Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méconnus

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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kiemavel
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Le repaire du forçat (Deep Valley) 1947
Réalisation : Jean Negulesco
Production : Henry Blanke (Warner)
Scénario : Salka Viertel, Stephen Morehouse Avery
et William Faulkner d'après un roman de Dan Totheroh
Image : Ted McCord
Musique : Max Steiner

Avec :

Ida Lupino (Libby Saul)
Dane Clark (Barry Burdette)
Wayne Morris (Jeff Barker)
Henry Hull (Cliff Saul)
Fay Bainder (Ellie Saul)
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Libby vit avec ses parents dans une ferme délabrée, isolée au fond d'une vallée de Californie. Depuis son enfance, prisonnière de la relation malsaine qu'entretiennent ses parents désunis, elle s'est repliée sur elle-même et ne se libère de l'emprise familiale que par ses sorties dans la nature environnante. Au cours de l'une d'elle, elle tombe sur un chantier qui se rapproche de la ferme. Des centaines de forçats de la prison de Saint Quentin et leurs gardiens travaillent au percement d'une route surplombant l'océan Pacifique. Libby est fascinée par l'arrivée de ces étrangers et remarque plus particulièrement Barry, l'un des détenus, un jeune homme impulsif et incontrôlable.

Dans les jours qui suivent, Jeff Barker, l'ingénieur responsable du chantier, se rend à la ferme pour puiser de l'eau et le père de Libby en profite pour faire quelques affaires. Le soir, il est invité à la ferme et s'intéresse de très près à la jeune fille qui le repousse tant bien que mal alors que son père s'était absenté, voulant par là favoriser l'initiative de Barker qu'il avait anticipé. Quelques jours plus tard, à la faveur d'un glissement de terrain qui cause de nombreux morts parmi les forçats, Barry, qui avait été mis à l'isolement, parvient à s'échapper, la coulée de boue et de pierres n'ayant fait qu'éventrer sa cellule. Alors qu'il fuit à travers la forêt et qu'une patrouille s'est déjà lancée à sa recherche, il retrouve Libby qui l'entraine dans une cabane abandonnée au milieu des bois. Les deux "sauvages" commencent alors à s'apprivoiser, tandis que la chasse à l'homme s'organise, la police locale et le personnel pénitentiaire parcourant la montagne à la recherche du fugitif...
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Quand Roy Earle (La grande évasion) rencontre Johnny Belinda…Ce n'est pas uniquement à ces deux films que fait penser ce petit bijou de Jean Negulesco car on pense aussi obligatoirement à La maison dans l'ombre en raison de la personnalité des deux principaux personnages et de la situation de départ très ressemblante entre, la aussi, un homme violent et une jeune femme vulnérable….et on y pense d'autant plus que dans les deux cas, la fille en question était interprétée par la même actrice : Ida Lupino. Je précise que c'est plus un mélodrame romantique qu'un film noir mais les aspects noirs me semblent suffisamment importants pour le placer dans ce topic. Même si ce film est l'un des meilleurs films de son metteur en scène et qu'Ida Lupino a trouvé la un de ses plus grands rôles (un avis que je partage avec Bertrand Tavernier), le premier casting envisagé dès 1942, l'année de la parution du roman laisse tout de même rêveur : Ann Sheridan, Humphrey Bogart et John Garfield. Les raisons du report du tournage initial sont inconnues et celui de 1947 ne fut pas simple non plus. Ida Lupino était en train de renégocier son contrat avec Warner et le studio, sentant que la comédienne n'allait pas vouloir le renouveler, a voulu mettre en boite un film supplémentaire de toute urgence, puis, une grève dans les studios Warner empêcha d'y tourner les scènes initialement prévues...ce qui fait notre bonheur car l'une des qualités d'une film qui n'en manque pas, c'est précisément le fait qu'il a été presque intégralement tourné en décors naturels…et ils sont magnifiques. La côte très découpée et les paysages de moyenne montagne auraient été mis en boite dans 2 secteurs distincts de la cote californienne, le " Big Sur " et " Palos Verdes ".

Un mot sur la situation de mélo de départ qui anticipe déjà certains aspects d'un film ultérieur de Negulesco, Johnny Belinda. Tourné l'année suivante, ce film lui valu une ribambelle de nominations à l'oscar (12 mais un seul billet gagnant pour Jane Wyman, l'interprète du rôle titre ). Libby, sa "soeur" est une jeune femme introvertie, complexée et maladroite qui s'exprime en bégayant. Elle a grandit dans un isolement complet et ses relations sociales sont inexistantes car elle est totalement étouffée par la relation malsaine qu'entretiennent ses parents. Ils ne se parlent plus depuis que Saul a frappé sa femme des années auparavant et ils se sont répartis la maison, Ellie vivant recluse à l'étage, seulement rejointe par sa fille qui est leur messagère, tandis que Saul occupe le rez-de-chaussée d'une ferme qui, laissée à l'abandon, s'est dégradée comme la situation de la famille. Si le père est un rustre qui se sert de sa fille qu'il croit stupide comme d'une domestique, la relation de Libby avec sa mère est encore plus dévastatrice pour la jeune femme totalement sous la coupe d'une mère vivant dans un monde imaginaire et qui la tient, par ses discours délirants, dans la méfiance des hommes. C'est aussi une manipulatrice, simulant un handicap pour mieux tenir sa fille à son service. Alors Libby fuit cet univers étouffant à la première occasion…
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L'homme qu'elle rencontre est au moins en apparence son opposé. Si Libby n'a rien vu de la vie, Barry, lui, en a trop vu. Il s'est retrouvé à 24 ans emprisonné pour une longue durée après avoir été condamné pour un crime qu'il dit n'avoir pas commis. Il prétendra avoir été impliqué dans la mort accidentelle d'un homme qu'il ne connaissait pas un soir ou il était ivre, soupçonnant ses accusateurs d'être les véritables auteurs du meurtre. En fait, il est permis d'en douter tant sa violence est grande. Car si lui aussi est un être asocial, c'est en raison de sa violence prête à exploser à la moindre contrariété. Torturé par son passé et d'une nature impulsive, il se montrera incapable d'avoir le moindre controle sur lui-même et semblera prêt à tout, y compris à tuer pour faire face au moindre danger ou pour conserver sa liberté. Contrairement à Libby qui est l'image de la pureté, la personnalité de Barry a été profondément viciée. On avait découvert vraiment la jeune femme libérée de l'emprise de ses parents dans des scènes idylliques de nature filmées magnifiquement par Negulesco. Les scènes champêtres ultérieures seront plus menaçantes dès qu'elles impliqueront le citadin Barry, déplacé et gauche dans une nature qu'il ne connait pas. C'est guidé par Libby qu'il pourra croire y trouver refuge mais les plans de coupe sur des hommes en armes perchés sur les escarpements rocheux ne laissent guère de doute sur l'issu de la chasse.

Entre temps, il y aura néanmoins eu toutes ces séquences sublimes entre deux êtres transformés par l'amour. La jeune femme totalement dépourvue de confiance en elle et d'estime de soi découvre le sentiment amoureux et surtout le désir car c'est même par là que çà commence, les regards insistants qu'elle jette à distance sur Barry ne laissent guère de doute à ce sujet. Quand il l'embrassera, elle s'arrêtera aussitôt de bégayer…Ce qui est une découverte totale pour elle est sans doute moins inédit pour Barry mais en fait on n'en sait rien. En tout cas, si Libby est totalement transformée par cette relation amoureuse, Barry semblera prendre çà pour une liberté conditionnelle. Même s'il (re)découvre en lui une capacité à aimer, elle est profondément ternie par le poids de son passé qui, sans même la présence menaçante des hommes qui le traque, réapparait soudainement par la simple découverte d'une arme à feu par le couple, une arme qui lui fera presque peur, toutefois moins que la peur qu'elle inspirera à Libby qui avait très vite perçu toute la violence potentielle de cet homme.
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Un mot sur les interprètes. Jouer une jeune fille arriérée, c'était dur à interpréter pour Ida Lupino. Certains acteurs/trices n'éprouvaient aucune difficulté à paraitre bête (Fais comme t'en as l'habitude, coco…) mais pour Ida, c'était un rôle de composition et on a du mal à la croire seulement un peu neuneu :mrgreen: . Plus c'est compliqué, plus son personnage s'enrichi et donc plus le film avance et plus elle est sublime. La soi-disant Bette Davis du pauvre vous salue…De son coté, le John Garfield du pauvre, puisque c'est ainsi qu'il a lui aussi été surnommé n'est pas tout à fait à la hauteur et il aurait plutôt le problème inverse. Dès que sa dureté commencera à s'estomper, il sera un peu en difficulté face à sa partenaire. Dans la violence, l'intensité de son regard et un coté sec et tendu sont parfait mais dès qu'il doit exprimer des sentiments complexes ou même simplement la tendresse, il est plus limité que sa partenaire et çà se voit un peu. Malgré tout, le coté profondément désespéré de son personnage peut faire passer ses limites pour des services rendus. Son meilleur rôle reste sans doute celui qu'il tiendra l'année suivante dans Le fils du pendu (Moonrise) réalisé par Frank Borzage en 1948 avec à ses cotés une autre sublime créature, Gail Russell (mais tout de même moins douée de Miss Lupino). Cela dit, il se trouve que je suis en train d'explorer les films noirs rares de Dane Clark alors il se peut que je fasse quelques découvertes intéressantes. Il y a en tout cas un peu de potentiel mais à priori pas d'énormes bonnes surprises à attendre. A propos du final, Attention spoiler, je ne peux résister à signaler un final inhabituel...
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C'est en effet sinon un des plus noirs que j'ai vu, un des plus désespérant. C'est un final à double effet. D'une part, Barry meurt, ce qui est dans la logique du récit mais le plan final nous montre une Libby manifestement en couple avec Jeff Barker, l'homme qui l'avait "symboliquement " violé au début du récit. Il n'y a pas de viol contrairement à ce qui se produisait dans Johnny Belinda mais il est plus que suggéré par les avances pressantes de Barker, ses regards sans équivoque, les intentions qu'il manifestait lorsqu'il avait tenté de la coincer dans un recoin de la cuisine des Saul même si elle était parvenu finalement à se dégager

Jean Negulesco a réalisé d'autres films noirs et apparentés plus ou moins faciles à voir. En dehors de Deep Valley, le meilleur est peut-être La femme aux cigarettes (Road House) 1948, avec à nouveau Ida Lupino accompagnée par Richard Widmark et Cornell Wilde (DVD zone 1 avec st français). Je l'ai déjà dit, je ne suis pas fan de ses premiers longs métrages, des thrillers plus ou moins marqués par l'actualité politique et la guerre dans lesquels il employa par 3 fois le "couple" Peter Lorre/Sidney Greenstreet. Même le plus réputé, Le masque de Dimitrios ne m'a jamais totalement convaincu. Je préfère Nobody Lives Forever même si John Garfield a été beaucoup mieux servi par d'autres dans le genre. Negulesco l'emploiera encore dans l'un des films américains de Micheline Presle, La belle de Paris (Under my Skin) (DVD zone 2)…mais c'est assez emmerdant et surtout dans Humoresque (DVD zone 2), qui est au contraire l'une de ses grandes réussites (sauf peut-être pour le cinéphile mélomane). Ce repère du forçat est aussi un des tout meilleur du réalisateur au coté de Johnny Belinda (DVD zone 1 avec st français) et Captives à Bornéo (DVD zone 2). J'adore ce film. La 2ème vision n'a fait que renforcer mon admiration pour ce film très peu connu et diffusé de ce metteur en scène dont la plupart des films ont été soit édités en DVD, soit au moins visibles à la télévision chez nous.
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Les deux hommes de Libby : Le père (Henry Hull) et le forçat (Dane Clark)
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Jean Negulesco et ses deux comédiens principaux

Je signale aussi un heureux évènement : la naissance d'un index digne de ce nom. Grace à l'intervention de la modération, de quelques mains invisibles puis celle de Jeremy Fox, j'ai pu récupérer l'usage des premiers posts de ce topic démarré sous une autre identité et que je ne pouvais par conséquent pas éditer.
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Jeremy Fox
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Jeremy Fox »

kiemavel a écrit : la naissance d'un index digne de ce nom.
De sacrés lacunes : à le relire, même pas certain d'avoir vu plus de deux films de cet index qui est une très bonne initiative.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Jeremy Fox a écrit :
kiemavel a écrit : la naissance d'un index digne de ce nom.
De sacrés lacunes : à le relire, même pas certain d'avoir vu plus de deux films de cet index qui est une très bonne initiative.
Il doit y en avoir plus que çà je pense. Je me rappelle au moment de la publication des papiers de tes commentaires sur des films que tu connaissais, pour les sûrs : Dans la souricière et Mission périlleuse. Alors je pense qu'il est probable que tu en as vu d'autres de cette liste. D'ailleurs un certain nombre de films que j'ai évoqué sont devenus plus faciles à voir .

Certains films ont été diffusés ou rediffusés sur une chaine française depuis l'écriture des textes :

-Appointment With Danger (Échec au hold-up) de Lewis Allen avec Alan Ladd et Paul Stewart
-Dangerous Mission (Mission périlleuse) de Louis King avec Victor Mature, Vincent Price et Piper Laurie
-Drive a Crooked Road de Richard Quine avec Mickey Rooney, Diane Foster et Kevin McCarthy
-Edge of Eternity (Le secret du grand canyon) de Don Siegel avec Cornel Wilde et Victoria Shaw
-Framed (Traquée) de Richard Wallace avec Glenn Ford, Janis Carter et Barry Sullivan
-Inferno de Roy (Ward) Baker avec Robert Ryan et Rhonda Fleming
-The Mob (Dans la gueule du loup) de Robert Parrish avec Broderick Crawford
-Naked Alibi (Alibi meurtrier) de Jerry Hopper avec Sterling Hayden et Gloria Grahame
-The Threat de Felix E. Feist avec Charles McGraw et Virginia Grey
-Two of a Kind de Henry Levin avec Edmond O'Brien Lizabeth Scott et Terry Moore

D'autres ont été édités en DVD. Pour les éditions françaises :

-Al Capone de Richard Wilson avec Rod Steiger et Martin Balsam
- New-York Confidential de Russell Rouse avec Richard Conte, Broderick Crawford et Anne Bancroft
- Tomorrow is Another Day (Les amants du crime) de Felix E. Feist avec Steve Cochran et Ruth Roman
- Woman on the Run (Dans l'ombre de San Francisco) de Norman Foster avec Ann Sheridan, Dennis O'Keefe

et enfin, d'autres films étaient déjà disponibles en DVD à l'époque de la publication :

-Bodyguard de Richard Fleischer avec Lawrence Tierney et Priscilla Laine
-Crime Wave (Chasse au gang) de Andre de Toth avec Sterling Hayden
-Cry of the City (La proie) de Robert Siodmak avec Richard Conte et Victor Mature.
-Thieves Highway (Les bas-fonds de Frisco) de Jules Dassin avec Richard Conte, Valentina Cortese et Lee J. Cobb

Listes bien sûr non exhaustives et je ne parle même pas des autres films qui sont disponibles dans des éditions étrangères, principalement américaines ou espagnoles mais dans les deux cas presque exclusivement en vo non st. Cependant, un certain nombre de ceux là ont été diffusés à la télévision française mais parfois ces diffusions sont anciennes. Maintenant, il faut admettre que jusque là ce topic est plutôt destiné aux complétistes et aux fouineurs avides de sensations nouvelles pour avoir déjà pas mal fréquenté le genre. A propos de compléter…A peu près dans le même esprit, cad des films noirs pas ou mal connus, réalisés par des gens qui le sont davantage et/ou comportant dans leur distribution des gens qui le sont souvent encore un peu plus, dans l'esprit de la récente série Richard Conte, j'en ai encore au minimum une centaine sous le coude. Après çà, il sera toujours temps de s'en prendre aux films stars du genre ou au contraire d'aller voir du coté des 3ème couteaux tels Chester Morris, Lloyd Nolan, Robert Armstrong ou Gene Barry…mais je m'emballe et regarde trop loin :mrgreen: . Plus près de nous, le prochain, c'est du lourd, du Henry Fonda.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

Message par Jeremy Fox »

kiemavel a écrit : -Crime Wave (Chasse au gang) de Andre de Toth avec Sterling Hayden

Ca n'en fait que quatre avec ce petit chef-d’œuvre et Woman on the Run qui m'a déçu. J'en ai peut-être vu d'autres mais sans aucun souvenirs.
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Message par Supfiction »

kiemavel a écrit : Quand Roy Earle (La grande évasion) rencontre Johnny Belinda…Ce n'est pas uniquement à ces deux films que fait penser ce petit bijou de Jean Negulesco car on pense aussi obligatoirement à La maison dans l'ombre en raison de la personnalité des deux principaux personnages et de la situation de départ très ressemblante entre, la aussi, un homme violent et une jeune femme vulnérable….et on y pense d'autant plus que dans les deux cas, la fille en question était interprétée par la même actrice : Ida Lupino.
aaargh.. j'adore ces films, en particulier La maison dans l'ombre (deux films en un presque) dans lequel Ida est fabuleuse face à Robert Ryan!
Les belles images du film et ton texte font en outre très envie même si effectivement on a du mal à s'imaginer Ida jouer une jeune fille arriérée (mais bon, Jodie Foster l'a bien fait aussi plus ou moins..) !
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Message par kiemavel »

Jeremy Fox a écrit :
kiemavel a écrit : -Crime Wave (Chasse au gang) de Andre de Toth avec Sterling Hayden
Ca n'en fait que quatre avec ce petit chef-d’œuvre et Woman on the Run qui m'a déçu. J'en ai peut-être vu d'autres mais sans aucun souvenirs.
ça n'en fait effectivement pas beaucoup…Puisque ce topic peut aussi servir à ça, je mettrais prioritairement dans la prescription :

-1 Bafon, 2 Frisco, 2 Dassin. Le tout en une seule prise (parce qu'avec les vrais pros, il n'en faut pas plus). A prendre le soir après le repas, bien détendu mais à faire passer avec une boisson non alcoolisée.

-Ensuite, faut prendre une bonne fiction avec la pommade de chez Nathan Juran. J'y suis allergique mais je sais que tu l'as supporte mieux. Par contre, énergique la fiction !

-Après ça, j'ajouterais un peu d'élixir du bon docteur Joseph H. Lewis. ça fait penser à un remède de charlatan de westerns mais çà reste toujours très efficace.

-Par contre, rien en suppositoire, parce que quand on peut s'en passer, hein...

Alors au 1er signe d'intoxication, faut surveiller le patient. Au 1er rêve ou tu recevrais la visite de Gloria Grahame qui te réveillerait en te chuchotant à l'oreille : "Erick...Wake up Honey, You will be late…", faut réduire le dosage car il ya un risque d'addiction et qui sait, tu risquerais de ne plus aimer tant que ça le western. :arrow: (j'avais pourtant fait des efforts, un bel index tout neuf et pis là, Paf ! la boulette :mrgreen: )
Dernière modification par kiemavel le 19 mai 14, 23:52, modifié 1 fois.
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Revolt in the Big House

Message par kiemavel »

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La révolte est pour minuit (Revolt in the Big House) 1958
Réalisation : R.G. Springsteen
Production : Davis Diamond (Allied Artists)
Scénario : Daniel James et Eugène Lourié
Image : William Margulies

Avec :

Gene Evans (Lou Gannon)
Robert Blake (Rudy Hernandez)
Timothy Carey ('Bugsy' )
John Qualen (Doc)
Emile Meyer (Warden)
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Lou Gannon, un homme inquiété dans de multiples affaires mais jusque là jamais confondu, est enfin condamné à 20 ans de prison pour un vol à main armée. Il est transféré dans un pénitencier très sécurisé ou il retrouve Doc, une vieille connaissance qui purge une longue peine et qui, emprisonné depuis longtemps et bénéficiant d'un poste grâce auquel il peut recueillir des informations de toutes sortes, le renseigne sur les hommes susceptibles de tenter une évasion. Doc l'oriente vers Bugsy et sa bande qui contrôle la prison du coté des détenus. Bugsy constatant que Gannon a déjà un plan parfaitement au point et qu'il bénéficie de soutiens à l'extérieur, se range derrière le nouveau venu…
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Un film de prison assez original, certes vite oubliable mais qui se suit sans ennui et qui, bien que limité, serait sans défauts -contrairement aux autres films de son metteur en scène- s'il ne souffrait d'un manque de moyens assez évident, visible plus particulièrement dans ce qui est habituellement le point d'orgue dans ce genre de récit : l'émeute et/ou l'évasion, en d'autres termes toutes les scènes d'action durant lesquelles la violence finit par exploser. Le film est réputé avec récupéré les stock-shots du film de Don Siegel Les révoltés de la cellule 11 pour donner à la révolte plus d'ampleur. Heureusement car effectivement la figuration semble si réduite que Springsteen est contraint -en dehors de ces inserts- de serrer ses cadres mais ces astuces ne suffisent plus dans les séquences (presque) finales qui trahissent vraiment la pauvreté du budget. Dommage mais je dirais que contrairement à d'autres films comparables, ce n'est de toute façon pas l'émeute et ses conséquences qui a intéressé les scénaristes, sans doute justement en raison de la pauvreté des moyens engagés.

Une partie de l'intrigue nous fait suivre les préparatifs de la future révolte organisée par Gannon et ses nouveaux amis : les complicités qui s'établissent à l'intérieur de la prison, les trucs employés pour parvenir à faire rentrer entre ses murs des armes en pièces détachées puis les moyens trouvés pour les faire circuler dans les lieux sous le nez des gardiens. Des pratiques en elles mêmes risquées mais comme souvent, le plus problématique, ce sont les hommes. Il faut veiller à ce que tout ceci reste discret en s'assurant -par tous les moyens- de la loyauté de tous les gens impliqués ou mis dans la confidence. Car au delà de l'anecdotique et de l'enrobage, ce sont surtout aux hommes que s'intéresse le film et à ce titre, ses quelques personnages principaux très bien caractérisés constitue le point le plus réussi de ce petit film avec pour personnalité centrale le pervers manipulateur Lou Gannon. Car s'il y a bien un gardien chef assez retors qui harcèle les prisonniers, on n'est pas ici dans le film de prison militant à la manière des démons de la liberté malgré une situation de départ qui rappellera un peu le film justement célèbre de Jules Dassin dans lequel, dans une atmosphère de violence extrême, le plus violent était le gardien chef incarné de manière magistrale par Hume Cronyn, représentant pervers d'une société dépassée par la violence qu'elle engendre. C'est le gardien qui était le personnage central de ce film puisque c'est par lui que passait le message de Dassin. Il était le même dans La rafale de la dernière chance, un petit film de prison sorti en 1958 qui n'employait pas tout à fait les mêmes moyens, se focalisant sur la condition des détenus et jouant sur les émotions fortes et les scènes chocs en montrant des hommes dans le couloir de la mort d'une prison américaine. Il insistait donc sur les angoisses ressenties par les détenus qui finissaient par rendre fou celui incarné par Mickey Rooney, seul véritable psychopathe de cette histoire, même si c'est en raison des méthodes violentes employées par deux gardiens -cette fois ci subalternes- qu'éclatait la violence.
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Dans le film du jour, on voit peu de scènes chocs caractéristiques du genre. On tue certes le détenu seulement susceptible de pouvoir parler -pas encore mouchard et déjà mort- mais c'est à peu près tout en dehors de l'émeute. Il n'y a pas non plus d'interprétations spectaculaires, ni de psychopathes…en dehors toutefois de l'inénarrable Timothy Carey qui fait bien le barjo :twisted: , mais seulement par moment car dans ce film, il avait été relativement tenu (et sans camisole ! ), ce que certains admirateurs d'un des plus grands barrés d'Hollywood pourraient déplorer. Cependant, il faut le voir lorsqu'il peut enfin se servir de la mitraillette qui avait été patiemment assemblée tout au long du film :shock: :lol: . Bref, c'est guignol mais puisque contrairement à la plupart de ses rôles, il est ici le 2ème ou 3ème personnage le plus important, on le voit donc beaucoup et le plus souvent il est assez sobre (l'avait pris ses cachets ?). Le personnage central est néanmoins celui de Gannon qui ressemble comme un frère à celui tenu par Richard Conte dans un film évoqué récemment, Under the Gun. Ses manipulations successives pour parvenir à tout prix à s'évader renvoient au personnage sans scrupules du film de Ted Tetzlaff. Le second personnage important est tout son contraire. Le jeune mexicain (formidablement interprété par Robert Blake) qui est transféré dans la cellule de Gannon est emprisonné pour la première fois à la suite de sa participation involontaire à un cambriolage qui avait mal tourné. Condamné à 4 ans de prison, il tient à se tenir tranquille pour obtenir une liberté conditionnelle…mais le voisin de cellule de Gannon aurait pu mieux tomber. C'est surement le personnage le plus intéressant. Il semble d'abord être le naïf qui va être dévoré par les loups mais le petit Rudy a de la ressource. Le petit Robert Blake n'a malheureusement pas eu la carrière que son talent aurait mérité car il est encore une fois formidable dans ce rôle. Le dernier personnage important, c'est celui interprété par le vétéran John Qualen, toujours impeccable de sobriété en vieux détenu ayant l'oeil à tout et qui semblera suivre aveuglément Gannon.

R.G. Springsteen a été avant tout un réalisateur de westerns. Il débuta dans le genre par des films de séries avec pour "vedettes" Bill Elliott ou Allan Lane et avec le tout jeune Robert Blake alors adolescent. A partir du Desperado des plaines (Cole Younger, Gunfighter), 1958, il a eu enfin accès à des comédiens et comédiennes un peu plus réputés mais peu excitants type Rory Calhoun ou Tab Hunter, et surtout un peu fatigués : Frank Lovejoy pour le premier puis Dana Andrews, Broderick Crawford, Brian Donlevy ou George Montgomery ; et pour les filles : Yvonne de Carlo, Jane Russell ou Linda Darnell (dans son dernier rôle). A la question : "Et si tu étais un moyen de locomotion ? ", Springsteen aurait répondu : " La voiture balai " tant il a récupéré d'acteurs et d'actrices essoufflés. Ainsi, au cours des années 60, il tourna plusieurs films pour A.C. Lyles, un producteur spécialisé dans le recyclage de stars. Je connais Fort Bastion ne répond plus (Red Tomahawk) qui est à peu près nul et confirme la sinistre réputation du producteur mais Toute la ville est coupable (Johnny Reno), 1966 (DVD zone 2) est regardable même s'il peut faire mal aux admirateurs de Dana Andrews. Il a aussi récupéré Audie Murphy pour deux films bien plus réussis sans être inoubliables : Le collier de fer (Showdown) 1963, est fauché mais original et La patrouille de la violence (Bullet for a Badman) 1964 (DVD zone 2). Il a peu tourné en dehors de son genre de prédilection : The Red menace est le pire film de la série anti-rouge du tournant des années 50 que j'ai vu mais il en est drôle à force de bêtise.
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L'affiche Belge prenait donc comme tête de gondole en le mettant au premier plan, ce bon Tim.

J'ai déjà évoqué plusieurs films de prison dans ce topic. Castle on the Hudson de Anatole Litvak ; Convicted (La loi des bagnards) de Henry Levin ; The Last Mile (La rafale de la dernière chance) de Howard W. Koch et Riot in Cell Block 11 (Les révoltés de la cellule 11) de Don Siegel. Tous, y compris le film du jour, ont été diffusés à la télévision chez nous mais aucun n'a à ce jour été édité en DVD sauf pour certains en Espagne et/ou aux États-Unis.

Ce film n'était pas prévu au programme, le prochain devrait être Laissez-nous vivre de John Brahm avec Henry Fonda
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Roadblock (1951)
Réalisation : Harold Daniels
Production : Lewis J. Rachmil (RKO)
Scénario : Steve Fisher et George Bricker
d'après une histoire de Richard Landau et Daniel Mainwaring
Image : Nicholas Musuraca
Musique : Paul Sawtell

Avec :

Charles McGraw (Joe Peters)
Joan Dixon (Diane)
Lowell Gilmore ( Kendall Webb)
Louis Jean Heydt (Harry Miller)
Milburn Stone (Egan)
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Après avoir accompli une mission à Cincinnati, Joe Peters, l'inspecteur d'une compagnie d'assurance, rentre à Los Angeles par avion. Il avait remarqué dans le hall de l'aéroport une jeune femme séduisante qui avait semblé l'avoir remarqué puis l'avait incompréhensiblement ignoré. Une fois dans l'appareil, il se rend compte que la jeune femme s'est servi de lui pour obtenir une réduction sensible sur le prix du vol en se faisant passer pour sa femme. Un orage ayant contraint l'avion a faire une escale imprévue, ils sont contraint de partager la même chambre. Peters, immédiatement séduit par Diane au petit matin l'embrasse mais la jeune femme exclu sans ambiguité la possibilité d'une liaison entre eux. Quelques temps plus tard, dans le cadre d'une enquête sur un vol de fourrures, Peters retrouve Diane chez le suspect de l'affaire, un truand notoire…Ils se revoient et une idylle commence entre eux.
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Ce bijou inconnu revu hier soir m'incite à changer à nouveau de programme car j'ai trop envie de parler à chaud de cette merveille, quitte à bâcler ce texte et à y revenir plus tard. Harold qui ? Harold Daniels ! Vous ne connaissez pas et moi non plus. Au vu de son pedigree, je ne sais pas comment il a pu tourner ce film d'abord destiné à Don Siegel. Obscur acteur de complément, souvent même pas crédité, il avait aussi dirigé quelques films de 3ème ordre avant Roadblock et retournera ensuite à ses médiocres occupations. Cette petite série B sans stars, même si Charles McGraw s'était retrouvé au cours de cette très courte période 49/51, pour la 1ère et unique fois de sa carrière tête d'affiche de quelques films…et des films noirs (The Threat, Armored Car Robbery, The Narrow Margin et donc Roadblock) restera l'unique "titre de gloire" de Harold Daniels car la petite série B commence à voir sa réputation nettement grandir aux États-Unis depuis son édition DVD…Resterait à faire pareil en France. Pour le DVD, ne rêvons pas mais j'apporte ma pierre…

Je commence par les attraits périphériques. Visuellement, le film est superbe, les captures ne rendant que partiellement compte bien sûr du travail sur l'image du grand Nicholas Musuraca, directeur de la photographie mythique de la RKO ou il travailla à la "photogénie" des plus célèbres productions de Val Lewton, notamment sur La féline puis entre autres sur un autre Tourneur La griffe du passé, le film noir que je conserverais si par malheur je ne devais en garder qu'un. Ensuite toujours par la périphérie, le second attrait et bien justement ce sont les séquences de début et de fin. Les très malines séquences d'introduction nous plongent directement dans une atmosphère de pur film noir mais elles sont un leurre, un montage, une manipulation car le "vrai" film noir on ne l'aura que plus tard. Les séquences finales sont tout aussi remarquables. Il s'agit d'une longue course poursuite brillamment mise en scène, en partie tournée dans un endroit insolite parait-il inédit en 1951 mais qui depuis a beaucoup servi : le lit canalisé de la rivière de Los Angeles. (Je raconte en détail les formidables séquences d'ouverture mais en spoiler…)
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Le film s'ouvre en effet sur un meurtre. On découvre Joe Peters abattant un homme en pleine rue, la victime venant s'écrouler sur le capot de la voiture d'un homme qui s'apprêtait à prendre le volant. Pris en otage par le tueur, l'homme prend peur et achète sa vie en révélant l'emplacement d'une cachette ou il a dissimulé une forte somme d'argent. Dans un cimetière, sous la dalle d'un caveau, il tente de saisir une arme mais est pris de vitesse par Peters et jeté à terre. En se relevant, il voit stupéfait la soit disant victime de Peters réapparaitre. C'est bien évidemment après cette séquence d'introduction que nous recevons les informations relatives au métier de Peters et de son collègue. Ce sont des détectives qui travaillent pour une compagnie d'assurance. En marge du travail de la police, ils tentent de retrouver les auteurs des vols perpétrés sur les clients de leur employeur.
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L'argument est en revanche loin d'être inédit. Le type honnête, droit comme un piquet, qui voit sa vie chamboulée par la rencontre d'une femme fatale et qui va remettre en cause tous ses principes, allant jusqu'à se muer en voleur et en tueur pour la garder, c'était déjà du réchauffé en 1951. Celui dont il aura le plus à craindre, c'est d'ailleurs son collègue et ami resté honnête, la encore une figure que l'on avait déjà vue et que l'on reverra notamment dans une autre série B de valeur, Le bouclier du crime dans lequel le flic incarné par Edmond O'Brien, tueur et voleur lui aussi mais pour accéder à un confort matériel modeste mais pourtant inaccessible, était confondu par son coéquipier. Dans Roadblock, si la plongée dans l'abime du personnage incarné formidablement par un McGraw plus subtil qu'à l'accoutumée, est une figure attendue, la personnalité de la femme fatale est elle extrêmement singulière car la soi disant "femme fatale" que l'on commence par découvrir va se muer en femme sincèrement amoureuse d'un homme qui ne prendra jamais véritablement conscience de sa transformation ou trop tard pour revenir en arrière, les actes engagés étant trop graves pour rester sans conséquences. Peters va progressivement paniquer et c'est d'abord sa fébrilité inhabituelle puis une explosion de violence inédite qui va éveiller les soupçons sur l'insoupçonnable agent mais cette fébrilité n'est pas née de son passage du mauvais coté de la loi, elle était en lui, dans son incapacité à comprendre cette femme qui s'était sincèrement métamorphosée au contact d'un homme "décent" pour franciser une expression américaine maintes fois entendues dans le film noir.

On avait en effet découvert Diane en incarnation presque caricaturale de la femme fatale de film noir. Après leur rencontre qui s'était apparentée à une longue joute oratoire entre la séductrice et l'homme de marbre a qui on ne l'a fait pas, incarné d'ailleurs dans cette première partie par le Charles McGraw granitique et rugueux que l'on connait, Peters, qui avait néanmoins été séduit, avait retrouvé Diane au domicile de son petit ami soupçonné dans une affaire de vol de fourrures. Peters avait alors pu mesurer tout ce qui semblait le séparer de cette femme attirante, maitresse d'un truand notoire, vénale, menteuse et disant elle même trop aimer le vison pour se laisser séduire par un "sucker". L'affrontement avec le rigide Joe Peters est donc très rude durant les premiers temps de leur relation. Il va d'ailleurs rester sur cette image et croira que pour garder une telle femme il doit changer de train de vie alors que dans le même temps, elle semblera avoir été réellement séduit par la droiture de cet homme et se montrera prête à changer de vie pour lui, commençant par rompre avec son amant. Le passage vers cette seconde Diane est marqué par une escapade hors de Los Angeles, une parenthèse idyllique qui ne durera pas...
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La qualité de l'interprétation et la beauté de "l'inconnue" Joan Dixon a été la révélation de cette seconde vison dans une copie décente. Elle a tourné dans une poignée de films essentiellement des westerns de 3ème division signés Lesley Selander ou Stuart Gilmore et je suis sidéré qu'un tel talent en soit resté à une carrière aussi rachitique. C'est une énigme...Charles McGraw, quant à lui, a été un bon second rôle du film noir puis occasionnellement un premier. On l'a découvert d'abord bien sur dans Les tueurs puis dans de nombreux noirs de la rko, tournant dans de nombreux films des metteurs en scène maison, notamment Anthony Mann et Richard Fleischer. Si le premier, malgré 4 films, ne lui offrit jamais de premiers rôles même s'il se fit remarquer dans un rôle de tueur saisissant dans La brigade du suicide (1949), le second lui permis de tenir le haut de l'affiche dans 2 de ses meilleurs films noirs, d'abord dans le très bon Armored Car Robbery (1950) puis dans L'énigme du Chicago Express (1952), encore meilleur que le précédent. Ce furent les sommets de sa carrière. Juste avant, il avait déjà été remarqué dans The Threat (1949) un court film noir dans lequel il excellait dans un rôle de tueur psychopathe qui aurait pu échoir à Lawrence Tierney. Plus tard, il excellera dans le rôle d'un agent d'assurance buté dans Loophole (1954) mais il était déjà relégué au second plan. ça n'ira pas en s'arrangeant même si entre deux télévisions, il se faisait encore remarquer de temps à autre sur le grand écran.
Pour une fois, j'attribue une note. Pas d'étoiles chez moi mais des glaçons. De 0 à 5 ??? Pour ma part, je mettrais bien 4 glaçons pour mon Daniels :arrow:
Dernière modification par kiemavel le 20 mai 14, 02:14, modifié 1 fois.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Mon dernier combat pour faire connaitre le talent et la beauté de Faye Marlowe s'était soldé par un échec mais je m'en fous :wink: , je continue avec cette fois ci la talentueuse et splendide créature dénommée Joan Dixon. J'ai mis des photos toutes issues de Roadblock prises parfois dans les mêmes séquences pour montrer la diversité des facettes de ce visage très expressif. Une diversité telle que je lui trouve des faux airs de Jane Greer ( en haut, avec les cheveux tenus) et une certaine ressemblance avec Gail Russell avec un soupçon de Gene Tierney (dans les photos du milieu et du bas)...A moins que ça tourne à l'obsession puisque ce sont 3 de mes glaçons préférés…
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La même à la plage ( l'accessoiriste n'a pas gagné l'oscar cette année là :P )


Du coup, Je continue à poser les projos sur Joan Dixon. Le prochain sera donc l'un de ses rares films accessibles. Je préviens que c'est un bon nanard au scénario hallucinant (et du coup assez marrant) mais je risque néanmoins de faire court (Merci qui ?). Il s'agit de : Experiment Alcatraz de Edward L. Cahn avec Joan Dixon. Ah bon ? :mrgreen:
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Experiment Alcatraz (1950)
Réalisation : Edward L. Cahn
Production : Edward L. Cahn (Crystal Productions). Distribution : RKO
Scénario : Orville H. Hampton
d'après une histoire de George W. George et George F. Slavin
Image : Jackson Rose
Musique : Irving Gertz

Avec :

John Howard (le docteur Ross Williams)
Joan Dixon (Joan McKenna)
Robert Shayne (Barry Morgan)
Walter Kingsford (Le docteur Finley)
Lynne Carter (Ethel Ganz)

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5 détenus de la prison d'Alcatraz acceptent de participer comme cobayes à une expérimentation médicale inédite dans laquelle ils risquent leur vie contre la promesse d'une libération immédiate en cas de survie à la fin des essais. Les 5 criminels sont exposés à des radiations après qu'on leur ai injecté une solution censée empêcher le développement des maladies du sang chez les gens irradiés mais l'essai est subitement arrêté lorsque Barry Morgan, un des 5 volontaires, poignarde son meilleur ami dès le début de l'expérimentation. En raison des liens d'amitié qui liaient les deux hommes, les médecins en concluent que le meurtre est à mettre sur le compte d'un coup de folie provoqué par le traitement expérimenté. Le programme est arrêté et les cobayes survivants très rapidement libérés mais ces conclusions ne satisfont pas le docteur Ross Williams, le chercheur à l'origine du traitement. Avec Joan McKenna, l'infirmière qui surveillait les essais, tombée en disgrâce pour avoir été rendue en partie responsable du drame, il commence à mener des investigations pour comprendre ce qui n'a pas fonctionné au cours de l'essai thérapeutique…
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Un petit thriller d'à peine une heure (57 min !!!) tout à fait facultatif mais qui se suit sans ennui (manquerait plus que ça) et devant lequel on peut même pas mal se marrer tant le scénario est délirant. Comme le lecteur aura pu le constater, le postulat de départ est dément, assez débile et en tout cas, plus qu'à un polar, il fait d'avantage penser à un départ de film fantastique, ce qu'il n'est absolument pas. Malgré le "Alcatraz" du titre, ce n'est pas non plus un film de prison. Les cobayes en sont effectivement extraient…mais on y reviendra presque plus. Ce n'est pas non plus, malgré ce que pourrait donner à penser mon court résumé, un thriller "hospitalier" (il y en a eu plusieurs dans le cycle noir) car après la libération des cobayes, en dehors des débats entre médecins qui s'opposent quant à la suite à donner à l'affaire de meurtre, l'essentiel de l'action se déroule au dehors et relève du (petit) film noir même s'il est loin d'être brillant.
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L'enquête est donc menée par des détectives amateurs, ici une infirmière et un médecin, tous les deux discrédités par l'expérimentation ratée. Le médecin est persuadé de la validité de son traitement et sa motivation va être d'apporter la preuve de son efficacité ce qui donnera dans le final des scènes ahurissantes pour les spectateurs un peu au fait des évolutions médicales, y compris d'ailleurs pour les spectateurs de l'époque. La motivation de l'infirmière incarnée par ma nouvelle lubie Joan Dixon est double. Elle veut se réhabiliter parce qu'elle se sent responsable du meurtre pour avoir laissé trainer the fatal paire de ciseaux qu'on retrouvera entre les omoplates d'un des cobayes. Elle est aussi personnellement concernée par la quête du chercheur puisque son jeune frère est déjà très gravement atteint par une leucémie. Le scénario -leucémique lui aussi- nous entraine donc -malgré l'arrière plan médico-burlesque- dans une intrigue de pur polar avec ses personnages vus et revus dans des lieux qui le sont également. Aussitôt après avoir été libéré, le racketteur et propriétaire de casino Barry Morgan reprend ses activités. Autour des tables de jeu s'affairent les clients et les hommes de main toujours prompt à protéger leur patron dès lors qu'un fouineur, ici le médecin, s'intéresse de trop près à ses activités…et surtout lorsqu'il lui demande -au nom des malades atteint de maladies incurables- de se prêter à un contrôle médical, ce que refuse catégoriquement de faire Morgan. Un personnage secondaire est intéressant, c'est un indic plus ou moins volontaire, interprété par un bon petit second rôle connu de tous sans que l'on mette forcément un nom sur sa tête, c'est Frank Cady, qui a tenu des rôles secondaires dans de nombreux films noirs et westerns jusqu'à la fin des années 50 avant de poursuivre sa carrière essentiellement à la télévision. Il joue ici un prisonnier d'Alcatraz qui a des révélations à faire sur le passé du tueur et sa victime. On a aussi droit à la balade au Lac Tahoe qui est loin d'être inédite également dans le cycle noir. On déplore aussi et surtout quelques séquences involontairement comiques. Chronologiquement, on a d'abord une séquence de tabassage grotesque du docteur Williams par un des hommes de main de Barry Morgan grâce à laquelle on apprend par déduction qu'il y avait 0 budget pour les cascades. Dans l'épilogue, on déplore aussi une reconstitution du drame initial qui tourne mal…mais qui fait bien rire.
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Edward L. Cahn était un génie méconnu (Pardon ? )…et pour ce que j'ai vu à ce jour, c'était mérité. Il doit sa petite notoriété à 2 genres potentiellement gros pourvoyeur de nanards, la SF fauchée et la jeunesse délinquante. Un seul des premiers bénéficie d'une bonne réputation, It ! The Terror from Beyond Space sorti en zone 1 dans la collection Midnite Movies (avec vost) mais je ne peux rien en dire puisque le dvd est encore emballé. D'autres titres sont disponibles dans la même collection mais ils semblent nanardesques même Le tueur au cerveau atomique :uhuh: édités celui là en Espagne par "L'atelier 13" (vost). Pas avare de ses efforts, il donna dans la soucoupe volante, le zombie, le vaudou (liste non exhaustive)…et donc dans le teenager délinquant. Dragstrip Girl, Motorcycle Gang ou Riot in Juvenile Prison ne motivent pas trop non plus. Il tourna aussi pas mal de westerns. Je n'en connais qu'un Gun Fight, édité en zone 1 (vost) avec en tête d'affiche un de ses acteurs fétiches, James Brown (Oui, je vous voir venir, mais non…). Enfin, il fut aussi un spécialiste du polar fauché. Patrick Brion a proposé Destination Murder dans le dernier cycle qu'il avait consacré au film noir. C'est également assez délirant mais plutôt mieux fichu et on y retrouvait un petit acteur de film noir que j'aime bien dans l'un des rôles principaux, Stanley Clements, le jeune jockey du film Sa dernière course, un des préférés de Raoul Walsh. J'ai d'autres polars de ce bon Edward L. Cahn mais je n'ai pas encore osé y jeter un oeil. Guns, Girls and Gangsters a l'avantage de nous présenter le programme, Girls in Prison aussi, quant à Hong Kong Confidential avec Gene Barry, c'est une des assez nombreuses plongées "confidentielles" dans les bas-fonds des villes américaines. De Chicago à New-York en passant par Kansas-City, le terme a été pas mal utilisé dans le cycle noir. A priori, les 2 seuls films d'Edward L. Cahn qui ont été diffusés sur une chaine française doivent être celui du jour et celui débusqué par Patrick Brion, à moins que certains de ses films de SF l'ai été aussi mais là c'est moins mon rayon.
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Joan Dixon, le retour (suite mais pas fin). Les photographies proviennent du chef d'oeuvre de l'immense Edward L. Cahn évoqué ci -dessus.
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La suite ? Étant donné le succès de l'opération "plein feu" sur une starlette inconnue...mais qui mériterait un peu de reconnaissance posthume, je vais poursuivre l'offensive en proposant encore un peu de Joan Dixon sauf si quelqu'un se manifestait pour me demander malgré mes efforts réitérés : " Joan comment ? ". En attendant, je vais me procurer un long plaisir solitaire avec Bunco Squad. Il n'est pas encore visionné mais ce petit polar au casting de feu :mrgreen: : Robert Sterling, Ricardo Cortez…et Joan Dixon m'attire irrésistiblement, à moins que ce ne soit qu'un imbécile entêtement.
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Sa dernière course (Salty O'Rourke) 1945
Réalisation : Raoul Walsh
Production : E.D Leshin (Paramount)
Scénario : Milton Holmes
Image : Theodor Sparkuhl
Musique : Robert Emmet Dolan

Avec :

Alan Ladd (Salty O'Rourke)
Gail Russell (Barbara Brooks)
William Demarest (Smitty)
Stanley Clements (Johnny Cates)
Bruce Cabot (Doc Baxter)
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Salty O'Rourke, un joueur professionel notamment passionné de courses de chevaux, découvre que son associé s'était endetté de 20 000 $ auprès d'un bookmaker qui lui annonce sa mort, révélant sans ambiguité être le commanditaire du meurtre et qui lui donne un mois pour rembourser cette dette. Avec son ami Smitty, entraineur de chevaux de course, ils achètent un cheval très rapide mais réputé immontable et vont rechercher Johnny Cates, un jeune jockey très doué mais interdit de course et doté d'un caractère impossible, avec pour objectif de les préparer pour remporter la grande course qui lui permettrait de rembourser la dette. Johnny rentre aux États-Unis en usurpant l'identité de son jeune frère mineur ce qui l'oblige à intégrer l'école des jockeys attenante aux champs de course, condition obligatoire à sa réintégration. Absolument pas disposé à retourner à l'école, il s'arrange pour en être exclus dès le premier jour avant d'être réintégré très rapidement après que Salty ai réussi à convaincre Barbara Brooks, la jeune institutrice de l'école, de se montrer bienveillante envers le jeune perturbateur. Bientôt, Johnny tombe éperdument amoureux de l'enseignante mais celle ci n'a d'yeux que pour Salty…
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Ce film tenait semble t'il à coeur à Raoul Walsh puisqu'il demanda à la Warner, son employeur de l'époque, d'être prêté à la Paramount pour réaliser en toute liberté ce film sur un milieu qu'il connaissait parfaitement bien pour avoir été lui-même un parieur et surtout un propriétaire de chevaux de course pendant une bonne partie de sa vie. Comme dans un certain nombre de grandes réussites de son réalisateur, mais habituellement pas dans le polar, ou moins ouvertement, Salty O'Rourke propose un mélange des genres très réjouissant. A partir d'un scénario qui sur le papier est un film noir, il s'amuse à multiplier les atmosphères y compris à l'intérieur des scènes qui proposent parfois des ruptures de tons étonnantes et il réalise au final un film hybride s'attachant à décrire avec un oeil amusé ce milieu des champs de courses qu'il connaissait bien, avec ses personnages douteux allant des petits magouilleurs plutôt inoffensifs aux vrais gangsters bien plus dangereux. Le mélange de film noir, de drame et de comédie est en tout cas pour moi pleinement réussi mais cet avis est loin d'être unanime. En effet, certains commentateurs tels Pierre Giuliani (dans le " Raoul Walsh " édité jadis par Edilig) ou Jean Tulard (dans son guide des films) ont tout l'air d'avoir pris au sérieux la totalité du film et parlent de film noir raté mais je crois surtout que ce sont les commentateurs qui ont surtout raté quelque chose tant il est évident que l'on est surtout dans la comédie, "noire" si l'on veut, mais c'est surement le moins "film noir" de tous les films que j'ai pu évoquer jusque là dans ce topic. Le film n'est en effet un pur film noir que dans sa première partie, partiellement, puis surtout dans sa partie finale qui elle est totalement "sérieuse", dramatique et violente, le reste du film n'en présente pour moi que la façade tant la comédie transpire de partout.

La première partie était en revanche un peu plus conforme au programme envisagé, on découvre en effet un Alan Ladd en mode "film noir" : imperturbable malgré les menaces du gangster et bookmaker assassin incarné par Bruce Cabot, puis glacial et cynique lorsqu'il expose à son ami Smitty ses motivations initiales : se servir sans scrupules de Johnny, son jeune protégé, jusqu'à la victoire tant espérée. Malheureusement pour lui, son projet est contrarié par les associés peu fiables qu'il s'est trouvé et rien ne va se passer comme prévu. 1er soucis : la personnalité du jeune jockey qui va se révéler aussi indomptable que le cheval que lui seul peut parvenir à monter et Salty va avoir toutes les peines du monde à le dompter. Car si Salty et Smitty sont des magouilleurs expérimentés, doués pour le mensonge et les manipulations, ils sont dépassés par le précoce Johnny…Précoce en tout d'ailleurs comme le déplorera l'institutrice incarnée par Gail Russell. On le découvre réfugié au Mexique après qu'il ai été interdit de courir aux États-Unis pour avoir truquer une course…et avec une blonde à chaque bras qui se disputent pour le petit Johnny. Une partie du portrait est déjà dressé : c'est un magouilleur né et un voleur doublé d'un menteur invétéré. C'est aussi un meneur d'hommes, jamais avare d'idées fumeuses pour faire rentrer de l'argent. C'est aussi un baratineur au langage vert et un chaud lapin incontrôlable. Alors que Salty parvient à le faire rentrer au pays, après que le jeune homme ai fait la preuve de son savoir faire en parvenant à contrôler le crack réputé immontable, il ne reste plus en théorie qu'à attendre le jour de la course en s'entrainant, mais avec un tel énergumène rien n'est simple. Il commence par perturber la classe, tente d'embarquer les autres élèves dans ses sales coups, fait le mur et rentre ivre. Mais ce sont surtout ses relations avec la jolie enseignante de l'école qui vont le plus poser problème.
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La situation se complique en effet sérieusement quand Johnny s'amourache de son institutrice car si le jeune homme est extrêmement déluré et entreprenant, c'est loin d'être le cas de la jeune femme coincée et vieux jeu qui vit encore chez sa mère, incarnée par Gail Russell. C'est le début d'un triangle amoureux qui va compromettre tous les projets de Salty. Lorsque ce dernier avait tenté d'amadouer la jeune femme ainsi que sa mère (interprétée par l'excellente Spring Byington) sans d'autre but que de voir son impossible protégé réintégrer l'école, condition obligatoire pour participer à la course, il était loin de s'imaginer que la jeune femme tomberait amoureuse de lui. Bien que lui même ne partage absolument pas les sentiments de Barbara, lorsque Johnny comprendra les sentiments éprouvés par la jeune femme, sa jalousie à l'égard de son employeur manquera de faire échouer les projets de Salty…C'est dans cette partie que l'on aura les scènes les plus drôles du film, notamment en raison des dialogues hilarants entre le chaud lapin Johnny -censé être un jeune homme de 17 ans- et la prude Barbara qui trouve le jeune garçon bien trop précoce. Le Dirty Talking (pour l'époque) des dialogues de Stanley Clements est très drôle comme ses efforts vains pour plaire à sa belle. Il faut voir la tête de Barbara quand Johnny lui offre une broche un peu olé olé, représentant une jambe de femme incrustée de brillants. On rit encore quand Salty explique à la naïve Barbara qui s'étonne de le voir porter un révolver, que Bob (le nom de son révolver) est le seul ami sur lequel il peut vraiment compter en cas de coup dur. Quand Johnny nie contre l'évidence qu'il a parié sur une course qu'il avait préalablement "arrangée" avec ses jeunes concurrents et qu'il niera le fait devant Salty, il se trahira en rajustant son oreiller et en s'enfonçant dans ses draps, le mouvement faisant voler en l'air les billets discimulés, etc…Je signale tout de même que la réapparition du film noir ne vient même pas vraiment perturber le spectateur car malgré la description que j'en fais, insistant sur ce qui fait la personnalité de ce film, malgré tout le film noir n'est jamais très loin. C'est l'enrobage qui est pure fantaisie.

Bilan : Un petit Walsh étonnant et parfait si l'on considère le programme proposé car évidemment il a filmé de plus grands sujets mais ce petit film est bourré de charme et de fantaisie. Walsh s'est amusé à détourner de nombreux points qui auraient pu être traités avec le plus grand sérieux mais d'emblée, il oriente cette intrigue de film noir vers la satire. Ce film là fait penser à un film de vacances, fait par dessus la jambe mais il est en réalité très construit et maitrisé…et d'ailleurs il s'appuyait sur un solide scénario justement nommé à l'oscar cette année là. D'autre part, Il offrait à Alan Ladd un de ses meilleurs rôles, en tout cas un des plus complexe qu'il aura eu à interpréter. Avant de découvrir ce film, je ne le pensais pas capable de jouer sur tous ces registres là dans un même film mais ici, il est visible qu'il s'est beaucoup amusé surtout dans les séquences impliquant Gail Russell et Spring Byington en proposant une caricature de séducteur dont les sourires enjôleurs et les compliments insistants cachent de noirs desseins. Le numéro de mère de famille "Old Fashon" de Spring Byington est encore plus amusant. Il faut voir ses manières vieux jeux et ce qui transparait de la vie ennuyeuse qu'elle mène avec sa fille mais elle ne pourra pas dissimuler son enthousiasme quand au contact de Salty, elle va commettre quelques écarts pour elle synonymes de dépravation. C'est d'ailleurs elle qui est séduite en premier par Salty O'Rourke et il faut voir ses enthousiasmes de jeune fille devant ses bonnes manières feintes. Il est visible qu'elle motive sa fille pour qu'elle se fasse aimer de lui alors que celle ci semble totalement dénuée de libido. Elle va alors tenter de favoriser une aventure et va la vivre par procuration. A la première vision il y a plusieurs années, j'avais en revanche trouvé Gail Russell assez peu à l'aise dans les scènes de comédies mais le 2ème passage m'a beaucoup plus convaincu. Elle est en réalité très à l'aise, c'est sans doute la surprise de découvrir la très jolie personne qu'elle était en vieille ville totalement coincée qui avait du me troubler. Si William Demarest est tel qu'on le connait, le bon copain amusant, le dernier a crever l'écran c'est Stanley Clements. Le petit jeune homme frèle à la tête chevaline était une pile électrique et son interprétation fait vraiment penser à certains des personnages interprétés dans les années 30 par le tout jeune James Cagney dans les films de cette famille là, mêlant gangstérisme et comédie. Il interprète en tout cas ce voyou sympathique à l'énergie inépuisable dans le style survoltée qui fit la gloire de Jimmy et ne démérite absolument pas par rapport au maitre.
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Je n'évoque pas la carrière de Raoul Walsh car rien que pour le film noir, je risque de faire long…Je n'évoque pas plus la carrière "noir" d'Alan Ladd si ce n'est pour signaler que plusieurs films ont déjà été évoqués dans ce topic (voir le superbe index :mrgreen: ). Par contre, il serait peut-être judicieux d'évoquer dans la foulée, le deuxième noir -et celui là un pur film noir- tourné par le couple Alan Ladd et Gail Russell, Meurtres à Calcutta de John Farrow. Faut voir car je ne suis pas très fan de ce film...Sa dernière course est déjà passé sur une chaine française mais pas hier : "Allo ! Paramount Channel ? Heu, vous savez que vous aviez une superstar dans les années 40 et 50, Alan Ladd qui s'appelait…" . Enfin, au rayon " triste coincidence ", on peut remarquer que 3 des vedettes de ce film n'ont pas fait de vieux os : Gail Russell (36 ans :shock: ), Alan Ladd (50 ans :cry: ) et Stanley Clements (55 ans :? ). Ils ont été largement dépassés -et de plus d'une encolure- par William Demarest qui tint le coup jusqu'à plus de 90 ans.
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Re: Les films noirs à petits budgets et/ou de cinéastes méco

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Même s'il parvient à faire rentrer dans le bungalow qu'il occupe avec ses patrons la jeune personne que voici, malgré aussi et surtout tous les efforts déployés pour séduire Barbara, le seul que parviendra à monter finalement Johnny, c'est lui. Je n'ai pas poussé les investigations jusqu'à la recherche de son petit nom (va pour Tornado. Ah non, y va pas nous saloper ça :mrgreen: )
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