Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Votre "épisode" préféré ?

Décalogue, 1 (Un seul dieu tu adoreras)
4
18%
Décalogue, 2 (Tu ne commettras point de parjure)
0
Aucun vote
Décalogue, 3 (Tu respecteras le jour du seigneur)
0
Aucun vote
Décalogue, 4 (Tu honoreras ton père et ta mère)
1
5%
Décalogue, 5 (Tu ne tueras point)
9
41%
Décalogue, 6 (Tu ne seras pas luxurieux)
6
27%
Décalogue, 7 (Tu ne voleras pas)
2
9%
Décalogue, 8 (Tu ne mentiras pas)
0
Aucun vote
Décalogue, 9 (Tu ne convoiteras pas la femme d'autrui)
0
Aucun vote
Décalogue, 10 (Tu ne convoiteras pas les biens d'autrui)
0
Aucun vote
 
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El Dadal
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par El Dadal »

Narrativement, il y a bien un ordre chronologique, du 1 au 10 (la protagoniste du 2, enceinte jusqu'au cou dans le 5, le malheur du père du 1 lisible dans le 3, le concept même du 2 décortiqué en cours magistral dans le 8 etc), et Kieslowski ayant réalisé le 1er en dernier, il y met un précipité des choses à venir. Je dirai aussi que l'humeur étant différente dans chaque, l'harmonisation de l'ensemble a tout intérêt à être maintenue (comme la tracklist d'un album, pensée comme telle).
Bien entendu, chaque film étant indépendant, rien ne t'empêche de faire ta tambouille. Qui sait, tu y verras peut-être des éléments nouveaux ?
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-Kaonashi-
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par -Kaonashi- »

Flol a écrit : 20 avr. 21, 10:50 Le Décalogue 9 : Tu ne convoiteras pas la femme d'autrui : 8/10
J'ai adoré. Cette histoire d'adultère pleine d'amour, de frustration et là encore de voyeurisme (scène géniale vue du point de vue du mari à travers un placard), se terminant par une belle note d'espoir, m'a happé du début à la fin.

Le Décalogue 10 : Tu ne convoiteras pas les biens d'autrui : 7/10
On finit donc sur un touche plus légère, plus comique (même si on n'est pas non plus mort de rire, hein), mais ça fait du bien de terminer cette oeuvre gigantesque sur une note plus douce.
J'ai bien évidemment été touché par la relation qui unit ces 2 frères, d'ailleurs interprétés par 2 comédiens se ressemblant vraiment pas mal, ce qui aide encore un peu plus à croire en leur
La magnifique scène finale vient conclure parfaitement, non seulement le film, mais aussi les 9 autres qui ont précédé.

Pour résumer : je trouve ça incroyable comme avec peu de choses, simplement avec une mise en scène soignée, une musique scintillante (particulièrement mise en valeur dans l'épisode 9) et des interprètes tous plus excellents les uns que les autres, le cinéma de Kieslowski me touche. Il y a comme une évidence dans son cinéma qui, sans l'air d'y toucher, parvient à mettre le doigt sur des choses très justes et sait être émouvant sans jamais tomber dans le pathos.

Allez hop, mon classement final des 10 :
5. Tu ne tueras point
1. Un seul Dieu tu adoreras
6. Tu ne seras pas luxurieux
9. Tu ne convoiteras pas la femme d'autrui
8. Tu ne mentiras pas
3. Tu respecteras le jour du Seigneur
4. Tu honoreras ton père et ta mère
10. Tu ne convoiteras pas les biens d'autrui
2. Tu ne commettras point de parjure
7. Tu ne voleras pas
Tout ça me donne très envie de les revoir, car je dois bien l'admettre : j'ai beau avoir adoré à l'époque, je ne les ai jamais revu depuis, et... je ne me souviens vraiment que des épisodes 1 et 5. Même ceux que je disais avoir adoré (il y a presque 16 ans donc), quand je me relis, je ne m'en souviens pas. :oops:
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Mosin-Nagant »

Flol a écrit : 20 avr. 21, 10:50Pour résumer : je trouve ça incroyable comme avec peu de choses, simplement avec une mise en scène soignée, une musique scintillante (particulièrement mise en valeur dans l'épisode 9) et des interprètes tous plus excellents les uns que les autres, le cinéma de Kieslowski me touche. Il y a comme une évidence dans son cinéma qui, sans l'air d'y toucher, parvient à mettre le doigt sur des choses très justes et sait être émouvant sans jamais tomber dans le pathos.
Mouais... Tout ça ne vaut pas un bon Zack Snyder.
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Alexandre Angel
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Alexandre Angel »

El Dadal a écrit : 20 avr. 21, 14:19 Narrativement, il y a bien un ordre chronologique, du 1 au 10 (la protagoniste du 2, enceinte jusqu'au cou dans le 5, le malheur du père du 1 lisible dans le 3, le concept même du 2 décortiqué en cours magistral dans le 8 etc), et Kieslowski ayant réalisé le 1er en dernier, il y met un précipité des choses à venir. Je dirai aussi que l'humeur étant différente dans chaque, l'harmonisation de l'ensemble a tout intérêt à être maintenue (comme la tracklist d'un album, pensée comme telle).
Bien entendu, chaque film étant indépendant, rien ne t'empêche de faire ta tambouille. Qui sait, tu y verras peut-être des éléments nouveaux ?
Non, non, on va regarder ça dans l'ordre, merci :wink: !
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Flol »

Et il y a aussi un personnage récurrent dans 9 films sur 10 (si je ne m'abuse, il n'y a que dans le 9 qu'il n'apparaît pas) : celui du témoin muet, que l'on voit à chaque fois lors d'un moment clé et dans différents rôles.
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El Dadal
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par El Dadal »

Il est bien dans le 9 (à velo à la fin, il s'arrête puis repart), par contre absent des 7 et 10 (Kieslowski aurait tourné un bout de scène avec lui dans la gare pour le 7, mais ce n'était pas intéressant selon ses dires et il l'a donc coupé, et il ne trouvait pas que sa présence cadrait avec le ton du 10 et le fait que le personnage aille vendre son rein :mrgreen: )
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Flol »

Ah oui voilà, je me souviens avoir noté son absence dans le 10ème. Quant au 7ème, il m'avait tellement peu passionné que je n'avais même pas remarqué son absence.
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par MJ »

Flol a écrit : 21 avr. 21, 14:50Quant au 7ème, il m'avait tellement peu passionné que je n'avais même pas remarqué son absence.
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Thesix »

Vous m'avez donné envie de me lancer enfin.
Mais je suis un peu paumé ; j'étais persuadé de tous les avoir vu au cinéma à leurs sorties, 2 par 2.
Et je ne me souviens que de critiques de films TV. Par contre, je pensais que c'était plus tôt que 1990, enfin avant la chute du mur.
C'est bien comme ça qu'ils sont sortis à l'origine, ou bien j'ai rêvé ?
Parce que je ne suis pas sûr de tous les avoir revus à la télévision depuis.
Donc pour moi, ce sera un plongeon de 30 ans en arrière.
Si on passe AC/DC, je quitte la pièce (J. Jarmusch)
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par El Dadal »

Si l'on en croit les pages Imdb, certains films du Décalogue auraient connu des premières en festival courant 1989, mais leur diffusion à la télévision polonaise commence en mai 1990, au rythme d'un film par semaine.
Tu ne tueras point est sorti en Pologne en mars 1988, avec une présentation au festival de Cannes en mai suivant, tandis que Brève histoire d'amour commence à faire le tour des festivals en septembre de la même année. Soit un an et demi avant la diffusion des épisodes !
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Alexandre Angel
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Alexandre Angel »

El Dadal a écrit : 29 avr. 21, 16:58 Si l'on en croit les pages Imdb, certains films du Décalogue auraient connu des premières en festival courant 1989, mais leur diffusion à la télévision polonaise commence en mai 1990, au rythme d'un film par semaine.
Tu ne tueras point est sorti en Pologne en mars 1988, avec une présentation au festival de Cannes en mai suivant, tandis que Brève histoire d'amour commence à faire le tour des festivals en septembre de la même année. Soit un an et demi avant la diffusion des épisodes !
Je me souviens de la diffusion du film n°10 sur la 7 (l'ancêtre d'Arte) vers mai 1990 mais c'est un peu flou : d'autres épisodes avaient-ils été diffusés? Et de toutes façons, il me semble qu'il y a eu une courte période où la 7 était relayée par FR3, quelque chose comme ça (vraiment flou dans ma mémoire :| ).
Quand à Brève histoire d'amour, c'est tout à fait ça.
Je l'avais vu dans un festival strasbourgeois, bien avant sa sortie, pourvu d'un titre provisoire : Tu aimeras ton prochain.
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Thesix »

El Dadal a écrit : 29 avr. 21, 16:58 (...)mais leur diffusion à la télévision polonaise commence en mai 1990, au rythme d'un film par semaine.
Ah oui ?!? Après nous alors ?!
Effectivement, maintenant je me souviens de ma collègue avec qui je travaillais à l'époque et c'est donc bien en 1990. :mrgreen:
J'ai retrouvé cet article dans les archives du Monde publié le 07 mars 1990 :
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UNE AUTOPSIE DE LA SOCIETE POLONAISE Les dix films qui constituent "le Décalogue" du cinéaste polonais Krzysztof kielowski, sortent a paris

Mai 1988. Tu ne tueras point, film d'un cinéaste polonais choc âgé de quarante-six ans, du Festival de Cannes. Prix du jury, prix de la Critique internationale. Kieslowski n'est pas tout à fait inconnu, mais on le redécouvre. En octobre de la même année, il a droit, à Paris, à une rétrospective en même temps que sort Tu ne tueras point. On apprend alors que ce film appartient à une série réalisée pour la télévision polonaise : Le décalogue, version moderne des Dix commandements. En fait, la version télévisée de Tu ne tueras point est plus courte, et légèrement différente, mais on ne peut pas, alors, comparer.

Festival de Venise 1989. La présentation des dix films du Décalogue, (chacun durant moins de soixante minutes), soulève l'enthousiasme des critiques. Peu de temps après, la version cinéma du sixième commandement sort sous le titre Brève histoire d'amour. La cause est entendue : Kieslowski est un génie. Le vent souffle de l'Est. Le cinéma polonais ne faisait plus parler de lui, et Wajda est renvoyé aux vieilles lunes. Quelques réticences (dont la nôtre) sont étouffées sous les acclamations générales.

OEuvres de " chambre "

Mars 1990. Le Décalogue sort dans les salles de cinéma, après avoir été diffusé, en intégralité, sur la SEPT dans le courant du mois de février. On peut, maintenant, se faire une opinion raisonnable. " Il faut les voir au cinéma, c'est mieux ", dit-on partout. Rien ne s'oppose, évidemment, à une programmation de ces oeuvres sur grand écran, mais c'est tout de même pour le petit qu'elles ont été conçues et mises en scène, et c'est à partir de leur vision sur la SEPT qu'on peut les juger. OEuvres de " chambre ", pourrait-on dire, comme Ingmar Bergman, à une certaine époque, tournait des " films de chambre ", intimistes, à quelques personnages et en lieu clos. Car c'est bien de cela qu'il s'agit.

Dans le Décalogue, Kieslowski serre les cadrages, utilise souvent les gros plans, enferme ses personnages dans un espace réduit, travaille, à chaque film, la lumière de façon différente. C'est son style, pour ce projet-là, cette " suite " dont il faut donner les résumés succincts. 1) Un seul dieu tu adoreras : un petit garçon de onze ans a un père, universitaire spécialiste d'informatique, qui ne croit qu'à la raison, et une tante très catholique. Cet enfant est la victime d'un drame. 2) Tu ne commettras point de parjure : un homme est gravement malade, sa femme enceinte d'un autre. Elle décide de se faire avorter s'il guérit. Le médecin lui jure qu'il va mourir. 3) Tu respecteras le jour du Seigneur : Janusz va passer le réveillon de Noël avec sa femme et ses enfants. Une ancienne maitresse, accablée de solitude, le harcèle. 4) Tu honoreras ton père et ta mère : Anka, vingt ans, et son père, Michal, sont très _ trop _ attachés l'un à l'autre. Une lettre de la mère morte laisse planer un doute sur la paternité. 5) Tu ne tueras point : Jacek, un garçon pauvre des faubourgs de Varsovie, assassine, d'une manière atroce, un chauffeur de taxi. Il est condamné à mort. 6) Tu ne seras pas luxurieux : d'une fenêtre de HLM, un adolescent, employé des postes, vierge, observe à la lunette une jeune femme d'en face, très portée sur le sexe. 7) Tu ne voleras pas : Majka enlève sa petite soeur, qui est en réalité sa fille. Elle l'avait eue étant étudiante. Sa mère, directrice de lycée, a déclaré l'enfant comme sienne, pour éviter le scandale. 8) Tu ne mentiras pas : une femme âgée, professeur d'éthique à Varsovie, voit surgir après quarante ans, l'enfant juive qu'elle croyait avoir envoyée à la mort sous l'Occupation à cause d'un mensonge. 9) Tu ne convoiteras pas la femme d'autrui : un chirurgien marié depuis dix ans, est frappé d'impuissance sexuelle. Il découvre que sa femme a un amant au moment où elle rompt sa liaison. 10) Tu ne convoiteras pas les biens d'autrui : deux frères, Artur et Jerzy, trouvent, chez leur père, qui vient de mourir, une collection de timbres de grande valeur. De quoi réaliser leurs rêves?

Ici, Tu ne tueras point est décevant par rapport à la version cinéma. On ne retrouve pas, dans la construction du récit, les jeux du hasard prenant au piège les protagonistes d'un fait divers, relation thématique avec un long métrage précédent. En revanche, Tu ne seras pas luxurieux est meilleur, dans sa concision, son atmosphère plus confinée, et sa conclusion différente, que Brève histoire d'amour. C'est que chaque épisode du Décalogue a été écrit, mis en scène et monté par rapport à un ensemble et une ligne directrice. En détacher une pièce, c'est forcément la transformer, dramatiquement, stylistiquement. Laissons donc ces versions cinéma pour retrouver l'idée ou plutôt les idées qui se faufilent dans ces Dix Commandements.

A l'exception de Tu ne tueras point, où apparait le prolétariat de Varsovie, les personnages de Kieslowski appartiennent à une classe moyenne frustrée et surtout à une bourgeoisie qui n'a pas de problèmes matériels, habite de confortables appartements, mais est totalement déstabilisée par ses tricheries sociales _ l'adultère, l'égoisme et le manque de valeurs morales et spirituelles, le catholicisme dont il est beaucoup question n'étant plus qu'un résidu culturel ou une pratique purement formelle. La politique n'est pas évoquée.

L'autopsie de cette société est terrifiante, même si Kieslowski ne condamne pas les hommes et les femmes qu'il présente dans leur solitude et leur enfermement. Il leur conserve même une part de mystère au-delà des apparences et du déterminisme. Cet auteur _ un grand auteur _ ne se complait pas dans le pessimisme. Il proteste, avec une rigueur exemplaire, et tragique dans ses mises en scène au scalpel, contre l'injustice et le mal accablant les pauvres créatures humaines dans cette Pologne, cette Varsovie, filmées comme des " no man's lands ". Libre aux exégètes de décider si le personnage énigmatique traversant chaque commandement comme un voyageur-témoin, représente Dieu, un de ses anges ou le destin. C'est peut-être tout simplement le truchement de Kieslowski.

Travail de chef d'orchestre

Or il en est du Décalogue comme de ces enregistrements d'opéras dont les critiques musicaux vous disent qu'il faut les acquérir pour le talent et la " lecture " du chef d'orchestre plus que pour des chanteurs disparates. Sauf qu'ici il ne s'agit pas des interprètes (toujours, et tous excellents) mais des scénarios, de valeur inégale. Le travail du chef d'orchestre Kieslowski est admirable, mais il ne transcende pas les faiblesses de certaines histoires (la jalousie morbide dans le neuvième commandement, par exemple). A vrai dire, on ferait pas mal de réserves sur les histoires proprement dites si Tu ne mentiras pas (qui se relie, par des détails précis, aux deuxième et dixième commandements) n'était une pure merveille. Le destin d'Elzabieta, petite juive rescapée des persécutions de 1943, devenue universitaire américaine, et de Zofia, dont la vie fut marquée par le mensonge non éclairci de cette époque,ont leurs racines dans le passé de la Pologne. Le débat sur la justice, la faute et le pardon, se traduit par des images à la fois implacables et émouvantes, et le rappel d'une responsabilité collective assumée devant l'Histoire.
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moonfleet
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par moonfleet »

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J'hésite à regarder cette série et j'aimerais savoir si il y a un point de vue, une morale catholique qui collerait à chacun des films ou si la vision de Kieslowski est plus libre, ouverte ... :?: :?:
J'avoue que le catholicisme me gonfle, et pas seulement à Noël ha ha :twisted:

Je ne connais de lui que Bleu et Rouge, que j'avais appréciés 8)
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Alexandre Angel
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par Alexandre Angel »

moonfleet a écrit : 25 déc. 22, 19:41 J'hésite à regarder cette série et j'aimerais savoir si il y a un point de vue, une morale catholique qui collerait à chacun des films ou si la vision de Kieslowski est plus libre, ouverte
Au pire, on a pu reprocher à Kieslowski ce que j'appellerais une "dictature du scénario" qui impose aux personnages une soumission à un certain tragique arbitraire, Mais il n'y a pas plus de prosélytisme catholique ici qu'il n'y en a dans L'Evangile selon Saint-Matthieu de Pasolini, dans un tout autre registre, bien entendu. Les commandements sont invoqués comme cadre scénaristique qui fait la part belle au doute, à la défiance même vis-à-vis de tout ce qui a trait à la foi (voir l'épisode 1). Pour moi, je pense que Dieu, dans Le Décalogue, brille par son absence.
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Re: Le Décalogue (Krzysztof Kieslowski - 1989/90)

Message par moonfleet »

Merci de cette réponse Alexandre :wink: Je vais donc tenter le visionnage.

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