Hayao Miyazaki

[Joe Wilson]

Princesse Mononoké

Je dois avouer avoir été captivé du début à la fin. La puissance du récit apporte une intensité très singulière, de l'ordre de la mythologie. Mais si le film laisse beaucoup de symboles, il n'oublie jamais de s'incarner par le biais de ses personnages. Ils sont nombreux et le propos de Miyazaki est particulièrement ample, mais Princesse Mononoké va à l'essentiel et chaque figure s'avère indispensable.
Plastiquement, c'est également à mon goût son plus beau film. L'imagination est débordante et le regard s'évade entre admiration et inquiétude. Car l'enjeu, à travers le cheminement d'Ashitaka, est bien l'apprentissage et la perception de la souffrance.
Miyazaki cerne d'abord la source d'un conflit destructeur entre l'homme et la nature. Mais sans cesse, en scrutant les motivations et failles de chacun, il montre les conditions d'un duel intérieur propre à chaque personnage. Au final, les dieux de la forêt et les hommes combattent leurs peurs en quête d'une délivrance inaccessible.
Dame Eboshi exprime à la fois la lucidité d'un progressisme social et sa pulsion de mort (puisque la continuité et l'expansion des forges ne peut qu'aboutir à l'anéantissement de la forêt)...elle est le double de San, fille des loups, condamnée à un déchirement permanent. Chez les deux personnages, il y a une fierté, une démesure jusqu'au-boutiste ne consacrant qu'un affrontement.
Ce qu'apprend alors Ashitaka est l'impuissance des êtres face à un mouvement des passions poussant chacun vers son anéantissement. La dernière demie-heure cristallise, dans sa sombre rage, ce constat d'un échec.
La renaissance de l'épilogue s'avère alors un contrepoint nécessaire...la possibilité d'une autre naissance plutôt qu'un dépassement.


Kiki la petite sorcière

Beaucoup de simplicité dans ce film, mais uniquement pour consacrer une forme d'épure sereine et admirative. Sans mièvrerie ni fadeur, Miyazaki saisit un accomplissement personnel et l'appropriation d'une démarche artistique.
L'envol de Kiki, au sens propre comme au sens figuré, doit lui permettre de franchir le cap d'une compréhension de soi. D'ailleurs, j'aime beaucoup comment le contexte de l'entraînement d'une sorcière est toujours suggéré, normalisé, acquis par la population...à l'image d'un apprentissage parmi d'autres...c'est par cette banalité apparente que Miyazaki touche à l'essentiel.
Perception de sa fragilité, ouverture aux autres, délicatesse et spontanéité...la personnalité de Kiki n'est pas linéaire et n'échappe pas à quelques désillusions. Mais elles ne sont que l'instrument d'une construction patiente, qui trouve son aboutissement dans un final spectaculaire et euphorique.

[Joe Wilson]

Mon voisin Totoro

Je vais poursuivre dans la lignée de Strum et Mama Grande! puisque mon avis sera particulièrement élogieux.
La grandeur sereine du film ne tient pas à grand chose, à une confiance absolue dans la poésie de l'imaginaire, à une délicatesse immense dans le traitement des personnages. Les soins apportés aux mimiques de Mei, à sa manière de courir, à ses gestes, sont un exemple parmi d'autres d'une finesse de trait assez souvent prodigieuse.
Quelques scènes sortent du lot : la première rencontre avec Totoro, le parapluie, la scène nocturne avec les arbres, et enfin le crescendo final. Mais c'est bien l'ensemble qui émerveille par sa spontanéité radieuse...ainsi, les moments de peine, inévitables, sont toujours dépassés par l'envie, l'admiration de la nature, la protection des esprits de la forêts. L'arrivée de ces derniers semble d'ailleurs toujours couler de source...soif de curiosité, capacité d'émerveillement peuvent expliquer cette impression d'évidence.
Tout respire, en effet, la richesse des premières fois, l'intensité simple d'une découverte...c'est un regard d'enfant magnifié par le recul d'une vie d'adulte. Ainsi, Mon voisin Totoro peut exprimer une plénitude limpide et calme, une sensation d'euphorie, épanouie et bienveillante.

[Mama Grande!]

Joe, tu as exprimé clairement ce que j'avais exprimé de manière confuse. Je suis d'accord à 200% avec toi, notamment sur la réussite de Mei. Ce personnage est un monument d'animation à lui tout seul. La finesse et la justesse du mouvement en font une vraie petite fille, tout aussi crédible que par exemple Ana Torrent dans L'esprit de la ruche ou Cria cuervos!. Il y a beaucoup de Miyazaki que je dois revoir, mais en me basant sur mes souvenirs certes parfois confus, je ne crois pas l'avoir vu arriver à un tel niveau d'émerveillement que dans Totoro, alors que c'est son film le plus épuré, le plus simple, sur le papier le moins ambitieux.
Allez, pour le plaisir, le générique de fin, qui me file la pêche personnellement et dont les paroles résument très bien le film, mais qui me rend aussi "nostalgique". "Nostalgique" de l'univers merveilleux du film, de son innocence, que l'on ne peut retrouver que dans certains souvenirs d'enfance (et encore). Son film le plus simple, et pourtant le plus rêveur et le plus émouvant.
Attention, pour ceux qui ne l'ont toujours pas vu, on voit les dernières images du film donc ça spoile un peu. L'histoire elle-même n'a pas un grand suspense, mais ça peut gâcher la découverte quand même, donner moins de portée à ces moment au moment où l'on découvre le film.

[Boubakar]

Mon voisin Totoro (1988)

J'ai au avoir vu le film plusieurs fois (la première vision datait de l'époque des VHS où l'on voyait des films -ou séries- en V.O. sous-titrée en chinois, il y a plus de 15 ans ), à chaque fois, c'est un émerveillement complet, et j'ai enfin l'occasion de le voir au cinéma, à l'occasion d'une reprise (et on sent que la copie avait "tournée", à en juger des craquements), et ce fut du bonheur complet.
C'est le genre de films où je trouve que tout est parfait, je n'arrive pas à y trouver un seul défaut, c'est magnifique du début à la fin.
Ne serait-ce que par le personnage de Mei, petite fille vraiment craquante (il faut la voir sauter sur une flaque d'eau avec ses bottes ou s'endormir sur le gros Totoro), vraie pile électrique, auquelle sa grande soeur apporte aussi un certain humour et une belle tendresse, quand Mei va subitement disparaitre. Et c'est aussi très drôle, surtout quand elles se mettent à crier dans la maison soit pour faire partir les noiraudes ou pour imiter Totoro.
Si il y aurait un seul défaut, c'est que c'est trop court, on voudrait presque que ce film ne s'arrête jamais, avec sa si belle ambiance (on a presque envie de croire à l'existence des Totoro, ils sont si cute ), bref c'est un chef d'œuvre, le meilleur de Miyazaki.

[Le prisonnier]

on a presque envie de croire à l'existence des Totoro, ils sont si cute

On dit kawaii !

[Murnau]

Avec tout le "ramdam" fait autour de Miyazaki en ce moment, j'ai envie de découvrir son oeuvre. Vous me conseilleriez de commencer par quel film, sachant que je ne suis pas fan d'animes et que je cumule à peu près tous les préjugés possibles à leur sujet ?

Merci

[Stromboli]

Peut-être "Le Voyage de Chihiro" puisque j'avais les mêmes réticences que toi et que c'est en voyant ce film que je suis revenu sur mes préjugés au fur et à mesure que la projection se déroulait.
Sinon "Le tombeau des lucioles" de Takahata, le compère et associé de Miyazaki, un film qui va à l'encontre des clichés sur l'animation manga.

[Demi-Lune]

Peut-être "Le Voyage de Chihiro" puisque j'avais les mêmes réticences que toi et que c'est en voyant ce film que je suis revenu sur mes préjugés au fur et à mesure que la projection se déroulait.

+ 1
Pas encore tout vu de lui, mais c'est celui-là qui m'a ouvert les portes à son univers, et qui me semble être la meilleure introduction possible à celui-ci.
Ou tu peux commencer avec Nausicaa qui passe ce soir sur Arte.

[Murnau]

Oui, j'avais déjà dans l'idée de débuter par Chihiro, merci pour cette double confirmation.

Par contre, Le Tombeau des lucioles, il me semble avoir lu que c'est extrêmement triste comme film ? Ca va peut-être attendre dans ce cas, pas trop d'humeur en ce moment...

[cinephage]

Oui, j'avais déjà dans l'idée de débuter par Chihiro, merci pour cette double confirmation.

Par contre, Le Tombeau des lucioles, il me semble avoir lu que c'est extrêmement triste comme film ? Ca va peut-être attendre dans ce cas, pas trop d'humeur en ce moment...

C'est effectivement un film triste, mais il a été réalisé par Isao Takahata, un autre artiste du studio Ghibli (le studio de Miyazaki). Pas besoin d'en passer par là, donc, pour découvrir l'auteur du voyage de Chihiro.

[hansolo]

Perso j'ai découvert Miyazaki au cinéma avec Mononoke, et je trouve que c'est une formidable introduction à son univers!! (je l'avais vu en VOST puis j'y étais retourné en VF!)

Quant à Nausicaa, ceux qui n'ont pas découvert le manga ne percoivent qu'une partie du récit formidable de Miyazaki!

[Alcatel]

Avec tout le "ramdam" fait autour de Miyazaki en ce moment, j'ai envie de découvrir son oeuvre. Vous me conseilleriez de commencer par quel film, sachant que je ne suis pas fan d'animes et que je cumule à peu près tous les préjugés possibles à leur sujet ?

Merci

Tous J'étais comme toi, et puis j'ai vu Mon voisin Totoro et Nausicaa. (bon j'ai vu Ghost in the shell avant)
Et là j'attends la diffusion du Chateau dans le ciel lundi prochain.

[hansolo]

Tous J'étais comme toi, et puis j'ai vu Mon voisin Totoro et Nausicaa. (bon j'ai vu Ghost in the shell avant)
Et là j'attends la diffusion du Chateau dans le ciel lundi prochain.

Tu ne l'as pas encore vu? Quel veinard!
Attends toi a un grand moment (tu dois t'en douter )

[Vazymollo]

Je suis en train de tous les enregistrer sur Arte :
Nausicaä repasse dimanche à 8h
Princesse Mononoké lundi à 20h35
Mon Voisin Totoro repasse mercredi à 14h45
Le Château dans le Ciel jeudi à 20h35

Je suis novice, n'ayant vu que le Voyage de Chihiro, que j'avais beaucoup aimé. En voyant des bouts des films déjà enregistrés (le Château Ambulant et Totoro), je suis persuadé que je vais adoré, et je vais passer ça à mes enfants, il paraît par exemple que Totoro est exempt de toute violence (difficile de trouver un film sans aucune violence, même les Disney me semblent parfois trop durs pour des petits de 2-3 ans).

[tewoz]

Je suis en train de tous les enregistrer sur Arte :
Nausicaä repasse dimanche à 8h
Princesse Mononoké lundi à 20h35
Mon Voisin Totoro repasse mercredi à 14h45
Le Château dans le Ciel jeudi à 20h35

Je suis novice, n'ayant vu que le Voyage de Chihiro, que j'avais beaucoup aimé. En voyant des bouts des films déjà enregistrés (le Château Ambulant et Totoro), je suis persuadé que je vais adoré, et je vais passer ça à mes enfants, il paraît par exemple que Totoro est exempt de toute violence (difficile de trouver un film sans aucune violence, même les Disney me semblent parfois trop durs pour des petits de 2-3 ans).

Totoro est une merveille, et c'est sans aucun risque pour les enfants, junior le connait déjà par coeur.