Requiem pour un massacre (Elem Klimov - 1985)

[Boubakar]

30 euros le dvd sur Amazon... d'accord...

a la fin de l'année dernière, le titre était devenu assez dur à trouver, j'avais dû m'abonner à Positif pour le choper !

[Major Tom]

Requiem pour un Massacre (Idi i smotri, "va et regarde", 1985) d'Elem Klimov

1943 en Biélorussie. Le très jeune Florya déterre avec frénésie un fusil dans un champ. Muni de cette arme indispensable, il obtient la possibilité de s'engager auprès de la résistance. Il refuse ainsi d’écouter sa mère, qu'il abandonne avec ses deux petites sœurs, et part avec les résistants. Tout semble aller pour le mieux pour le garçon qui voit cela comme une colo de vacances, et surtout il se lie d’amitié avec Glacha, une jeune paysanne qui flâne souvent avec les résistants. Mais lors d'un bombardement, les deux adolescents se retrouvent livrés à eux-mêmes.

Difficile de rester serein après ce film, de le juger avec du recul, la tête froide et l'esprit calme. Requiem pour un Massacre est avant tout un électrochoc. Représentation inédite de la folie des hommes dans un contexte extrême et barbare, perçue à hauteur d'enfant, Requiem pour un Massacre est d'un réalisme et d'une dureté sans limite. Le réalisateur ne se prive pas de nous raconter atrocement une histoire déjà atroce. Lorsque la machine humaine est bien lancée, chargée d'ignominie et de barbarie, les pulsions destructrices et les instincts primaires en éveil, rien ne peut l'empêcher de commettre l'innommable.

La première grande qualité de Requiem pour un Massacre est l'interprétation. Mais son originalité, qui donne davantage de puissance dramatique au film, réside dans ses gros plans de visages filmés de face. Le réalisateur montre son héros ainsi, à chaque étape de son voyage, jusqu'à ce qu'il ne reste de lui qu'une angoissante image blême figée dans l'épouvante. Au travers de ces traits cadavériques et noircis, le réalisateur cherche à concentrer dans ce personnage une humanité qui meurt peu à peu, subissant les abominations, et engloutie par ses penchants les plus sombres. L'interprétation du jeune Aleksei Kravtchenko est incroyable. Je crois que rarement un enfant-acteur a su proposer un tel visage aussi alarmant et criant de vérité.

Requiem pour un Massacre ne montre jamais les combats au front. C'est un film sur les ravages de la guerre, il se concentre sur le supplice des civils et la survie de l'adolescent Florya. Le film est parcouru d'images troublantes, des grandes séquences d'hystérie collective aux scènes plus intimistes, avec des personnages telle que cette conductrice agonisante au bord de la route, le sein nu, ou la jeune fille hagarde marchant les jambes écartées avec les cuisses en sang, la bouche déformée par une flûte de Pan. Le périple insensé de Florya à travers ce monde apocalyptique, peuplé de personnages tragiques, trouvera donc son point culminant lors de la très longue séquence où le personnage se retrouve dans un village investi par les nazis. Devenu leur otage, incapable d'intervenir, il doit assister à un massacre proprement terrifiant.

Le film passe par différentes formes artistiques pour représenter l'horreur et le chaos. Nous trouvons aussi bien le théâtre de l'absurde Dantesque, les visions horrifiques d'un cinéma d'épouvante, que l'utilisation du hors champ. Mais Requiem pour un Massacre désamorce tout ce que peut faire Hollywood sur la guerre: pas de héros, ni de larmoyantes scènes, ou de pathos. Retournant le coeur et l'estomac, le film est une expérience visuelle et traumatisante sans explication psychologique , un témoignage extrême sur les crimes atroces perpétrés en Biélorussie, ainsi que le récit initiatique d'un enfant propulsé en enfer. J'ai été soufflé par la qualité de la réalisation, ce réalisme cru sans compromis, l'histoire et la véritable plongée dans l'enfer pour le casting qui se ressent fortement à l'image, ou encore le non recours à la fiction plus ou moins débridée. Le réalisateur explore le fond de l'âme, comme on lance un seau dans un puits pour y remonter ce qu'on y trouve (la question est aussi de savoir si ce qu'on y trouve mérite d'être montré? éternelle polémique sur le droit ou non d'un cinéaste à montrer, filmer l'inmontrable). Ce que nous voyons est horrible, donne envie de hurler, et pourtant en se plaçant du point de vue de Florya, nous nous répétons: "Mais que pouvons-nous faire?"

[Jack Griffin]

Impressionnant mais trop pesant dans ses effets. J'avais été plutôt distant devant ce film.

[Nicolas Mag]

Impressionnant mais trop pesant dans ses effets.

pas selon moi et comme l'a souligné Major tom on est très loin des defauts des films hollywoodien sur cette periode, si tu trouves içi les effets pesant alors que dire du soldat ryan pour n'en citer qu'un

vu 3 fois depuis que je l'avais Film du Mois en 2005 et c'est devenu un de mes films préférés

[Jericho]

Pas vu le film, j'ai plutot envie de le découvrir, mai les screenshots du gamin donné par Major Tom, me freine un peu: on dirait qu'il surjoue comme un goret !

[Major Tom]

Pas vu le film, j'ai plutot envie de le découvrir, mai les screenshots du gamin donné par Major Tom, me freine un peu: on dirait qu'il surjoue comme un goret !

Non. Je disais d'ailleurs que le jeune acteur s'est considérablement investi, de façon incroyable mais surtout incroyablement juste. Compte-tenu de l'abomination qu'il subit, de ce dont il est témoin, et de ce que le réalisateur cherche à dire à travers ce corps malmené, avec son rictus d'horreur figé, puis de ce qu'il en reste enfin avec cette figure cadavérique noircie hallucinée, cette zombification physique est tout à fait logique. Mais de toute façon, il n'y a qu'une façon pour s'en rendre compte, c'est de voir le film.

[Beck]

30 euros le dvd sur Amazon... d'accord...

Il est à la fnac pour 20 euros...

[Major Tom]

30 euros le dvd sur Amazon... d'accord...

Il est à la fnac pour 20 euros...

Oui, je l'ai eu pour 19,99 en le commandant sur amazon, mais on peut l'avoir en occas'.

[julien]

Oui mais en occas' y'a pas l'autocollant dvd classik dessus.

[Beck]

Oui mais en occas' y'a pas l'autocollant dvd classik dessus.

Tout à fait !

[Sybille]

J'ai découvert ce film en février ou en mars. Son visionnage me faisait un peu peur au gré des commentaires que j'avais lu sur Classik justement, et au final j'avoue n'avoir pas été très impressionnée, ni horrifiée, même si le film est indubitablement bon. Ce sont les dernières minutes que j'ai préférées (en grande partie grâce à Mozart d'ailleurs). C'est vrai que le jeune garçon joue très bien, je me souviens tout particulièrement de son regard halluciné sur la flaque d'eau, encore une fois à la fin.

Idi i smotri / Requiem pour un massacre4
Elem Klimov (1985) :

"Requiem pour un massacre" prend place dans la Biélorussie du début des années 1940, alors en plein conflit mondial. On suit un adolescent qui, à l'instar de beaucoup de jeunes garçons, considère la guerre comme un amusement, une aventure à vivre, quelque chose d'exaltant auxquel il faut prendre part. En quittant son village et sa famille pour être enrôlé parmi les partisans russes, il va très vite prendre conscience de toutes les atrocités de la guerre. Le film oppose une première partie à l'atmosphère encore relativement sûre, fraternelle grâce à la camaraderie bourrue qui règne dans la forêt où vivent et s'organisent les soldats, au choc d'un premier bombardement allemand, suivi d'une fuite désespérée pour leur échapper, se cacher, et l'on bascule alors dans une seconde partie où l'horreur devient de plus en plus grande. Si le film est doté d'une mise en scène recherchée, à l'aspect parfois symbolique, Klimov privilégie également une forme plus documentaire, tout aussi travaillée et parfaitement réaliste. Ainsi, la description du massacre des habitants d'un village par un commando nazi. Une séquence qui s'est un peu trop éternisé à mon goût, non parce que j'en ai trouvé le visionnage insupportable, mais parce que c'était vraiment long, le fait étant qu'on sait immédiatement comment ça va finir (et pourtant j'ai conscience que la durée de la scène est légitime, que sa longueur est justifiée). Le film, même s'il n'a pas tout à fait été le choc attendu, est néanmoins excellent. 7/10

[Demi-Lune]

Durant la première heure, je m'inquiète : est-ce ça, le film que beaucoup d'entre vous m'avaient conseillé ?
Un rythme d'une lenteur incroyable, un gamin au jeu complètement crispé et agaçant, une quasi absence d'histoire à raconter... et lorsque le cinéaste s'attarde sur une cigogne qui marche dans la forêt, je crois être tombé sur un film perdu de Terrence Malick.
Mais la longue marche de l'horreur qu'orchestre Klimov nécessitait sans doute un prologue et une introduction volontairement nonchalantes pour mieux entraîner progressivement le spectateur, à l'instar du jeune protagoniste principal, dans le cauchemar. Pris avec recul, les moments d'inaction dans la forêt, en compagnie de la blonde Gratcha, sont finalement autant de moments d'insouciance et d'innocence que le spectateur, secoué par les séquences édifiantes du dernier tiers, en vient presque à regretter.
Sans concession, d'une brutalité parfois inouïe (il faut être bien accroché pour affronter la scène de l'incendie), Requiem pour un massacre, dont le titre alternatif me paraît plus pertinent - Va et regarde - est une plongée apocalyptique dans la barbarie humaine que la mise en scène de Klimov (parfois un peu hésitante mais globalement maîtrisée, notamment dans son utilisation du format 1.33) rend insoutenable. Barbarie humaine que l'on se prend, comme le gamin, à rêver qu'elle n'ait jamais eu lieu, dans ce qui est peut-être la scène la plus puissante du film. Cette lecture de la Seconde Guerre mondiale côté russe est un témoignage nécessaire des atrocités commises par les SS en Union soviétique. Pour voir que le film est tourné dans les 80's de l'autre côté du Rideau de fer, je trouve quand même ce traitement hyper-réaliste sacrément couillu.
Si l'on veut chipoter, on relèvera deux ou trois détails embêtants : matériel militaire parfois non conforme, un début assez confus, ou des problèmes de continuité au montage (Florya et Gratcha qui en bavent dans la vase, prennent pied sur l'île, et retournent finalement dans le marais... mais il n'y a plus de vase du tout ! Et pourquoi Gratcha ne dit-elle pas dès le début que les villageois se sont faits massacrés ? Cela leur aurait évité bien des soucis !). J'ai également du mal à comprendre l'intérêt du plan-séquence final à la Steadycam dans les bois.
Mais l'uppercut est là, vivace, se moquant pas mal de ces détails. Le périple fut fastidieux, mais ce que le réalisateur avait à nous faire voir méritait bien toute cette peine.

[AtCloseRange]

matériel militaire parfois non conforme

C'est vrai que ça craint...

[Demi-Lune]

matériel militaire parfois non conforme

C'est vrai que ça craint...

Puisque tu ne retiens que ça de mon message, autant y répondre : voir un soldat SS tirer avec un fusil anglais, désolé mais pour le coup, ça ne fait pas très sérieux. Disons que moi, en tout cas, c'est le genre de détail qui m'interpelle. Fin du HS.

[AtCloseRange]

C'est vrai que ça craint...

Puisque tu ne retiens que ça de mon message, autant y répondre : voir un soldat SS tirer avec un fusil anglais, désolé mais pour le coup, ça ne fait pas très sérieux. Disons que moi, en tout cas, c'est le genre de détail qui m'interpelle. Fin du HS.

Y avait un drapeau dessus?

Blague à part, j'avoue surtout que c'est l'expression "matériel militaire non conforme" qui m'a joliment rappelé mes classes.
Comme tu dis, fin du HS.