Mission: Impossible 3 (J.J. Abrams - 2006)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

gehenne
Howard Hughes
Messages : 19884
Inscription : 19 mai 04, 00:43
Localisation : sous une pierre...
Contact :

Message par gehenne »

Le triptyque Mission : Impossible poursuit un schéma narratif que l’on pourrait associer à une trilogie comme celle de Matrix. Répondant au découpage naissance / vie / mort, les métrages deviennent, au-delà des apparences, une œuvre somme qui ne se construit pas en fonction du scénario tel qu’on le conçoit, mais en fonction des cinéastes qui prennent possession des films. Bien que derrière un tel programme, on devine l’ombre implacable du producteur Cruise, il serait réducteur de notifier sa présence relevant d’un caractère dictatorial et omniscient. Au contraire, chaque opus incarnait une figure définissable, représentée par le metteur en scène attitré. Difficile de ne pas reconnaître De Palma derrière le premier épisode et John Woo pour le second, comme il parait improbable de ne pas relever la paternité de ce troisième épisode à Abrams. Cependant, ce dernier est encore jeune au point que sa personnalité ne se devine pas de manière concrète ou formel, mais davantage sur le plan de la construction du scénario.

Dans la logique imposée par les précédents réalisateurs, Abrams déconstruit l’hégémonie du Héro. Ce choix, celui de proposer le métrage à un réalisateur issu du petit écran, met en lumière l’impossibilité d’un cinéma à renouveler un concept qui tient surtout par le degré formaliste de sa fabrication. Quelques réalisateurs « de cinéma » se sont succédés, mais aucun n’a pu ou su tenir les reines d’un projet qui répondait à des codes mouvants, ne répondant plus à une logique cinéphile dans sa démarche. Abrams possède le profil, cette identité malléable qui ne correspond pas à un facteur précis, mais à un investissement rigoureux dans l’application d’une recette, celle de la série tv. Le réalisateur parvient ainsi à transposer un mode narratif d’un médium à l’autre, sans perdre la fluidité d’un récit qui se défragmente comme une saison, mais en lui imposant un rythme hyperactif. Paradoxale situation qui implique de se contredire pour opérer, d’oublier une partie de ses croyances afin de présenter un film différent dans sa volonté narrative.

Abrams s’applique à construire son film comme une saison, ou comme un jeu vidéo. La notion d’épisode (ou de tableau) constitue l’ossature d’une intrigue qui fonctionne de manière cyclique en imposant une déroute systématique pour avancer sereinement. Le réalisateur ne peut bien évidemment pas terminer une séquence par un cliffhanger, il instaure donc une logique comparable en prenant soin d’illustrer des échecs compulsifs. Le métrage emploie donc un sentier similaire aux travaux précédents de Abrams, tout en poursuivant le cycle de la franchise dans cette représentation de mort. Le cinéaste s’acharne sur son personnage, le martyrise pour mieux assimiler cette incarnation ultime du Héro. A l’instar d’un parcours christique, il faut le tuer, le torturer, le traîner pour opérer la poursuite du cycle.

Devenant l’épilogue temporaire d’un ensemble de films au trajet linéaire, ce troisième épisode constitue également la somme des deux précédents. Incorporant au sein de son propre schéma des éléments des deux précédents métrages, il provoque ainsi la mémoire du spectateur. L’exercice est évident pour le cinéaste, habitué de concevoir des scriptes s’échelonnant sur une longue période et réclamant ainsi l’attention d’un spectateur concerné. La continuité est naturelle, là où le second opus faisait plus ou moins abstraction du premier film. On se retrouve alors au cœur du FMI, chose somme toute naturelle lorsque l’on regarde à la fois le concept de la franchise et le parcours du cinéaste. Habitué du contexte relatif aux institutions d’espionnage, Abrams reproduit des éléments qu’il a pu déjà abordé, sans que cela ne soit préjudiciable au métrage, bien au contraire. Il développe une intrigue linéaire qui avance par rebondissement et révélations. Pour la première fois de la franchise, Hunt est incroyablement passif et subit l’action plus qu’il ne la crée. Jouant formidablement sur les faux semblants, le réalisateur impose alors à son personnage une descente inexorable qui désacralise l’imposante aura le définissant dans les précédents épisodes. Ce constat s’inscrit bien évidemment dans une logique d’ensemble, qui devait se répercuter implacablement au sein du métrage. Toutefois la mise en scène d’une telle situation prévoit des idées intéressantes sur l’avenir de la franchise et son prochain traitement. Instaurant pour une fois, une finalité d’ordre conclusive qui apporte ce caractère sacrificielle à la série.

Il serait précoce d’affirmer que M:I 3 représente le renouveau du blockbuster, mais il constitue néanmoins une avancé certaine et surtout, la parfaite intégration d’un médium (la télévision) à un autre. Les adaptations issues de séries tv ont toutes échoués dans leur tentative de se réapproprier une logique narrative en la transposant sans effectuer de réel travail de recul sur les implications d’une telle démarche. Si l’on excepte X-files qui s’incarnait dans la continuité de la série sans opérer de changement entre son passage du petit écran au long, aucune adaptation n’a réellement su redéfinir les lignes propres au concept télévisé pour les assimiler au cinéma. La franchise Mission Impossible représentait une légère exception – celle de proposer une identité formelle en lieu et place de transposition – mais avec ce troisième épisode, elle s’impose désormais en transfuge opérationnel. Bien que formellement, le métrage soit encore perfectible, Abrams fait toutefois preuve d’une ambition impressionnante et d’expériences remarquables pour une première apparition au cinéma. Inscrivant peut-être son nom en tête d’une démarche reproductive, l’avenir nous dira si les leçons que le film impose seront apprises et affinées.
Ainsi, toujours et pourtant...
Nimrod
Hypoglycémique
Messages : 26173
Inscription : 13 avr. 03, 18:57

Message par Nimrod »

John Anderton a écrit :
imho a écrit :Alan Shore, tu as aimé alors? :D
C'est vrai qu'on ne l'a jamais aussi peu entendu au sujet du film que depuis qu'il l'a vu ! (enfin, normalement)... :lol:
Il n'était pas censé poster son avis avant mardi. ;)
Avatar de l’utilisateur
John Anderton
Vintage
Messages : 7661
Inscription : 15 avr. 03, 14:32
Localisation : A bord de l'Orca, au large d'Amity

Message par John Anderton »

Nimrod a écrit :
John Anderton a écrit :
C'est vrai qu'on ne l'a jamais aussi peu entendu au sujet du film que depuis qu'il l'a vu ! (enfin, normalement)... :lol:
Il n'était pas censé poster son avis avant mardi. ;)
Ah, bon. :)
Image
tronche de cuir
Ophely, no soucy
Messages : 2541
Inscription : 2 juil. 04, 14:32
Localisation : RIP !!!

Message par tronche de cuir »

J'aimerais te répondre point par point:




imho a écrit :scoop1 : Tom Cruise joue dedans (sisicaivrai), alors s'il vous donne de l'urticaire n'allez pas le voir parce que scoop 1bis, l'acteur principal comme dans beaucoup de films on le voit beaucoup à l'écran (sisicaivraibis).

Sans même aller jusqu'à l'épidermie ( Cruise a déjà prouvé dans bon nombre de films qu'il pouvait être trés bon), je trouve qu' ici il est particulièrement mal dirigé. A sa décharge, il faut dire que les dialogues sont assez nuls.
imho a écrit : scoop2 : c'est pas le dernier Lynch hein, donc si vous vous attendez à autre chose qu'à un blockbuster américain, faudra revoir vos critères de sélection et pour quelque chose de plus inimiste vous tournez par exemple vers l'excellent film mongole le chien jaune de Mongolie que je recommande chaudement.

Il ne faut pas faire dire à ceux qui n'aiment pas le film qu'ils sont indifférents aux blocksbusters, à leurs cahiers des charges. Au contraire, beaucoup auraient aimer passer un bon moment. Or, avec "MI3", on se trouve devant un film qui souhaite tellement en mettre plein la vue qu'il provoque l'effet inverse: l'ennui. De la même façon, on ne s'attend pas à une étude psychologique renversante mais juste ce qu'il faut pour avoir un minimum d'empathie à l'égard des personnages. Difficile d'avoir une quelconque émotion pour des pantins.



imho a écrit : scoop3 : le titre c'est mission impossible, pas mission doigts dans le nez, donc oui, comme dans un bon James Bond qui se respecte, y a des incohérences et des tirages de cheveux scénaristiques.
les fervents défenseurs de Charlie's Angels ici présents me font par ailleurs bien rire à critiquer la cohérence ici...

Il m'a semblé que les arguments ne portaient pas sur un manque de vraisemblance mais plutôt sur la banalité (Tom va t-il pouvoir concilier son boulot et son couple ? :lol: ) et le je-m'en-foutisme ("patte de lapin or not ?) de l'intrigue.

imho a écrit : scoop4 : c'est un film de commande pour Abrams, on lui demande d'insufler son style dans la série. Alors oui, le monsieur a fait Alias (vous savez la série télé, sous-genre cinématographique dont sont issus 24h, the shield, sopranos, carnivale, boston legal,... :roll: ) et a une certaine expérience dans le domaine agent secretiesque.


Et quel style mes aieux !!!
Un découpage varié, un joli sens du scope surtout dans des scènes d'action parfaitement lisibles, montage clair; bref, que du bonheur !!! :mrgreen:


imho a écrit : Dernière petite réponse aux critiques, oui, la fin est gnangnan, mais pas 15 minutes, 5 minutes. Sur 120 c'est pas bien grave.
Quelques uns parmi vous se souviennent des fins des James Bond?
Parce que dans le genre gnangnan, parfois...

Si, si, il l'est plusieurs fois ( la scène "Trust me " en haut du building, le flash-back à l'enterrement, le mariage, le prologue...etc)
Nestor Almendros
Déçu
Messages : 24394
Inscription : 12 oct. 04, 00:42
Localisation : dans les archives de Classik

Message par Nestor Almendros »

tronche de cuir a écrit :Or, avec "MI3", on se trouve devant un film qui souhaite tellement en mettre plein la vue qu'il provoque l'effet inverse: l'ennui.
C'est ce qui s'est passé avec Mme Almendros, il est vrai peu portée sur l'action musclée, qui s'est carrément endormie...
tronche de cuir
Ophely, no soucy
Messages : 2541
Inscription : 2 juil. 04, 14:32
Localisation : RIP !!!

Message par tronche de cuir »

Nestor Almendros a écrit :
tronche de cuir a écrit :Or, avec "MI3", on se trouve devant un film qui souhaite tellement en mettre plein la vue qu'il provoque l'effet inverse: l'ennui.
C'est ce qui s'est passé avec Mme Almendros, il est vrai peu portée sur l'action musclée, qui s'est carrément endormie...

Normal.
Moi, j'ai eu un sacré mal de crâne en sortant !!!
imho
Assistant opérateur
Messages : 2860
Inscription : 14 avr. 03, 17:42
Localisation : Belgian Connection
Contact :

Message par imho »

tu n'as pas complètement tort (:mrgreen: ) mais à ça devient question du goût de chacun, mes "scoops" sont des éléments dont il faut tenir compte avant même de songer apprécier le film.
je ne me suis pas ennuyé, ,toi si.
Je me suis ennuyé devant la guerre des mondes (et toi? je le recite parce que Cruise, gros budget, film d'action...).
Image surtout, restons courtois...
blog dessins - srtCleaner
tronche de cuir
Ophely, no soucy
Messages : 2541
Inscription : 2 juil. 04, 14:32
Localisation : RIP !!!

Message par tronche de cuir »

imho a écrit :Je me suis ennuyé devant la guerre des mondes (et toi? je le recite parce que Cruise, gros budget, film d'action...).

Non. J'ai adoré.
Autant la prestation de Cruise que la f....mise en scène de Spielberg.
imho
Assistant opérateur
Messages : 2860
Inscription : 14 avr. 03, 17:42
Localisation : Belgian Connection
Contact :

Message par imho »

pourtant je pourrais aussi le démonter point par point ce film :D
mais je vois pas l'intérêt :wink:
Image surtout, restons courtois...
blog dessins - srtCleaner
tronche de cuir
Ophely, no soucy
Messages : 2541
Inscription : 2 juil. 04, 14:32
Localisation : RIP !!!

Message par tronche de cuir »

imho a écrit :pourtant je pourrais aussi le démonter point par point ce film :D
mais je vois pas l'intérêt :wink:
Certes.
Nimrod
Hypoglycémique
Messages : 26173
Inscription : 13 avr. 03, 18:57

Message par Nimrod »

En y repensant, c'est fou le nombre de traitres qu'il peu y avoir dans Mission Impossible.
Ca doit être une déformation professionnelle, chez eux.
Alan Shore
Réponse rapide assurée
Messages : 6435
Inscription : 5 mai 05, 20:15

Message par Alan Shore »

Verdict alors :



Ben, c'était génial. :D :mrgreen:


Je me suis éclaté comme un gosse durant deux heures : Rythme sans temps morts, scènes d'actions explosives, un scenario aux enjeux humains, un véritable travail d'équipe, Seymour Hoffman est un méchant absolument génial, Keli russel un espionne martyre toute mimi et enfin, Ethan Hunt qui lui, devient (enfin!) faillible et borderline : Un régal. Il encaisse, subit, se dépasse pour finir par laisser la place à sa femme finalement dans la toute dernière séquence.
Evidemment, Cruise occupe le devant de la scène de sa propre production mais beaucoup moins qu'à l'accoutumée.
Luther n'est plus le sidekick des deux premiers, laissant ce rôle à Maggie Q et Rhys-Myers. Il épaule Hunt en tant qu'ami et confident et prend place maintenant sur le terrain. C'est bien le premier M:I où Cruise laisse plus de place aux autres qu'à lui, où les missions sont quand même de l'ordre de l'impossible, où la team est vraiment importante et vraiment soudée. Bref, une petite avancée certes mais infiniment plus digeste que le deuxième opus (que j'adore pourtant) et son narcissime Cruisien qui suinte à tous les plans.
A noter que c'est aussi le premier M:I qui a une mémoire, puisqu'il nous indique un bref rappel du premier épisode concernant la mission d'infiltration dans la C.I.A.
M:I est une franchise mais pour le coup, se permet d'instaurer une continuité propre à son univers, certes légère, mais qui à le mérite d'exister.


Abrams applique à la lettre son univers personnel, à fortiori celui d'Alias, multipliant les clins d'oeil à la série éponyme, ce qui peut enchanter ou désenchanter. Personnellement, c'est tout à fait le genre d'entertaiment que j'adore, calibré comme il faut et plaisant au possible et la transition du petit écran en en long métrage correspond pleinement à ce que j'en attendais.
Qui plus est, Cruise a le mérite de réussir à s'approprier les tics flagrants de chacun de ses réalisateurs et Abrams n'echappe pas à la règle : Son style est reconnaissable dès la première et fabuleuse scène de son film.
Bref, une éclate totale durant 120 minutes. J'avoue même que j'ai déjà envie d'y retourner :mrgreen: (Quand je pense que Nimrod ose me le comparer avec son bad boys 2 et et sa deuxième heure sans intérêt :uhuh: )


PS et Edit : Entièrement d'accord avec Imho et Gehenne 8)
Les manga, c'est mal

"La manière d'agir, c'est la manière d'être."
tronche de cuir
Ophely, no soucy
Messages : 2541
Inscription : 2 juil. 04, 14:32
Localisation : RIP !!!

Message par tronche de cuir »

Alan Shore a écrit :Verdict alors :
(Quand je pense que Nimrod ose me le comparer avec son bad boys 2 et et sa deuxième heure sans intérêt :uhuh: )

Encore que, le Michael Bay est plus fun !!! :oops:
Alan Shore
Réponse rapide assurée
Messages : 6435
Inscription : 5 mai 05, 20:15

Message par Alan Shore »

Colqhoun a écrit :
Alan Shore a écrit : mardi soir sur ce topic, jour de mon retour sur Nantes. :mrgreen:
:|
Désolé :|
Les manga, c'est mal

"La manière d'agir, c'est la manière d'être."
Alan Shore
Réponse rapide assurée
Messages : 6435
Inscription : 5 mai 05, 20:15

Message par Alan Shore »

tronche de cuir a écrit :
Alan Shore a écrit :Verdict alors :
(Quand je pense que Nimrod ose me le comparer avec son bad boys 2 et et sa deuxième heure sans intérêt :uhuh: )

Encore que, le Michael Bay est plus fun !!! :oops:

Ouais, t'as raison de rougir :twisted:
Les manga, c'est mal

"La manière d'agir, c'est la manière d'être."
Répondre