Alain Jessua (1932-2017)
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Re: Alain Jessua
Tiens, pas d'images de Paradis Pour Tous dans leur petit clip.
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Re: Alain Jessua
J'aimerais bien voir "la vie à l'envers" mais pas de dvd me semble-t-il...
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Re: Alain Jessua
LÉON LA LUNE de Alain Jessua (1956) découverte
Premier court métrage d'Alain Jessua pour un hommage à peine déguisé à Charles Chaplin. Le Léon du titre est un clochard, le film va suivre son quotidien, sans qu'aucune phrase ne soit prononcée. Une esthétisation très (parfois trop) prononcée, quelques clins d'œil au Boudu sauvé des eaux de Jean Renoir mais surtout l'occasion de marier burlesque (le coup du costard) et tendresse comme le fit Chaplin. Bizarrement, ce joli petit film, récompensé et adoubé par Jacques Prévert (qui a écrit le carton d'introduction) ne sera suivi d'un long métrage que... huit ans plus tard.
Premier court métrage d'Alain Jessua pour un hommage à peine déguisé à Charles Chaplin. Le Léon du titre est un clochard, le film va suivre son quotidien, sans qu'aucune phrase ne soit prononcée. Une esthétisation très (parfois trop) prononcée, quelques clins d'œil au Boudu sauvé des eaux de Jean Renoir mais surtout l'occasion de marier burlesque (le coup du costard) et tendresse comme le fit Chaplin. Bizarrement, ce joli petit film, récompensé et adoubé par Jacques Prévert (qui a écrit le carton d'introduction) ne sera suivi d'un long métrage que... huit ans plus tard.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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Re: Alain Jessua
JEU DE MASSACRE de Alain Jessua (1967) révision
Huit ans après Léon la lune, Alain Jessua enchaine (enfin) avec son deuxième film, un long (faut savoir se faire plaisir) et déjà son style se déploie. Autant Léon la lune était mignon comme tout, autant il ne reflétait pas forcément l'étrangeté du cinéaste. Ici, on navigue dans le surprenant, dans un trip entre la bande dessinée, la pop et la cruauté du cinéma de Claude Chabrol. Jeu de massacre est un rapport de force entre l'extrême cynisme d'un Jean-Pierre Cassel (génial) et l'extrême naïveté d'un Michel Duchaussoy (génial). L'un est aussi victime que manipulateur, l'autre est aussi enfantin que flippant, les deux vont se bousculer jusqu'à un happy end calme donc suspect. Fun mais glaçant, coloré mais sombre, rigolo mais inquiétant. Premier coup de poker du réalisateur et première (sacrée) réussite.
Huit ans après Léon la lune, Alain Jessua enchaine (enfin) avec son deuxième film, un long (faut savoir se faire plaisir) et déjà son style se déploie. Autant Léon la lune était mignon comme tout, autant il ne reflétait pas forcément l'étrangeté du cinéaste. Ici, on navigue dans le surprenant, dans un trip entre la bande dessinée, la pop et la cruauté du cinéma de Claude Chabrol. Jeu de massacre est un rapport de force entre l'extrême cynisme d'un Jean-Pierre Cassel (génial) et l'extrême naïveté d'un Michel Duchaussoy (génial). L'un est aussi victime que manipulateur, l'autre est aussi enfantin que flippant, les deux vont se bousculer jusqu'à un happy end calme donc suspect. Fun mais glaçant, coloré mais sombre, rigolo mais inquiétant. Premier coup de poker du réalisateur et première (sacrée) réussite.
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Re: Alain Jessua
ARMAGUEDON de Alain Jessua (1977) révision
Même coincés dans un ascenseur pendant une heure trente, le face à face entre Alain Delon et Jean Yanne aurait été fascinant. Alain Jessua a eu une autre idée (elle était pourtant bonne) et plutôt que d'en faire une rencontre de monstres, il a la naïveté de conduire son drame policier sans se soucier trois secondes de la persona des comédiens. Yanne sera donc à l'opposé du cynique rigolard mais un être destructeur, fragile et sacrément angoissant. Delon sera un personnage plus passif, plus distant, qui commentera l'action du film plus qu'il ne la conduira. Armaguedon est une chasse à l'homme tout sauf à l'américaine, c'est un film à son rythme, privilégiant le triste quotidien de Yanne, son amitié pathétique avec Renato Salvatori et sa lente préparation terroriste qu'un suspense haletant. En résulte un climat particulier, fascinant, qui mène à une séquence finale éprouvante où Yanne, comme Peter Lorre dans M de Fritz Lang, se livre autant qu'il se condamne. Jessua est décidément un cas à part.
Même coincés dans un ascenseur pendant une heure trente, le face à face entre Alain Delon et Jean Yanne aurait été fascinant. Alain Jessua a eu une autre idée (elle était pourtant bonne) et plutôt que d'en faire une rencontre de monstres, il a la naïveté de conduire son drame policier sans se soucier trois secondes de la persona des comédiens. Yanne sera donc à l'opposé du cynique rigolard mais un être destructeur, fragile et sacrément angoissant. Delon sera un personnage plus passif, plus distant, qui commentera l'action du film plus qu'il ne la conduira. Armaguedon est une chasse à l'homme tout sauf à l'américaine, c'est un film à son rythme, privilégiant le triste quotidien de Yanne, son amitié pathétique avec Renato Salvatori et sa lente préparation terroriste qu'un suspense haletant. En résulte un climat particulier, fascinant, qui mène à une séquence finale éprouvante où Yanne, comme Peter Lorre dans M de Fritz Lang, se livre autant qu'il se condamne. Jessua est décidément un cas à part.
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Re: Alain Jessua
EN TOUTE INNOCENCE de Alain Jessua (1988) découverte
Thriller chelou (normal c'est d'Alain Jessua), aussi calme et décontracté que pervers et vénéneux, comme un croisement entre Misery et Le bonheur est dans le pré. D'emblée, il y a quelque chose de pourri au royaume de ce film serein, un jet d'eau sur Nathalie Baye par son beau-père Michel Serrault et c'est une attirance sexuelle sous-jacente, une opposition nette et une tension qui ne demande qu'à éclater. Le reste d'En toute innocence va voir la belle fille et le courageux beau-père se foutre sur la pomme en souriant lors des déjeuners pour mieux cacher son jeu. On pense au cinéma de Claude Chabrol, à La Cérémonie ou à Masques, mais avec un petit sentiment malsain en plus. Voir l'éternelle gentille fille Baye interpréter une sacrée garce ou Serrault préparer des plans machiavéliques pour buter la femme de son fiston chéri est aussi étonnant que fascinant. Pour Baye, ça ne fait aucune doute, c'est son plus beau rôle (avec La Chambre verte dans un autre registre). Pour Serrault, on commence à être habitué, le type est une bête de compétition en termes d'ambiguïté. Le plan final apaisé reste longtemps en tête car n’atténue en rien le climat dérangé qui parcourt le film, bien au contraire. A priori, En toute innocence est la dernière vraie réussite de Jessua.
Thriller chelou (normal c'est d'Alain Jessua), aussi calme et décontracté que pervers et vénéneux, comme un croisement entre Misery et Le bonheur est dans le pré. D'emblée, il y a quelque chose de pourri au royaume de ce film serein, un jet d'eau sur Nathalie Baye par son beau-père Michel Serrault et c'est une attirance sexuelle sous-jacente, une opposition nette et une tension qui ne demande qu'à éclater. Le reste d'En toute innocence va voir la belle fille et le courageux beau-père se foutre sur la pomme en souriant lors des déjeuners pour mieux cacher son jeu. On pense au cinéma de Claude Chabrol, à La Cérémonie ou à Masques, mais avec un petit sentiment malsain en plus. Voir l'éternelle gentille fille Baye interpréter une sacrée garce ou Serrault préparer des plans machiavéliques pour buter la femme de son fiston chéri est aussi étonnant que fascinant. Pour Baye, ça ne fait aucune doute, c'est son plus beau rôle (avec La Chambre verte dans un autre registre). Pour Serrault, on commence à être habitué, le type est une bête de compétition en termes d'ambiguïté. Le plan final apaisé reste longtemps en tête car n’atténue en rien le climat dérangé qui parcourt le film, bien au contraire. A priori, En toute innocence est la dernière vraie réussite de Jessua.
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Re: Alain Jessua
Kevin95 a écrit :EN TOUTE INNOCENCE de Alain Jessua (1988) découverte
Thriller chelou (normal c'est d'Alain Jessua), aussi calme et décontracté que pervers et vénéneux, comme un croisement entre Misery et Le bonheur est dans le pré. D'emblée, il y a quelque chose de pourri au royaume de ce film serein, un jet d'eau sur Nathalie Baye par son beau-père Michel Serrault et c'est une attirance sexuelle sous-jacente, une opposition nette et une tension qui ne demande qu'à éclater. Le reste d'En toute innocence va voir la belle fille et le courageux beau-père se foutre sur la pomme en souriant lors des déjeuners pour mieux cacher son jeu. On pense au cinéma de Claude Chabrol, à La Cérémonie ou à Masques, mais avec un petit sentiment malsain en plus. Voir l'éternelle gentille fille Baye interpréter une sacrée garce ou Serrault préparer des plans machiavéliques pour buter la femme de son fiston chéri est aussi étonnant que fascinant. Pour Baye, ça ne fait aucune doute, c'est son plus beau rôle (avec La Chambre verte dans un autre registre). Pour Serrault, on commence à être habitué, le type est une bête de compétition en termes d'ambiguïté. Le plan final apaisé reste longtemps en tête car n’atténue en rien le climat dérangé qui parcourt le film, bien au contraire. A priori, En toute innocence est la dernière vraie réussite de Jessua.
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Re: Alain Jessua
Je le pense vraiment.
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Re: Alain Jessua
Alain Jessua vient de décèder, quelques mois après son hommage à la cinémathèque. RIP.
http://www.filmdeculte.com/cinema/actua ... 25040.html
Il me reste encore à voir Paradis pour Tous, Frankeinstein 90 et son tout dernier film. Traitement de Choc reste mon préféré
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Re: Alain Jessua
Petit hommage sur Devil Dead :
http://www.devildead.com/indexnews.php3?NewsID=10449
"La vie est bizarre"...un de ses derniers entretiens où il revenait sur sa carrière et ses enthousiasmes cinéphiles récents:
https://www.culturopoing.com/cinema/ent ... e/20170903
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"La vie est bizarre"...un de ses derniers entretiens où il revenait sur sa carrière et ses enthousiasmes cinéphiles récents:
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Dernière modification par mannhunter le 1 déc. 17, 12:52, modifié 1 fois.
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Re: Alain Jessua
Oui, c'est très bon , Traitement de choc. Mais contrairement à certains, je n'y vois pas vraiment une variation sur le thème du vampirisme . On utilise le sang des victimes, mais ça tient plus du film de savant fou que du film de vampires (si on veut le rattacher à un genre fantastique/SF). On en retrouve un des thèmes classiques : l'endroit apparemment bien sous tous rapports, avec savant réputé, mais où se déroulent en fait des expériences bizarres...
Le film est surtout une fable sur notre société, en particulier sur la façon dont les forts (et les privilégiés) utilisent les faibles. Et le fait que les victimes soient des travailleurs immigrés (ici portugais essentiellement, mais la nationalité est secondaire) ajoute une piste de réflexion supplémentaire.
Même chose d'ailleurs avec Paradis pour tous : derrière la fable fantastique, le film propose une réflexion sur notre société. Réflexion aussi présente (sans le fantastique) dans Les chiens.
Par contre, les couleurs du diable , c'est du fantastique sans sous-texte politique : c'est juste une histoire de pacte avec le Diable (par un peintre qui obtiendra ainsi le succès). Par ailleurs, ce n'est pas très bon ...
Le film est surtout une fable sur notre société, en particulier sur la façon dont les forts (et les privilégiés) utilisent les faibles. Et le fait que les victimes soient des travailleurs immigrés (ici portugais essentiellement, mais la nationalité est secondaire) ajoute une piste de réflexion supplémentaire.
Même chose d'ailleurs avec Paradis pour tous : derrière la fable fantastique, le film propose une réflexion sur notre société. Réflexion aussi présente (sans le fantastique) dans Les chiens.
Par contre, les couleurs du diable , c'est du fantastique sans sous-texte politique : c'est juste une histoire de pacte avec le Diable (par un peintre qui obtiendra ainsi le succès). Par ailleurs, ce n'est pas très bon ...
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
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Re: Alain Jessua
Je n'en ai pas un souvenir très favorable mais je serais curieux de le revoir, il y avait quand même encore une petite singularité dans le sujet...j'aime bien les anecdotes amusées de Jessua sur "Frankenstein 90" dans l'entretien posté au-dessus.aelita a écrit :Par contre, les couleurs du diable , c'est du fantastique sans sous-texte politique : c'est juste une histoire de pacte avec le Diable (par un peintre qui obtiendra ainsi le succès). Par ailleurs, ce n'est pas très bon ...
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Re: Alain Jessua
Je l'ai découvert lors de la rétrospective Jessua à la Cinémathèque, et, si ça ne verse pas dans le nanar risible, ce n'est franchement pas bon. Quelques bonnes idées (visuelles, ou dans le scenario) sauvent le film. Ca reste par ailleurs une histoire très classique de pacte avec le diable, qui tourne mal pour le contractant. C'est d'ailleurs ça qui m'avait attirée : voir ce que Jessua allait faire de ce thème pas neuf. il n'a pas été très inspiré cette fois. La vraie curiosité du film, c'est la présence du chanteur d'opéra Ruggiero Raimondi dans le rôle du diable.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
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Re: Alain Jessua
Passionnant, merci!
Dommage qu'il n'ait jamais pu realiser son film sur le retour du religieux dans notre société, son point de vue aurait été pertinent et caustique, assurement...
Dommage qu'il n'ait jamais pu realiser son film sur le retour du religieux dans notre société, son point de vue aurait été pertinent et caustique, assurement...