Sydney Pollack (1934-2008)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Nestor Almendros
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par Nestor Almendros »

LA FIRME (1993)

Il me tardait de découvrir ce film après avoir lu le roman il y a à peine quelques mois. Je ne m'attendais pas à une réussite mémorable, mes craintes se sont avéréesplus que fondées. Si le roman de Grisham m'avait beaucoup plu sur certains aspects, j'étais beaucoup plus réservé sur sa structure "thriller". En voyant le film hier soir, j'ai sensiblement rehaussé cet avis: et de toutes façons, bien que les comparaisons soient inévitables lorsqu'il s'agit d'adaptations, je pense pour ma part que le livre est bien supérieur au film.

Ce qui m'a finalement le plus gêné dans le film c'est le gommage systématique de tout ce qui faisait le sel du roman. Déjà, la version ciné se consacre presque uniquement à l'aspect "suspense" alors que le roman excelle avant tout dans sa description du milieu juridique de Memphis et des contournement légaux de certains nantis pour éviter les taxes de l'état. Une très grosse partie du roman décrit minutieusement un mode de vie voué à l'argent, un bulldozer qui avance inexorablement et qui transforme tout en billet vert. De cela le film ne s'en sert que comme décor plus ou moins lointain, évacuant toute perspective de critique ou de mise en abyme d'une société capitaliste outrancière.
A l'intérieur de ce système évoluent des hommes formatés pour ce travail dans une vie dédiée à la réussite. Notre héros apparait ainsi dans le roman comme un petit génie extrêmement doué, malin, faisant preuve de sang froid, de calcul. C'est surtout une bête de travail aux horaires démentiels et à l'appétit de succès évident. Là encore, le film gomme beaucoup de ces nuances, transformant ce personnage très intéressant (trop beau pour être vrai, d'ailleurs) en simple pion d'une machination et soumis à des tourments moraux plus ou moins attendus (après avoir trompé sa femme). Le film propose d'ailleurs un tournant étrange en faisant participer davantage sa femme (Jeanne Tripplehorn, actrice que je n'ai jamais apprecié) dans les détournement de documents, notamment en provoquant des faces à faces intimes avec le mentor de son mari (Gene Hackman): sans que celle-ci passe à l'acte, il y a comme une sorte de revanche et de match nul qui sied peut-être mieux à la morale bien-pensante du pays mais qui n'a plus grand chose à voir avec le sujet du film. Non que cette ébauche de liaison (ou en tout cas d'amalgames) ne soit pas intéressante, au contraire c'était une piste prometteuse, mais elle es,t là encore, assez mal exécutée.
Un beau personnage du roman passe ainsi presque à la trappe: celui de la secrétaire interprétée par Holly Hunter, courageuse et dévouée qui n'est plus, dans le film, qu'un simple maillon de la chaîne. De même que l'agent du FBI dont les scènes de contact du roman étaient pleines de verve se retrouvent platement banales dans le film (même le grand Ed Harris n'évite pas le passage en courant d'air).
Dommage, aussi, d'avoir supprimé toute la dernière partie du roman (sur la côte), peut-être moins originale il est vrai, mais bien plus prenante que la pauvre poursuite avec l'albinos et le chef de la sécurité qui n'a plus l'aura dangereuse du roman. On a seulement gardé les 2 mafieux pour un pauvre ersatz des AFFRANCHIS (casting commun, en plus: bonjour l'originalité :roll: ).

Un bon exemple de ratage, un film édulcoré pour plaire au plus grand nombre, simplifié au maximum pour ne pas embrouiller le spectateur que les costards-cravate considèrent comme "débile"...
Mais à sa décharge, si je veux être honnête, j'avais peut-être aussi trop du roman en mémoire...
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Jericho
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par Jericho »

Découvert La Firme récemment et j'ai été vachement déçu par ce film. C'est long, un peu chiant sur les bords (le scénario et les personnages sont guère passionnants), et surtout la mise en scène est extrêmement paresseuse.
Le type même de film surestimé à l'époque et qui a vite sombré dans l'oubli...
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cinephage
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par cinephage »

Jericho a écrit :Découvert La Firme récemment et j'ai été vachement déçu par ce film. C'est long, un peu chiant sur les bords (le scénario et les personnages sont guère passionnants), et surtout la mise en scène est extrêmement paresseuse.
Le type même de film surestimé à l'époque et qui a vite sombré dans l'oubli...
:?: :?: :?:
Par qui ??
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Jeremy Fox
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par Jeremy Fox »

cinephage a écrit :
Jericho a écrit :Découvert La Firme récemment et j'ai été vachement déçu par ce film. C'est long, un peu chiant sur les bords (le scénario et les personnages sont guère passionnants), et surtout la mise en scène est extrêmement paresseuse.
Le type même de film surestimé à l'époque et qui a vite sombré dans l'oubli...
:?: :?: :?:
Par qui ??
Effectivement il n'y avait pas grand monde pour le défendre. Je m'en souviens car ayant beaucoup aimé, je ne comprenais pas une telle "cabale" contre le film. Pour une fois que je tombais sur un film d'espionnage que j'arrivais à comprendre ; ça n'a toujours pas changé aujourd'hui :mrgreen:
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cinephage
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par cinephage »

Voila. Je n'ai pas vu ce film, mais, à sa sortie, il faisait l'unanimité contre lui (Grisham, Cruise)... D'où ma surprise qu'il puisse sembler surestimé aujourd'hui.
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Demi-Lune
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par Demi-Lune »

J'aime beaucoup La Firme. Moi non plus, je ne comprends pas trop les critiques assassines à son égard.
C'est un film classieux (photographie, le piano de Dave Grusin), intelligent, prenant le temps de développer son intrigue et les relations entre ses personnages principaux (le couple Mitch/Abby qui s'use, le paternalisme d'Avery envers Mitch, le frère de Mitch en prison...). Je suis d'ailleurs assez surpris qu'un film aussi long et aussi peu spectaculaire, nécessitant du spectateur une certaine concentration, ait pu voir le jour à l'heure où le cinéma américain tendait de plus en plus vers de la débauche pyrotechnique. Preuve que Cruise, l'acteur, savait bien choisir ses films et les réalisateurs avec lesquels il voulait tourner. Pollack a en effet cette sensibilité "New Hollywood" qui fait de La Firme une espèce de réminescence des films des années 1970, des films donnant avant tout la primeur aux scénarios et à la performance des interprètes. D'ailleurs, il me semble que Robert Towne a participé à l'écriture du scénario.
La mise en scène de Pollack n'est pas paresseuse, elle est juste discrètement efficace. Le problème du film peut être sa durée (2h30), mais le scénario, adapté du bouquin de Grisham (qui propose une bien meilleure fin que le roman), est très bien écrit, et les interprètes (quel casting ! Cruise, Hackman, Trippelhorn, Hunter, Harris...) sont unanimement excellents. Tom Cruise décroche vraiment là un de ses meilleurs rôles, et que dire d'Hackman, si ce n'est qu'il y est épatant, une fois de plus. Un film que je revois souvent avec plaisir.
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Major Tom
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Re: Disparition de Sydney Pollack

Message par Major Tom »

odelay a écrit :Après avoir suivi vos avis, je viens de voir ABSENCE DE MALICE, et je ne regrette pas. Film carré et belle réflexion sur les dérives du métier de journaliste et sur la réhabilitation. Excellente interprétation dans l'ensemble. Je retiendrai surtout la scène entre Sally Field et Melinda Dillon et toutes celles qui découlent de cette rencontre qui sont réellement émouvantes.
Il est vraiment pas mal, c'est vrai! Belle découverte pour ma part. Il y a un bon scénario, de belles interprétations (Bob Balaban et son satané élastique enroulé/déroulé aux mains) et c'est un film qui donne faim (on y bouffe bien) et donne envie d'avoir un bateau pour déjeuner au milieu de la mer...

Je rejoins Jeremy Fox et Demi-Lune, j'aime bien cet excellent thriller qu'est La Firme. D'un point de vue visuel, c'est un film à la mise en scène carrée, classe, comme Absence de Malice d'ailleurs (s'il est assez "pépère", reproche souvent formulé à son encontre, dans les années 70, Pollack ne se privait pas de sur-découper formidablement bien, sans faire perdre le fil au spectateur, comme avec la scène du combat de Yakuza ou la bagarre entre Redford et le postier dans Les trois jours du Condor). Ça m'évoque un peu le Polanski de The Ghost-Writer. Ils savent qu'ils n'ont plus besoin d'en faire des tonnes pour l'épate ou montrer que ce sont des virtuoses. Il y a cette même recherche de crédibilité et une utilisation des médias qui leurs sont contemporains... Mais c'est totalement différent du point de vue narratif (explosion des points de vue chez Pollack).
Frank Bannister
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Re: Sydney Pollack (1934-2008)

Message par Frank Bannister »

Demi-Lune a écrit :Pollack a en effet cette sensibilité "New Hollywood" qui fait de La Firme une espèce de réminescence des films des années 1970
Ca tombe bien puisque c'est à lui que l'on doit sans doute l'un des meilleurs films d'espionnage des années 70.
johell
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par johell »

hellrick a écrit :La malédiction des whateley
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Croisement entre Lovecraft et un pré-Chiens de paille...Ca ne manque pas d'idées intéressantes mais tout ça est assez mal exploité et quand même plutôt ennuyeux...Acteurs peu convaincants, voire ridicules, excepté Oliver Reed en méchant violeur...
3/6
J'ai beaucoup aimé ce film, que j'ai trouvé très atmosphérique et avec une belle bande sonore expérimentale composé par le musicien de jazz Basil Kirchin. Certainement l'une des oeuvres qui arrive le mieux à retranscrire le malaise qui se dégage des écrits de Lovecraft. Pour ma part, une belle réussite!
Count Dooku
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Count Dooku »

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Faut décidément que j'évite les films de Godard. J'avais trouvé A Bout de souffle plaisant mais assez creux, ça se regarde pour son statut de jalon dans l'histoire du cinéma (là, faut reconnaître que formellement, Godard tranche radicalement avec ce qui avait précédé) mais ça n'a pas grand intérêt en tant que film. Pierrot le fou c'était déjà autre chose, le film est d'une richesse visuelle inouïe, Godard ose tout et n'importe quoi, mais là encore j'ai trouvé ça relativement ennuyeux, du fait de l'absence d'un réel fil conducteur, et assez prétentieux dans sa volonté de rompre à tout prix avec les conventions, quitte à faire un film sans queue ni tête (tant qu'à faire). Mais ça restait une curiosité plutôt plaisante, même si ce n'est clairement pas le style de cinéma que j'aime.
Mais là, avec Alphaville, c'est le pompon. J'étais plutôt confiant envers ce film, c'était peut-être le seul Godard qui me faisait envie (esthétique proche du film noir, histoire mâtinée de SF, bref de prime abord, sur le peu que j'en savais, ça avait l'air sympa). Et mon Dieu, qu'est-ce que je me suis fait ch... devant ce film! :shock: Ah ça, Godard soigne sa mise en scène, c'est sûr. La photographie en noir et blanc est très belle, et met parfaitement en valeur la beauté d'Anna Karina (le point fort du film selon moi :fiou:). Mais à part ça c'est tout, le scénario est impossible à suivre tellement c'est mal narré, la voix qu'on entend tout au long du film (et qui semble provenir d'un mec ayant subi une trachéotomie) est agaçante au possible, et les acteurs jouent sans la moindre conviction (sans doute faute de comprendre les délires de Godard). Les scènes s'enchaînent sans vraiment de cohérence, ça bavarde beaucoup pour ne rien dire (d'autant que le mot d'ordre semble être : plus c'est abscons, mieux c'est), bref j'ai du le regarder en deux fois, car je m'endormais à la moitié du film (qui n'est pourtant pas long : 95min! Mais ça m'a semblé une éternité...). Vraiment pénible! 2/6

Là c'est autre chose, un tout bon western comme je les aime, avec en prime un scénario bien plus subtil et dense que d'ordinaire! Servi par un casting de folie, avec trois acteurs que j'aime beaucoup (Henry Fonda, Anthony Quinn et Richard Widmark), Warlock est intéressant dans le portrait qu'il dresse de ses protagonistes principaux, des hommes très différents dont les parcours opposés les amèneront à s'affronter (mention spéciale au duo Fonda/Quinn dont la relation particulièrement complexe est un des points les plus réussis du film). C'est un film qui résonne un peu comme un passage de témoin entre une époque, celle du far-west des as de la gâchette (symbolisé par le personnage d'Henry Fonda), et une autre, où la loi (incarnée par Richard Widmark) l'emporte sur le jugement des colts et où les citoyens prennent enfin leurs responsabilités (cf la scène où Widmark reçoit l'aide de plusieurs villageois contre les bandits qui essayent de le tuer). Finalement, le personnage d'Henry Fonda n'a plus sa place dans ce monde, en témoigne la scène finale très réussie (la seule où l'on voit les fameux colts d'or, finalement! :mrgreen:). Vraiment un tout bon western, j'ai adoré. :) 6/6
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Kevin95
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Kevin95 »

The Hired Hand (Peter Fonda) Image

Ça pour être une western atypique, s'en est un. L'intrigue peut se résumer à "un homme fatigué rentre chez lui et retrouve sa femme" et ce n'est pas l'histoire de vengeance (qui intervient dix minutes avant la fin du film) qui va bousculer cette chronique lunaire qu'est The Hired Hand, car Fonda accorde autant (si ce n'est plus) d'importance à un changement de roue d'un charriot qu'au règlement de compte.
C'est évidemment très 70's, la musique y est hypnotique tout comme la mise en scène où de superbes plans de la nature (on pense à Malick sans arrêts) s'alterne avec des scènes conjugales interprétées par des comédiens en under playing. C'est sur, il ne faut pas être fatigué pour se lancer dans cet hymne à la nature, le rythme y est volontairement lent et les personnages fatigués. Mais on reste bouche bée devant la beauté de la photographie et touché par l'engouement de Fonda à peindre un western qui ne ressemble à rien d'autre. Je serai par contre sceptique devant le scénario qui ressemble à un cadavre exquis (on passe d'un corps d'enfant mort dans une rivière à une scène de bar complètement différente sans lien autre que les personnages) et surtout quelques effets de style qui frôles le ridicule (les ralentis ne sont pas tous réussis et pertinents).
Mais le film est franchement planant, pourquoi refuser ce plaisir pour les yeux.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
Julien Léonard
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Julien Léonard »

Détective privé (Harper) - Réalisé par Jack Smight / 1966 :

Un polar typique de la seconde moitié des années 60, efficace et classieux, agréable et bien ficelé. Paul Newman trouve ici encore un rôle en or, l'un des plus sympathiques de sa carrière, grâce à ce personnage fun, légèrement voyou, mais surtout cynique, solitaire, asocial et finalement anti-glamour. L'image de beau gosse dont héritait Newman en début de carrière explose une fois de plus en mille morceaux et laisse percevoir un acteur capable de tout jouer, d'investir n'importe quel rôle, ou presque. Un exemple supplémentaire de la qualité et du renouvellement permanent de la carrière de Newman. Pour le reste, distribution 4 étoiles (Lauren Bacall, Janet Leigh, Robert Wagner...), mise en scène souple et élégante (Jack Smight livre un travail impersonnel mais de grande qualité), musique jazzy totalement géniale, et scénario tordu, véritable passage obligé des polars à base de détectives privés. Harper n'est pas un grand film, mais à n'en pas douter un excellent produit à voir et à revoir, avec son lot de fausses pistes, ses coupables tout trouvés et ses rebondissements improbables. Paul Newman est tellement à l'aise qu'il fait passer n'importe quoi, dans une interprétation assez éblouissante de "coolitude". Très bon moment. J'ai hâte de découvrir la suite...
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Jeremy Fox
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Jeremy Fox »

Julien Léonard a écrit :Détective privé (Harper) - Réalisé par Jack Smight / 1966 :
Un polar typique de la seconde moitié des années 60, efficace et classieux, agréable et bien ficelé. Très bon moment. J'ai hâte de découvrir la suite...
J'ai aimé sa suite tout autant. Avec Tony Rome (Sinatra dans deux films), un de mes personnages de polar préféré :wink:
Julien Léonard
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Julien Léonard »

Du coup, j'aimerais bien découvrir Tony Rome aussi. :wink: Jusqu'ici, concernant les années 60 et 70, j'ai toujours jeté mon dévolu sur les polars nerveux, à base de flics impitoyables et de courses poursuites inoubliables. Mais en revoyant Le privé d'Altman et Dans la chaleur de la nuit de Jewison, j'ai eu envie de découvrir des films du même type, ou presque...
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Profondo Rosso
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Re: Notez les films naphtas - Juin 2010

Message par Profondo Rosso »

Un château en enfer de Sidney Pollack (1969)

Au mois de décembre 1944, lors de la Bataille des Ardennes, une contre-offensive des allemands contre les forces alliées, un groupe de huit G.I.s, conduit par le major borgne Falconer (Burt Lancaster) se réfugie au château de Malderais, une bâtisse isolée du Xe siècle. Le comte Henri Texier et Thérèse, sa jeune épouse s’avérant être également sa nièce, y vivent sans enfant, le comte étant impuissant, entourés d'inestimables œuvres d’art. Le major décide, malgré l’opposition de son second, le capitaine Beckman, féru d’art et spécialiste des miniatures en ivoire du XIIe siècle, de s’installer dans les lieux et d'en faire une place forte.

Sous ce pitch en apparence classique se cache un pur ovni du film de guerre. Le début évoque les classique du film de commando de l'époque avec se groupe de soldat investi de la protection château médiéval mais très vite le tout dérape. L'atmosphère pesante chargée d'histoire des lieux, l'ennui provoqué les longues semaines d'inactivité et l'idylle improbable entre le commandant joué par Lancaster et la jeune châtelaine sont des éléments qui font que le film détonnent progressivement de ce genre de production. Du coup les enjeux se déplacent complètement, la grande question étant ici l'opposition entre Lancaster souhaitant faire du château le dernier bastion de résistance à l'arrivée imminente des troupes allemandes tandis que son second (excellent Patrick O'Neal) féru d'art souhaite préserver le patrimoine du chateau, soutenu par le comte joué par Jean Pierre Aumont. Pollack applique une esthétique et une narration tout aussi surprenante, très moderne et presque psyché dans certains effet avec des ellipses surprenantes, des dialogues en voix off décalé avec l'image et une imagerie majestueuse pour tout ce qui est d'illustrer les splendeurs contenues dans le château de Malderais. L'ambiance m'a vraiment rappellé "La neuvième Configuration" de William Peter Blatty par instants.
Certaines scènes sont vraiment hallucinantes tel ce moment où le commando se rend au bordel du village, aux intérieur rougeoyants et théâtraux où les prostituées prennent la pose pour nos soldats en tenues affriolantes. L'arrivée d'un groupe de soldat déserteur fous de dieu mené par un Bruce Dern possédé est également des plus déstabilisant. Les seconds rôles sont à l'avenant en particulier Peter Falk réinvestit de son métier premier lorsqu'il se lie avec la boulangère du village, Scott Wilson (le terrifiant Slim Grisom de "Pas d'orchidée pour Miss Blandish") qui tombe amoureux d'un Volkswagen ou le jeune écrivain noir dont le livre imaginaire fait office de narrateur par intermittence. On sent que "Les Douze salopards" de Aldrich est passé par là à travers cette galerie de personnages psychotique et torturé, et comme pas mal de film de cette période c'est surtout la guerre du Vietnam qui est en point de mire plutôt que le réel conflit où se déroule l'intrigue. Malgré ce ton anticonformiste, les séquences d'action sont bien là et s'avère dantesques : une séquence de guérilla en plein village où un tank allemand pulvérisent les parois d'une église pour traquer des soldats américain et surtout la résistance finale pour la défense du château où une véritable apocalypse de feu et de sang se déchaînent sous nos yeux. Magnifique Lancaster dont le personnage reste une énigme dans son jusqu'au boutisme suicidaire qui rattrape bien les faiblesses d'interprétation de Astrid Heeren. Vraiment étonnant dans le genre, et sacré score de Michel Legrand aussi déroutant que les images. 5/6
Dernière modification par Profondo Rosso le 6 juin 10, 13:38, modifié 1 fois.
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