Les Fils de l'homme (Alfonso Cuaron - 2006)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Ubik
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Message par Ubik »

Je l'aurai compris si on parlait du Snake Eyes de De Palma. Si on parlait du Smokin Aces de Carnahan. Du Strange Days de Bigelow. J'en passe. Je comprends ce que tu te tentes de m'expliquer mais je pense sincèrement que mise en scène impressionnante ne rime pas toujours avec esbrouffe ou exercice de style. Au contraire. Le très faible nombre de plans (un reccord pour une production américaine d'ailleurs) du film de Cuaron m'aurait plutôt donné une impression d'épure que d'esbrouffe malgré les extraordinaires plans séquences. La mise en scène de ce film est à ce point sublime qu'elle est formellement à tomber par terre et sur le fond à genoux devant le sujet. Je crois n'avoir jamais assisté à si sobre mais si élégant feu d'artifice depuis très longtemps d'ailleurs...
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Colqhoun
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Message par Colqhoun »

Jordan White a écrit :Hormis Clive, Michael Caine et la porteuse de l'enfant, quelles autres figures marquantes retient-on, notamment au niveau des personnages secondaires ?
Julianne est à part. Son charisme suffit
Donc finalement, les personnages véritablement importants du film sont tout de même bien développés. Et l'ambiance glaciale dont tu parles (et que je n'ai pas vu... mais soit) ne tue en rien l'attachement que l'on pourrait avoir pour eux. Même les seconds rôles, Syd, Luke, Marichka ou Miriam sont admirablement développés et ne sont jamais présentés de manière uniforme et lisse, chacun présentant différentes facettes qui ont vite fait d'en faire des personnages complets.

Et je ressens les plans-séquences principaux comme de grandes respirations. On retient son souffle pendant plusieurs minutes pendant que Cuaron fait monter la pression puis enfin, on relâche tout et l'on apprécie totalement et pleinement l'acalmie qui suit (autant avec le plan intérieur de la voiture que celui de la guerilla urbaine). Plus que de la simple démonstration technique, j'y vois surtout la volonté de prendre le spectateur au cou pour mieux le relâcher ensuite.
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Eusebio Cafarelli
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Message par Eusebio Cafarelli »

Jordan White a écrit :
Ubik a écrit :Difficile de s'attacher aux personnages ? :shock:
En raison de l'ambiance générale, glaciale, apocalyptique. Ce n'est pas que j'attendais une soirée disco ou le royaume de Candy (ou il y a aussi des méchants) mais une plus grande profondeur dans le traitement des personnages. Hormis Clive, Michael Caine et la porteuse de l'enfant, quelles autres figures marquantes retient-on, notamment au niveau des personnages secondaires ?
Julianne est à part. Son charisme suffit
Tout aussi surpris qu'Ubik.
Je prendrai juste un exemple, pour souligner à quel point la forme me semble servir le fond : la compagne de Michael Caine.
Elle est paralysée, une sorte de légume du point de vue cérébral. On le voit à l'écran. Comment Cuaron nous l'explique-t-il, comment donne-t-il de la profondeur au personnage qui en devient attachant ? Par un plan-séquence et un lent travelling (de gauche à droite, de mémoire) sur des cadres et des photos au bord d'une fenêtre, qui racontent toute l'histoire de cette femme et expliquent les raisons de son état. Même méthode dans le camp dans l'appartement des Russes mais là la caméra erre sur des souvenirs qui ne sont pas dans l'ordre, qui créent une ambiance.
La profondeur des personnages est souvent dans la profondeur du champ et les détails qui s'y trouvent : ainsi dans la pièce couverte de journaux, qui racontent l'histoire passé du monde où se déroule l'action, et les raisons du mécontentement de ceux qui ont enlevé Owen.
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Zelda Zonk
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Message par Zelda Zonk »

A propos du DVD de ce film, faut-il absolument opter pour le Collector ou l'édition simple suffit-elle ?
En clair, que valent les suppléments ?
Merci :wink:
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-Kaonashi-
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Message par -Kaonashi- »

Jordan White a écrit :Le portrait du Londres de 2027 ravagé par la guerre civile, avec ses indications visuelles et sonores agressives (les campagnes publicitaires qui n'auraient pas dépareillé dans un régime dictatorial) tendrait ou voudrait tendre à démontrer que dans le futur, en gros dans vingt ans, c'est-à-dire demain, la population sera parquée, surtout celle qui est clandestine dans des camps où l'immondice est devenue reine, laissée pour compte. Les infrastructures routières seront désastreuses, par contre il y aura un avertisseur de choc avant les collisions, les gardes royales seront toujours à cheval et le ciel sera lourd.
Là où tu te trompes, c'est que tu mets tout ça au futur, alors que le film met plus son sujet au conditionnel : il y a un postulat de départ qui tient complètement de la fiction, donc le film tient plus, en ce sens, de la science fiction que de l'anticipation.
Jordan White a écrit :Clive Owen est impeccable, Julianne Moore en leader ...........,
Tu peux mettre en spoiler ce que j'ai remplacé par des points ? Dans un de tes messages, par la suite, tu as mis la même info en spoiler...
Jordan White a écrit :et le film montre un monde dévasté dans lequel certains collectionnent tout de même des objets de qualité, ou plus précisément des reliques d'un temps passé qui n'existent plus (la copie de Guernica accrochée au mur de l'artiste).
Le personnage interprêté par Danny Huston n'est pas artiste, il recherche, rassemble et collectionne des oeuvres d'art en tout genre (et non des copies) pour le compte de régime en place. C'est pour ça que Theo va le voir : c'est non seulement son frère (ou un cousin ou un ami, je ne me rappelle plus), mais en plus il peut lui avoir des papiers officiels pour Julian & cie.
Autre chose concernant l'immigration : ne peut-elle être qu'assimilée à la clandestinité et donc à l'illégalité ? Le réal nous montre surtout celle qui est concernée par la clandestinité et là encore j'ai trouvé sa patte lourde. Tout ce qui est militaire, policier est ici traité comme un mal incurable, une forme d'agression constante.
Justement dans ce monde chaotique, et dans un pays qui a réussi à maintenir un semblant d'ordre (à base de truc du style Patriot Act, on le devine...), tout ce et tous ceux qui viennent de l'étranger est dangereux. L'extrait de message télé qu'on voit au début (images du monde à feu et à sang) souligne l'idée d'une Angleterre seul pays où ça va encore bien, et donc à protéger de l'extérieur coûte que coûte.
Ce n'est donc pas le film qui qui amalgame immigrés et illégalité, mais bien le monde représenté dans le film.
Ca m'a vraiment gêné en tout cas, tout comme l'image de la manifestation des arabes armés de kalachnikov et criant Allah Akbar ! car j'avais l'impression qu'on assimilait cela à des milices plus dangereuses encore que les groupuscules activistes.
Là aussi, je pense qu'il y a une idée derrière cette apparition saisissante : les groupuscules activistes en tout genre apparaissent et en tout cas se fortifient et deviennent plus puissants. Le chaos entraîné par la répression sans distinction est un terreau fertile pour les extrêmismes en tout genre. En tout cas c'est ce que je comprends à travers les scènes dans la ville-camp de prisonniers, et à travers ces images horribles de réfugiés et hors-la-loi enfermées dans des cages dans les rues, sur les quais de gare, etc.
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Melmoth
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Message par Melmoth »

cinephage a écrit :il y a des gens qui préfèrent une caméra plus discrète. Dans Children of Men, la caméra n'est pas discrète. Je disais juste que je comprenais qu'on critique ce coté "m'as-tu-vu" de la mise en scène, même si pour moi, elle est plutôt une qualité qu'un défaut.
Pour que l'on tombe dans le "m'as-tu-vu" il faudrait que les aspects virtuoses de la mise en scène soient gratuits. Ce n'est pas le cas ici.
Tout ce qui est militaire, policier est ici traité comme un mal incurable, une forme d'agression constante.
C'est un des postulats du film, je ne vois pas pourquoi il faudrait se sentir obligé de nuancer, de traiter son sujet comme une dissertation de lycée avec obligatoirement thèse-antithèse et synthèse.
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MJ
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Message par MJ »

C'est marrant parce qu'autant c'est un film virtuose, autant ça ne me viendrait jamais à l'esprit de traiter Children of Men de "m'as-tu vu". Je me suis senti totalement immergé, et ce n'est qu'après coup que la mise en scène m'a impressioné. Avec Elephant, c'est l'un des films de ces dernières années où le procédé du plan-séquence est le plus pertinent.
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Billy Budd
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Message par Billy Budd »

Pourquoi - je ne pose la question que pour Children of men ?
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Tom Peeping
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Message par Tom Peeping »

Pour ma part, j'ai adoré ce film vraiment brillant dans son scénario et son exécution. La seule chose qui m'aie fait un peu tiquer
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c'est le fait que la sauveuse de l'Humanité soit une african-american (noire pour les non-anglophones). Un peu trop politiquement correct à mon goût. J'aurais aimé que ce fut une bonne française.
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Message par joey »

Tom Peeping a écrit :Pour ma part, j'ai adoré ce film vraiment brillant dans son scénario et son exécution. La seule chose qui m'aie fait un peu tiquer
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c'est le fait que la sauveuse de l'Humanité soit une african-american (noire pour les non-anglophones). Un peu trop politiquement correct à mon goût. J'aurais aimé que ce fut une bonne française.
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Dans mes souvenirs, c'est une réfugiée d'un pays africain directement, pas une intégrée, donc pas une "african american" comme tu dis, d'autant plus que le film se passe en Angleterre. C'est quand même une différence énorme.
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Billy Budd
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Message par Billy Budd »

Tom Peeping a écrit :Pour ma part, j'ai adoré ce film vraiment brillant dans son scénario et son exécution. La seule chose qui m'aie fait un peu tiquer
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c'est le fait que la sauveuse de l'Humanité soit une african-american (noire pour les non-anglophones). Un peu trop politiquement correct à mon goût. J'aurais aimé que ce fut une bonne française.
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Je trouve cela plutôt incorrect en ce qui me concerne
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Message par MJ »

Nikita a écrit :Pourquoi - je ne pose la question que pour Children of men ?
Pour la simple et bonne raison que je n'y ai pas vu une volonté que je t'en jette facile à la gangsta MTV mais une manière de plonger complètement le spectateur dans l'action, - qui se serait retrouvé bien plus fragmenté avec un montage plus cut dans les scènes de tension. Un peu l'anti-Bourne en somme, et je me retrouve beaucoup plus dans cette démarche. Quoiqu'aucun effet n'est bon, mauvais ou valable en soi.
Pour Elephant, je me doutais bien que tu ne poserais pas la question!
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Eusebio Cafarelli
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Message par Eusebio Cafarelli »

-Kaonashi Yupa- a écrit :
Ca m'a vraiment gêné en tout cas, tout comme l'image de la manifestation des arabes armés de kalachnikov et criant Allah Akbar ! car j'avais l'impression qu'on assimilait cela à des milices plus dangereuses encore que les groupuscules activistes.
Là aussi, je pense qu'il y a une idée derrière cette apparition saisissante : les groupuscules activistes en tout genre apparaissent et en tout cas se fortifient et deviennent plus puissants. Le chaos entraîné par la répression sans distinction est un terreau fertile pour les extrêmismes en tout genre. En tout cas c'est ce que je comprends à travers les scènes dans la ville-camp de prisonniers, et à travers ces images horribles de réfugiés et hors-la-loi enfermées dans des cages dans les rues, sur les quais de gare, etc.
+1
J'ajouterai que, de mémoire, on voit ensuite passer des Français avec un drapeau, chantant (pas certain ceci dit, peut-être que je me trompe et qu'ils ne chantent pas) la Marseillaise. Même message : la répression entraîne les révolutions.
La manifestation arabe reprend des images d'aujourd'hui, tout comme à l'arrivée dans le camp on voit des images reprises des tortures d'Abu Graib (les photos faites par les GI), ou alors il inverse des images (Allemands prisonniers s'inquiétant de leur sort, à moins qu'il ne s'agisse de Juifs allemands).
Pour moi c'est un film de speculative fiction, comme Soleil vert, plus que de science-fiction. Il décrit un futur proche et tout à fait plausible.
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Message par patogaz »

Eusebio Cafarelli a écrit : ...
Je prendrai juste un exemple, pour souligner à quel point la forme me semble servir le fond : la compagne de Michael Caine.
Elle est paralysée, une sorte de légume du point de vue cérébral. On le voit à l'écran. Comment Cuaron nous l'explique-t-il, comment donne-t-il de la profondeur au personnage qui en devient attachant ? Par un plan-séquence et un lent travelling (de gauche à droite, de mémoire) sur des cadres et des photos au bord d'une fenêtre, qui racontent toute l'histoire de cette femme et expliquent les raisons de son état.
cette séquence est superbe en effet !
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-Kaonashi-
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Message par -Kaonashi- »

Tom Peeping a écrit :Pour ma part, j'ai adoré ce film vraiment brillant dans son scénario et son exécution. La seule chose qui m'aie fait un peu tiquer
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c'est le fait que la sauveuse de l'Humanité soit une african-american (noire pour les non-anglophones). Un peu trop politiquement correct à mon goût. J'aurais aimé que ce fut une bonne française.
Elle a quand même un sacré accent populo anglais, ton "african-american"...
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Et franchement, je ne vois pas en quoi c'est "politiquement correct", de faire d'une jeune femme noire le dernier espoir du l'humanité. C'est le genre de réflexion qui ne me viendrait pas à l'esprit.
Dernière modification par ed le 26 mars 08, 12:02, modifié 1 fois.
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