Shôhei Imamura (1926-2006)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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k-chan
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Message par k-chan »

-Kaonashi Yupa- a écrit :Il me semble que dimanche prochain, à 12h, Arte ou France 5 va repasser le "Cinéaste de notre temps" consacré à Imamura. À vérifier.
Enfin ça reste un hommage bien mince. :?
Est-ce ce drôle de documentaire où on le voit chez une coiffeuse ?
Margo

Message par Margo »

L'Anguille est programmé dans le cadre du traditionnel Festival de cinéma en plein air de la Villette. Cette année, thématique "Des bêtes et des hommes".

Le calendrier précis n'a pas l'air d'avoir été publié encore sur le web, mais il est dans le numéro des Inrocks de cette semaine.
tewoz
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Message par tewoz »

Margo a écrit :L'Anguille est programmé dans le cadre du traditionnel Festival de cinéma en plein air de la Villette. Cette année, thématique "Des bêtes et des hommes".
Cool!
Margo a écrit : Le calendrier précis n'a pas l'air d'avoir été publié encore sur le web, mais il est dans le numéro des Inrocks de cette semaine.
Il y a quoi d'autre au programme???
Vous venez de lire un message de tewoz, ca vous a pas rendu plus intelligent, mais ca aurait pu...
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Margo

Message par Margo »

tewoz a écrit :Il y a quoi d'autre au programme???
Je ne me souviens plus trop trop. De mémoire, il y a le dernier Terry Gilliam, une soirée Tenue de plongée exigée avec Life Aquatic + un autre film, Au hasard Balthazar, La mouche, Les oiseaux, Out of Africa, Master and Commander, Matador, Princesse Mononoké et plein d'autres trucs. Si qq'un a les Inrocks sous la main, il dira ça mieux que moi, sinon le programme devrait bientôt être publié sur le web j'imagine...

Souvenir gamin d'une projection d'Out of Africa en plein air, avec les scèns nocturnes qui se mêlaient au ciel étoilé, ça m'avait scotché. Je vais essayer de me refaire ça, surtout que je n'ai jamais revu le film depuis sa sortie...
Nestor Almendros
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Message par Nestor Almendros »

LA VENGEANCE EST A MOI (1979)

Emprunté presque au pif, surtout motivé par la mention "film noir" sur la jaquette, je m'attendais à un poloar dans la lignée du CHIEN ENRAGE de Kurosawa. D'abord première surprise: c'est un film des 70's, en couleurs.

Passé ce détail, la surprise vient du traitement de l'histoire. La structure est défragmentée, déconstruite. On nous propose plusieurs récits de différentes époques, motivées par l'interrogatoire de police en tronc commun. Ce début de film m'a paru un peu brouillon, dans le sens où j'étais un peu perdu en passant d'une époque à l'autre. Mais très vite, le récit se stabilise, devient plus fluide, en quittant les scènes de police (présent du récit) pour se concentrer sur le parcours chronologique du tueur.

Je ne connais pas Imamura (juste vu LA BALLADE DE NARAYAMA il y a quelques années) et le découvre donc. Ca commence très fort. J'ai vraiment beaucoup aimé. Ce portrait glacé du tueur et de son environnement est tout simplement captivant. L'angle utilisé reste toujours très sobre, réaliste, sans jamais donner de l'empathie à ce personnage dont on suit pourtant la vie. On observe ses gestes, on essaie de comprendre ce qui le motive. Il tue et escroque pour de l'argent, mais il ne faut pas oublier qu'il se sait traqué, recherché par la police, qu'il change donc constamment d'apparence pour rester caché. Ses nomreuses escroqueries lui permettent de gagner du temps et du confort dans sa fuite. Il reste toutefois un tueur froid et presque instinctif, sans remords.
Ce qui est surtout prenant, ce sont les portraits des personnages qui l'entourent, qui ne connaissent pas sa véritable identité et avec qui le spectateur ressent de l'empathie car il sait qu'ils sont floués quelque part. Mais il y a aussi un désespoir prenant dans ces personnages. Que ce soient la femme aubergiste mécontente de sa vie (mais amoureuse sincère) ou la liaison platonique inassouvie entre le père du tueur et sa femme. Au-delà de l'histoire policière, c'est surtout l'aspect dramatique qui m'a pris au coeur, si je puis dire, bien que les aspects de "genre" soient aussi remarquables. Il n'y a qu'à voir l'impact des scènes de meurtre d'un réalisme dérangeant, qui m'ont fait penser aux réflexions d'Hitchcock sur LE RIDEAU DECHIRE dans lequel Paul Newman met un certain temps à tuer sa victime. Dans ce film également, il ne suffit pas d'un coup de couteau pour finir le travail: on voit les coups de couteau répétés, les giclées de sang. C'est très réaliste, très long. On sort ainsi du cadre de la fiction pour aller vers une représentation presque documentaire.

Ce qui m'a surpris, également, car je n'attendais rien de particulier et encore moins cela, c'est la présence importante du sexe dans le film. Sans aller dans des démonstrations trop poussées, l'acte sexuel y est toutefois très présent. Et pas seulement en tant que plaisir, puisque (comme l'indique Tesson dans sa préface) ils s'assimile souvent à la violence du film, car c'est parfois une violence contre les femmes (prostitution et surtout viol).
Il y a du sexe mais aussi de la sensualité. L'une des scènes qui m'a le plus marqué est celle du bain thermal et des première avances de la femme du tueur envers son beau-père. Une scène extrêmement délicate, au regard de la relation qui unit les deux personnages.

Je ne saurais trop quoi dire d'autre, sinon que j'ai beaucoup aimé. Et comme par hasard, j'avais aussi beaucoup apprecié MEMORIES OF MURDER qui garde une filiation certaine avec LA VENGEANCE EST A MOI.
pascal45
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Message par pascal45 »

Nestor Almendros a écrit : Passé ce détail, la surprise vient du traitement de l'histoire. La structure est défragmentée, déconstruite. On nous propose plusieurs récits de différentes époques, motivées par l'interrogatoire de police en tronc commun. Ce début de film m'a paru un peu brouillon, dans le sens où j'étais un peu perdu en passant d'une époque à l'autre.
Certes on s'y perd dans les 1ers instants, mais Imamura voulait surement éviter de rendre le personnage positif, et marquer dès le départ que sa cavale était sans issue et le mènera uniquement à l'échafaud. La ficelle de la lampe en forme de corde de pendaison le rappelle rapidement, sa destinnée est tracée.
On se détache alors du héros comme celui-ci se détache de sa capture, chantonnant dans la voiture ou s'inquiétant de ses conditions de détention, pour suivre alors son histoire.
bruce randylan
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Message par bruce randylan »

Eijanaika ( 1981 )

1ère fois que Imamura me deçoit :cry:

Le sujet lui tenait à coeur depuis de longue année et il a eut le budget de ses ambitions pour livrer une fresque historique visuellement parfaite ( les scène de foule sont impressionnante ) mais pêchent plus au niveau de la narration. Les grands boulversement politiques et sociaux de l'époque qu'il décrit l'oblige à consacrer une grande partie de sa fiction aux intrigues du pouvoir et guerres de clans mais ils ne semblent pas à l'aise et la succession de scènes n'est pas du grande fluidité. Ca plus le grand nombre de personnage qu'on suit à la fois et qu'on abandonne brutalement, m'ont empeché de rentrer dans le film.
C'est dommage car Imamura a un amour pour les gens simples, les paysans à la sexualité épanouie qui donne lieu à de de trés bonnes séquences.
Il aurait pu (du ?) être du beaucoup plus collé à ces gens et ne prendre que leur point de vue pour expliquer le background. La longue séquence finale qui se met uniquement de leur coté est justement excellente. A la fois drôle, fraiche et angoissante, elle sauve le film in-extremis de l'ennui poli et donnerait presque l'envie de retourner au film plus tard.
Sinon, rien à redire à sa réalisation même. De longs plans qui capturent l'essentiel d'une vérité historique associé à une photographie parfois audacieuse ( certains plans sont dans un noir quasiment total )
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
homerwell
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Pluie Noire (Shohei Imamura 1989)

Message par homerwell »

Pluie Noire de shohei Imamura

Formidable plaidoyer contre la bombe atomique, le film de Imamura sonde les effets pervers de la radiation sur la population japonaise.
L'histoire se déroule dans les années 50. On découvre les effets directs du bombardement à travers des flash backs dont l'intensité n'a d'égale que le calme qui règne dans le petit village seulement troublé par les élucubrations d'un traumatisé par les combats.
Les scènes de vie intime sont nombreuses, les repas ponctués par les émissions de radio et la remise à l'heure de la pendule, le bain avec son système de chauffage, les soins apportés aux irradiés, rythment la narration et le quotidien des malades.
Mais la guerre vient réclamer son tribut et les personnages disparaissent les uns après les autres emportés par « l'éclair ».
Ajouté à cela le poids des convenances sociales, des croyances et des traditions encore bien présent malgré le discours de défaite de l'empereur, (même les mariages arrangés sont pervertis par les effets de la bombe !), et j'ai le sentiment d'une peinture très réaliste dans cette chronique du Maître Japonais.
Film incontournable !
Alligator
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par Alligator »

Hateshinaki yokubo (Désir inassouvi) (Shohei Imamura, 1958) :

http://alligatographe.blogspot.com/2010 ... okubo.html

_______________

Un des premiers Imamura, réalisateur que j'aime énormément. Ici, il s'attèle à un genre très spécifique, le film de casse.
Une bande hétéroclite essaie de récupérer un trésor de guerre enterré sous la boutique d'un boucher dans un quartier promis à la démolition. Ils ouvrent une fausse agence immobilière à quelques mètres et creusent un tunnel censé les relier au sous-sol de la boucherie.

Sujet basique, traditionnel du cinéma de divertissement auquel Imamura n'apporte finalement que très peu si ce n'est un savoir-faire formel assez remarquable. Le cinémascope noir et blanc sert une mise en image très léchée. Les éclairages montrent très astucieusement la fièvre qui gagne de plus en plus ces êtres avides. Souvent j'ai pensé au "Trésor de la Sierra Madre" de Huston. Les personnages peu scrupuleux au départ perdent de plus en plus le contrôle d'eux même, le peu d'humanité qu'ils avaient. Tous, plus ou moins, sont des caricatures, des illustrations de ratés, la lie de la société : le violent, la pute, le lâche, le fourbe et le paria.

Si le scénario s'en était tenu à cela, le film aurait paru plus équilibré. Là, il est malheureusement alourdi par une histoire d'amourette parallèle et ultra conventionnelle dont les personnages n'apportent pas grand chose si ce n'est une part de comique forcément malvenue dans un film à l'aspect noir.

Le film devient passionnant sur la toute fin, quand les protagonistes s'approprient enfin le magot et que le film s'emballe. Jusque là le rythme était un peu poussif et le ton indécis : policier ou comédie romantique, on ne savait trop vers où l'on voulait nous amener, attente préjudiciable.
beb
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par beb »

...
Dernière modification par beb le 30 mars 23, 20:11, modifié 1 fois.
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Watkinssien
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par Watkinssien »

beb a écrit :Pas très naphta mais le topic existe .....

Dr Akagi (Kenzo Sensei - 1998)
J'aurais bien aimé que ce soit le dernier film d'Imamura. Je n'ai pas tellement accroché à "De l'eau tiède sous un pont rouge".
Comme quoi, moi j'adore son dernier film ! :wink:
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Novembre 2010

Message par cinephage »

Intentions of Murder, de Shohei Imamura (1964)

J'entame dans le désordre la découverte du coffret Criterion Imamura, avec ce film long et déroutant, qui se révèle d'une richesse assez phénoménale. Brodé autour d'un récit policier assez classique, quoiqu'atypique, le réalisateur nous dépeint conjointement une lutte entre la corporéité (une femme terre-à-terre, en qui luttent l'instinct et les codes de la société) et l'esprit (un mari bibliothécaire), un récit de famille hantée (du poids des ancêtres sur la vie contemporaine), une histoire d'amour et de jalousie, un fait divers...

Bref, on est vite désarçonné par la diversité des approches possibles, et qui fonctionnent toutes, pour appréhender le film, qui reste très ouvert. Si l'on y ajoute les qualités formelles d'un film en scope dans un beau noir et blanc, d'une caméra portée élégante et toujours pertinente dans sa description du japon des années 60 (notamment dans toutes les scènes de train), on obtient un film passionnant qui aura sans doute une belle durée de vie, et que je reverrai certainement avec plaisir dans quelques années.

8,5/10
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par cinephage »

Cochons et cuirassés (Pigs and Battleships - Buta to gunkan)

Sorti en salles en France sous le merveilleux titre de Filles et gangsters, ce film apparait comme une description sordide d'un Japon dominé par l'occident, et, plus encore, par ses richesses.
Triste récit d'amour entre une petite frappe fils de pécheur et une fille de bordel (mais, dans ce milieu, toute fille un tant soit peu jolie est condamnée à le devenir, il y a trop à gagner pour qu'on puisse se permettre de faire la fine bouche). L'un s'engage de plus en plus dans la spirale de la magouille, de la veulerie des gangs yakuza qui n'ont plus que faire des anciens codes d'honneur, et souhaitent doubler leur patron tout en entendant que leurs inférieurs les respectent. L'autre rêve d'évasion, d'une vie honnête mais dure, à l'usine, mais peine à échapper au déterminisme qui veut faire d'elle une femme à soldats.

Tout le film tourne autour d'un trafic de porcs destinés aux navires américains faisant escale, ce qui donne son titre au film. Mais c'est aussi une jolie métaphore de ces hommes avilis par la soif de l'argent, qui n'en finissent pas de se vendre ou de vendre les leurs. Le final est d'une belle force, et tout le film est mis en scène avec élégance, pour un cadrage d'une efficacité remarquable.

Décidément, après Désirs meurtriers, Imamura se confirme comme un cinéaste de grand talent, un perturbateur qui rue dans les brancards (les valeurs japonaises en prennent pour leur grade) et met à nu son pays. Enfin, sa façon de filmer, sensuelle, terrestre, de rapprocher les animaux des hommes (on parle d'un bestiaire d'Imamura, et, de fait, les animaux sont souvent plus éloquents que les hommes, dans son cinéma). Vivement le prochain ! :D
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shaman
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par shaman »

cinephage a écrit :Vivement le prochain ! :D
Bon timing, en sachant qu'un livre français sur Imamura s'apprête à sortir en Janvier 2011.
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gnome
Iiiiiiil est des nôôôôtres
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Re: Shohei Imamura (1926-2006)

Message par gnome »

Intéressant, ça... :D
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