Le Cinéma muet

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Répondre
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Image (Marika: Dita Parlo)

Ungarische Rhapsodie (1928, Hanns Schwarz) avec Dita Parlo, Willy Fritsch et Lil Dagover

En Hongrie, le lieutenant Turoczy (W. Fritsch) bien qu'issu d'une famille aristocratique est sans le sou. En tant qu'officier, il ne peut se marier sans avoir une fortune d'au moins 45000 couronnes. Or, il est amoureux de la jolie Marika (D. Parlo)...

Ce film d'Hanns Schwarz nous plonge dans un univers d'opérette austro-hongroise avec les beaux officiers en uniforme de hussard et les femmes volages de généraux. Evidemment, nous sommes au cinéma muet, donc les czardas endiablées chantées par Willy Frisch ne sont que suggérées à l'écran par un remarquable montage de trépignements de pieds et de bouteilles en vibrations sur les tables. Hanns Schwarz a réalisé un superbe Die wunderbare Lüge der Nina Petrowna (1929) où Brigitte Helm illuminait l'écran. Ici, les deux actrices principales sont également superbement photographiées par Carl Hoffmann. Dita Parlo offre son délicieux visage mobile et émouvant tandis que Lil Dagover se montre sensuelle et provocante. L'histoire est totalement prévisible; mais, la qualité de l'interprétation, du montage et de la mise en scène en font un film au-dessus de la moyenne. Willy Fritsch se laisse séduire par la femme du général (Lil Dagover) au grand dam d'un violoniste qui la convoitait. Il le dénonce à son mari qui arrive au grand galop pour les surprendre en flagrant délit. Mais, Marika (D. Parlo) qui a tout vu, le sauvera du déshonneur en s'exposant elle-même. Il y a là une formidable séquence où Marika imagine les conséquences pour le lieutenant: une courte séquence en montage rapide qui nous expose ses pensées et sa décision immédiate de se porter à son secours. Encore un très joli film d'Hanns Schwarz.
joe-ernst
Décorateur
Messages : 3820
Inscription : 20 mars 06, 15:11
Localisation :

Re: Le cinéma muet

Message par joe-ernst »

Ann Harding a écrit :Ungarische Rhapsodie (1928, Hanns Schwarz) avec Dita Parlo, Willy Fritsch et Lil Dagover
Amusant, je l'ai ajouté il y a moins d'une heure à ma liste de films muets à acquérir, donc avant de lire ton avis. Et merci pour celui-ci ! :D
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
allen john
Assistant opérateur
Messages : 2010
Inscription : 17 mai 06, 19:00
Localisation : Une maison bleue
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

ROMEO BOSETTI

Parfois, le cinéma des origines a d'indicibles trésors, en ces films qui certes ne paient pas de mine, mais portent en eux un potentiel poétique inattendu. C'est le cas avec les cinq films de Roméo Bosetti édités sur deux coffrets il y a 18 mois... Prémices du surréalisme, sous-entendus inattendus, bouffonnerie gentille de rigueur, et potirons doués de vie... vive le cinéma!

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 75178.html
allen john
Assistant opérateur
Messages : 2010
Inscription : 17 mai 06, 19:00
Localisation : Une maison bleue
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par allen john »

http://filmabinitio.blogspot.com/

Un blog qui fouille dans les images disponibles et immédiatement visibles des films des débuts du cinéma. des ambitions démesurées, beaucoup d'images en effet, mais pas de message depuis novembre. on encourage!!
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Image

The Cat and the Canary (La Volonté du mort, 1927) de Paul Leni avec Laura La Plante, Creighton Hale et Tully Marshall

Le vieux West est mort en laissant un testament qui ne doit être ouvert que 20 ans plus tard. A l'heure dite, les héritiers putatifs se retrouvent dans le vieux château poussiéreux. Une nuit d'angoisse et de frayeur les attend...

Le réalisateur allemand Paul Leni produit là un film qui combine comédie et horreur pour la Universal. On retrouve tous les clichés du film gothique: château hanté, gouvernante à l'allure sinistre, passages secrets et mystères autour d'un joyau. Si on retrouve le style expressionniste, dont Leni était un adapte avec Das Wachsfigurenkabinett (1924), l'élément comique est à mon avis moins réussi. Creighton Hale (avec ses lunettes à la Harold Lloyd) joue le jeune effarouché et Flora Finch est la vieille tante qui a peur des fantômes. Tully Marshall en notaire a la tête de l'emploi (comme toujours!). Mais, tout ce petit monde ne réussit pas totalement à capter mon intérêt. Laura La Plante était meilleure dans la comédie pure comme Skinner's Dress Suit (1926, Wm A. Seiter). Ici en héritière terrifiée, elle manque de relief. Il reste néanmoins, la superbe cinématographie. Pour l'apprécier au mieux, il faut absolument voir le DVD de la restauration Photoplay réalisée à partir de copie nitrate d'origine. C'est une pure merveille de contrastes chatoyants avec des ombres d'un noir d'encre et des éclairs lumineux d'une incroyable finesse de grain. En plus, il y a une excellente musique (orchestrale) de Neil Brand qui souligne le mystère et le comique avec intelligence.
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Image (I. Mosjoukine et B. Helm)

Manolescu: Der König der Hochstapler (1929, V. Tourjansky) avec Ivan Mosjoukine, Brigitte Helm, Heinrich George et Dita Parlo

George Manolescu (I. Mosjoukine) rencontre la troublante et mystérieuse Cleo (B. Helm) à bord du train Paris-Monte-Carlo. Envouté, il devient voleur, escroc et faux-monnayeur pour lui offrir le train de vie qu'elle réclame...

La carrière d'Ivan Mosjoukine est fort complexe. Il passe de la Russie Impériale à la France, puis fait une courte escale à Hollywood en 1927 pour un seul film (Surrender d'E. Sloman) avant de retourner en Europe faire des films en Allemagne. De retour en France, au moment de l'arrivée du parlant, il disparaît rapidement des premiers rôles miné par son accent russe et les mauvais films. Pour Manolescu, une production allemande muette, il retrouve son compatriote Victor Tourjansky qui est lui aussi passé de l'autre côté du Rhin après un échec à Hollywood. Le film bénéficie d'une belle distribution avec Brigitte Helm en femme fatale et Dita Parlo en jeune innocente. L'intrigue ne me semble pas offrir, néanmoins, le type de personnage complexe que Mosjoukine interprétait fréquemment dans sa première période française (la meilleure). Il est un escroc victime d'une femme qui retrouve le chemin de l'honnêteté au contact de la pure Dita Parlo. C'est un film plus formaté que ceux de la période Albatros où comique et tragique faisait bon ménage. Cela dit, le film doit certainement recéler des beautés plastiques grâce à la photo de Carl Hoffmann. Malheureusement, la hideuse copie que j'ai pu voir ne permet pas du tout de les apprécier. De même le jeu tout en nuances de Mosjoukine est parfois à peine perceptible tant son visage ressemble à un point blanc. Par contre, il semble que Tourjansky avait conservé son talent avec des mouvements de caméra remarquables comme celui où elle se déplace vers une fenêtre, arrive au niveau du carreau avant de passer au travers pour nous faire pénétrer à l'intérieur de la maison. Tout cela est totalement fluide et sans à-coups. Helm et Parlo offre un beau contraste dans les deux personnages féminins opposés. Ce n'est pas le meilleur film de Mosjoukine ; mais, c'est certainement un de ses meilleurs pour la période allemande.

Image
(I. Mosjoukine et V. Tourjansky)
joe-ernst
Décorateur
Messages : 3820
Inscription : 20 mars 06, 15:11
Localisation :

Re: Le cinéma muet

Message par joe-ernst »

Ann Harding a écrit :Manolescu: Der König der Hochstapler (1929, V. Tourjansky) avec Ivan Mosjoukine, Brigitte Helm, Heinrich George et Dita Parlo
Est-il disponible quelque part ?
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Non, le film n'est pas disponible en DVD commercialement.
joe-ernst
Décorateur
Messages : 3820
Inscription : 20 mars 06, 15:11
Localisation :

Re: Le cinéma muet

Message par joe-ernst »

Ann Harding a écrit :Non, le film n'est pas disponible en DVD commercialement.
Ben tant pis, mais merci pour ta réponse ! :wink:
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Image
Grace à ce DVD publié par Kino, j'ai découvert deux films passionnants de réalisatrices des années 10.

The Ocean Waif (1916, Alice Guy-Blaché) avec Doris Kenyon, Carlyle Blackwell et Edgar Norton

Image

Millie (D. Kenyon), une enfant trouvée, s'enfuit de la cabane de son père adoptif qui la bat. Elle trouve refuge dans une maison abandonnée. Mais, peu après, un écrivain, Donald Roberts (C. Blackwell) vient s'installer là pour écrire. Elle se cache dans le grenier...

Alice Guy fut la première réalisatrice de cinéma au monde (homme et femme confondus). Elle avait été embauchée comme secrétaire de Léon Gaumont peu de temps avant l'arrivée du cinématographe en 1895. Elle fut ignorée pendant des décennies par les historiens du cinéma. En 1910, elle quitta la France pour les USA avec son époux Herbert Blaché. The Ocean Waif appartient à sa carrière américaine. Le film ne nous ai pas parvenu dans sa totalité dû à la décomposition. Mais, il forme néanmoins un ensemble cohérent avec des intertitres pour remplacer les manques. Cette histoire simple filmée en décors naturels a énormément de charme ainsi que de l'humour. La jolie Doris Kenyon -qui deviendra une star quelques années plus tard- offre son beau visage à cette enfant perdue qui se métamorphose sous l'influence de l'écrivain qu'elle rencontre. Enfilant une vieille robe du siècle passé, elle devient une femme désirable plutôt que la sauvageonne qu'elle était. Il est amusant de reconnaitre Edgar Norton, qui jouera tant de domestiques comme dans Dr Jeckyll and Mr Hyde (1931), en valet de l'écrivain. Une scène a particulièrement retenu mon attention. Carlyle Blackwell prend dans ses bras Doris Kenyon alors que le vent secoue les herbes folles autour d'eux donnant à la scène un mouvement et une ampleur intéressante. Un joli film.

'49-'17 (1917, Ruth Ann Baldwin) avec Joseph W. Girard, Leo Pierson et Jean Hersholt

Image

Le vieux juge J.R. Brand (J. Girard) se souvient avec nostalgie de ses jeunes années dans l'ouest quand il était chercheur d'or. Il envoie son secrétaire Tom (L. Pierson) là-bas en lui demandant de recréer l'atmosphère des années 1849 dans Nugget Notch, la petite ville de l'ouest où il avait habité. Tom arrive sur place et embauche une troupe de comédiens qui travaillent sur un champ de foire...

Ce film écrit et réalisé par Ruth Ann Baldwin, dont je n'avais jamais entendu parler, m'a emballé. C'est une sorte de parodie de western avec une intrigue extrêmement habile. Son titre est une abbréviation de 1849-1917, marquant bien la marche du temps entre ses deux périodes. On recrée une ville de western artificiellement avec des acteurs qui font un 'show' sur l'ouest. Le juge qui veut se replonger dans cette atmosphère de Far West a un souvenir nostalgique de cette période. Il va passer un moment merveilleux dans cette ville peuplée de comédiens où l'on va même organiser une bagarre mémorable dans le saloon. Je suis toujours fascinée de voir à quel point le western -une invention encore récente en 1917- pouvait être parodié ou mis en décalage avec ses contemporains. Dans Wild and Woolly (1917), Douglas Fairbanks était lui aussi victime d'une reconstitution du Far West pour satisfaire son plaisir. Mais, au sein de la troupe de comédiens, il y a l'inquiétant Jim Raynor, superbement incarné par Jean Hersholt, le futur interprète de Greed (1924). Jim lui s'intéresse à l'argent qu'il pourrait soutirer au juge grâce à une escroquerie bien organisée. La réalisatrice mène son récit tambour battant dans la deuxième partie où s'entremêlent les souvenirs du juge, en flash-back, le complot de Jim et la vie au sein de la ville. Comme dans Wild and Woolly, la fiction rejoint la réalité lorsque Jim met en oeuvre ses méfaits. Un excellent film.
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

Image

He Who Gets Slapped (Larmes de Clown, 1924) de Victor Sjöström avec Lon Chaney, Norma Shearer, John Gilbert et Tully Marshall

Paul Beaumont (L. Chaney) se fait dérober sa découverte scientifique par le Baron Regnard (M. McDermott) ainsi que son épouse. Il devient clown de cirque pour un numéro où il se fait gifler...

Lon Chaney n'a jamais été meilleur que sous la direction de Victor Sjöström. Le grand réalisateur suèdois obtient de lui une caractérisation épurée et sans excès. Bien qu'il soit la star du film, Sjöström réussit à faire un film de réalisateur sans chercher à trop flatter l'égo de Chaney. Les autres personnages existent en dehors de Chaney and le récit ne cherche pas le rendre omniprésent. Et c'est là la différence principale entre les autres films de Lon et celui-ci. Il est le visage de l'homme qui va boire l'humiliation jusqu'à la lie. Ayant tout perdu, il n'est plus qu'un clown de cirque. Pire encore, son numéro consiste à se faire gifler rituellement tous les soirs devant un public hilare qui trouve un énorme plaisir devant cette torture publique. Le symbolisme est encore plus féroce avec ce coeur en tissu qu'on lui arrache tous les soirs pour le jeter sur la piste. Il n'est que le reflet du désespoir de Chaney amoureux de la belle écuyère Consuelo (N. Shearer pour une fois très sobre et juste). Elle aussi le frappe au visage par jeu. Dans cet univers très noir, on ne trouve que des âmes noires comme celle du Comte Mancini (T. Marshall toujours aussi vénéneux) qui veut vendre sa fille au riche et libidineux Baron Regnard (M. McDermott un habitué de ce type de personnage). Chaney a été aussi un clown dans Laugh, Clown, Laugh (1928, H. Brenon); mais, il y a une énorme différence entre les deux films. La mise en scène de Sjöström est magistrale. Il a un sens de l'espace, de la direction d'acteur et une connaissance de l'âme humaine qui transcendent son sujet assez conventionnel. Un film superbe.
feb
I want to be alone with Garbo
Messages : 8964
Inscription : 4 nov. 10, 07:47
Localisation : San Galgano

Re: Le cinéma muet

Message par feb »

Superbe présentation du film Ann :wink: J'ai tout simplement adoré ce film et ce malgré la qualité pitoyable du DVD Bach Film :( J'imagine que tu as eu la chance de le voir dans une version de bien meilleure qualité et avec une durée peut être différente non ? (IMDB annonce une durée initiale de 90 min (Suède), 80 min (USA) et 71 min (copie TCM) alors que le DVD Bach fait 68/69 min).
Lon Chaney est très bon dans ce rôle de clown triste et Norma Shearer :oops: y est superbe et très douce...sans oublier John Gilbert impeccable. Des muets comme celui ci j'en redemande tous les jours mais si possible de bonne qualité :uhuh:
Avatar de l’utilisateur
Ann Harding
Régisseur
Messages : 3144
Inscription : 7 juin 06, 10:46
Localisation : Paname
Contact :

Re: Le cinéma muet

Message par Ann Harding »

J'ai vu une copie enregistrée sur TCM US qui est excellente. Il y a malheureusement une bande-son 'patchwork' assez sinistre avec un galimatia pénible et des effets sonores irritants. Le film est maintenant disponible en DVD chez Warner Archive. La durée est de 71 min.
Image
feb
I want to be alone with Garbo
Messages : 8964
Inscription : 4 nov. 10, 07:47
Localisation : San Galgano

Re: Le cinéma muet

Message par feb »

Ann Harding a écrit :J'ai vu une copie enregistrée sur TCM US qui est excellente. Il y a malheureusement une bande-son 'patchwork' assez sinistre avec un galimatia pénible et des effets sonores irritants. Le film est maintenant disponible en DVD chez Warner Archive. La durée est de 71 min.
Merci Ann :wink: (c'est l'édition dont parlait Bugsy Siegel dans ce topic). Je ne sais pas si tu as eu l'occasion de voir la version Bach Film mais la bande-son est y également horripilante (changement de thème en plein milieu d'une scène, thèmes pénibles). Quel dommage que Bach n'ait pas utilisé le master du DVD Warner dont tu parles :(
someone1600
Euphémiste
Messages : 8853
Inscription : 14 avr. 05, 20:28
Localisation : Québec

Re: Le cinéma muet

Message par someone1600 »

Ce dvd Warner recupere tres surement la copie TCM. Je crois que c'est le cas de la totalité des Warner Archives. :?
Répondre