C'ETAIENT DES HOMMES et LE TRAIN SIFFLERA TROIS FOIS sont mes deux Zinneman préférés sur l'ensemble de sa filmo, très inégale et allant du médiocre au très bon par gradations erratiques.
Je suis content
de voir que quelqu'un a mentionné C'ETAIENT DES HOMMES. Cette histoire pathétiquement sobre, néo-réaliste et psychologique de mutilés de guerre devant apprendre à revivre est très belle, très juste. Le film sert son sujet sans plus, sans aucune esbrouffe et est inoubliable en effet par sa charge émotionnelle. Mais je l'ai vu étant petit garçon : guère de souvenir de la mise en scène, des plans, des séquences, mais un souvenir très vif du contenu, de l'émotion qu'il suscitait en moi. Souvenir inaltérable = bon film. La preuve par la mémoire en l'occurence mais une revision s'imposera un jour ou l'autre. Il le faut régulièrement, de toute manière, quand il s'agit d'un bon film ou d'un film qu'on a trouvé bon. Ou des deux à la fois.
Et le débat HIGH NOON vs Sturges m'a intéressé.
Personnellement Sturges me semble en effet un formaliste mais un formaliste "minimal" qui conserve une humanité constante. C'est peut-être un formaliste sans le savoir comme on disait que Hawks était un génie malgré lui mais ces formules n'ont pas de sens. Ils savent ce qu'ils font, c'est évident. Et Zinneman aussi bien sûr. Je m'inscrit en faux contre l'analyse de Bazin qui démolit HIGH NOON. HIGH NOON est un très beau film. Son contexte maccarthyste est une chose mais le film a une porté intemporelle et universelle, comme tout chef-d'oeuvre authentique sa résonnance ne se limite pas aux circonstances contingentes de sa création. C'est pourquoi en 2004 on peut aimer HIGH NOON : chacun peut s'y retrouver. Le commentaire répétitif de Tiomkin est efficace, obsédant à mesure que le film s'avance vers son terme, sa suprise finale.
Et Floyd Crosby était un grand directeur photo avant même la série Edgar Poe de Corman : la preuve avec ce film.
Pour en revenir à Sturges :
- FORT BRAVO (1950 ou approx)
- REGLEMENT DE COMPTE À OK CORRAL
- LE DERNIER TRAIN DE GUN HILL (1958)
- HOUR OF THE GUN [Sept secondes en enfer] (USA 1967 ou 1968)
- LE TRESOR DU PENDU (Jack ... and the law (?) de mémoire) (USA 1958 (?) ) avec Robert Taylor
- DESTINATION ZEBRA, STATION POLAIRE (1968)
- MAROONED [Les naufragés de l'espace] (USA 1969) enfin réédité en zone 1 et admirable
- McQ [Un silencieux au bout du canon] (USA 1974)
- THE EAGLE HAS LANDED [L'aigle s'est envolé] (USA 1976)
sont des films allant du bon au très bon (parfois d'une séquence à l'autre à l'intérieur d'un même film, faut-il préciser malgré tout) à tout point de vue.
Je dirais même que le bilan est supérieur à celui de Zinneman quantitativement du point de vue qualitatif !
Et ce en dépit d'une modestie absolue et d'une absence totale de revendication discursive ou formelle. Le formalisme est consubstantiel à Sturges mais il n'est pas revendiqué : d'où sa force de persuasion, son efficacité. Il est de la même race que Siegel de ce point de vue même si moins incisif, moins pénétrant, moins mature que Siegel, c'est évident. Encore que LE DERNIER TRAIN DE GUN HILL par exemple... et on peut en citer d'autres parmi les titres cités supra, qui tiennent la comparaison. Même son remake de Kurosawa est supportable et appréciable pour ces raisons.