Le Cinéma muet

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Tancrède
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Re: Le cinéma muet

Message par Tancrède »

merci ann
allen john
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

THE ARTIST!!!!!!!!! :shock: :D :mrgreen:
bruce randylan a écrit :
Jeremy Fox a écrit :
Ce n'était pas très difficile cela dit. Et effectivement, ce sont deux superbes réussites à tout points de vue.
Ce qui est surtout remarquable dans ces 2 films c'est le travail pour obtenir le style visuel des films de l'époque (couleur, grain, mise en scène, format de l'image, musique). J'ose espérer sans trop de crainte que dans un film au 1er degré comme The artist, le résultat devrait être sensationnel.

Et puis un ami a croisé l'équipe du film à une projection de l'aurore à la cinémathèque lors de la préparation du film. Le réalisateur voulait montrer aux acteurs ce à quoi ils devaient se référer. Une sorte de bible. Ca m'avait tout de suite beaucoup alléché comme projet. :)
J'ai vu la bande-annonce, je n'en suis pas revenu. On a tendance à imaginer en effet qu'il suffit de quelques gestes grandiloquents, de costumes vagues, de film accéléré, et le tour est joué. La bande-annonce révèle un travail corporel, facial, dans le mouvement, l'espace. Les costumes renvoient précisément à 1927, les nuances de gris ont l'air authentique. Aucun effort stupide pour vieillir le film n'a été produit, et les acteurs ne donnent pas l'impression de grossir le trait. Pour l'instant c'est très alléchant... reste à savoir ce que sera le travail sur la musique, la bande-son de la BA respire le temporaire à plein nez...
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Voilà le dossier de presse de The Artist. On y apprend tout le travail réalisé en amont ainsi sur la photo et la musique sur le plateau. Ca a l'air d'être du sérieux. Les critiques américaines sont dithyrambiques.
Music Man
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Re: Le cinéma muet

Message par Music Man »

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MANON LESCAUT de Arthur ROBISON – ALLEMAGNE – 1926
Avec Lya DE PUTTI et Vladimir Gajdarov

Adaptation édulcorée du roman de l’abbé Prévost.

Un jeune homme de noble famille, destiné à rentrer dans les ordres s’éprend d’une jeune femme frivole, infidèle et dépensière. Afin de pouvoir lui offrir la vie aisée dont elle a besoin pour s’épanouir, le chevalier se fait admettre dans les cercles de jeu, tandis que sa belle le trompe, sans trop de scrupules…


En dépit de la copie de qualité très médiocre (image constamment floue Heureusement que les acteurs sont outrageusement maquillés, ce qui permet de discerner leurs traits), et du silence total (aucun accompagnement musical), cette adaptation de ce fameux roman est tellement réussie qu’on en oublie rapidement ces petits soucis : le film est vivant, expressif notamment dans sa seconde partie. Le petit monde assez malsain qui évolue autour du couple est dépeint avec acuité et sarcasme, comme dans des gravures animées, avec un souci constant du détail. La scène de déportation des filles de joie et prisonnières est excellente.
Et évidemment, le personnage central, à la fois ou successivement inconstant, pervers, frivole mais passionné est fort bien incarné par la vénéneuse Lya de Putti, une des vamps les moins affectées du cinéma muet, et probablement les plus efficaces. De part la qualité de son jeu et surtout sa sensualité, elle supplante de loin les vamps du cinéma américains des années 20(dommage que sa carrière ait sombré si vite après , avec le parlant : la légende prétend même qu’elle avait sombré dans la misère la plus noire et qu’elle serait décédée en 1931 en avalant un os de poulet de travers en se jetant avidement sur un repas gentiment offert à l’actrice qui mourrait de faim – les versions divergent néanmoins).
En tous les cas, elle est brillante ici. A un moment, il m’a semblé reconnaître Marlene Dietrich : j’ai vérifié, c’était bien elle !
allen john
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

Ca y est!! je l'ai vu!

Old ironsides (James Cruze, 1926)
Cruze, oublié aujourd"hui, a réalisé au moins un film important, The Covered Wagon. On peut estimer qu'une large part de ce que va être le western vient en effet de ce long métrage spectaculaire. Il ne faut pas s'étonner de trouver les mêmes ambitions dans un film commme Old ironsides, qui entremêle l'histoire sublimée par le patriotisme, l'anecdote épique et les histoires privées de quelques personnages.

Les horizons maritimes sont, si j'ose dire dans l'air durant les années 20, représentant un défi pour les cinéastes, ce que confirment beaucoup de films, classiques (The sea hawk, 1924, de Frank Lloyd, The black pirate, 1926, de Albert Parker avec Douglas Fairbanks), ou moins (The Viking, 1928, de Roy william Neill). Toute personne qui a vu également le très beau Ben Hur (1925) de Fred Niblo doit avoir en tête les spectaculaires scènes de combat maritime. L'objectif premier d'un film comme celui-ci est avant tout de participer à cette compétition stimulante, et c'est bien sur ce que recherche la Paramount. mais Cruze, qui vient après The Sea Hawk, a sur ce dernier des avantages: d'une part, il parle d'histoire là ou le film de Lloyd jouait sur une invention romantique. Ensuite, Cruze a donné le tout pour le tout en livrant une mise en scène énergique, volontariste et en obtenant de ses acteurs des performances qui vont également dans cette direction.

Charles Farrell est un jeune homme naïf qui veut s'engager sur la frégate Constitution (Surnommée Old Ironsides), afin de participer à la lutte contre les pirates qui infestent la méditerranée. Il en va de l'avenir du commerce et de la jeune République des Etats-Unis... mais un Wallace Beery très roublard qui cherche des marins pour son bateau (L'Esther) va lui tendre un piège, ainsi qu'à un cannonier interprété par George Bancroft. Esther Ralston interprète quant à elle une passagère du bateau, qui va très vite tomber amoureuse de Farrell, et réciproquement.

Farrell ne sera une star qu'après ce film. pour l'instant, tout s'est passé comme si les studios ne savaient pas quoi faire de ce grand gaillard gauche. mais Cruze lui donne un emploi qui lui convient: fragile, indécis, sachant exprimer l'incertitude de l'amour de façon physique, et faire passer la soudaine maitrise de son corps, sans que ça ait l'air plaqué, Farrell développe déjà avec ce film un personnage dont Borzage, Murnau ou Hawks saurant se souvenir à la Fox. Face à Esther Ralston, dans la fameuse scène de séduction durant laquelle la jeune femme laisse le vent dessiner avec précision les contours de sa silhouette, il est irrésistible. il n'est pas le seul, remarquez. La présence de bancrift et de Beery, lui-même au générique de The Sea Hawk, aussi, permet de compenser en picaresque et en bourru le coté hésitant assumé de la vedette, un peu comme fFord met la même année George O'Brien un peu en retrait par rapport à l'action de Three bad men, incarnée par les vieux briscards Tom Sanstchi, J. Farrell McDonald et Frank Campeau...

Un film comme celui-ci nous rappelle opportunément que le cionéma muet était en 1926 à son zénith. Le soin apporté à une telle production était énorme, et le cinéma parlant accusera le coup avant de pouvoir reprendre le chemin du spectaculaire! Un film à ranger dans la même catégorie que Wings ou The big parade, avec une réserve quand même: le message ici, s'il y en a un, est surtout de donner du grand, du beau spectacle. Comme avec The covered wagon, on est un peu dans la commémoration figée d'actes fondateurs, et l'histoire privée des amours de ces tourtereaux n'est que la jolie cerise sur le beau gâteau...

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 60144.html
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Re: Le cinéma muet

Message par someone1600 »

Et tu as vu ca comment ? :?
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hellrick
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Re: Le cinéma muet

Message par hellrick »

Je ne sais pas trop où demander ça donc...
J'ai le double dvd d'Haxan, pour découvrir le film à votre avis faut il mieux commencer par la version originale ou par le remontage avec commentaire (sachant que je dois faire un tit papier dessus et que je pense pas pouvoir le regarder 2 fois tout de suite)
Merci
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allen john
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

hellrick a écrit :Je ne sais pas trop où demander ça donc...
J'ai le double dvd d'Haxan, pour découvrir le film à votre avis faut il mieux commencer par la version originale ou par le remontage avec commentaire (sachant que je dois faire un tit papier dessus et que je pense pas pouvoir le regarder 2 fois tout de suite)
Merci
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

Cleopatra, ou........?

Un film muet dont deux minutes ont été retrouvées, c'est frustrant, à plus forte raison quand on se trompe de film. On annonce Cleopatra, de 1917, avec Theda Bara, mais ce pourrait être le sulfureux "Queen of Sheba", avec Betty Blythe: un autre film perdu mythique, un autre film Fox.

Pour les gens qui en ont déja entendu parler, toutefois, ne nous emballons pas: l'actrice est habillée.
:roll:

A vous de juger:
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

Her sister from Paris (Sidney Franklin, 1925)
A l'écart de la comédie burlesque, une frange plus sophistiquée est apparue, et vit ses plus beles heures dans les années 20. On pense bien évidemment à Lubitsch et ses magnifiques films muets Américains, temples de la subtilité, mais on n'en est pas très loin, en fait. Sidney Franklin est un réalisateur plus modeste, mais dont on ne peut pas dire qu'il ne soit pas capable, et avec Constance Talmadge et Ronald Colman, qui ont travaillé ensemble et avec le même réalisateur et scénariste (Hans Kräly, qui a aussi travaillé avec Lubitsch, comme quoi tout se tient), on obtient un résultat des plus enthousiasmants.

A Vienne, Joseph Weyringer et sa femme Helen sont en pleine crise. Elle lui reproche de ne plus l'aimer, et il veut clairement aller voir aileurs. Elle lui en donne l'occasion en "retournant chez sa mère", mais en fait, elle va voir sa soeur, une célèbre artiste en tournée. elles sont jumelles, et la seule différence physique entre elles, c'est un grain de beauté envahissant sous la lèvre inférieure. La soeur, dont le nom de scène est La Perry, suggère à Helen de regagner le coeur de son époux en jouant avec lui: elle refaçonne son apparence, jusqu'à lui faire d'elle une copie conforme d'elle-même. Ainsi affublée, une Helen gonflée à bloc se lance, sous l'identité de sa soeur jumelle, à la conquète de son propre mari.

Le scénario de Kräly fonctionne très bien, si ce n'était un petit détail au début: la façon dont on introduit la soeur jumelle dont manifestement Joseph n'a jamais entendu parler est un peu excessive. Sinon, c'est un bonheur de tous les instants. Un troisième personnage joué par George K. arthur sert de faire-valoir en même temps que de concurrent auprès de Joseph pour les affections de sa "belle-soeur", et la façon dont Helen-La Perry lorsqu'elle voit les deux hommes embrasse goulument l'ami de celui-ci en l'appelant "cher beau-frère" est le point de départ des réjouissances. Colman est splendide, jouant sur l'embarras et le tourment lié au dilemme de la situation. Arthur joue de son visage lunaire, et rappelle un peu le rôle de Creighton hale dans The marriage circle, de Lubitsch. Enfin, Constance Talmadge, la star, est magnifique, d'une part avec deux rôles de jumelles aux caractères dissemblables, mais surtout en Helen timide qui fait semblant d'être sa soeur extravertie, et qui en fait souvent légèrement trop: c'est un régal. La façon dont elle utlilse ses yeux, la mobilité de son beau visage, est irrésistible.

A la fin, le film se conclut sur un fascinant passage de relais, lorsque Joseph dit à celle qu'il croit être sa belle soeur que ça ne peut pas marcher, et qu'il se tourne vers La Perry en croyant qu'elle est son épouse. En un jeu de regard de Constance Talmadge à elle-même, les deux femmes échangent leur personnalité, et Helen "revient", un moment touchant et troublant, qui annonce une fin qui donne des légers frissons de bonheur ciinématographique...

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 34823.html
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Supfiction
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Re: Le cinéma muet

Message par Supfiction »

allen john a écrit :Cleopatra, ou........?

Un film muet dont deux minutes ont été retrouvées, c'est frustrant, à plus forte raison quand on se trompe de film. On annonce Cleopatra, de 1917, avec Theda Bara, mais ce pourrait être le sulfureux "Queen of Sheba", avec Betty Blythe: un autre film perdu mythique, un autre film Fox.

Pour les gens qui en ont déja entendu parler, toutefois, ne nous emballons pas: l'actrice est habillée.
:roll:

A vous de juger:
Oui.. effectivement, cela ne ressemble pas tellement à Cleopatre! Quant aux deux minutes en question, il s'agit des mêmes 10 secondes passant en boucle.

A propos de Theda Bara, je crois que c'est à elle que l'on doit le mot "vamp", en référence à son film "A Fool There Was" (1915) dans lequel elle jouait le rôle d'un vampire "sexy" (selon les critères de l'époque).

http://www.youtube.com/watch?v=xlSOvQn0dOQ
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Re: Le cinéma muet

Message par Supfiction »

http://www.youtube.com/watch?v=fVBLHr4i ... re=related

Interview de Theda Bara datant de 1936! Dans lequel elle parle du muet et explique d'autre part qu'il n'y avait pas de département "recherche" pour Cleopatra, et qu'elle avait dû faire ses recherches elle-même pour le rôle..

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Je ne résiste pas à l'envie de mettre ces 3 clichés :

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Vous aurez reconnu l'hommage.
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

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The Magician (1926, Rex Ingram) avec Paul Wegener, Alice Terry, Ivan Petrovich et Firmin Gémier

Margaret Dauncey (A. Terry), une femme sculpteur, a été victime d'un grave accident. Opérée par le Dr Burdon (I. Petrovich), elle devient la proie du mystérieux Oliver Haddo (P. Wegener)...

Ce film de Rex Ingram est une adaptation d'une oeuvre de William Somerset Maughan qui s'inpira de la vie d'Aleister Crowley, un pratiquant de l'occultisme. Rex Ingram travaillait déjà depuis plusieurs années dans son propre studio, près de Nice, qui devint plus tard le Studio de la Victorine. Pour ce film, il utilise abondamment les extérieurs: Paris, Monte-Carlo, Nice et Sospel. Il a rassemblé une distribution internationale impressionnante avec l'allemand Paul Wegener, alias Le Golem, sa femme Alice Terry, le serbe Ivan Petrovich qui apparait dans nombres de ses films ainsi que chez Léonce Perret (qui utilisait les studios d'Ingram) et le grand directeur de théâtre et acteur, Firmin Gémier. On pouvait attendre des merveilles avec de tels noms à l'affiche. Malheureusement, la structure dramatique du film est déficiente. Alors qu'on pouvait espérer une montée en puissance de l'angoisse face aux agissements du sinistre Haddo, joué par Wegener, il n'en est rien. Par contre, comme toujours chez Ingram, il y a un soin remrquable au niveau de l'image et de l'atmosphère. Son complice John Seitz fait des merveilles lorsqu'il photographie le laboratoire de Wegener entouré de cornues et autres instruments.
Le film contient aussi une superbe séquence avec des faunes qui dansent une bacchanale endiablée. Wegener a hypnotisé Alice Terry, sa proie, et lui fait voir cette scène sensuelle et violente pour lui montrer son pouvoir. C'est une scène qui semble sortie de Häxan, mais qui est plus chorégraphiée. Le final du film se situe dans une tour par une nuit d'orage. Le magicien Haddo veut donner une vie à une créature de sa confection en prenant le sang d'une jeune femme blonde, aux yeux bleus, c'est-à-dire Margaret (Alice Terry). Le film se termine par l'explosion de la tour. C'est un avant-goût de la fameuse scène de Frankenstein (J. Whale) qui ne sera réalisé que 5 ans plus tard. On peut penser que cette scène a influencé James Whale pour son film. Pour ce qui est de l'interprétation, Alice Terry est assez impavide, Paul Wegener utilise son visage lourd et massif pour nous faire peur et Ivan Petrovich est simplement décoratif. Il est fort dommage qu'Ingram n'est pas fait l'effort de créer de vrais personnages en développant les caractérisations. Mais, néanmoins, ce très beau livre d'images vaut le coup d'oeil. le film a été restauré récemment et est maintenant disponible dans la collection Warner Archive.
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Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

Ann Harding a écrit :ImageImage
The Magician (1926, Rex Ingram) avec Paul Wegener, Alice Terry, Ivan Petrovich et Firmin Gémier

Margaret Dauncey (A. Terry), une femme sculpteur, a été victime d'un grave accident. Opérée par le Dr Burdon (I. Petrovich), elle devient la proie du mystérieux Oliver Haddo (P. Wegener)...

Ce film de Rex Ingram est une adaptation d'une oeuvre de William Somerset Maughan qui s'inpira de la vie d'Aleister Crowley, un pratiquant de l'occultisme. Rex Ingram travaillait déjà depuis plusieurs années dans son propre studio, près de Nice, qui devint plus tard le Studio de la Victorine. Pour ce film, il utilise abondamment les extérieurs: Paris, Monte-Carlo, Nice et Sospel. Il a rassemblé une distribution internationale impressionnante avec l'allemand Paul Wegener, alias Le Golem, sa femme Alice Terry, le serbe Ivan Petrovich qui apparait dans nombres de ses films ainsi que chez Léonce Perret (qui utilisait les studios d'Ingram) et le grand directeur de théâtre et acteur, Firmin Gémier. On pouvait attendre des merveilles avec de tels noms à l'affiche. Malheureusement, la structure dramatique du film est déficiente. Alors qu'on pouvait espérer une montée en puissance de l'angoisse face aux agissements du sinistre Haddo, joué par Wegener, il n'en est rien. Par contre, comme toujours chez Ingram, il y a un soin remrquable au niveau de l'image et de l'atmosphère. Son complice John Seitz fait des merveilles lorsqu'il photographie le laboratoire de Wegener entouré de cornues et autres instruments.
Le film contient aussi une superbe séquence avec des faunes qui dansent une bacchanale endiablée. Wegener a hypnotisé Alice Terry, sa proie, et lui fait voir cette scène sensuelle et violente pour lui montrer son pouvoir. C'est une scène qui semble sortie de Häxan, mais qui est plus chorégraphiée. Le final du film se situe dans une tour par une nuit d'orage. Le magicien Haddo veut donner une vie à une créature de sa confection en prenant le sang d'une jeune femme blonde, aux yeux bleus, c'est-à-dire Margaret (Alice Terry). Le film se termine par l'explosion de la tour. C'est un avant-goût de la fameuse scène de Frankenstein (J. Whale) qui ne sera réalisé que 5 ans plus tard. On peut penser que cette scène a influencé James Whale pour son film. Pour ce qui est de l'interprétation, Alice Terry est assez impavide, Paul Wegener utilise son visage lourd et massif pour nous faire peur et Ivan Petrovich est simplement décoratif. Il est fort dommage qu'Ingram n'est pas fait l'effort de créer de vrais personnages en développant les caractérisations. Mais, néanmoins, ce très beau livre d'images vaut le coup d'oeil. le film a été restauré récemment et est maintenant disponible dans la collection Warner Archive.
C'est vrai qu'Ingram avec ce film se laisse aller à ses penchants décoratifs. Mais il est bon de pouvoir voir ses films et de pouvoir échanger dessus! Pour le plaisir de repérer Powell, pour le baroque, et rien que parce que c'est une sacrée curiosité, je crois que je ne peux pas être autre chose qu'indulgent avec ce film, et avec Mare Nostrum!
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Ann Harding
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Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Tu as bien raison Allen John, Rex Ingram est un grand réalisateur. d'ailleurs, je viens de revoir Scaramouche avec un énorme plaisir:
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Scaramouche (1923, Rex Ingram) avec Ramon Novarro, Alice Terry, Lewis Stone et Lloyd Ingraham

André-Louis Moreau (R. Novarro) assiste impuissant au duel qui provoque la mort de son ami Philippe de Vilmorin. Il jure de venger sa mort face à son meurtrier le Marquis de la Tour d'Azyr (L. Stone). Or celui-ci cherche à épouser Aline de Kercadiou (A. Terry), l'amie d'enfance d'André...

En 1923, Rex Ingram adapte le roman de Rafael Sabatini situé durant la Révolution Française. Cet auteur de roman d'aventures est en vogue avec les adaptations successives de The Sea Hawk (1924, F. Lloyd), Captain Blood (1924, D. Smith) et Bardelys The Magnificent (1926, K. Vidor). Ingram a choisi Ramon Novarro, un jeune acteur d'origine mexicaine qui avait déjà joué dans The Four Horsemen of the Apocalypse (1921, R. Ingram) (où il n'était que figurant) et qui avait été révélé au public dans The Prisoner of Zenda (1922, R. Ingram) en Rupert of Hentzau. C'est un choix particulièrement judicieux car Novarro est un acteur sensible et intelligent, tout à fait à même de donner tout son poids au rôle de Moreau. Contrairement au remake de 1952 avec Stewart Granger qui est surtout un film de cape et d'épée tourné vers la comédie, le film d'Ingram est baigné dans l'atmosphère révolutionnaire et se veut nettement plus tragique. Comme toujours avec Ingram, la reconstitution du XVIIIème siècle se veut fidèle jusqu'au plus petit bouton. Et tous les décors respirent l'atmosphère de l'époque avec leurs chemins pierreux et les petites maisons de paysans semblent sortir d'un tableau de l'époque.
De ce point de vue, le film est infiniment supérieur à la production MGM de 1952, technicolorée en diable, mais absolument pas authentique. Les éclairages de John F. Seitz animent ces tableaux avec une utilisation de la profondeur de champ et du chiaroscuro qui n'avait pas son égal en ce début des années 20. Chaque personnage est baigné dans une lumière qui lui donne un relief particulier. Les seconds rôles sont choisis avec une attention particulière. Que ce soit, le Lieutenant du roi obèse qui se lèche les babines ou un Danton plus vrai que nature avec ses cicatrices de la vérole. Visuellement, le film est un régal de tous les instants. Dramatiquement, le film tient parfaitement la route. S'il n'a pas un rythme endiablé, son intrigue suit son cour inexorable alors que la Révolution se fait de plus en plus sanglante. Les scènes de la Terreur avec sa populace avinée et avide de sang sont parmi les plus belles que l'ont puisse voir. La foule envahit les Tuileries et tue tout sur son passage. Quant à André-Louis Moreau qui ignore tout de ses origines, il devient un membre de l'assemblée révolutionnaire où sa maîtrise des armes fait merveille. Face à lui, le Marquis de la Tour d'Azyr est un aristocrate imbu de sa personne et de son rang. Lewis Stone est parfait dans ce rôle de méchant suave. Moreau découvrira bien tard qu'il est en fait le fils de cet aristocrate haï qu'il a failli tuer en duel. Alice Terry est une Aline fragile comme une porcelaine de Saxe. Au total, ce film d'Ingram est à découvrir d'urgence. Il est certainement sur bien des points une oeuvre supérieure au remake de 1952.
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