Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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bruce randylan
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par bruce randylan »

Le jardin des femmes / Garden of women (Onna no sono - 1954)

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Des pensionnaires d'une école de jeunes femmes supportent de moins en moins l'autoritarisme des enseignantes

Après une ouverture virtuose aux amples mouvements de caméra parcourant la masse des étudiantes, l'histoire se lance sur un long flash-back de presque 2h10, censé expliquer pourquoi une élève s'est suicidée. Et 2h10, c'est un peu long pour raconter ce drame, même enrichi d'un discours social et d'une sévère critique du conservatisme japonais. Les jeunes femmes sont encore confrontées à des pratiques presque féodales où l'amour doit s'effacer derrière des mariages arrangés et où les idées socialistes sont considérées comme dangereuses.
L'écriture, la caractérisation des personnages ou le rythme sont dans l'ensemble inégales avec des passages creux et sans passion alternant avec moments brillants et lyriques où Kinoshita se montre particulièrement inspiré, que ce soit dans les travellings complexes ou le sens du cadre/découpage (tel la scène autour du château d'Himeji - que j'avais visité 3 jours avant de voir le film :o ).
C'est dommage que la narration ne soit pas plus resserrée car il sait être régulièrement passionnant, notamment quand les proches ou l'équipe pédagogique se rejettent la responsabilité du suicide.
Les actrices font un bon travail mais restent un peu trop âgées (dont Hideko Takamine qui avait 30 ans lors du tournage).

Il semble que Kinoshita se soit basée sur le film allemand Jeunes filles en uniforme pour les grandes lignes.

Et si vous vous posez la question, j'ai vu ça via un bootleg VOSTA
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Commissaire Juve
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Commissaire Juve »

Tiens, Bruce ! Il y avait longtemps.
bruce randylan a écrit :... un peu trop âgées (dont Hideko Takamine qui avait 30 ans lors du tournage).
Tu me fais penser à Les Collégiennes de Hunnebelle (1957) avec des comédiennes de 23 à 27 ans (pour les rôles de premier plan). :uhuh:

Cela dit, certaines comédiennes n'ont pas de mal à faire plus jeune que leur âge (je pense à Odette Joyeux par ex.).
bruce randylan a écrit :
Et si vous vous posez la question, j'ai vu ça via un bootleg VOSTA
Ah voilà ! :mrgreen:
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par bruce randylan »

Commissaire Juve a écrit :Tiens, Bruce ! Il y avait longtemps.
Bah oui, j'étais pas trop disponible ces dernières semaines :P
bruce randylan a écrit : château d'Himeji - que j'avais visité 3 jours avant de voir le film
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par bruce randylan »

The tattered wings / Distant Clouds (1953)

Après des années d'absence un homme revient dans son village natal pour quelques jours. Il cherche à renouer avec une ancienne camarade de lycée avec qui il partagea un amour réciproque avant que la guerre ne les sépare. Elle a connu un mariage arrangé avec un homme qui l'a négligé et avec qui elle a eu un enfant. Désormais veuve, elle se sent proche de son beau-frère dans cette petite ville encore très réactionnaire.

Un très joli mélodrame dont la retenue et la sobriété font forcément penser à Naruse, d'autant qu'on retrouve Hideko Takamine (même si elle collabora régulièrement avec Kinoshita). La mise en scène n'est toutefois pas aussi aiguisée et lyrique que ce dernier et le style parait un brin académique et compassé, sans doute pour mettre en avant la qualité d'écriture des personnages et leur incarnation. Les personnages sont tous déchirés entre plusieurs sentiments contradictoires, ceux qu'ils aimeraient suivre, ceux qu'ils refrènement, ceux que la société condamnent et ceux qu'ils fantasment ou projettent alors que l'amour qui les anime sont souvent à sens unique. Pas assez jeunes pour se moquer des conventions (comme un jeune couple qui prend la fuite en fin de film) et pas assez âgés pour accepter totalement leur destin imposés par les moeurs traditionnels, les différents protagonistes ne sont pas loin de l’aliénation, à commencer par le "héros" qui ne sait plus faire preuve de discernement et se soucie peu de ternir la réputation de Takamine alors qu'elle a des projets de re-mariage. Il y a dans son comportement un égoïsme assez rare me semble-t-il dans le cinéma japonais de l'époque. Comme la conclusion qui évite plusieurs facilités (tant optimiste que pessimiste).
Ces valses émotionnelles, la crainte des qu'en-dira-t-on qu'on a tout de même envie de braver, la peur de rater un nouveau départ, l'atmosphère conservatrice du village, les moments frémissants... Tout cela est bien rendu et donne plusieurs moments touchants et vibrants : la visite du cimetière, le rendez-vous au spectacle, la déclaration d'amour d'une voisine, l'indécision finale de Takamine... Sans être aussi aussi transporté et ému qu'on le souhaiterait.
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Beule »

LE JARDIN DES FEMMES (Onna no sono - 1954)
avec Mieko Takamine, Hideko Takamine, Keiko Kishi, Yoshiko Kuga, Takahiro Tamura... Quelle distribution !

Une institution (en l'occurrence un pensionnat pour femmes) passée au crible de la raison et de la critique humaniste dans un élan choral suffisamment équivoque pour déjouer les pièges du dogmatisme : c’est sans doute le plus premingerien des films japonais.

Au gré de ses subtiles variations de rythme, entre poussées de fièvre in situ et respirations introspectives ou rhétoriques visant à élargir le champ de la contestation à la sphère sociétale toute entière, Le Jardin des Femmes échappe au cadre de l'anecdote et du simple mélodrame. Vibrant manifeste féministe d'avant-garde autant que cri d’alarme anti-réactionnaire (le Parti Libéral Démocratique qui entérinera ce repli conservateur sur le long terme sera d’ailleurs créé un an plus tard), parfaitement documenté pour donner du grain à moudre aux différentes parties antagonistes (les factions communistes avaient ainsi effectivement déjà noyauté les milieux étudiants depuis 1948), le film est un pamphlet visionnaire fusionnant harmonieusement avec un romanesque de la plus belle eau. Certaines idées de mise en scène sont en ce sens remarquables. Je pense en particulier à cette émouvante séquence où Hideko Takamine se réfugie au sommet du Château d'Himeji (bien que l'action soit kyotoïte), symbole éternel des valeurs du Japon féodal, pour saluer le départ de son amour interdit (Takahiro Tamura). Sur le plan visuel, Le Jardin des Femmes s'avère au demeurant souvent hypnotique. Le dosage entre style quasi documentaire, fait de mouvements d'appareils complexes et nerveux pour dynamiser les frictions et d'un style de caméra langoureux multipliant les travellings ouatés aux valeurs de plan constamment rafraîchies pour les séquences plus intimistes (ah la longue déambulation le long du fleuve, que n'aurait pas reniée Naruse !) y est remarquable.

Servi par un casting de très haut vol que l'on sent constamment concerné - non Bruce, les comédiennes ne sont pas trop âgées pour leurs rôles, ce ne sont pas des collégiennes : Keiko Kishi et Yoshiko Kuga, ont autour de 22 ans, Hideko Talkamine est censée être leur aînée de quelques années - et un score plein de finesse du frangin Kinoshita, c'est un film en tout point admirable. Je le classe immédiatement au niveau de cette poignée de films qui me permettent de comprendre pourquoi Kinoshita, que je connais mal mais qui me semble néanmoins assez inégal, fit un temps de l'ombre à l'Empereur au Japon. Et assurément, au vu de son caractère anticonformiste, pourquoi Ôshima avait déclaré que c'est ce film en particulier qui lui avait donné l'envie de réaliser.
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Supfiction »

Sur Plex, on peut en trouver, L’armée, La ville en liesse et Le matin de la famille Ozone. Qualité passable voire correct mais sous-titres anglais.

La ville en liesse (titre qu’on pourrait croire ironique) est intéressant parce que tourné durant la guerre omniprésente en hors champ.
Malheureusement, propagande oblige, difficile de dire (sans recherches complémentaires) ce qui relève de la vérité de l’état d’esprit des habitants de Tokyo de cette époque et ce qui relève de la propagande. Néanmoins, j’ai quand même l’impression qu’on est pas loin de la vérité de l’état d’esprit très majoritairement partagé.
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Duane Jones
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

Le Matin de la famille Osone (1946)
Très beau film humaniste tourné juste après la guerre. Dans cette chronique se déroulant sur 3 ans, de 1943 à 1946, Kinoshita suit le destin d'une famille libérale, une veuve et ses 4 enfants dont 1 fille, confrontée à un oncle militaire et autoritaire. Le réalisateur démonte parfaitement l'idéologie militariste, viriliste et machiste, qui a mené le Japon au bord du gouffre. Face à ce terrible parent, les réactions des membres de la famille seront toutes différentes. Le cadet sera facilement endoctriné alors que l'aîné sera interné pour son antimilitarisme. Les personnages parfaitement écrits représentent différentes facettes du Japon de l'époque, sans pour autant faire catalogue. Le personnage le plus touchant me semble être celui du fils passionné de peinture. La discussion avec sa mère où il avoue sa peur de ne pas revenir du front, donc de la mort, et de ne pas devenir peintre, est déchirante. Certains dialogues peuvent paraître un peu didactiques mais l'humanité du film gomme ces défauts minimes. Bien sûr cette famille ne sortira pas indemne de la Seconde Guerre mondiale mais la fin représente paradoxalement une note d'espoir, voire d'optimisme, Le Matin de la famille Osone représente aussi l'aube d'un nouveau Japon.

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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

La légende du combat à mort/A Legend or Was It?/Shito no densetsu (1963)

J'ai regardé plusieurs Kinoshita, hélas je n'ai pas eu le temps d'écrire dessus. Pour le moment je n'ai pas encore vu ses grands classiques (à l'exception de Carmen revient au pays), mon choix s'est porté sur des films assez courts : Le portrait, Nuages au crépuscule, Rafale de neige et Un jour comme les autres. Kinoshita ne vole pas sa réputation, je découvre un grand cinéaste dont j'attends avec impatience le visionnage de ses films phares.

Mais revenons au film d'hier soir, en l’occurrence La légende du combat à mort. L'intro en couleurs montre des agriculteurs dans un paysage montagneux s'entraidant au début des années 60. Rapidement une voix off, nous amène dans le passé, plus précisément à la fin de de Seconde Guerre mondiale. Les couleurs disparaissent, laissant place à un noir & blanc contrasté absolument sublime de Hiroshi Kusuda. Idée géniale, le générique lui reste en couleurs. L'histoire est simple, une famille de citadins a été transplantée dans les montagnes à cause de la guerre. Une fille de la famille refuse de se marier avec le fils du maire car il est un criminel de guerre. L'homme éconduit va alors se venger de cette famille pacifiste et monter les montagnards contre eux. Le drame final se termine dans un lieu dévasté, métaphore du Japon... mais je n'en dis pas plus. Une nouvelle fois Kinoshita montre l'impasse totale du régime militaire de l'époque et met en parallèle le drame vécu par le Japon (notamment les bombes atomiques) avec l'injustice subie par cette famille. D'une durée de 83 mn, ce film éprouvant pour les nerfs est une longue montée jusqu'au climax mise en scène avec de longs travellings alternant avec des gros plans sur des visages tourmentés. La musique du frère de Keisuke Kinoshita, Chuji Kinoshita, se réduit dans les moments de tension à l'utilisation d'une simple guimbarde, simple mais terriblement efficace. L'ensemble est soutenu par un casting de grande classe, notamment du côté féminin avec Kinuyo Tanaka, Shima Iwashita et Mariko Kaga. Vivement les classiques de Môsieur Kinoshita !

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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

La Ballade de Narayama (1958)

La version d'Imamura est un de mes films fétiches, j'étais donc impatient de découvrir la version de Kinoshita, lui qui taxait (apparemment) l’œuvre de son cadet de film porno, la surprise fut grande. Contrairement à la Palme d'or de 1983, le film est réalisé en studio à l'exception de la toute fin. La caméra fluide se déplace à travers les séquences grâce à un changement de lumière, à la disparition d'un décor, d'une toile peinte etc. La mise en scène au millimètre comporte peu de gros plans. Autre différence notable, le film comporte une voix off chantée dans un style traditionnel accompagné par un shamisen. L'aspect théâtral appuyé rend le film envoutant et unique. Kinoshita est un maître et ça se voit. Comme son remake l'histoire est une adaptation de la nouvelle de Shichiro Fukazawa de 1956 que je n'ai pas lu. Quoiqu'il en soit les 2 scénarios sont assez proches, même si bien sûr la version de 1983 (plus longue de 30 mn) abordant frontalement la sexualité est bien plus réaliste et, il me semble, plus émouvante. L'artificialité du film de Kinoshita implique moins le spectateur dans la tragédie qui se joue. Quant à l'interprétation, elle est soutenue dans les 2 films par 2 grands acteurs, Kinuyo Tanaka (la mère en 1958) méconnaissable en vieille femme et Ken Ogata (le fils pour le remake).

Même si la version d'Imamura me touche plus, la version de Kinoshita reste un film unique avec une mise en scène magistrale.

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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

Comme une fleur des champs (1955)

Dans les années 50, un vieil homme (Chishu Ryu) revient dans son village natal, il se souvient de son premier (seul) amour, sa cousine de 2 ans son aîné au grand dam de leur famille.

Kinoshita filme son mélodrame en 1.37 (le cinémascope viendra en 58 avec La ballade de Narayama) et place un cadre oval (iris) pour les flashbacks, en gros la quasi-totalité du film. Sur Wiki, je lis que ça rappelle les photographies de l'époque, en gros fin 19e siècle, possible, ça me rappelle aussi des effets typiques du cinéma muet. Quoi qu'il en soit, ce choix de mise en scène m'a posé quelques questions au début, pourquoi un effet aussi voyant ? Plus nous vieillissons, plus les souvenirs de notre jeunesse s'éloignent. Nous nous souvenons de moments précis, le reste demeure flou, voire opaque, comme un cache sur le reste. Je divague peut-être, mon explication en vaut bien d'autres. En tout cas ce cadre sied parfaitement à cette tragique histoire filmée avec une grande délicatesse et une grande pudeur. Assurément l'un des plus beaux films de Kinoshita même si je suis loin de connaître encore bien son œuvre. La musique de son frère, Chuji Kinoshita, accompagne tendrement ce récit doux-amer. Le thème simple, joué bien souvent avec 2 guitares, il me semble, demeure longtemps en tête. Le réalisateur confronte l'innocence des 2 amoureux à une famille suivant les codes sociaux de l'époque.

Pour le moment, mon Kinoshita préféré. A découvrir absolument pour toute personne s'intéressant au cinéma japonais des années 50.

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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

La Rivière Fuefuki (1960)

Au 16ème siècle, le destin d'une famille de paysans à travers plusieurs générations. La plupart des hommes aspirent à un avenir meilleur, afin d'améliorer leur situation ils prennent part aux différents conflits de l'époque.

La maison de la famille, où se passe une grande partie de l'action, se situe au bord de la rivière Fuekuki. Les hommes de la famille ne cessent de traverser cette dernière afin de partir aux combats et à la mort. La fameuse rivière paraît donc marquer une frontière, peut-être celle entre les vivants et les morts mais elle s'apparente aussi au temps, au temps qui s'écoule. Les membres de la famille grandissent et meurent, indifférent aux tragédies l'eau continue à s'écouler. Ceux restant à côté sont ceux vivant le plus longtemps, en l’occurrence les femmes et les hommes, refusant les règles absurdes d'une société, la soumission à un seigneur qui n'a jamais rien fait pour eux. Ces hommes-là n'aspirent pas non plus à un meilleur statut, la vie d'agriculteur pauvre est difficile mais préférable à celle d'un guerrier participant à des batailles dont les enjeux les dépassent. Ce film est bien sûr pour ses effets de couleurs, assez déconcertant pour ma part. Parfois une seule une partie de l'image est colorée. D'autres fois, la pellicule est teintée, lors des batailles notamment. Le sens de ses couleurs m'échappe, le bleu semble lié à la mort... pour le reste difficile à dire. Les flammes du foyer sont teintes en rouges... donc la chaleur. Certains effets rendent très bien, pour les batailles, le bleu bien souvent et le rouge des flammes. Après, bien des effets laissent dubitatifs, ces sortes de taches de couleurs apparaissant ou non au fil des situations. Autres effets, des arrêts sur images apparaissant au cours des batailles m'ont plus intéressé. Kinosita semble geler ce temps qui s'écoule inlassablement. J'aimerais lire une interview où il explique ce choix de mise en scène. A l'inverse de Comme une fleur des champs, ces effets m'ont sorti du film, je ne suis pas sûr qu'ils servent vraiment à quelque chose. Et les différentes interprétations ne m'ont pas convaincus non plus.

Ce film reste un beau mélodrame, superbement écrit et joué, notamment par Hideko Takamine. La scène où elle suit ses fils à la guerre est bouleversante. Reste ces effets de couleurs me laissant dubitatif.

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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par The Eye Of Doom »

La rivière Fuefuki
Une famille de paysans pauvres (pleonasme) subit sur 3 générations la malédiction des guerres menees par le seigneur local.

C’était mon premier Kinoshita. J’ai tenté le coup suite au post ci dessus mais comme Duane Jones j’ai pas été complètement convaincu.
En parti dérouté par cet etrange usage de la couleur.
Il y a pourtant des choses tres interessante. Quelques plans colorés assez saisissant avec une sorte d’apparition surnaturelle qui chante lors d’événements dramatiques. Cette facon de scander le recit avec des images distanciées de batailles régulières et historique sur 80 ans. Ce recit a hauteur d’homme et femme.
Et tout de même quelques plans curieux avec ces taches de couleurs incrustées.
Enfin ce dispositif de lieu unique, quasi huis clos que cette miserable maison au bout du grand pont en bois qui traverse la rivière.
Ce pourrait etre une piece de theatre en fait.
A noter la belle Hideko Takemine méconnaissable en vieille femme sur la seconde partie.
La charge sociale est sans ambiguïté : les paysans servent de chair a sabre (puis à fusil) pour les guerres du seigneur et le pire c’est qu’ils sont volontaires, poussés par l’illusion de pouvoir changer de conditions sociales. Ou par celle de trouver un honneur en mourant pour / avec le seigneur.
Complètement manipulés / aveuglés / condamnés par le dispositif social qui les broit.
La « preface » de Charles Tesson est particulièrement éclairante sur le cineaste et l’inscription du film dans sa filmographie.

Mais voila j’ai pas vraiment ete pris par l’ensemble….
Tesson eclaire aussi une des questions/enjeux du film : l’utilisation si curieuse de la couleur. Celle ci, à l’opposé de toute objectif naturaliste, est la pour donner de l’irréalité, renforcer la distance entre le spectateur et la scène filmée.
Le coté assez systématique du procédé, son artificialité, m’ont empêché souvent de rentrer dans le film. Il y a quelques passages assez saisissants mais j’ai trouvé que trop souvent ca tombait à plat. Bref j’ai pas trop compris l’effet recherché et/ou pas trop accroché à la forme.
Tesson evoque l’hypothèse d’une histoire de la couleur dans le cinema japonais demeurant a écrire: idée tres séduisante ! Convoquant le Kurosawa de Dodes Kaden (et la fumée du Ciel et Enfer), mais aussi bien sur La barrière de chair de Suzuki
Qui s’y colle?

Dans tout les cas Tesson m’a convaincu de decouvrir d’autres films de Kinoshita, et la presence recurrente d’Hideko devrait finir d’emporter le morceau.
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Duane Jones
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

The Eye Of Doom a écrit : 15 sept. 22, 21:26 Tesson eclaire aussi une des questions/enjeux du film : l’utilisation si curieuse de la couleur. Celle ci, à l’opposé de toute objectif naturaliste, est la pour donner de l’irréalité, renforcer la distance entre le spectateur et la scène filmée.
Merci du retour. Un film déconcertant et passionnant à la fois. Sais-tu si Tesson fait référence à une interview de Kinoshita pour appuyer son propos ? Je trouve ça un peu vague pour un choix de mise en scène aussi marquant.
The Eye Of Doom a écrit : 15 sept. 22, 21:26 Tesson evoque l’hypothèse d’une histoire de la couleur dans le cinema japonais demeurant a écrire: idée tres séduisante ! Convoquant le Kurosawa de Dodes Kaden (et la fumée du Ciel et Enfer), mais aussi bien sur La barrière de chair de Suzuki
Qui s’y colle?
Superbe idée !
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Alexandre Angel
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Alexandre Angel »

Vous les avez vus par les disques MK2 ?
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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Re: Keisuke Kinoshita (1912-1998)

Message par Duane Jones »

Alexandre Angel a écrit : 25 sept. 22, 10:25 Vous les avez vus par les disques MK2 ?
Non, je découvre l’œuvre de Kinoshita via Criterion Channel, ils ont une quarantaine de ses films.
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