Je ne résiste pas à la tentation de citer un passage du journal que Claude Dauphin a tenu pendant le tournage du film : "On voit la porte s'entrebailler lentement et, dans la sombre embrasure, les yeux de M. Rossi briller de convoitise. Il n'y aurait là rien de divertissant si ce n'était les yeux d'Alberto Sordi. A la fois suppliants, émerillonnés, humides, on y perçoit le désir d'approcher cette belle nymphe sans écailles et la crainte d'être surpris, toute la canaillerie et toute la couardise de M.Rossi, on y saisit dans l'éclat du regard, les pronfondeurs d'un caractère, la vérité d'un personnage. Un mimodrame de trente secondes, rien dans les mains , rien dans les poches, tout dans les yeux, mais si juste et si comique que les spectateurs éclatent de rire. Il n'ya que les grands bouffons qui, d'une grimace, obtiennent autant de leur audience que les grands tragédiens d'une tirade."rosebud a écrit :j'ai le souvenir de ce faux procés et de la performance d'Alberto Sordi ( mais peut-on parler de performance quand il s'agit d'un tel acteur ? )
Claude Dauphin, Les Derniers Trombones, éditions Jean-claude Simoën.
Claude Dauphin a promis à ses amis "trombones" de ne pas se censurer (lire le bouleversant passage qui traite de la mort de Brasseur, en présence de Vanel et de Dauphin), de ne rien épargner de leurs manies comme de leurs bassesses. Il le fait sans méchanceté aucune. On sent poindre la tendresse même lorsqu'il s'attarde sur les caprices de Brasseur ou les incartades de Simon.
Et, pour revenir à la citation retenue, on sent véritablement une admiration de l'auteur pour le travail de Sordi qu'il célèbre, avec conviction et respect.
Complément idéal du film (à ne lire qu'après l'avoir visionné donc...pour éviter les spoilers notamment) l'ouvrage de Dauphin est, au-delà d'un récit autobiographique, un témoignage précieux sur le tournage d'un film et sur le "paradoxe du comédien".