Vincente Minnelli (1903-1986)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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hansolo
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par hansolo »

Jeremy Fox a écrit : 8 avr. 22, 17:30 Mémorable pour moi. L'un des plus beaux films du monde avec des numéros musicaux extraordinaires, d'une sidérante virtuosité (Nina). Une de mes prochaines chroniques.
Idem.
Un film éblouissant !
J'en ai le sourire en y repensant.
Ça me donne envie de le revoir tiens ;)
- What do you do if the envelope is too big for the slot?
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moonfleet
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par moonfleet »

Existe t'il une édition du film The Seventh Sin/La Passe Dangereuse, d'après Maugham, avec E.Parker, G.Sanders, F.Rosay, J.P Aumont ... ??
P.Brion en parle comme d'un film mineur, Minnelli n'est pas crédité au générique, mais j'aimerais bien le découvrir :wink:

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Courleciel
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Courleciel »

Rétrospective Vincente Minnelli (1903-1986) à la cinémathèque Française été 2023 :D
"- Il y avait un noir a Orly, un grand noir avec un loden vert. J'ai préféré un grand blond avec une chaussure noire a un grand noir avec un loden vert
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Jeremy Fox
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Jeremy Fox »

moonfleet a écrit : 11 avr. 22, 11:57 Existe t'il une édition du film The Seventh Sin/La Passe Dangereuse, d'après Maugham, avec E.Parker, G.Sanders, F.Rosay, J.P Aumont ... ??
P.Brion en parle comme d'un film mineur, Minnelli n'est pas crédité au générique, mais j'aimerais bien le découvrir :wink:

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Ce que j'en disais

Je viens de découvrir La Passe dangereuse (The Seventh Sin), film de Ronald Neame (co-réalisé par Vincente Minnelli après que Neame ait abandonné un tournage chaotique), histoire d'adultère d'après Somerset Maugham (The Painted Veil avait déjà été interprété par Garbo en 1934) qui ne m'aurait certainement pas autant ému si son interprète principale n'avait pas été cette sublime actrice qu'est Eleanor Parker. Elle porte littéralement le film sur ses épaules et on éprouve vite une grande empathie pour cette femme déboussolée et qui ne sait plus quoi faire de sa vie. A ses côtés quand même, un non moins génial George Sanders ! Pour la petite histoire, on y rajoute un somptueux noir et blanc et un score admirable (un de plus) de Miklos Rozsa. L'histoire plutôt banale sur le papier devient, grâce à tous ses éléments (Eleanor Parker en tête), un mélodrame assez touchant à défaut d'être inoubliable. J'aimerais bien connaitre un jour quelle a été la véritable contribution de Minnelli pour ce film, car d'après son autobiographie, on n'en apprend guère plus. On sait juste qu'il l'a terminé mais sans savoir les scènes qu'il a réalisé. La seule chose qui lui importait est de ne pas être crédité au générique.
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Cathy
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Cathy »

Je l'ai revu cet été, et je me demande toujours où est la touche Minnelli, mais c'est un beau mélodrame différent de la version Boleslawski avec Garbo et Marshall. Il me semble d'ailleurs dans mon souvenir que les deux fins sont différentes, ouverte dans l'une, fermée dans l'autre. Il faudrait que je vois la version récente du voile des illusions avec Naomi Watts.
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par moonfleet »

Merci à tous les deux, donc apparemment il est introuvable sur support en dehors du Dark Net :? C'est à dire là où l'écran se fait noir et que seule une torche virtuelle dernière technologie pourrait pointer de son rayon lumineux :)
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tchi-tcha
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par tchi-tcha »

Tout prétexte est bon pour remonter un sujet Minnelli, surtout quand on peut extraire une discussion du topic-monstre où sa noyade était assurée.

Au commencement, il y une confession de stagiaire à peine croyable :
Heliurl a écrit : 3 oct. 22, 23:40 En cette heure tardive, je vais, non sans émotion, découvrir "Comme un torrent" de Vincente Minnelli. J'ignore tout sur cet auteur et dois admettre que c'est plus le casting cinq étoiles qui m'a attirée vers ce choix.

Vais-je verser des torrents de larmes ou bien vais-je rester de marbre devant ce grand classique ?

Vous le saurez après une page de publicité interminable vantant les mérites de kleenex :mrgreen:
Quoi ? Quelqu'un qui ignorerait tout de Vincente Minnelli et qui ne jette son dévolu sur Comme un Torrent que grâce à son casting ? :shock:


Du coup, je suis impatient de connaitre le verdict :
tchi-tcha a écrit : 5 oct. 22, 00:58
Dialogue entendu tout à l'heure entre deux classikiens :

- Dis donc, Jeremy Fox, elle est interminable cette page de pub, non ? À mon avis, Heliurl n'a pas aimé le Minnelli...
- Mais non, t'es ouf, tchi-tcha ! Laisse Heliurl le digérer, c'est pas n'importe quel film, là, "Comme un Torrent."
- Oui, tu as raison, c'est un peu comme "Bad Boys 2" c'est vrai, Jeremy Fox.
- Ta gueule, tchi-tcha.


(ils ont raison, le suspense est insoutenable)
(vous noterez que pour une fois j'ai fait dans la subtilité et que je n'ai presque pas parlé de Michael Bay)


Et soulagement, le premier rendez-vous semble avoir plutôt bien matché :
Heliurl a écrit : 5 oct. 22, 15:53
Je me devais bien de décanter dans ma mémoire un film aussi riche en thématiques, personnages et doté d'une mise en scène d'une telle précision que ça laisse pantois d'admiration !
C'est simple dès la première séquence du retour de Dave Hirsh au bercail, une idée formelle qui fait mouche
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La pimpante Ginnie avachie sur son siège qui est cachée par la figure imposante de Dave. On peut comprendre dès lors qu'elle va le suivre à la trace tout en restant dans son ombre
Comme je m'y attendais, la gamme de couleurs utilisée à travers la direction de la photographie, les décors et les costumes sublime chaque personnage et on peut même dire illustre leur personnalité (Le rose bonbon des vêtements de Ginnie sied parfaitement à son caractère en apparence futile, les tons maronnés des scènes entre Miss French et Dave sont à l'image de leurs sentiments contrariés : Le rouge passion n'est pas employé puisque cette histoire ne peut advenir, elle est morte-née ...)

Toutefois malgré de grandes qualités, l'écriture de tous les personnages ne me semble pas toujours fine ou approfondie.
Ainsi le personnage interprété par Dean Martin m'a semblée légèrement caricatural et il faut attendre la fin du film pour qu'il gagne en complexité.
Tout comme celui de Miss French, diamétralement l'opposé de Ginnie, engoncée dans ses valeurs morales et sociales qui ne peut succomber aux sentiments de Dave Hirsh.

De plus l'utilisation de la musique m'a parue trop "facile" (Lors des séquences romantiques des airs appuyés de violons censés nous émouvoir ; Lors des scènes d'action on place une musique énergique, avec des soubresauts)

Néanmoins la séquence finale, forcément tragique, est d'une telle perfection, que ces aspects décevants se trouvent comme éclipsés.

Je n'ai pu voir ce grand film que sur mon petit ordinateur portable ce qui est un véritable sacrilège quand on y pense :oops:

En tout cas je pense qu'on pourrait donner un autre titre au film : "L'Amour dévaste tout"
J'espère pouvoir le revoir dans des meilleures conditions et peut-être deviendra-t-il un film de chevet ! :)
Alexandre Angel a écrit : 5 oct. 22, 16:41 Sur les personnages, il ne faut pas oublier qu'ils sont des stéréotypes, même si dans un registre intelligent : la prof coincée, la pute au grand cœur, le mari volage, l'intello encanaillé ou le joueur invétéré, alcoolo et macho, etc.. C'est le principe du mélodrame et avant cela, de l'opéra.
Je disais "registre intelligent" car, dans ce film, tout stéréotypes qu'ils sont, ils sont parfaitement, et très intellectuellement, conscients d'en être (Dave Hirsch, qui trimballe avec lui des bouquins de Steinbeck, Faulkner et je ne sais plus qui d'autre, c'est particulièrement caractéristique).

Quant à la musique, c'est pareil. Elle sert d'assise à la mesure de la dramaturgie. J'adore l'air au piano qui accompagne Dave Hirsch alors que Miss French lit son manuscrit et qu'il patiente en contemplant la vue qui surplombe la bourgade. On jurerait une Etude de Chopin et j'ai des frissons à chaque fois.
C'est un film admirable.
The Eye Of Doom a écrit : 5 oct. 22, 19:15
Encore un film que l’on ne verra probablement pas édité sous nos contrees avec sstf…
J’ai le warner achive dans mon panier amazon.com (avec Party Girl, Monfleet et j’en passe) et attends un prochain déplacement pro aux Us pour valider le tout.
J’oubliais qu’il y a les bootlegs espagnols: a voir.

D'ailleurs, avez-vous bien pensé à inclure des films de Vincente Minnelli dans la mise à jour de votre Top 100, maintenant que j'y pense ? :fiou:

Même sur un écran d'ordinateur portable, le charme opère toujours, c'est la bonne nouvelle du jour.
(mais c'est quand ils veulent pour une salve de Minnelli en blu-ray en France, nos éditeurs...)
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Heliurl
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Heliurl »

En effet cette première "rencontre" avec cet auteur fut un franc succès !
Il fait partie de ces cinéastes tellement importants dans l'histoire du cinéma que je suis quelque peu effrayée par la grandeur de leur filmographie.
Je ne voulais pas commencer cette découverte par une comédie musicale puisque je suis, comment dire, presque allergique à ce genre ...

Je suis sûre que des classikiens pourraient me conseiller d'autres films immanquables de Minnelli (de préférence pas de comédies musicales) ! :D
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Jeremy Fox
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Jeremy Fox »

Heliurl a écrit : 6 oct. 22, 15:22 En effet cette première "rencontre" avec cet auteur fut un franc succès !
Il fait partie de ces cinéastes tellement importants dans l'histoire du cinéma que je suis quelque peu effrayée par la grandeur de leur filmographie.
Je ne voulais pas commencer cette découverte par une comédie musicale puisque je suis, comment dire, presque allergique à ce genre ...

Je suis sûre que des classikiens pourraient me conseiller d'autres films immanquables de Minnelli (de préférence pas de comédies musicales) ! :D
C'est néanmoins dans le genre du musical que son génie est le plus éclatant à mon avis mais sinon j'ai un très grand faible pour Il faut marier papa et Le chevalier des sables
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Alexandre Angel »

Heliurl a écrit : 6 oct. 22, 15:22 Je suis sûre que des classikiens pourraient me conseiller d'autres films immanquables de Minnelli (de préférence pas de comédies musicales) ! :D
Ah oui mais là ça va pas. C'est trop important dans sa filmographie.

Si tu as aimé Comme un torrent, tape dans les mélodrames : Celui par qui le scandale arrive, Les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, Thé et sympathie..

Dans les comédies, La Femme modèle, évidemment..
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par tchi-tcha »

Je me doutais que notre shérif passerait en premier
:mrgreen:

Alors sans hésiter : Brigadoon, même si c'est aussi une comédie musicale. Sublime profession de foi, déclaration d'amour au cinéma qui croit dur comme fer que le rêve est plus fort que la réalité.

Je laisserai Jeremy Fox te conseiller des comédies (Minnelli en a fait quelques-unes délicieuses qui devraient te régaler sans peine), et je me contenterai de t'orienter vers le diptyque Les Ensorcelés / Quinze Jours Ailleurs.
(j'ai une nette préférence pour le second mais il ne faut pas trop le dire... :fiou: )

Et ai-je parlé de Brigadoon, au fait ?
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Jeremy Fox
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Jeremy Fox »

tchi-tcha a écrit : 6 oct. 22, 15:48

Je laisserai Jeremy Fox te conseiller des comédies (Minnelli en a fait quelques-unes délicieuses qui devraient te régaler sans peine)
Ben oui : le superbe il faut marier papa et j'ai un faible aussi pour La Roulote du plaisir mais celui-ci j'ai toujours un peu peur de le conseiller.
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Jeremy Fox
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Jeremy Fox »

Et sinon j'avais écrit ça sur l'intégralité de ses films si ça peut t'aider à te faire une idée de chacun. par contre, je serais désormais bien moins sévère sur 15 jours ailleurs que j'ai revu récemment avec plaisir
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Heliurl
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Heliurl »

Merci à vous tous pour ces nombreuses recommandations !
Je pense que mon choix va se porter sur "La vie passionnée de Vincent Van Gogh" car je suis une grande admiratrice de Kirk Douglas mais aussi pour comparer ce biopic avec celui de Pialat qui étant trop focalisé sur la personnalité du peintre surtout son rapport avec les femmes et pas assez sur son travail de peintre m'a déçue :|
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Profondo Rosso
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Re: Vincente Minnelli (1903-1986)

Message par Profondo Rosso »

Un petit coin aux cieux (1943)

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« Little Joe » Jackson, un joueur incorrigible, promet à son épouse, la pieuse et vertueuse Petunia, de renoncer au jeu. Mais à la première occasion, il se rend dans un casino où, à la suite d'une bagarre, il est mortellement blessé. Parvenu dans l'Au-Delà, « Little Joe » rencontre les représentants du Ciel (Le « Général ») et de l'Enfer (Lucifer « Junior »). En raison de ses engagements à renoncer définitivement au jeu et à devenir un bon époux, et avec l'aide des prières de Petunia, un sursis lui est accordé, avec une « mise à l'épreuve » de six mois.

Vincente Minnelli est invité par le producteur Arthur Freed à rejoindre la MGM au début des années 40, après une carrière scénique où il aura occupé les fonctions de costumier, décorateur puis metteur en scène à Broadway notamment. Après une première expérience sur Panama Hattie (1942) qu'il dont il partage la réalisation avec Norman Z. McLeod et Roy Del Ruth (Minnelli s'occupant des numéros musicaux), il a l'opportunité de réaliser son vrai premier film avec Cabin in the sky. Il s'agit là de l'adaptation d'une comédie musicale à succès jouée à Broadway en 1940 et qui a la particularité d'être jouée par un casting entièrement noir. Ce n'est pas le premier film à avoir cette spécificité à Hollywood mais néanmoins la MGM par les moyens alloués se montre audacieuse dans des Etats-Unis encore ségrégationniste, l'exploitation de Cabin in the sky dans le Sud sera d'ailleurs plutôt mouvementée avec des projections interrompues et les manifestations d'une population blanche indignée. Le casting de la pièce est en partie conservée avec Ethel Waters (avec laquelle Minnelli avait déjà travaillé sur scène pour la comédie musicale At Home Abroad en 1935) et Rex Ingram, reprenant leurs rôles, Eddie Anderson remplace Dooley Wilson en "Little Joe, tandis que Lena Horne trouvera là le seul rôle principal de sa carrière hollywoodienne.

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Le film est une fable morale entre rêve et réalité qui permet déjà à Minnelli de déployer son esthétique surréaliste et teintée d'onirisme. L'attention fut particulière durant la conception à éviter les stéréotypes racistes sur la communauté noire, Freed et Minnelli soumettant le script aux leaders de la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People) association engagée pour les droits civiques qui le valideront. Certains clichés sont certes bien présents, mais pas dans une volonté de dénigrement et plutôt au service des enjeux dramatiques du récit. Ainsi la piété profonde associée à la communauté afro-américaine est associée à la figure pure de Petunia (Ethel Waters), forcée de se montrer d'autant plus vertueuse en contrepoint de son époux Little Joe (Eddie Anderson) toujours sur la corde de raide de la tentation avec son goût pour les jeux d'argent. Minnelli joue sur cet aspect religieux constamment à deux échelles représentant ses deux personnages principaux. Les séquences de gospel qui ouvre le film sont superbes et immersive avec la caméra de Minnelli arpentant une assemblée pleine de ferveur, mais la malice et les airs ahuris de Little Joe viennent nous faire ressentir qu'il y a plus exaltant à vivre que ce cadre bienveillant. C'est d'ailleurs quand il s'agit de filmer la tentation du péché et les lieux qui s'y rattache que Minnelli laisse entrevoir les premiers élans de sa virtuosité filmique. Le mouvement de caméra accompagnant la course folle de Petunia vers casino où Little Joe vient de prendre une balle impressionne par son urgence, sa flamboyance et fluidité, annonçant les cavalcades hypnotiques de Brigadoon (1954) ou Comme un torrent (1958). Le réalisateur trouve le ton juste entre bons sentiments jamais niais et mauvais esprit réjouissant, dans l'imagerie, le ton et son approche des numéros musicaux.

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L'onirisme amusé de la première confrontation entre anges et démons scellant le pacte autour du salut de Little Joe annonce la couleur. Ainsi le numéro Cabin in the sky dessine un environnement idyllique et irréel où les paroles et la composition de plan de Minnelli fige un tableau d'harmonie romantique et communautaire trop parfait, trop innocent et candide. La tentation de voir cette perfection vriller se ressent dans le numéro Life is Full of Consequence, où les danses endiablées de Little Joe viennent s'inviter au foyer, tout comme le spectre d'un élan plus lascif pour la pure Petunia amorçant des mouvements chaloupés et étouffant un cri sauvage de plaisir. Toute cette retenue n'a plus court chez les suppôts du diable, qu'ils soient démon ou humain. Le cliché d'un monde divin/infernal administratif souvent exploité est transcendé par l'énergie jazz se dégageant des enfers avec les hilarants dialogues entre Lucifer jr (Rex Ingram) et ses agents (dont l'un joué par un Louis Armstrong survolté) où le leader se désole que son équipe A soit trop occupé en Europe.

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En tentatrice bien humaine, Lena Horne fait monter la température en goldigger au regard de braise et aux déhanchés lascifs, baignant chaque instant de présence d'un parfum de stupre et de provocation. Le clou de cette veine sulfureuse est atteint dans la dernière partie avec l'apparition de Duke Ellington et son orchestre dont les élans autorise les numéros de danses les plus tapageurs, les plus sexuels. Minnelli se montre aussi habile dans la retranscription cinématographique d'un espace "scénique" mettant en valeur les chorégraphies, que dans la capture du pur mouvement par la caméra - même si l'on doit officieusement le numéro Shine à Busby Berkeley. Les coutures morales se défont également en partie pour le couple qui ne peut s'aimer pleinement qu'en ayant failli, (fait mine de) cédé à la tentation avant que l'apocalypse divine viennent les laver de leur péché et détruire cette Babylone miniature - et la réutilisation habile d’un stock-shot de la tornade de Le Magicien d'Oz (1939). Toujours dans cet élan entre bons sentiments pieux et ironie habile, Minnelli nous laisse entrevoir une vision extatique des cieux avant de nous ramener à une morale et réalité plus terre à terre. Plus qu'une promesse un Minnelli déjà grand même si le meilleur était bien sûr à venir. 4,5/6
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