Les évolutions du son au cinéma

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Tom
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Les évolutions du son au cinéma

Message par Tom »

Bonjour à tous - j'ai cherché un topic sur le son, mais n'en ai pas trouvé, n'hésitez pas à me dire s'il faut poster ce message dans un sujet déjà existant !

Je viens vers vous car je suis entrain de me pencher sur les évolutions du son au cinéma. Jusqu'ici il me semblait que trois étapes étaient facilement reconnaissables :

- Le son optique, dans les années 30, reconnaissable à ses fréquences très limitées (qui rend le mixage des musiques et dialogues assez grossier), et par son fort bruit parasite audio (pas de vrais silences).
- Le son magnétique, qui se répand dans les années 50, reconnaissable à une plus grande clarté de l'enregistrement, et à des couches sonores qui peuvent se superposer aisément.
- Le son Dolby (mono ou multicanal), dans les années 60-70, reconnaissable à sa précision et son micro-détail, à ses très hautes et très basses fréquences, et à l'arrivée d'ambiances sonores beaucoup plus subtiles et délicates. Michel Chion avait d'ailleurs fait un bel article sur celui-ci, repris dans son livre ("Un art sonore le cinéma").

Sauf qu'en cherchant des exemples, la différence son optique / son magnétique me semble beaucoup plus floue que je ne le pensais de prime abord. Le son très parasité des films des années 30 semble pour beaucoup dépendre de l'âge des copies et de leur restauration : la récente ressortie de Show Boat, par exemple (1936), a des silences certes bruités mais stables, et un son assez clair. De même pour Fantasia (1940), au son aussi clair et précis que celui du cinéma Hollywoodien dans les années 50, avec de beaux silences bien propres. Peut-être y a-t-il eu plusieurs étapes dans le son optique ? (j'ai l'impression d'un son assez hardcore dans les premières années des années 30, surtout...).

Et je ne trouve aucun moyen de vérifier si tel ou tel film dans les années 50 est enregistré avec l'un ou l'autre procédé (sans compter des cas possiblement complexes : enregistrement magnétique mais système optique sur la copie...).

Bref, si quelqu'un a exploré le sujet, pourrait-il/elle m'aider à y voir plus clair (ou si vous connaissez des forums, lectures, ou personnes à contacter qui pourraient m'y aider), ça m'aiderait beaucoup !


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EDIT: Pour Showboat, je viens de voir au générique "Noiseless western electric recording", ce qui semble avoir marqué un tournant, et expliquerait la très mauvaise qualité sonore des films avant 1932 :
As the quality of the films themselves improved, dealing with noise became critical, especially during a film’s quieter moments. Western Electric introduced “noiseless recording,” a way of biasing the light valve to reduce the amount of light being passed though the track during MOS (without sound) moments, thus greatly reducing hiss and allowing dirt, scratches and film grain noise to be edited in the reproduction of Variable Density Tracks. (source)
Quoique je trouve des films au son très attaqué après cette date, notamment à l'étranger (La fille des marais de Sirk, par exemple, en 1935 ; ou Les Sœurs de Gion de Mizoguchi, 1936, pourtant restauré).
Telmo
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Re: Les évolutions du son au cinéma

Message par Telmo »

Fantasia, étant donné l'importance primordiale de la musique, c'est le premier film où un soin particulier a été apporté au son, avec notamment le Fantasound.
Un son à la hauteur de l'animation, le Fantasound
Fantasia est l'unique film à bénéficier du système Fantasound, un des tout premiers procédés stéréophoniques, ancêtre du son Surround, développé par William E. Garity et John N.A. Hawkins pour les studios Disney dès 1938-194014. Pour cela les studios Walt Disney Pictures ont achèté huit oscillateurs basse fréquence modèle 200B à la jeune société Hewlett-Packard, à 71,50 dollars chacun, pour synchroniser les effets sonores du film Fantasia120.

Le chef d'orchestre Stokowski s'est beaucoup investi dans le film, et pour Leonard Maltin sa présence a sans aucun doute convaincu Disney de développer un système de rendu sonore de meilleure qualité que les systèmes d'alors78. Disney a demandé à son équipe d'ingénieurs du son, alors dirigée par William E. Garity, de concevoir un système d'enregistrement et de restitution du son plus étendu pour le film78. Barrier qualifie le système de « dimensionnel »121. Les premières technologies de restitution sonore, comme le Vitaphone et le Movietone, n'avaient pas la restitution souhaitée122, celle permettant de reproduire une salle de concert. Le système comprend 11 haut-parleurs, dont huit derrière l'écran sur deux rangées et trois à l'arrière de la salle123.

L'ensemble des enregistrements représente 420 000 pieds (128 016 m) de bandes qui a été mixé et arrangé afin de tenir sur les 18 000 pieds (5 486,4 m) de la bande finale du film78. La bande sonore du film a été enregistrée en 1938 lors d'une session de deux mois à l'Académie de musique de Philadelphie sur neuf canaux d'enregistrement, l'un pour l'orchestre complet et huit pour des sections spécifiques grâce à 33 microphones répartis dans l'orchestre78.

Pour la restitution, Disney a fait construire un prototype par RCA, coût 100 000 USD, et ensuite plusieurs autres pour les salles de cinéma au prix unitaire de 30 000 USD78,124. Lors de la première projection à New York, sa salle de 2000 places a été équipée du système de reproduction Fantasound, qui avec quatre bandes (dont une de contrôle) reproduisait les neuf bandes d'enregistrement, ensuite diffusées par 90 haut-parleurs50.
Le wiki anglais est plus détaillé.
Tom
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Re: Les évolutions du son au cinéma

Message par Tom »

Ha oui, ok, en effet ! Je croyais que Fantasia avait surtout bossé la spatialisation, mais apparemment c'est bien plus que ça...

J'ai re-parcouru pas mal de films ce soir : en fait la vraie rupture entre un son au rendu "grossier" et "précis" semble plutôt avoir eu lieu en cours des années 30 (au tout début des années 30 pour les USA, pendant le précode, et souvent plus tard pour les autres pays). Le seul reste, après ça, étant un bruit de fond très audible dans les silences (par exemple, dans Stagecoach, 1939 : le son est précis et propre, mais il n'y a pas de vrais silences, ils sont tous très bruités - même chose pour les films hollywoodiens des années 40 et 50 que je passe en revue - Laura, All I Desire...). On sent bien durant ces années que progressivement le son se fait plus piqué et qu'il gagne en fréquences (que le son des dialogues d'All I Desire n'est pas celui de Stagecoah, justement), mais c'est discret, progressif et il semble difficile de poser une frontière nette - rien avoir avec le choc de l'arrivée des vrais silences des années 70.
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