Les films du studio Ealing

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Rick Blaine
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :Il était un petit navire (Barnacle Bill) : Charles Frend - 1957

Dernière production du studio, ce n'est pas encore le film qui me réconciliera avec, la dernière comédie anglaise de l'époque ayant été pour moi un coup de cœur n'étant justement pas un film du studio (Vacances sur ordonnance avec également Alec Guiness). Même si le postulat de départ était savoureux, je n'ai pas vraiment souri avant la 50ème minute qui démarre la dernière partie bien plus charmante, celle qui transforme la jetée en bateau immobile, les habitants venant y faire une "croisière statique" : idée assez géniale et qui donne quelques séquences vraiment fantaisistes et cocasses. J'ai pris plus de plaisir à lire la chronique d'Antoine que de visionner cette comédie un peu laborieuse à mon goût et qui a eu du mal à capter mon attention.

Dans l'ensemble je te rejoins assez. Il est mignon ce film, et prête à sourire, mais l’ensemble est tout de même assez laborieux, et on a un peu tendance à décrocher, le film multipliant les temps morts et manquants de moments forts. Alec Guinness est parfait, comme d'habitude, et le film est toutefois sympathique, mais ça ne suffit pas à faire de ce Barnacle Bill un film efficace et franchement drôle.
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Re: Les films du studio Ealing

Message par bruce randylan »

Pas encore vu celui-là, mais de Charles Frend, il faut surtout voir ses films de guerre marins dont l'excellent La mer cruelle. :wink:
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Jack Carter »

bruce randylan a écrit :Pas encore vu celui-là, mais de Charles Frend, il faut surtout voir ses films de guerre marins dont l'excellent La mer cruelle. :wink:
je plussoie pour ce titre :wink:

depuis le temps que j'ai le dvd dans ma wishlist
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The Life and Death of Colonel Blimp (Michael Powell & Emeric Pressburger, 1943)
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Jeremy Fox
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Jeremy Fox »

The Magnet de Charles Frend chroniqué par Justin Kwedi à l'occasion de la sortie du film en DVD chez Tamasa.
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Jeremy Fox »

Justin Kwedi nous parle de Nowhere to Go de Seth Holt, existant en DVD zone 2 chez Studio Canal.
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Profondo Rosso »

Dance Hall de Charles Crichton (1950)

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Histoire de quatre ouvrières et leurs diverses aventures dans une salle de danse londonienne....

Dance Hall est une production assez oubliée du studio Ealing dont l'approche inédite restera sans lendemain au vu de son insuccès. Le film est en effet un des rares Ealing adoptant un point de vue féminin à travers une trame se préoccupant justement de la place de la femme dans cette Angleterre d'après-guerre. Le contexte avait conduit à une certaine autonomie des femmes avec les hommes au front et ces dernières contribuant à l'effort d guerre en usine. Dance Hall nous montre la situation complexe de l'après-guerre où les femmes sont déchirées entre un retour au statut de ménagère soumise et des aspirations à une autre vie qu'elles ont entrevue durant cette période sans hommes. Dans le film, une salle de danse londonienne sera le vecteur de ces désirs contradictoires. C'est là que se retrouvent les quatre ouvrières Eve (Natasha Parry), Carole (Diane Dors), Georgie (Petula Clarke) et Mary (Jane Hyton). Entre les contraintes de l'usine et un foyer parental qu'elles ne pourront quitter que par le mariage, la salle de danse représente leur seul vrai espace de liberté. C'est là que le scénario situe tous les rebondissements, la semaine ne constituant qu'un interlude au moment où ces jeunes femmes se sentent réellement vivre, le weekend sur la piste de danse.

Les attentes sont très différentes pour chacune des héroïnes. Eve retrouve au dance hall le ténébreux Alec (Bonar Colleano), séducteur glacial mais plus excitant que son fiancé plus terre à terre Phil (Donald Houston). Georgie rêve elle d'une carrière de danseuse en gagnant le concours organisé au dance hall tandis que Carole n'aspire qu'à y trouver un mari. La justesse de la caractérisation laisse deviner que le scénario a été écrit par une femme, en l'occurrence Diana Morgan qui le cosigne avec Alexander Mackendrick. Le regard aurait été encore plus juste si elle en avait assuré la réalisation (dans la logique de promotion de Ealing puisqu'on lui doit d'autres scripts fameux comme celui de Went the day well (1943)) mais Michael Balcon préférera la confier à l'efficace Charles Crichton. Le film interroge sur des thématiques novatrice et propose nombres de séquences fortes où les jeunes femmes se confrontent au limites entre leur statut et leur rêves, Eve subissant des crises de jalousie injuste à chaque échappée au dance hall et Georgie nourrissant une culpabilité face à ses parents durant les concours de danse. Cela ne va cependant pas plus loin avec un retour dans le rang final qui évite la mièvrerie grâce au charme des actrices. Petula Clark trouve son premier rôle adulte après ses débuts d'enfant star et est très touchante, Diana Dors impose déjà sous une forme plus légère ses atours de vamp et Natasha Parry campe un personnage assez poignant dans ses hésitations. La presse britannique sera assez injuste avec le casting, estimant les actrices trop glamour et pas crédibles en héroïnes working class.

Autre point fort, les formidables scènes de bal. La caméra de Charles Crichton explore le décor splendide du sol au plafond, les travellings capturent dans le mouvement les figures des danseurs et la frénésie de l'orchestre (The Geraldo Orchestra pour les amateurs) alternent avec l'excitation du public dans un ensemble dynamique. La photo de Douglas Slocombe sait cependant donner un contour plus inquiétant aux lieux au fil des déconvenues rencontrées par les héroïnes. Une œuvre intéressante dont les qualités seront reconnues au fil des décennies, notamment lorsque Terence Davies en vantera les mérites dans les années 90. 4/6
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Jeremy Fox
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Jeremy Fox »

The Magnet : Charles Frend - 1950

L'idée de départ et les situations qui en découlent ont beau être assez cocasses, malgré la courte durée du film, un court métrage aurait à mon avis suffit. Ici, même si les comédiens s'avèrent très bon, même si la critique de la psychanalyse est assez savoureuse, je ne me suis encore guère passionné pour ce film Ealing. Par contre une chose a fortement retenu mon attention, la manière qu'à le réalisateur à filmer ces paysages naturels d'une petite ville anglaise au bord de la mer ; la photographie étant lumineuse, rien que pour ça le film mérite d'être vu.
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Profondo Rosso »

Pool of London de Basil Dearden (1951)

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Le Dunbar, un navire de commerce britannique, rentre à quai à Londres. Dan (Bonar Colleano), jeune marin, fait un peu de trafic pour arrondir ses fins de mois, important notamment des bas nylons en contrebande. Pour ne pas éveiller les soupçons, il demande parfois à son ami jamaïcain Johnny (Earl Cameron), de lui donner un coup de main. Mais alors que Johnny refuse de s’impliquer davantage, Dan accepte une proposition pour un gros coup.

Pool of London est la seconde incursion de Basil Dearden dans le polar au sein d'Ealing après The Blue Lamp (1950). C'est clairement le genre de prédilection du réalisateur qui même après son départ d'Ealing apposera une patte singulière en y intégrant des sujets sociaux forts et inédits dans le cinéma anglais d'alors, que ce soit le racisme dans Sapphire (1959) ou l'homosexualité dans Victim (1961). Pool of London nous plonge dans les bas-fonds du port de Londres à travers le destin de quelques marins du Dunbar fraîchement accosté. La première partie nous introduit donc chaleureusement les personnages tout en disséminant les éléments de la trame criminelle à venir. Le contrôle traditionnel des douanes offre donc une séquence savoureuse où nos marins tentent de faire passer en douce alcools, cigarettes, et bas-nylons divers pour les petites amies. Parmi eux on repère Dan (Bonar Colleano), plus roublard que les autres et qui arrondit ses fins de mois grâce à la contrebande. Pour l'occasion il demandera à son ami jamaïcain Johnny (Earl Cameron) de lui faire passer un paquet de cigarettes. Si Johnny malgré ce coup de pouce refuse d'aller plus loin, Dan trop confiant va accepter une offre plus dangereuse de la part de criminels locaux.

Si le fil rouge du film s'inscrit dans le polar, Basil Dearden brasse bien plus de thèmes à travers un véritable film choral. La solitude et le manque d'attache du marin l'expose ainsi aux tentations criminelles avec Dan ou une certaine désinvolture avec la gente féminine dont sera victime Sally (Renée Asherson), employée du port attendant en vain la visite de son fiancé engagé sur le Dunbar. Johnny traverse habituellement comme un fantôme les ports où il s'arrête mais cette fois va vivre un début de romance avec Pat (Susan Shaw) jeune vendeuse de ticket de cabaret. Earl Cameron fut le premier acteur noir à avoir un premier rôle dans une production anglaise et Dearden amorce ici les questionnements raciaux qui auront cours dans Sapphire. Ce sera à travers le racisme ordinaire dont est victime Johnny lors de séquences anodines (un vigile récalcitrant dans un club, une remarque désobligeante...) et qui expriment le complexe du personnage. C'est ce qui le rend si timoré dans sa relation avec Pat, presque surpris de l'intérêt de la jeune femme pour lui. Les balles timides du couple offrent de jolis moments où la mise en scène de Basil Dearden se fait superbement contemplative (les vues des toits londoniens et ces magnifiques plans d'ensemble) et intimiste, capturant le moindre regard tendre et geste gauche d'un Earl Cameron très touchant. Là aussi il s'agit de la première romance interraciale vue dans le cinéma anglais même si le scénario n'ose pas totalement franchir le tabou vu que tout cela reste extrêmement chaste.

La fluidité du récit et la gestion des ruptures de ton est assez remarquable, notamment lors des retours à la trame criminelle. Durant la promenade sur les toits du couple, ceux pensent apercevoir une silhouette qui disparait aussitôt. C'est en fait le hold-up longuement préparé qui s'amorce dans une séquence inventive (car jouant des capacités physiques d'un protagoniste innocemment introduites plus tôt) et tendue dont la tournure violente tient à un détail fortuit. La dernière partie du film prend un tour essentiellement nocturne et oppressant (photo somptueuse de Gordon Dines), la veine relativement documentaire du début de film s'orne d'une stylisation plus marquées des environnements urbains ou ruelle menaçantes alternent avec bars enfumés. Il s'agit à la fois de traduire la paranoïa et la solitude de Dan désormais fugitif et de Johnny, ramené à sa son sentiment d'exclusion. Une sensation de cauchemar éveillé magnifiquement traduite par Dearden tout en accélération brutale (fusillade et poursuite en voiture fabuleuse de nervosité) et ralentissements inquiétants (l'errance alcoolisée de Johnny dans une partie de Londres en ruines). C'est pourtant bien l'amitié entre les deux personnages qui permets un sursaut d'humanité dans ces bas-fonds où tout le monde est prêt à se trahir (éléments habilement amené en amont aussi avec la réaction de la petite amie de Dan pour ses "cadeaux") dans une belle conclusion où se disputent la tragédie et l'espoir. Un grand polar qui affirme définitivement Dearden en maître anglais du genre. 5,5/6 J'ai d'autant plus hâte de choper le BR de The Blue Lamp qui sort en décembre !
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Profondo Rosso
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Profondo Rosso »

Secret People de Thorold Dickinson (1952)

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Dans les années 1930, Maria et Nora, deux jeunes filles d'Europe centrale, sont contraintes de quitter leur pays pour se réfugier à Londres, loin de la menace dictatoriale qui a coûté la vie à leur père. Sept ans plus tard, Maria retrouve, au hasard des rues de Paris, son premier amour. S'ensuit alors une quête périlleuse de justice, qui compromettra les deux jeunes soeurs...

Secret People est un film d'espionnage brillant qui s'inscrit dans le versant plus sombre des productions Ealing, alors que la comédie commence à être le genre de prédilection du studio. On doit sa genèse au méconnu Thorold Dickinson, réalisateur talentueux mais souvent entravé dans des projets où il n'avait pas toujours la main au scénario ou la production. En 1940, Dickinson se rend au War Office britannique en attente d'une production visant en ces temps de guerre, à prévenir la population de tenir des discours dangereux. Dickinson rencontre à cette occasion Michael Balcon patron de la Ealing, studio pour lequel il put parfois être monteur. Les deux hommes sympathisent et il en naîtra l'excellent thriller Next of kin (1942) répondant au cahier des charges du War Office. Durant ses recherches pour ce film, Dickinson observe les méthodes de la police et découvre certaines affaires singulières à laquelle elle peut être confrontée comme les pressions que peuvent mettre les organisations politiques secrètes sur les quidams qui les intègre parfois de force, et l'emprise mentale exercée sur eux. Le sujet intéresse Dickinson qui décide d'y consacrer un film. Il mettra près de dix ans à écrire le scénario et trouver un financement pour le projet, trouvant à nouveau refuge au sein de la Ealing de Balcon qui voit en Dickinson un sang neuf bienvenu pour le studio.

On suit le destin de deux sœurs, Maria (Valentina Cortese) et Nora (Audrey Hepburn), filles d'un intellectuel activiste d'un pays (qu'on suppose d'Europe de l'est) soumis à la dictature et qui se sentant menacé les confie à son ami Anselmo (Charles Goldner) installé à Londres. Les années passent, les sœurs deviennent citoyennes britanniques, et si Nora fait son chemin dans sa carrière de danseuse, Maria végète car vivant dans le souvenir de son père assassiné et aussi de celui de son collaborateur le plus proche qui fut également son fiancé, Louis (Serge Reggiani). Le recroisant au hasard d'un voyage à Paris, Maria va être entraînée dans une spirale infernale par les accointances politiques douteuses de Louis qui flatte ses désirs de vengeance en organisant l'assassinat du bourreau de son père. Thorold Dickinson tisse un suspense au cordeau où se tiennent en parfait équilibre la tension psychologique et le pur suspense de thriller d'espionnage. L'ambiguïté et la duplicité que dégage Serge Regianni jette un trouble sur les retrouvailles avec Maria, ainsi que sur toutes les séquences romantiques plus légère où leur lien rompu se renoue. Chaque geste, sourire et action de Louis semble calculé et viser des desseins plus lointains et inquiétants. Le début lumineux du film qui voit les sœurs passer de l'angoisse de leur dictature au bonheur d'une vie nouvelle, marqué par l'atmosphère bienveillante qu'Anselmo cherche à poser pour elles après leurs épreuves. L'introduction du personnage de Louis fait basculer la photo de Gordon Dines dans le clair/obscur tant que l'on ne connaît pas exactement ses intentions, mais que sa seule présence distille le doute. Lorsque son plan se dévoile (faire de Maria la porteuse d'une bombe destinée à tuer le dictateur de passage à Londres), c'est une plongée dans le cauchemar ininterrompue.

Même si l'on y pense forcément un peu, Dickinson sait se différencier de l'approche expressionniste du Carol Reed de Huit heures de sursis (1947), Le Troisième homme (1949) ou L'Homme de Berlin (1953). Il ne se repose pas sur les cadrages déroutants mais cherche à poser une ambiance hallucinée adoptant le point de vue de Maria découvrant un monde sordide qui lui est inconnu. Le sommet est certainement la scène où elle est interrogée par l'organisation et où le verbe sec, répétitif et menaçant suffit à expliciter la menace. Les visages de ses interlocuteurs sont soit escamoté par le découpage qui s'arrête à leur pied ou à leurs mains, soit masqué dans l'obscurité de la pièce. L'idée formelle la plus brillante est de placer la silhouette de Louis en arrière-plan de Maria apeurée, et la confiance en cet être aimé s'évanouit tandis que la lumière de sa cigarette alternativement apparaître/disparaître son visage avant de s'évanouir complètement dans les ténèbres. On reconnaît bien là le talent de Dickinson pour instaurer une tonalité à la lisière du fantastique en se pliant au point de vue terrorisé de ses protagoniste, notamment dans un remarquable flashback de la séquence d'attentat. C'était le cas dans Gaslight (1940) remaké plus tard par George Cukor avec Hantise (1944), ou La Reine des cartes (1949) excellente adaptation de La Dame de pique de Pouchkine. On appréciera les touches scabreuses subtilement amenées (Louis qu'on devine avoir couché avec l'innocente Nora après l'avoir manipulée à son tour) et l'emphase mélodramatique assumée de la dernière partie qui sert parfaitement la noirceur du récit. Le film ne rencontrera malheureusement pas le succès à sa sortie et ce sera l'avant-dernier long-métrage de Dickinson qui se consacrera ensuite à la production et à l'enseignement. Le film a néanmoins une importance considérable dans l'histoire du cinéma. Au moment du tournage, William Wyler se trouve à Rome où il fait des repérages pour son futur Vacances Romaines (1953). Dickinson lui envoie alors les essais de la toute jeune Audrey Hepburn qui convainquent à la fois Wyler de l'engager pour son film, mais aussi la Paramount de lui faire signer un contrat. La suite est connue ! 5/6

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Re: Les films du studio Ealing

Message par Commissaire Juve »

Reggiani ! :o Il parle anglais ?
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Profondo Rosso »

Commissaire Juve a écrit : 31 août 20, 06:44 Reggiani ! :o Il parle anglais ?
Oui un peu d'accent mais franchement il se débrouille bien :mrgreen:
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Sybille »

Merci pour ton avis enthousiaste. Je connais l'existence de ce film depuis des années (quand je m'intéressais à Hepburn, à l'époque le film était quasi invisible). Curieuse de le découvrir un jour.
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Re: Les films du studio Ealing

Message par John Holden »

Sybille a écrit : 31 août 20, 14:36 Merci pour ton avis enthousiaste. Je connais l'existence de ce film depuis des années (quand je m'intéressais à Hepburn, à l'époque le film était quasi invisible). Curieuse de le découvrir un jour.
Ça tombe bien, le film vient d'être édité par Doriane films. :wink:
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Re: Les films du studio Ealing

Message par Sybille »

Cool, j'y penserai le moment venu :)
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Re: Les films du studio Ealing

Message par John Holden »

Profondo Rosso a écrit : 31 août 20, 01:30 Secret People de Thorold Dickinson (1952)

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Dans les années 1930, Maria et Nora, deux jeunes filles d'Europe centrale, sont contraintes de quitter leur pays pour se réfugier à Londres, loin de la menace dictatoriale qui a coûté la vie à leur père. Sept ans plus tard, Maria retrouve, au hasard des rues de Paris, son premier amour. S'ensuit alors une quête périlleuse de justice, qui compromettra les deux jeunes soeurs...

Secret People est un film d'espionnage brillant qui s'inscrit dans le versant plus sombre des productions Ealing, alors que la comédie commence à être le genre de prédilection du studio. On doit sa genèse au méconnu Thorold Dickinson, réalisateur talentueux mais souvent entravé dans des projets où il n'avait pas toujours la main au scénario ou la production. En 1940, Dickinson se rend au War Office britannique en attente d'une production visant en ces temps de guerre, à prévenir la population de tenir des discours dangereux. Dickinson rencontre à cette occasion Michael Balcon patron de la Ealing, studio pour lequel il put parfois être monteur. Les deux hommes sympathisent et il en naîtra l'excellent thriller Next of kin (1942) répondant au cahier des charges du War Office. Durant ses recherches pour ce film, Dickinson observe les méthodes de la police et découvre certaines affaires singulières à laquelle elle peut être confrontée comme les pressions que peuvent mettre les organisations politiques secrètes sur les quidams qui les intègre parfois de force, et l'emprise mentale exercée sur eux. Le sujet intéresse Dickinson qui décide d'y consacrer un film. Il mettra près de dix ans à écrire le scénario et trouver un financement pour le projet, trouvant à nouveau refuge au sein de la Ealing de Balcon qui voit en Dickinson un sang neuf bienvenu pour le studio.

On suit le destin de deux sœurs, Maria (Valentina Cortese) et Nora (Audrey Hepburn), filles d'un intellectuel activiste d'un pays (qu'on suppose d'Europe de l'est) soumis à la dictature et qui se sentant menacé les confie à son ami Anselmo (Charles Goldner) installé à Londres. Les années passent, les sœurs deviennent citoyennes britanniques, et si Nora fait son chemin dans sa carrière de danseuse, Maria végète car vivant dans le souvenir de son père assassiné et aussi de celui de son collaborateur le plus proche qui fut également son fiancé, Louis (Serge Reggiani). Le recroisant au hasard d'un voyage à Paris, Maria va être entraînée dans une spirale infernale par les accointances politiques douteuses de Louis qui flatte ses désirs de vengeance en organisant l'assassinat du bourreau de son père. Thorold Dickinson tisse un suspense au cordeau où se tiennent en parfait équilibre la tension psychologique et le pur suspense de thriller d'espionnage. L'ambiguïté et la duplicité que dégage Serge Regianni jette un trouble sur les retrouvailles avec Maria, ainsi que sur toutes les séquences romantiques plus légère où leur lien rompu se renoue. Chaque geste, sourire et action de Louis semble calculé et viser des desseins plus lointains et inquiétants. Le début lumineux du film qui voit les sœurs passer de l'angoisse de leur dictature au bonheur d'une vie nouvelle, marqué par l'atmosphère bienveillante qu'Anselmo cherche à poser pour elles après leurs épreuves. L'introduction du personnage de Louis fait basculer la photo de Gordon Dines dans le clair/obscur tant que l'on ne connaît pas exactement ses intentions, mais que sa seule présence distille le doute. Lorsque son plan se dévoile (faire de Maria la porteuse d'une bombe destinée à tuer le dictateur de passage à Londres), c'est une plongée dans le cauchemar ininterrompue.

Même si l'on y pense forcément un peu, Dickinson sait se différencier de l'approche expressionniste du Carol Reed de Huit heures de sursis (1947), Le Troisième homme (1949) ou L'Homme de Berlin (1953). Il ne se repose pas sur les cadrages déroutants mais cherche à poser une ambiance hallucinée adoptant le point de vue de Maria découvrant un monde sordide qui lui est inconnu. Le sommet est certainement la scène où elle est interrogée par l'organisation et où le verbe sec, répétitif et menaçant suffit à expliciter la menace. Les visages de ses interlocuteurs sont soit escamoté par le découpage qui s'arrête à leur pied ou à leurs mains, soit masqué dans l'obscurité de la pièce. L'idée formelle la plus brillante est de placer la silhouette de Louis en arrière-plan de Maria apeurée, et la confiance en cet être aimé s'évanouit tandis que la lumière de sa cigarette alternativement apparaître/disparaître son visage avant de s'évanouir complètement dans les ténèbres. On reconnaît bien là le talent de Dickinson pour instaurer une tonalité à la lisière du fantastique en se pliant au point de vue terrorisé de ses protagoniste, notamment dans un remarquable flashback de la séquence d'attentat. C'était le cas dans Gaslight (1940) remaké plus tard par George Cukor avec Hantise (1944), ou La Reine des cartes (1949) excellente adaptation de La Dame de pique de Pouchkine. On appréciera les touches scabreuses subtilement amenées (Louis qu'on devine avoir couché avec l'innocente Nora après l'avoir manipulée à son tour) et l'emphase mélodramatique assumée de la dernière partie qui sert parfaitement la noirceur du récit. Le film ne rencontrera malheureusement pas le succès à sa sortie et ce sera l'avant-dernier long-métrage de Dickinson qui se consacrera ensuite à la production et à l'enseignement. Le film a néanmoins une importance considérable dans l'histoire du cinéma. Au moment du tournage, William Wyler se trouve à Rome où il fait des repérages pour son futur Vacances Romaines (1953). Dickinson lui envoie alors les essais de la toute jeune Audrey Hepburn qui convainquent à la fois Wyler de l'engager pour son film, mais aussi la Paramount de lui faire signer un contrat. La suite est connue ! 5/6
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En effet, excellent petit film d'espionnage mâtiné de "suspense étrange".
C'est curieux d'ailleurs, par instants le film m'a évoqué un autre de tes (très bons) films de chevet, So long at the fair de Terence Fisher.
Outre une photographie de toute beauté signée Gordon Dines, l'opérateur de Basil Dearden (The blue lamp et Pool of London notamment), il faut également louer l'aisance technique de ce réalisateur discret, qui ne cherche pas le joli plan gratuit, qui ajoute un relief subtile à ces résistants de l'ombre, agissant sans compassion, avec une détermination crûe pour défendre une cause qu'ils estiment juste.
Et pour répondre au Commissaire, Serge Reggiani se débrouille très bien en anglais.
Une belle découverte, merci Profondo.
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