Rodrigo Sorogoyen

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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ed
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Rodrigo Sorogoyen

Message par ed »

Aujourd'hui était présenté, à Cannes Première, le nouveau film du réalisateur, As bestas.

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Parmi les premiers retours, celui de Cyprien Caddeo de l'Huma : "Le meilleur film de la sélection cannoise n’est pas en compétition". Bon, Cannes est autant un festival de cinéma que de petites phrases, mais de fait, le film trouve tout de même d'emblée sa place parmi mes grosses attentes de l'année, dans la mesure où les trois films précédents de Sorogoyen, Que dios nos perdone (enquête traque d'un serial-killer), El Reino (thriller politique) et Madre (drame d'un deuil impossible) ont chacun témoigné d'une virtuosité singulière, avec une maîtrise du plan-séquence (que l'on pense au plan de Que dios nos perdone avec le saut par la fenêtre, à la scène d'El Reino où Manuel va chercher les documents cachés par l'ancien trésorier du parti, à la scène d'ouverture de Madre) mais aussi d'une irréductibilité stricte au genre.
J'avoue n'avoir vu ni Stockholm (2013) ni la série Antidisturbios.

Des topics existent déjà sur certains de ses films :
Que dios nos perdone
El Reino
Madre
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cinéfile
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par cinéfile »

Stockholm était une proposition très intrigante, aussi bien à l’écran - l’histoire d’une rencontre se déroulant le temps d’une nuit, qui après un début charmant sous le ton de la comédie romantique, virait vers une issue totalement étonnante au petit matin – que dans sa conception même : film entièrement financé par un crowdfunding et tourné en quelques jours avec une équipe technique bénévole. A noter qu’il s’agit du second long-métrage de Sorogoyen, qui avait auparavant coréalisé la comédie chorale 8 citas (2008), disponible avec STA sur Flixolé (https://flixole.com/). Stockholm est quant à lui disponible sur Univerciné en location à l’unité.

A titre personnel, j’ai été relativement agacé par Que dios nos perdone que j’avais trouvé rempli de clichés, de lourdeurs (avec notamment la figure du flic maniaque et dérangé joué par De La Torre lancé à la poursuivre du serial killer sur le refrain éculé du seul un taré peut mettre hors d’état de nuire un autre taré etc). De manière générale, j’ai été peu convaincu par cette vague de thrillers de ces dernières années en Espagne (La Isla Mínima et consorts). Il n’y a guère que La Colère d’un homme patient (unique réalisateur à ce jour de l’acteur Raúl Arévalo), qui tirait d’ailleurs plus vers le film noir, qui soit pour le coup un grand film.

El Reino était en revanche une grande et indéniable réussite, portée par l’énergie dévastatrice de De La Torre et d’une mise en scène brillante, en osmose avec son sujet.

Sentiment mitigé enfin au sujet de Madre, dont l’introduction époustouflante était en fait le court-métrage du même nom tourné par Sorogoyen 3-4 ans plus tôt, qu'il prolongeait en suivant cette mère dont le fils a disparu et qui venait hanter le lieu de sa disparition, pour un résultat qui m’avait semblé mou et longuet, hormis une belle scène intense de retrouvaille entre elle et le père de son fils vers la fin.

As Bestas semble très prometteur !
Dernière modification par cinéfile le 31 mai 22, 16:47, modifié 1 fois.
StateOfGrace
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par StateOfGrace »

L'un des cinéastes actuels que je préfère. J'aime sa façon de redonner de l'altitude au genre qu'il aborde, que ce soit le film de serial killer avec Que dios nos perdone, le thriller politique avec El Reino.

Madre est une sorte de thriller psychologique tendu comme un arc, maîtrisé de bout en bout, et au final dévastateur d'émotion.

Dire que j'attends As Bestas avec impatience est un euphémisme.
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Flol
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par Flol »

cinéfile a écrit : 28 mai 22, 00:39 A titre personnel, j’ai été relativement agacé par Que dios nos perdone que j’avais trouvé rempli de cliché, de lourdeurs (avec notamment la figure du flic maniaque et dérangé joué par De La Torre lancé à la poursuivre du serial killer sur le refrain éculé du seul un taré peut mettre hors d’état de nuire un autre taré etc). De manière générale, j’ai été peu convaincu par cette vague de thrillers de ces dernières années en Espagne (La Isla Mínima et consorts). Il n’y a guère que La Colère d’un homme patient (unique réalisateur à ce jour de l’acteur Raúl Arévalo), qui tirait d’ailleurs plus vers le film noir, qui soit pour le coup un grand film.

El Reino était en revanche une grande et indéniable réussite, portée par l’énergie dévastatrice de De La Torre et d’une mise en scène brillante, en osmose avec son sujet.

Sentiment mitigé enfin au sujet de Madre, dont l’introduction époustouflante était en fait le court-métrage du même nom tourné par Sorogoyen tourné 3-4 ans plus tôt, qu'il prolongeait en suivant cette mère dont le fils a disparu et qui venait hanter le lieu de sa disparition, pour un résultat qui m’avait semblé mou et longuet, hormis une belle scène intense de retrouvaille entre elle et le père de son fils vers la fin.
Exactement le même ressenti, au mot près, que cinéfile à propos de ces 3 films. 3 films qui puent le cinéma à plein nez, et qui me rendent Sorogoyen tout de même instantanément intéressants.
Et de ce que j'ai lu et entendu de son dernier opus, ça m'a l'air d'être encore un sacré morceau de peloche aussi étouffant que stressant. Très hâte de voir ça.
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par Nestor Almendros »

On n'aura pas à attendre longtemps: ça sort le 20 juillet.
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AtCloseRange
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par AtCloseRange »

Découvert Que dios nos perdone hier.
J'ai toujours du mal à être séduit par les tonnes de thrillers apparus dans toutes les parties du monde depuis le succès de Seven. Celui-là est plutôt réussi même si le mise en image façon Greengrass dans la première partie (qui disparaît quand l'un des deux policiers reprend l'enquête) est un peu pénible. Un peu marre aussi de la surenchère dans le sordide (merci pour les gros plans chez le médecin légiste).
Heureusement les acteurs sont bons (l'influence de The Shield est claire dans la caractérisation des deux policiers) et quelques scènes sortent du lot (la poursuite à pied, l'évasion du tueur par la fenêtre, quelques moments touchants avec la femme de ménage - même si c'est pas très #MeToo) donc le bilan est plutôt positif.
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par cinéfile »

Madre, son court-métrage de 2017 - qui deviendra le prologue du long-métrage de 2020 - est disponible pendant 15 jours sur le compte Dailymotion de Télérama (Fête du Court Métrage):

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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par cinéfile »

Toujours aussi fabuleux ce court-métrage ! (Malgré les 4 coupures pub Norauto en 17 minutes, merci bien Dailymotion...). Le choix du grand-angle pour donner à l’appartement un volume démesuré et angoissant, la lumière blanche irréelle lorsque le personnage s’approche de la fenêtre, les traces de l’enfant sur les photos et les dessins accrochés au mur en arrière-plan etc. Il y a tout un tas d’éléments qui créent une pure scène de cauchemar (cette situation matérialise la plus grande peur de tout parent) dont l’intégration dans le long-métrage faisait quelque part perdre une partie de sa dimension fantasmagorique, car tout le reste du film validait l’issue terrible de la perte, qu’on ne peut que simplement soupçonner dans le court. Pas revu depuis sa sortie en salles, Madre (2020) m’avait déçu, entre autres à cause de se raccord entre le court initial et sa (longue) suite , dont la couture n’était que trop visible à mon goût, malgré la continuité du grand-angle, banalisé du même coup par la répétition du dispositif.

L’ellipse brutale est devenue, au fur et à mesure des ses films, une marque de fabrique du cinéma de Sorogoyen (Estocolmo, Que Dios nos perdone, Madre, As Bestas), dont j’admire comme beaucoup la science de la scène, de la montée en tension, mais qui ne me convainc pas tout le temps sur un film entier. As Bestas est indéniablement un (très) bon film, mais sa deuxième partie ne fonctionne pas si bien que ça. Elle repose notamment sur la longue séquence d’explication tendue entre la mère (M. Fois) et sa fille rendue trop déséquilibrée par l’absence quasi totale de cette dernière dans la première partie - que ce soit à l’écran ou dans ce que le film veut suggérer de la vie du couple - qui nous fait prendre automatiquement le parti de la mère, qu’à la différence de la fille vivant loin de ses parents, nous avons côtoyée dans leur situation sur place.

Découvert il y a peu, 8 Citas (son premier long, en fait un co-réalisation sous forme d’un film à sketches sur les différentes étapes d’une relation amoureuse) est sympathiquement anecdotique et ne présage en rien de la carrière future du réalisateur. Sauf à faire un parallèle sur sa capacité à construire et faire évoluer rapidement une séquence à partir d’une situation donnée telle que le permet le principe d’un sketch. Mais dans le cas de 8 Citas, l’inégalité inhérente à ce genre de projets et le côté oubliable de l’ensemble le distinguent de la suite.

Revu cet automne en salle, El Reino est en revanche – et sans nul doute (avec Madre version court-métrage) - son meilleur film à ce jour. Et quel film ! Pas d’ellipse cette fois, mais un récit qui colle au corps, ambigu comme il faut (on suit un personnage peu aimable sur le papier, mais auquel la présence phénoménale d’Antonio de la Torre et la qualité pathétique du portrait d’un homme acculé rendent paradoxalement attachant), tendu et parfois hilarant (une scène d’anthologie sur le balcon avec Luis Zahera, qui a bien mérité sa reconnaissance actuelle post As Bestas). Qué grande la película !
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Re: Rodrigo Sorogoyen

Message par Flol »

cinéfile a écrit : 18 mars 23, 14:29(une scène d’anthologie sur le balcon avec Luis Zahera, qui a bien mérité sa reconnaissance actuelle post As Bestas)
Oh mais oui, c'était déjà lui dans cette scène. :o
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(à peine un regard de taré, le type)
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