sortent aussi le mercredi ? (c'est le cas en Belgique).
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Colqhoun
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Colqhoun »

Non, chez moi c'est le jeudi.
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Demi-Lune
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Demi-Lune »

Colqhoun a écrit :Parfaitement frustrant après ces deux belles réussites que furent History of Violence et Eastern Promises.
Les Promesses de l'ombre, ce n'était pas folichon. Du coup, à la lecture de ton avis, j'ai encore plus de craintes pour A Dangerous Method.
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Colqhoun
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Colqhoun »

Bon j'ai parlé de belles réussites.
Pas de chef d'oeuvres non plus.
Mais en l'état j'avais beaucoup aimé ces deux plongées dans le polar.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Watkinssien »

Demi-Lune a écrit :
Colqhoun a écrit :Parfaitement frustrant après ces deux belles réussites que furent History of Violence et Eastern Promises.
Les Promesses de l'ombre, ce n'était pas folichon.
Oh que si ! :wink:
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par ballantrae »

Tout à fait, sans atteindre la perfection de Videodrome, dead ringers ou Crash les deux polars susdits étaient saisissants, transfigurés par une mise en scène sèche et percutante de la violence que l'écrin feutré du reste du film mettait encore plus en avant. Pas des "révolutions" dans le cinéma de Cronenberg ( ça ce furent les titres évoqués plus haut auxquels on pourrait adjoindre Naked lunch qui me semble plus important qu'on ne le dit malgré - ou à cause de - ses excès baroques) mais une évolution assez réjouissante tout de même!
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Demi-Lune
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Demi-Lune »

J'apprécie également l'évolution du cinéma de Cronenberg, qui se renouvelle dans ses approches (plus psychologisantes depuis le tournant Faux-Semblants) tout en restant cohérent dans ses thématiques. C'est peut-être l'un des derniers grands auteurs contemporains qui arrive encore à muter à chaque nouveau film tout en restant lui-même. Mais autant j'aime A History of violence, qui sous le vernis d'une histoire très classique propose des pistes de réflexion passionnantes et offre une expérience assez remuante, autant Les Promesses de l'ombre me paraît être le plus faible Cronenberg que j'ai vu. OK, la violence est choquante, la mise en scène est clinique et l'ambiance lourde, mais cela suffit-il à faire un film ? Je ne crois pas. En l'occurrence, c'est un petit film qui use de ficelles qu'on a déjà vues mille fois ailleurs et en bien meilleur. Avec ses personnages unidimensionnels, campés par des comédiens globalement fades quand ils ne sont pas ridicules, le film se montre rapidement englué dans une trame amorphe aux enjeux dérisoires et dépassés. Malgré la métaphore du corps qui résume la vie de celui qui l'incarne, Cronenberg n'apporte aucune singularité dans le regard qu'il porte sur cet univers criminel. Si bien que, malgré un fascinant Viggo Mortensen et quelques scènes éparses, j'ai la cruelle impression d'avoir vu un téléfilm de luxe, l’œuvre d'un cinéaste génial qui ici a tout de l'élève appliqué, voire pire, dompté. Là où dans A History of violence il parvenait remarquablement à tenir sa barque et imposer sa patte caractéristique, là il semble tout effacé, comme endormi par une narration très hollywoodienne dans certains de ses effets (le twist identitaire, la scène de cul dont la justification est plus que ténue, la romance à deux balles...) et qui semble prendre le dessus sur sa personnalité. Soit tout l'inverse de Dead Zone ou La Mouche par exemple. Je te laisse donc deviner ce que je pense de la volonté de Cronenberg de donner une suite aux Promesses de l'ombre.
Et il y a toujours deux ou trois choses dans ce film qui me dérangent dans leur exécution.

Bref, je suis Cronenberg dans la trajectoire renouvelée qui a toujours été la sienne, mais je dis non au CroCro chloroformé.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par phylute »

J'apprécie History of Violence et Les Promesses de l'ombre comme d'excellents polars portés par le mise en scène de Cronenberg. Après, on peut effectivement trouver des liens avec ses films antérieurs, mais j'avais surtout l'impression qu'il avait tourné une page. Chose que j'appréciait d'ailleurs car avec Spider (et dans une moindre mesure eXistenZ), il semblait bien avoir atteint un point où la répétition un peu mécanique des mêmes thèmes allait prendree le pas sur la nouveauté et la prise de danger. Donc, Cronenberg en réalisateur de série B teigneuse, ça me plaisait bien.
Là, je ne sais pas trop où il va, mais comme Colghoun j'ai trouvé que Dangerous Method était un gros ratage, de loin son plus mauvais film à mes yeux. Longuet, bavard, mal photographié... le sujet est peut-être intéressant mais le traitement m'a complètement découragé. La faute au scénario de Christopher Hampton qui essaye de nous refaire Les liaisons dangereuses (pour la forme épistolaire), mais la faute surtout à un Cronenberg que l'on sent très extérieur au film, en mode automatique.
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par Dr David Menard »

Je suis très curieux de voir ce film. Mais...
Je suis un "vieux" fan de Cronenberg et comme pas mal d'entre nous ici, son nom évoque surtout des souvenirs d'ado lecteur de Mad Movies, L'Ecran Fantastique ou Starfix, fasciné par ses premiers films "fantastiques" (bien que sa conception du genre soit vraiment à part et s'apparente plus à de la SF, mais Mary Shelley ne fut-elle pas la première à établir cette passerelle ?)... Videodrome reste pour moi la référence absolue et Dead Ringers, somme de la première partie de son œuvre et en même temps transition vers un cinéma plus, comment dire, sans être injuste ou réducteur... euh, allez, mettons "classique", fait partie, pour moi, des très grands films des dernières décennies... Mais, là, déjà, justement, une page se tourne. Je me souviens m'être fait à l'époque une réflexion de jeune "con", mais je savais que dès lors que des "vieilles" (je sais, c'est un peu brutal) commençaient à s'asseoir à côté de moi dans une salle où l'on passe un Cronenberg, c'est qu'il y a quelque chose de changé (bon, elles ne sont sûrement pas allé voir Existenz ou Crash, ces dames fort respectables, sans doute fans de Jeremy Irons - car il y en avait aussi à M. Butterfly)...
A partir de Spider, et plus encore avec A History Of Violence (aaah, les contresens sur ce titre - parfois, ils sont vaches, ces distributeurs, de laisser les spectateurs un peu cancres en anglais se dépatouiller avec les titres originaux et leurs pièges sémantiques, mais passons) ou Eastern Promises (bon, là, la traduction, pas terrible, pour le coup - j'imagine les mecs: "non, les gars, l'Est, ça fait pas assez polar, violent, sombre tout ça...), j'avoue que j'ai un peu de mal à suivre l'orientation de son cinéma. Je comprends quand même la cohérence de son travail car on peut toujours trouver des correspondances avec ses premiers films (notamment, la suite du travail méthodique de décortication-déconstruction de tout ce qui peut constituer l'homme, l'identité masculine, le dialogue esprit-chair etc.) mais je reste perplexe devant la recherche de "respectabilité" qui semble émaner de ces films un peu donneurs de leçon, quand le "moraliste" risque de tomber dans le piège du "moralisateur" et caresse soudain dans le sens du poil le critique établi avide de "fables sociales qui jettent un regard sans complaisances sur la violence de notre société", le même qui autrefois hurlait au fou, au scandale à l'outrage aux bonnes mœurs devant The Brood, Scanners ou Videodrome. Et s'il est vrai, que même dans ces films-là, Cronenberg avait déjà la tentation de nous sermonner sur tel ou tel danger du monde moderne, il le faisait avec des armes étranges et hybrides à la croisée du film d'horreur de série B et du drame psychologique d'"auteur" à la Bergman-Antonioni, bien plus sympathiques que les contours plus lisses (peut-être en apparence seulement) de ses derniers films où la méthode semble quand même bien moins dangereuse qu'autrefois...
Tiens, rêvons un peu: imaginons un peu un Cronenberg qui aurait continué sur la lancée de Naked Lunch dans un fantastique à la fois cérébral et gore, non dénué d'humour malgré la noirceur du sujet, et bénéficiant de la maîtrise parfaite, de la classe absolue dont il témoigne dans la mise en scène de ses derniers films... Je crois que ça aurait eu de la gueule, non ? Mais je ne désespère pas de le voir un jour revenir dans cette direction.
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El Dadal
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Re: A Dangerous Method (David Cronenberg - 2011)

Message par El Dadal »

Dr David Menard a écrit : Tiens, rêvons un peu: imaginons un peu un Cronenberg qui aurait continué sur la lancée de Naked Lunch dans un fantastique à la fois cérébral et gore, non dénué d'humour malgré la noirceur du sujet, et bénéficiant de la maîtrise parfaite, de la classe absolue dont il témoigne dans la mise en scène de ses derniers films...
Ce film s'appelle Crash.
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