Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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G.T.O
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par G.T.O »

Demi-Lune a écrit :Enfin vu, après m'être gavé pendant longtemps des best-of sur Youtube. Étrange d'ailleurs de revoir tous ces passages en contexte... l'effet best-of les rend univoquement hilarants, alors que la connotation (ainsi que l'interprétation de Cage) est beaucoup plus ambivalente dans le déroulé du film.
Je n'avais pas capté que c'était le scénariste d'After hours qui était également à l’œuvre. Rétrospectivement, ça éclaire son ton très particulier. Je m'attendais à une vraie comédie noire sur un canevas classique alors que le programme est bien moins lisible que cela. Nulles impasses kafkaïennes ici mais un même sentiment de malaise qui progresse en même temps que le film, alors que Cage, dans une composition hallucinée dont lui seul a le secret (peut-être son chef-d’œuvre, d'ailleurs), redouble de grimaces dans un élan finalement plus désespéré et angoissant que strictement comique. Qu'on se retrouve face à quelque chose qui glisse imperceptiblement vers l'inconfort et le bizarre s'avère bien plus stimulant qu'une formule attendue, même si ce glissement ne préserve pas le film de la critique. Je ne trouve pas le film réellement réussi quel que soit le bout par lequel on le prend, mais le fait que je ne sache justement pas très bien par quel bout le prendre a tendance à me faire dire que son venin est quand même bien là et qu'il a déjà commencé à infuser. Très difficile à évaluer, ce film, et c'est peu dire que je ne m'y attendais pas. Il laisse un goût très amer.
Et puis, il y a Jennifer Beals en fantasme ambulant et cette atmosphère incomparable, mordorée, bourgeoise et névrosée, du New York du crépuscule des années 80, style Wall Street, Bright lights big city, Une autre femme ou Quand Harry rencontre Sally.

Extrêmement désenchanté ce film tout en étant, derrière son aspect immédiatement kafkaien, une déconstruction astucieuse du mythe du vampire. D'ailleurs, à bien des égards, c'est presque une relecture moderne de Reinfield. Avec c'est vrai énormément de rupture de tons. C'est un film qui joue beaucoup des collisions de genre, de tonalités différentes. Et Cage y est juste énorme.
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Demi-Lune
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par Demi-Lune »

Robert Bierman n'a en tout cas jamais confirmé et, de façon périphérique, cela ajoute au flou qui entoure la nature de ce film. Un peu comme Communion.

En tout cas, je trouve vraiment stimulante la manière dont le film (enfin, le script) passe d'une mise en situation fantastique et clichée (cette pauvre chauve-souris de LaFoirefouille) à quelque chose de plus en plus trouble sur l'état mental du personnage de Cage. Il est possible d'entrevoir, derrière les oripeaux du vampirisme, une parabole angoissée, comme After hours mais en plus pessimiste encore, sur un yuppie pur produit du capitalisme new-yorkais de l'époque, et qui pète les plombs en s'enfonçant toujours plus loin dans son délire de puissance et sa schizophrénie.
Et si Embrasse-moi, vampire était un chaînon manquant entre Wall Street et American pyscho ? :mrgreen:
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par mannhunter »

Demi-Lune a écrit :Robert Bierman n'a en tout cas jamais confirmé
J'aimerais bien voir quand même son premier (télé?)film "Apology" avec Peter Weller, un thriller sorti dans nos salles sous le titre "Confessions criminelles" et primé au festival du film policier de Cognac, me semble-t-il...
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Message par Rockatansky »

mannhunter a écrit :
Sergius Karamzin a écrit :Dommage que le réal n'ait plus rien fait.
J'aimerais bien revoir "Apology" dont j'ai un lointain souvenir...y a un dvd/blu ray qui traine quelque part?
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par mannhunter »

c'est le soleil qui finit de ravager mes derniers neurones, ça doit être ça...je vais finir comme Nicolas Cage dans le film. :)
Tiens, pour la peine:

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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par G.T.O »

Demi-Lune a écrit :Robert Bierman n'a en tout cas jamais confirmé et, de façon périphérique, cela ajoute au flou qui entoure la nature de ce film. Un peu comme Communion.

En tout cas, je trouve vraiment stimulante la manière dont le film (enfin, le script) passe d'une mise en situation fantastique et clichée (cette pauvre chauve-souris de LaFoirefouille) à quelque chose de plus en plus trouble sur l'état mental du personnage de Cage. Il est possible d'entrevoir, derrière les oripeaux du vampirisme, une parabole angoissée, comme After hours mais en plus pessimiste encore, sur un yuppie pur produit du capitalisme new-yorkais de l'époque, et qui pète les plombs en s'enfonçant toujours plus loin dans son délire de puissance et sa schizophrénie.
Et si Embrasse-moi, vampire était un chaînon manquant entre Wall Street et American pyscho ? :mrgreen:

Oui totalement. Le glissement est vraiment habile, comme le fait de présenter l'alternative de vie vampire comme une sorte d'idéal, auquel aspire le névrosé Cage. De même que la façon très inquiétante qu'il a de vampiriser la pauvre Alva, où le rire cède souvent sa place à quelque chose de plus profond, d'existentiel, de triste. Comme dans After Hours
Tout en disant quelque chose de l'état de délabrement psychique -yuppies . Bien vu le chainon manquant.
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par Rockatansky »

mannhunter a écrit :c'est le soleil qui finit de ravager mes derniers neurones, ça doit être ça...je vais finir comme Nicolas Cage dans le film. :)
Tiens, pour la peine:

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En fait l'affiche me dit quelque chose, je crois que c'était nul non ?
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par AtCloseRange »

Rockatansky a écrit :
mannhunter a écrit :c'est le soleil qui finit de ravager mes derniers neurones, ça doit être ça...je vais finir comme Nicolas Cage dans le film. :)
Tiens, pour la peine:

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En fait l'affiche me dit quelque chose, je crois que c'était nul non ?
Parfois je le mélange avec Cop (Lesley Ann Warren oblige et une ambiance pas si éloignée) si bien que je ne sais plus si c'est intéressant ou pas.
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Re: Embrasse-moi vampire (Robert Bierman - 1988)

Message par Barry Egan »

J'ai ramené le blu-ray de la RNAC cet après-midi, édition soignée, le film bénéficie d'une bonne image (au départ, la première bobine laisse croire au pire puis ça s'améliore grandement), le boitier d'un petit livret, et on a droit à un bonus intéressant d'une demie-heure qui fait légèrement doublon avec le livret mais pas mal fichu. Le film est légèrement plus long que sur le DVD, certains passages ne sont pas doublés en VF et passent directement en VOST.

Ça devait être mon 4ème visionnage du film en quinze ans (la première fois c'était quelques mois après "After Hours", je me demandais ce que le scénariste avait pu faire par la suite), et son ambiguïté tonale (faut-il rire ou avoir peur ? a-t-on le droit de se sentir ému devant quelqu'un qui ne maîtrise évidemment plus rien du tout ?) me saisit toujours pas mal. Les premières fois je focalisais bien entendu sur la performance de Cage mais plus ça avance, plus c'est cette plongée dans la psyché misérable d'un cadre à la vie affective zéro qui me remue. Alors qu'après une heure, on s'attendrait à ce que l'intrigue soit terminée, le scénario envoie son personnage principal encore plus bas dans ses méandres et dans sa solitude auto-infligée. En face de Cage, Maria Conchita Alonso s'en sort vraiment bien dans un rôle qui aurait pu dégénérer dans le rôle de la victime sans défense, en laissant suggérer qu'elle trouve malgré tout le "vampire" intriguant et peut-être même désirable, faisant figure de remède invisible à la situation psychologique du fou, ne lui servant au fond, ce qui constitue la tragédie cachée de l'œuvre, qu'à se confirmer son propre délire. Parce qu'on ne sait pas vraiment par quel bout le prendre, ce "Vampire's Kiss" reste un mystère entier. Ce qui est certain pour moi, c'est que ça a toujours été un bon film.
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