Luigi Zampa (1905-1991)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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bruce randylan
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

Oui, pas grand chose à redire pour Question d'honneur. Un poil viré mais rien de gênant. :wink:
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Kevin95
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par Kevin95 »

Nickel, j'essaye de me programmer sa dernière projection. Merci. :wink:
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

Bello onesto emigrato Australia sposerebbe compaesana illibata (1971)

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Comme son titre l'indique (pour qui parle italien) l'histoire raconte les péripéties d'un italien ayant immigré en Australie qui essaye de trouver une épouse de sa nationalité. Mentant sur son physique, il passe par une correspondance postale et trouve bientôt une fiancée, qui cherche elle à fuir son quotidien de prostituée.

Un peu décavant cet opus qui bénéficie pourtant d'un sympathique duo Claudia Cardinale / Alberto Sordi et du cadre dépaysant australien.
On évite pas aux vision carte postales d'autant qu'il s'agit essentiellement d'un road movie à deux. Pour le reste, c'est très prévisible, le rythme est un peu trop calme et ça décolle rarement pour ainsi dire. C'est régulièrement amusant mais guère plus alors que le potentiel était plus riche que ça.
Le film est plus réussi quand il se déplace dans la mélancolie (voire un certain malaise) avec le regard triste d'un Sordi qui ne parvient pas à avouer sa véritable identité à Cardinale ou quand il retrouve un ancien camarade de travail devenu fou pour avoir trop vécu dans la jungle. Ou encore quand Cardinale comprend qu'elle a été manipulé par un séducteur qui la place dans la même situation qu'elle avait en Italie. La dernière séquence avec les célibataires dans le train est assez fulgurante aussi pour sa capacité à faire naître très rapidement la douleur et le poids de la solitude.

Si les acteurs font bien leu boulot (à part les séquences de crise de malaria trop dans la cabontinage), c'est bel et bien à cause de la mise en scène que le film ne passionne pas. Elle est la plus part du temps aussi indolore qu'incolore et se déploie pendant 1h50 sans idée ni imagination.
On a aussi un peu l'impression que le film a été plus ou moins improvisé sur place (ou que l'équipe manquait de préparation).

A noter que Claudia Cardinale était présente dans le public pour revoir ce film très rare (malgré la Columbia à la production). :)
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Message par bruce randylan »

Gente di rispetto (1975)

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Une institutrice vient d'être muter en Sicile dans un village encore très marquée. Un homme qui lui avait manqué de respect en public est retrouvé assassiné très rapidement, ce qui laisse croire à la population et aux autorités qu'elle fait partie de la Mafia.

Scénario excellent, casting 3 étoiles (Jennifer O'Neill, Franco Nero et James Mason), musique de Morricone, description glaçante des mentalités enfermés dans leurs codes... et un résultat bien trop sage et décevant.

Avec son postulat proche de celui des années rugissantes, mais décliné sur un mode plus sérieux, il y avait de quoi beaucoup attendre à la vue de l'exposition alléchante et son climat qui se fait intrigant et paranoïaque. Malheureusement le film n'ira pas vraiment plus loin et s'arrêtera prisonnier d'un développement qui préfère la sécurité et le prévisible. Beaucoup d'éléments se devine en réalité facilement (le réel responsable des meurtres, des magouilles politiques cachées) et les personnages se révèlent au finale assez peu fouillée surtout Franco Nero qui ne sert en réalité à rien et dont les apparitions amènent des scènes incroyablement répétitives.

Au lieu de ça, il aurait fallut aller à fond dans le trouble, le doute, l'abstractions, jouer sur les ambiguïtés, la perception, créer un malaise, un vertige... bref perdre le spectateur dans la psychologie de l'héroïne, entre paranoïa, schizophrénie et manipulation pour mieux créer une seconde moitié où la réalité aurait été glissante et impalpable.

Le film n'est cependant pas mauvais ni même ratée mais seulement terriblement frustrant et aurait mérité un cinéaste plus audacieux. Zampa accouche ici d'un film à la fois riche et superficiel mais profondément personnel et qui s'inscrit pleinement dans ses thèmes récurrents (corruptions, hypocrisie, une femme face à des mentalités archaïques, description de la vie du Sud de l'Italie, volonté d'éviter le manichéisme...) mais n'apporte pas grand chose de neuf pour autant.
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

Les années difficiles (Anni difficili - 1947)

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Modeste employé de mairie, Piscitello est contraint d'adhérer au fascisme s'il veut conserver son poste même si cela reste contraire à ses opinions.

Il fallait sans doute du courage et de l'audace pour traiter un tel sujet dès 1947 d'autant que Zampa prône déjà une écriture basée sur des personnages/situations nuancés, refusant les facilités du manichéisme. La première moitié est assez habile de ce point de vue et l'on trouve déjà quelques touches humoristiques bien intégrés qu'on pourrait considérer comme séminales à "la comédie italienne".

Cependant, et malgré ses qualités, il faut admettre que le film a mal vieilli, rapidement prisonnier d'une dimension bien trop didactique et mécanique. En voulant couvrir l'ensemble de la seconde guerre mondiale, Zampa se tire une balle dans le pied alourdissant considérablement la narration qui se cantonne à un état des lieux linéaire et chronologique.
Toute la seconde moitié m'a semblé interminable à dérouler des scènes qui répondent inlassablement à la précédente ("oh mon pauvre fils, il manquerait plus que le gouvernement l'envoie en Afrique" ; "Ah mon pauvre fils, on t'envoie en Afrique !").
Une approche scolaire que la réalisation ne parvient pas à faire dépasser la frise historique bardée de stock-shots.

Les dernières scènes renouent avec une approche plus humaine (pour ne pas dire tragique) mais tombent justement dans le piège d'une psychologie plus shématiques et banals (le retournement du maire).


Pas folles les mignonnes (Le Dolci signore - 1967)

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4 amies font faces, chacune à leur manière, à la frustration sexuelles et à l'infidélité.

Pour le coup, on nage en pleine commande impersonnelle (c'est produit par Paramount) sans âme et sans grand intérêt, malgré la présence de Ruggero Maccari et Ettore Scola au scénario !
C'est d'une platitude et d'une inconsistance qui confinent à la somnolence malgré quelques passages vaguement croustillants comme le strip-tease ou Ursula Andress obsédée par un gros moustachu.

Cela dit, ce sentiment provient peut-être d'un montage international (doublé en anglais :? ) réduit de presque 30 minutes par rapport à la version italienne. D'ailleurs, l'un des personnages féminins est quasi absent de ce montage. Ce choix est très curieux car la Cinémathèque avait diffusé le montage intégral en 2013 dans l'histoire permanente du cinéma (ils doivent donc avoir la copie !)
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

Voleur et voleuse (Ladro Lui, Ladro lei - 1958)
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Une vendeuse est fatiguée d'être renvoyée par des patrons libidineux qui n'acceptent pas qu'on refusent leurs avances. Son voisin, un escroc fraîchement sortis de prison, l'aide à obtenir des indemnités de licenciement.

Très bon celui-ci et c'est surtout grâce à Alberto Sordi en fait. 8)
Ce dernier est d'ailleurs crédité au générique pour sa contribution au scénario et on peut aisément supputer qu'il a un peu vampirisé le projet, ce qui n'est pas un grand mal car la dimension "romantique" de l'histoire avec cette vendeuse (Sylva Koscina) est assez banale malgré quelques allusions sociales qui s'attaquent au peu de considération apportées aux femmes sur le marché du travail qui sont presque obligées de subir "un droit de cuissage" de leurs employeurs. Il y a là une vision très pessimiste et une description assez juste dans le désir d'émancipation de l'héroïne pour échapper à son quotidien (jolie séquence quand elle peut à son tour voyager en train qui passe sous les fenêtres de son quartier) mais qui est contrebalancée par une approche bien plus naïve dans son histoire d'amour jamais crédible.

Par contre dès que Sordi est à l'image, le film passe vraiment à la vitesse supérieure avec un humour irrésistible où le comédien campe un escroc, issu d'une longue traditions familiales, qui a l'habitude des passages en prison (il a sa chambre attitrée :mrgreen: ).
Déguisements, arnaques, entourloupes, dialogues savoureux... C'est un vrai régal et Sordi a l'air en grande forme et on sent qu'il s'amuse comme un petit fou dans ce rôle taillé sur mesure. Le passage où il se travestit en policier pour arrêter un bijoutier et l'emmener directement en prison est vraiment savoureux, comme son astuce pour échapper à un flic en filature. Et des exemples de ce type, il y en a très souvent. :D
Il est fort possible aussi qu'il ai mis son nez dans les séquences d'ouvertures qui sont aussi pleine de verve et d'humour dans les échanges autour d'un match de foot.


La contestation générale (Contestazione generale - 1969)
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C'est encore Sordi qui offre les meilleurs moments dans ce film à sketch vraiment moyen mais où donc surnage le dernier segment. Il y joue le prêtre d'un village isolé, et désormais, presque déserté qui s'inquiète des lettres anonymes qui lui prêtent une liaison avec une caissière d'un village voisin. Un interprétation plus subtile et mélancolique pour créer un personnage forcément très touchant et émouvant (sa dernière phrase dévoile un gouffre de solitude qu'on ne soupçonnait pas si profond).

Le reste est presque sans grand intérêt. On y trouve Vittorio Gassman, sorte Godard hippie, qui livre un film de commande avant-gardiste, peu au goût des commanditaires. Beaucoup de cabotinage et un discours sans relief ni originalité.
Le duo Michel Simon/Nino Manfredi ne fait guère plus d'étincelle dans un épisode bien trop long pour ce qu'il a à raconter, d'autant que l'humour n'est vraiment pas très fin.
Par ailleurs, il existe un 4ème (en fait le 3ème dans l'ordre de passage) qui a été coupé de la copie projetée à la CF. On y a bien le début (un grève dans un campus étudiant) mais il s'arrête brutalement ! Il manque donc une dizaine de minutes (sans doute coupée car aucune vedette ne semble y être figurée.

A voir uniquement pour Sordi.
Dernière modification par bruce randylan le 14 janv. 20, 22:35, modifié 1 fois.
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

Signorinette (1942)
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Je me suis laissé tenter par la rareté du film (il n'existe plus qu'une copie au monde, et en 16mm) et j'aurais pu m'abstenir : c'est vraiment anodin.
C'est non seulement les débuts balbutiants du cinéaste mais aussi l'époque des divertissements "téléphone blanc". Assez insipide donc, bourrés de bons sentiments artificiels, de chantage émotionnel et de personnages assez transparents...

Avec cette histoire où de jeunes filles découvrent les premières joies/désillusions de l'amour, Zampa parvient tout de même à éviter le l'œuvre de propagande et parvient même à brocarder l'imagerie fasciste avec une prof de sport autoritariste et une jeunesse qui se soucie peu des activités physiques (plus subtilement que dans Il Birichino di papà de Raffaello Matarazzo tourné un an plus tard)
Quelques passages témoignent aussi d'une certaine volonté de justesse dans les rapports hommes-femmes (et de leur différence d'âge) qui permet de contourner le roman photo et la mauvaise eau de rose.

A part ça, l'intérêt est vraiment limité et il me tardait la fin de séance d'autant que le dernier quart vire dans le mélodrame méprisante et presque cynique à jouer la corde sensible à ce point.
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par Jack Carter »

bruce randylan a écrit :Voleur et voleuse (Ladro Lui, Ladro lei - 1958)
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Une vendeuse est fatiguée d'être renvoyée par des patrons libidineux qui n'acceptent pas qu'on refusent leurs avances. Son voisin, un escroc fraîchement sortis de prison, l'aide à obtenir des indemnités de licenciement.

Très bon celui-ci et c'est surtout grâce à Alberto Sordi en fait. 8)
Ce dernier est d'ailleurs crédité au générique pour sa contribution au scénario et on peut aisément supputer qu'il a un peu vampirisé le projet, ce qui n'est pas un grand mal car la dimension "romantique" de l'histoire avec cette vendeuse (Sylva Koscina) est assez banale malgré quelques allusions sociales qui s'attaquent au peu de considération apportées aux femmes sur le marché du travail qui sont presque obligées de subir "un droit de cuissage" de leurs employeurs. Il y a là une vision très pessimiste et une description assez juste dans le désir d'émancipation de l'héroïne pour échapper à son quotidien (jolie séquence quand elle peut à son tour voyager en train qui passe sous les fenêtres de son quartier) mais qui est contrebalancée par une approche bien plus naïve dans son histoire d'amour jamais crédible.

Par contre dès que Sordi est à l'image, le film passe vraiment à la vitesse supérieure avec un humour irrésistible où le comédien campe un escroc, issu d'une longue traditions familiales, qui a l'habitude des passages en prison (il a sa chambre attitrée :mrgreen: ).
Déguisements, arnaques, entourloupes, dialogues savoureux... C'est un vrai régal et Sordi a l'air en grande forme et on sent qu'il s'amuse comme un petit fou dans ce rôle taillé sur mesure. Le passage où il se travestit en policier pour arrêter un bijoutier et l'emmener directement en prison est vraiment savoureux, comme son astuce pour échapper à un flic en filature. Et des exemples de ce type, il y en a très souvent. :D
Il est fort possible aussi qu'il ai mis sont nez dans les séquences d'ouvertures qui sont aussi pleine de verve et d'humour dans les échanges autour d'un match de foot.
Jaloux, je suis :o
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par John Holden »

Alberto Sordi pour un réalisateur, c'est un peu comme avoir Messi dans son équipe. :mrgreen:
D'ailleurs après recherches, il me semble qu'il n'existe malheureusement pas de livre qui lui soit consacré en France.
Il faudrait l'écrire...
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

John Holden a écrit :Alberto Sordi pour un réalisateur, c'est un peu comme avoir Messi dans son équipe. :mrgreen:
Ca fait pas tout pour autant. :|
Par exemple :

Le gynécologue de la mutuelle (Il Medico della mutua - 1968)
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L'Italie vient de passer à la sécurité sociale avec pour conséquence des consultations et des médicaments gratuits pour les patients mutualisés. Les médecins généralistes doivent donc multiplier les visites s'il veulent bien gagner leurs vies... et pour ça il faut remplir sa salle d'attente, ce qui n'est évident pour un jeune docteur.

Voilà typiquement le genre de films qui avaitt tout pour être hilarant et percutant mais qui s'avère décevant (par rapport à son potentiel) à cause de sa réalisation médiocre et surtout son absence de rythme. L'association sujet brûlant + présence du génial Sordi n'accouche donc que d'une souris, soit une comédie un peu mollassonne qui possède toute de même ses bons moments mais ne décolle jamais. Certaines séquences (avec la future veuve) sont ainsi terriblement convenue et répétitive. Zampa peine à accélérer la cadence, maintenir l'intérêt ou dynamiser sa satire.
Sordi a beau être excellent, comme à son habitude, cela ne suffit pas à envoyer le film dans la stratosphère.

C'est terriblement frustrant car le scénario en lui-même est génial avec cette vision très caustique sur les rapports à l'argent, la santé, la corruption, l'arrivisme ou l'ambition. Ca n'a pas vieilli (il suffit de voir la polémique sur l'actuel Tiers payant français). Il est donc vraiment dommage que le film ne l'illustre que tièdement. Seule la séquence où Sordi coure d'une salle de consultation à l'autres parvient à toucher du doigt ce vers quoi le film aurait dû tendre.

Malgré d'évidentes qualités, je n'y trouve malheureusement pas mon compte. Cela dit, je serais curieux de découvrir la suite tourné l'année suivante.

C'est un peu le même cas avant son pendant sérieux : Bistouri, la mafia blanche (Bisturi, la mafia bianca - 1972)
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Débarrassé de tout humour et second degré, Zampa dresse un portrait désabusé d'un système médical gangrené par les conflits d'intérêts et la corruption dans ce portrait d'un chef de clinique qui accepte de promouvoir des médicaments aux effets limités après avoir reçu un chèque du laboratoire ou qui n'a aucun scrupule à gonfler les factures qui clients plus fortunés... voire même à sacrifier un malade pour piéger un rival !

Un violent réquisitoire mais qui a l'intelligence de ne pas se vautrer dans le manichéisme puisque ce docteur véreux à aussi plusieurs qualités : il a l'air d'air un père affectueux et un chirurgien talentueux avec un minimum d'éthique en étant prêt à baisser la facture des plus pauvres.
Zampa n'est jamais aussi bon que dans les moments d'ambiguïtés comme quand il n'explicite pas les raisons des consultations gratuites pour les plus démunis (exonération fiscale ? Publicité indirecte ? Ou réel acte désintéressé ?).
A l'inverse son ennemi, un médecin plus intègre, multiplie les liaisons et les verres d'alcool.

Mais là encore, ses qualités d'écriture sont desservis par une réalisation manquant cruellement de tension et de nervosité. Ca se suit avec bien trop passivité et d'ennui.
La copie 16mm et virée n'aidait cependant pas à apprécier (et à juger) la qualité esthétique du film.

Sur un sujet proche, je garde un bien meilleur souvenir de La tour d'ivoire de Satsuo Yamamoto
http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 0#p2312380
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par manuma »

bruce randylan a écrit :Le gynécologue de la mutuelle (Il Medico della mutua - 1968)
Je m'étonne de ce titre français.

A ne pas confondre avec ça, en tout cas, signé de ce bon vieux Joe D'amato et nettement plus olé olé :

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Kevin95
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par Kevin95 »

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IL MAGISTRATO (Luigi Zampa, 1959) découverte

Il magistrato est purement et simplement un bon gros mélo des familles. Seulement en 1959, le genre est passé de mode et une œuvre qui n'aborde pas la situation socio-politique de l'Italie est d'emblée jugée comme de droite voir pire (le réveil du téléphone blanc). Alors Zampa le camoufle dans une récit policier maladroit mais qui sent l'usine, dans un personnage de flic inutile tout juste bon à assener la morale du film en introduction et en conclusion, dans un discours plaqué sur des personnages qui n'en demandaient pas tant.

Du coup, cette famille en crise va devoir laisser de la place au condé balourd et à un récit secondaire qui a du mal à se greffer au récit premier. Le tragique récit familial se suffisait à lui-même, d'où jaillit un François Périer en père de famille constamment paumé (LA figure du cinéma de Zampa) qui comme un petit bouchon pris dans un courant d'eau (dixit Renoir) se laisse aller aux va-et-vient de son environnement économique et une Jacqueline Sassard trop immature dans son jeu de séduction, trop mature dans sa mélancolie. La fin est donnée dès les premiers plans, mais le geste final garde sa force et son pathétisme.

Si seulement Zampa avait eu le courage de traiter de plain-pied son sujet, sans prendre une posture néo-réaliste trop lourde pour ses épaules.

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BISTURI, LA MAFIA BIANCA (Luigi Zampa, 1973) découverte

Le titre est explicite, installez vous la charge va commencer. Dernière ligne droite pour Zampa dont la carrière touche à sa fin et dont le style se radicalise. Les violons ont du mal à partir (on ne se refait pas) mais l'humour plus ou moins bon-enfant s'est envolé laissant la place à une rancœur et à un désir de se caler auprès des cinéastes politiques du moment (en deux noms, Rosi et Damiani) afin d'évoquer les problèmes directs d'une Italie sous pression. Ici l’ordre des médecins ont prend pour son grade, non pas tant le commun des blouses blanches mais les cliniques privés, les marchands de soins et autres capitalistes de la santé.

Sans ménagement, nous passons d'un milieu populaire pour ne pas dire défavorisé (le générique) aux murs propres et aux décors froids d'une clinique menée de main de maitre par un directeur cynique (excellent Gabriele Ferzetti) aux dents aussi longues que la liste d'attente des pensionnaires. Zampa réutilise consciemment (ou non) l’esthétique des feuilletons médicaux pour y injecter ses personnages sans foi ni loi. Les affaires de cœur font place à une absence de cœur aussi bien chez les médecins que chez les religieux (la mère supérieure cassante). Seuls deux personnages sortent du lot sans quoi le film aurait été étouffant : le médecin alcoolique désabusé qui va payer son idéalisme et une religieuse naïve. L'amour va les réunir aidé par les clichés du genre mais restera platonique. Le face à face entre le diabolique directeur et son adjoint, trouvera son aboutissement lors d'une séquence finale aussi tendue (la chanson du "scalpel, pinces, bon Dieu on le perd") que cruelle (monsieur tout-le-monde sera la principale victime de cette guerre idéologique).

Pas toujours des plus fins, le film de Zampa trouve son intérêt dans la violence du coup asséné par le réalisateur sur une société qui le débecte de plus en plus (courage Luigi).

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LADRO LUI, LADRA LEI (Luigi Zampa, 1958) découverte

Alberto Sordi se la joue fair-play et laisse à Zampa et Sylva Koscina les quinze premières minutes du film. Une jeune fille, bien portée de sa personne, pleure sur son sort et crie à qui veut l'entendre qu'elle est autre chose qu'un simple physique. Son parcours sent le déjà vu à plein nez que les quinze minutes se terminent et que Sordi rentre sur le terrain pour faire le ménage. Son personnage à beau se greffer à l'intrigue au chasse-pied, c'est bien lui qui fait tourner la boutique.

Escroc de père en fils, l'acteur joue les aristocrates du crime, qui ne peut s’empêcher de voler son prochain même le plus innocent. Du bonheur en barre nous est ainsi servi, l'immoralité de Sordi est une gourmandise qu'on ne peut refuser et ce, à n'importe quelle occasion : Sordi se déguise en flic pour mettre une de ses victime en prison, Sordi rentre dans une maison au hasard pour tromper la police et faire voltiger une grand-mère, Sordi tape sur l'épaule de celui qui va le (re)mettre en taule car au fond, il fait parti de la famille... Et quand ce n'est pas lui qui régale, c'est sa mère qui lui tricote un pull pour la prison ou qui demande à son fils s'il a la même cellule que feu son père.

L'ingénue Koscina (mais si, rappelez vous) revient de temps en temps, calme les zygomatiques entre deux sketchs d'Alberto mais rien de transcendantal ne lui arrive dans le film (bon une scène émeut, celle du train à couchettes qui stoppe devant son quartier). Est-ce vraiment un film de Zampa ? Je parlerais plus d'hold-up sordien.
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par Kevin95 »

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IL MOSTRO (Luigi Zampa, 1977) découverte

Le rapport qu'entretient Zampa avec le cinéma de genre (le giallo pour être précis) et plus généralement avec la société italienne de l'époque est résumé dans l'introduction du film. En une parodie de scène de meurtre, le réalisateur (via son personnage de spectateur râleur) précise qu'il ne faudra pas compter sur lui pour donner dans de l'exploitation pire, que cette époque de vulgarité affichée sur grand écran est peu à son gout.

Théorie du cheval de Troie, Zampa va ironiquement prendre la structure du film policier (des meurtres, un assassin, une enquête) pour détourner le genre (aucune fétichisation, aucun meurtre filmé, très peu de caméra subjective) et assener un coup derrière la tête d'une Italie des années de plomb. Dans une veine satirique, Il mostro tire à vue sur les médias, le gout du sang qu'il promeut pour une clientèle inconsciente, le show-business qui vendrait père et mère pour un gros titre ou un tube (cf. le segment Sydne Rome) ou les journalistes vautours qui font leur beurre quand le cadavre n'est même pas encore tiède. Un sourire en coin qui va se changer en grimace puis en boule dans la gorge un quart d'heure avant la fin, quand l'identité du tueur est révélée comme est révélé le véritable point de vue de Zampa sur ses contemporains. "J'ai créé un monstre" lancé par un personnage et c'est toute la tristesse du réalisateur qui éclate, son dégout d'une génération plus jeune et plus violente mais aussi l'aveu d'en être à l'origine consciemment ou non.

Officiellement Il mostro est son avant-dernier film (avant le sympathique Letti selvaggi) mais à l'image, le film fait sentir un parfum de testament. Un testament pas des plus joyeux.
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Kevin95 a écrit :Image

IL MOSTRO (Luigi Zampa, 1977) découverte
Quel chouette film!!!

Rattaché au giallo de par sa nationalité et la présence d’un mystérieux assassin (aux motifs particulièrement originaux et tordus !), CRIMINALIA se rapproche, toutefois, davantage d’un thriller cynique et réaliste, une série noire sans concession doublée d’une dénonciation acide des dérives de la presse à sensation. Valerio Barigozzi vivote dans sa petite existence minable. Il se dispute constamment avec son ex-femme et ne trouve un certain réconfort qu’auprès de son fils, le timide Lucas, qu’il emmène régulièrement au cinéma voir des giallos et des polars. Barigozzi bosse pour un journal italien et tient notamment une rubrique de courrier sentimental sous le pseudonyme de Comtesse Esmeralda. Il recueille ainsi les confidences scabreuses de ses lectrices et les moqueries de ses collègues. Pour arrondir ses fins de mois, notre homme écrit des romans policiers qui n’obtiennent guère de succès. Un jour, une lettre anonyme lui annonce le futur assassinat de Grand Père Gustave, animateur à succès d’une émission télévisée pour enfant. La police, prévenue, ne prend pas l’affaire au sérieux mais Gustave est bel et bien retrouvé mort, un V ensanglanté tracé sur son visage. Si les forces de l’ordre nient par la suite avoir eu connaissance de la missive menaçante, Barigozzi, quelques jours plus tard, en reçoit une seconde qui prédit, cette fois, l’assassinat d’un joueur de football. Le journaliste tente de le prévenir mais ne peut empêcher son meurtre. Soupçonné puis relâché par la police, Barigozzi voit dans cette affaire sordide l’occasion de démontrer ses talents. Jouant la carte du sensationnalisme, il gonfler le fait divers au point qu’une véritable psychose s’installe dans la métropole. Dans le même temps, les ventes de la feuille de choux s’envolent…

Thriller basé sur le whodunit, CRIMINALIA révèle, forcément, l’identité de l’assassin dans les ultimes minutes. Si les néophytes se laisseront sans doute piéger, les habitués du giallo n’éprouveront probablement pas de difficultés à le découvrir : la liste de suspects est, en effet, restreinte et le coupable obéit à la loi immuable voulant que le moins soupçonnable soit le fautif. Cependant, ce léger bémol n’enlève rien aux nombreuses qualités du long-métrage, mélange très convaincant de policier d’énigme traditionnel et de polar sombre et poisseux, peuplé de personnages pour la plupart peu recommandables voir détestables. Le principal protagoniste s’attire ainsi, alternativement, sympathie et antipathie : c’est un type peu gâté par l’existence, arrivé à l’heure des bilans et qui regarde de manière réaliste son parcours : une ex-femme qui le déteste, un boulot minable, une carrière d’écrivain de seconde zone, des ambitions avortées. Cependant les scènes en compagnie de son fils à qui il démontre beaucoup d’affection et d’attention le rendent plus humains et excusent ses comportements souvent excessifs et agressifs. Pas vraiment méchant, il s’apparente au « brave gars » ayant sans doute effectué quelques mauvais choix. Pris malgré lui dans l’engrenage du sensationnalisme, le journalisme va néanmoins briser, une par une, ses dernières barrières morales et se rendre complice des manigances du fils de son patron, assoiffé de pouvoirs et d’argent. Ne reculant devant aucune bassesse, le reporter commettra des faux témoignages avant d’entretenir, voire de susciter, une psychose aux répercussions dramatiques. Arrêté et soupçonné des meurtres, il verra, enfin, sa carrière décoller et recevra même un important contrat pour rédiger ses impressions sur l’affaire en cours. S’il est innocent il recevra une belle somme d’argent. S’il est coupable elle sera dix fois plus importante lui précise son éditeur. Parallèlement une starlette s’affiche avec notre journaliste, lui accorde ses faveurs, et enregistre un disque en l’honneur de l’insaisissable meurtrier.

Evoquant parfois, toutes proportions gardées, le cynisme ravageur du GOUFFRE AUX CHIMERES, le film de Luigi Zampa dénonce l’opportunisme, les magouilles, l’amoralité, la débauche, les compromis politiques de la presse et des hautes instances italiennes avec une virulence typique de son époque troublée. CRIMINALIA applique en quelque sorte à une intrigue « giallesque » le traitement radical des polars de la même époque soucieux de plonger les spectateurs, la tête la première, dans le bain boueux des pires travers de la société italienne. Cette diatribe acerbe ne néglige pas, toutefois, le suspense et les meurtres en série, aboutissant à une mécanique parfaitement huilée et souvent passionnante. Bercé par une musique entêtante d’Ennio Morriconne et servi par des comédiens peu connus hors des frontières de la Péninsule mais tout à fait crédibles, CRIMINALIA constitue une perle noire, un classique vénéneux du giallo / polar à redécouvrir impérativement pour les cinéphiles.
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bruce randylan
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Re: Luigi Zampa (1905-1991)

Message par bruce randylan »

hellrick a écrit :
Kevin95 a écrit :Image

IL MOSTRO (Luigi Zampa, 1977) découverte
Quel chouette film!!!
Ah dommage, je l'ai raté celui-là ! :?

Et dernier compte-rendu pour cette rétrospective :

Les coupables
(Processo alla cita - 1952)
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Un procureur enquête sur un double meurtre qui semble vouer à l'impasse. Mais il est persuadé qu'il s'agit d'une véritable organisation qui a planifié ces assassinats.

J'ai plusieurs fois regretté la réalisation pas toujours inspirée de Luigi Zampa mais celui-ci est vraiment une excellente surprise sur cet aspect où le cinéaste tente pas mal de chose entre la découverte du cadavre sur la plage, des mouvements de caméra alertes pour tenter de donner un mouvement unique à plusieurs interrogatoires menés à la suite, une longue partie en huit clos habilement découpée qui fait preuve d'une réel sens de l'espace et du décor ainsi que quelques séquences plus graphiques et impressionnantes dont une saisissante fuite nocturne au travers de ruelles labyrinthiques gorgées d'ombres menaçantes et d'interminables escaliers.

Îl faut dire que le sujet a dû particulièrement l'inspiré puisqu'il traite directement de la Gomorra (l'un des premiers j'imagine) qu'il filme vraiment comme un entité tentaculaire dont les membres ne semblent pas connaître de fin et couvre toutes les tranches de la population quelques soient leurs âges, leurs sexes ou leurs milieux sociaux. Ca permet un climat assez unique sous forme d'un impossible whodunit qui s'épaissit sans cesse d'un façon presque absurde lors de la séquence de la reconstitution du banquet très théâtrale sur le principe mais qui parvient a y échapper par sa façon d'élargir de plus en plus la cadre)
Devant ce scénario rigoureux, précis, ambitieux et paranoïaque, il n'est donc pas étonnant de retrouver Francesco Rosi à la plume, même si on devine que le couple cherchant à émigrer aux USA est plus un argument un peu trop "facilement" commercial (sans doute rajouter par Zampa).

Un petit mot sur Amedeo Nazzari très charismatique en procureur opiniâtre, déterminé mais humain et compréhensif. C'est d'ailleurs très curieux de voir à quel point je le trouvais fade chez Matarazzo alors qu'il est souvent excellent ailleurs.


Avis un peu décousu et qui ne rend pas pleinement justice à la richesse de ces coupables (et encore, la copie diffusée était en VF... correct cela dit)

Sans conteste dans le Top 5 du cinéaste. :D
"celui qui n'est pas occupé à naître est occupé à mourir"
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