Joseph Losey (1909-1984)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Phnom&Penh
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Tancrède a écrit :aussi fort que du bon Fritz Lang.
L'influence de Lang est très claire dans ces films noirs, même si Losey joue moins sur la culpabilité que sur l'ambiguïté. Tu as vu son remake, M?

A défaut d'avoir vu le film en question, j'ai appris pourquoi Losey avait réalisé ce remake assez ambitieux pour quelqu'un qui admirait visiblement le travail de Lang et n'en était qu'à son quatrième film. Outre, sur le plan artistique, l'influence commune de Bertolt Brecht, ils ont eu aussi un producteur en commun :)

Puisque je profite de ces posts pour dire un mot des professionnels qui ont travaillé avec Joseph Losey, je dirai un mot de Seymour Nebenzhal (aussi orthographié Nebenzal aux USA).

Joseph Losey a commencé à faire des films au début de la guerre froide, tandis que se mettait en marche la mécanique qui allait aboutir à la Liste Noire. De par ses amitiés politiques, il était, dès le départ, suspect pour les uns et porte-drapeau pour les autres. Losey réalisa les projets qu’on lui confiait, sans rien refuser et le remake de M le Maudit était, en fait, une idée du producteur Seymour Nebenzhal (1897-1961) .
Seymour Nebenzahl était le producteur de Pabst et de Lang en Allemagne. Foncièrement libéral, il avait deviné dès avant 1933 le tournant que prenait son pays et M le Maudit était une idée à lui avant d’être une idée de Fritz Lang. Il avait quitté l’Allemagne en 1933 pour la France, puis la France en 1938 pour les Etats-Unis. Parmi les scénarios dont il est à l’origine, on peut noter aussi celui de Hitler’s Madman de Douglas Sirk. C’est Hitler’s Madman qui permit à Douglas Sirk de relancer sa carrière aux USA et Seymour Nebenzhal a aussi produit les premiers films américains d’un autre réfugié allemand, Edgar Ulmer.
Le remake de M le Maudit par Joseph Losey est tout simplement une idée du producteur Seymour Nebenzhal qui souhaitait dénoncer l’état d’esprit de la société américaine à l’aube de la guerre froide et le procès à la fin du film une claire allusion aux auditions de la commission aux activités anti-américaines. C'est l'avant-dernier film de ce producteur qui a produit presque tous les meilleurs Lang (période allemande) et Pabst, et permis à plusieurs réfugiés allemands aux USA de retrouver du travail.
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Sinon, M de Losey a très bonne réputation mais je ne l'ai pas vu donc je n'en sais pas plus.
Tancrède a écrit :t'as pas parlé de Michael Redgrave ?
grand souvenir de Redgrave dans ce film.
C'est vrai que je ne lui rend pas justice, notamment dans mes captures, où on le voit seulement de dos et de profil. C'est effectivement LE grand acteur de Time of Pity et la sobriété de son jeu, compensée par une grande expressivité, répond très bien au jeu très physique de Leo McKern.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Tancrède »

intéressant ton topo sur la génèse de M, que je n'ai pas vu.

il faut noter cependant que Losey avait un passé de metteur en scène de théâtre donc je ne pense pas que le fait qu'il n'en était qu'à son quatrième film l'ait inhibé lors du tournage de M. Le garçon aux cheveux verts est déja un film maîtrisé de bout en bout.
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Phnom&Penh
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Oui, mais d'après ce que j'ai lu, M le Maudit de Lang était porté au pinacle par la critique de l'époque comme l'un des plus grands films de tout les temps. Losey de son côté, n'était justement pas un inconnu du fait de son activité théâtrale, mais il n'était pas apprécié de tous puisque, ayant travaillé avec Brecht, il était considéré comme d'"avant-garde", avec ce que cela peut avoir de péjoratif.(Ca recommencera d'ailleurs quand il collaborera avec Harold Pinter, voir ce qu'en dit Lourcelles pour qui Pinter a été le "mauvais génie" de Losey, "le moins intellectuel des cinéastes américains" :mrgreen: ).
C'est vrai qu'il vaut mieux ne pas faire partie des cinéphiles allergiques au théâtre pour aimer Losey. Cela dit, à la sortie de M, la critique a été cinglante envers, en gros, ce théâtreux snobinard qui avait la prétention de faire le remake de l'un des meilleurs films de l'avant-guerre.

C'est pour ça que je trouve que la véritable histoire est finalement plus intéressante que les critiques, puisqu'elle est au fond, très terre à terre.

Les critiques français mac-mahoniens, plus objectifs :lol: , se demanderont, en revanche, si le remake n'était pas supérieur à l'original.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Strum »

Phnom&Penh a écrit :Le remake de M le Maudit par Joseph Losey est tout simplement une idée du producteur Seymour Nebenzhal qui souhaitait dénoncer l’état d’esprit de la société américaine à l’aube de la guerre froide et le procès à la fin du film une claire allusion aux auditions de la commission aux activités anti-américaines. C'est l'avant-dernier film de ce producteur qui a produit presque tous les meilleurs Lang (période allemande) et Pabst, et permis à plusieurs réfugiés allemands aux USA de retrouver du travail.
Très intéressant, en effet. Merci. :wink:
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Strum a écrit : Très intéressant, en effet. Merci. :wink:
On dit tant de mal des producteurs :wink:

Sinon, voici quelques indications de lecture pour ceux qui sont intéressés par le cinéaste :
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Je suis en train de terminer L’œil du Maître, de Michel Ciment, qui, en fait, n’est pas un livre de Ciment mais un recueil des écrits de Losey. Il y a des articles sur différents sujets, des notes préparatoires pour des films et de la correspondance.
C’est très intéressant car le livre donne, je trouve, une idée beaucoup plus nuancée du cinéaste qu’une bonne part de ce qui a été écrit sur lui.

Sur le plan politique par exemple, il revient sur son appartenance au Parti Communiste en disant qu’elle est beaucoup plus le fruit de ce qu’il a vu durant les années de la Grande Dépression que le reflet d’opinions politiques précises. Il définit ça comme un engagement de jeunesse et il donne l’impression d’avoir continué à se définir comme tel surtout par défi envers les USA qui l’avaient rejeté. Les "préoccupations sociales" restent en revanche au cœur de ses films. Comme influence majeure sur le plan artistique, il cite plutôt son enfance en milieu puritain, tout en soulignant qu’on a aussi un peu caricaturé cet aspect. Il était d’une famille très cultivée, ce qui lui a évidemment rendu service et les positions religieuses des membres de sa famille étaient assez variées. Il n’a pas renié son milieu, il l’a quitté, nuance, avec l’habituelle incompréhension sur le choix d’une carrière artistique, mais sans drame particulier.

Sur la production, il a une position beaucoup plus pondérée qu’on pourrait le penser. Il a parfaitement conscience du coût des films par rapport à d’autres arts et sa position sur l’ "industrie du cinéma" est finalement objective et assez américaine. Il n’y a aucune véritable amertume, par exemple, dans ce qu’il dit à propos de la façon dont Eva a été traité, juste beaucoup de regrets. Il considère que des producteurs qui choisissent un réalisateur devraient lui faire confiance jusqu’au bout plutôt que de penser qu’ils ont une meilleure connaissance du public que l’artiste lui-même, prenant en exemple The Servant qui a été à la fois un grand succès et le film sur lequel il a eu une totale liberté.

Sur le théâtre, enfin, il est passionnant. Un long article sur Bertolt Brecht montre bien quelle importance la culture théâtrale a eu pour lui mais, s’il est resté proche des gens de théâtre comme Harold Pinter, il est devenu cinéaste et l’est resté. Il a une approche très esthétique du cinéma et voit un film comme un art à part, permettant de fixer une œuvre visuelle et sonore en même temps sur un écran. Cela seul lui importe et les messages qu’on pourrait trouver dans ses films ne sont que les reflets de son monde intérieur, en aucun cas une vision politiquement voulue de la société, il ne cherche pas à démontrer.
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Michel Ciment semble être le meilleur critique pour découvrir par écrit le monde de Joseph Losey. Son ouvrage Le livre de Losey est un recueil d’entretiens qui ont été longs et nombreux. Des échanges écrits entre Michel Ciment et Joseph Losey montrent avec quel soin le livre a été corrigé jusqu’à la publication. Il est actuellement épuisé mais on le trouve assez facilement en occasion.
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Le coffret Studiocanal, qui est un must du fait qu’il regroupe 7 films majeurs de Losey (ceux indiqués sur la jaquette ainsi que The Go-Between), même si on peut regretter que les films n’aient pas été tous restaurés, contient un très bon documentaire, Joe le Magnifique, réalisé par Philippe Saada. Il y a beaucoup d’informations sur le cinéaste, des petites analyses de séquences, plusieurs interventions de l’incontournable Michel Ciment, des interventions de professionnels ayant travaillé avec Losey et des extraits d’interview de son épouse, Patricia Losey, qu’il a rencontré sur le tournage d’Eva en 1961 et qui a travaillé avec lui jusqu’à la mort du cinéaste en 1984.

Dans le documentaire, Michel Ciment établi un parallèle très intéressant avec Elia Kazan, autre cinéaste sur lequel il a beaucoup travaillé. Les deux carrières sont très semblables: naissance la même année, marqués par la Grande Dépression, membres du Parti Communiste, débuts au théâtre, premiers films en 1944 (Kazan) et 1948 (Losey) et la grosse rupture du maccarthysme, avec évidemment des trajets différents à ce moment, et une seconde carrière après pour chacun des deux.
Une dernière rencontre au Festival de Cannes. Consécration en 1971 pour Losey avec The Go-Between...Kazan présente The Visitors à Cannes en 1972. Plusieurs membres du jury veulent lui donner un prix mais Joseph Losey est président du jury et s'y oppose. Kazan n'aura pas de prix. Patricia Losey, dans le documentaire, précise que son mari n'entretenait pas de haine envers Kazan mais ne supportait pas le sujet du film (pas vu: deux vétérans du Vietnam viennent se venger d'un troisième qui les a dénoncé après un viol et assassinat).
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Tancrède »

les quelques textes de Mourlet sont intéressants aussi pour cerner le style de Losey.
et Lourcelles bien sûr.
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Phnom&Penh
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Tancrède a écrit :les quelques textes de Mourlet
J’ai bavardé maintes fois avec Losey, à Londres, avant qu’il ne laissât quelque peu corrompre son esthétique brutalement rigoureuse par des enjolivures compliquées.

Moi j'ai un faible pour les enjolivures compliquées 8) :oops: Je poste sur les films dans l'ordre parce que l'idée est de voir l'évolution du style mais mes Losey préférés (de mémoire parce que je ne les ai pas vu depuis longtemps pour la plupart) sont:
The Go-Between
M. Klein
The Servant
Boom
Modesty Blaise (par contre, ces deux là, je ne les ai pas trouvé pour les revoir)
Accident
Eva
La Truite
Tancrède a écrit :et Lourcelles bien sûr
Bref, ceux de la période où selon Lourcelles, le "moins intellectuel des cinéastes américains" s'est fait pervertir par les élucubrations d'Harold Pinter, le goût pour les mouvements de caméra, les acteurs et actrices célèbres, tout ça quoi :mrgreen:
Michel Ciment me convient donc plus puisqu'il aime tout lui :)
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Tancrède »

plus je vois de films des années 60 et moins je les aime. Cérémonie secrète, Accident, The servant...c'est un peu toujours la même chose je trouve, les memes films avec les memes bourgeois détraqués. les mêmes procédés. Sans compter qu'il y a de véritables catastrophe dans ces films: Boom et Eva (que Mourlet a pourtant beaucoup défendu) par exemple.
Le messager que j'avais adoré la première fois que je l'ai vu m'est apparu laborieux et pas vraiment inspiré à la révision.

par contre, Monsieur Klein, ça reste génial.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Avec M. Klein, le seul que j'ai revu recemment, c'est Eva et j'ai vraiment été emballé. Par contre, j'avoue qu'en 1h45, ça me convient très bien parce que le plaisir est surtout esthétique...Losey disait qu'une fois coupé, le film ne voulait plus rien dire, mais la version coupée est suffisante pour moi; 3h d'Eva, ça me fait un peu peur.
Pour les autres, j'attend de les revoir mais je ne suis pas encore sur cette période là.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Watkinssien »

Phnom&Penh a écrit :
Bref, ceux de la période où selon Lourcelles, le "moins intellectuel des cinéastes américains" s'est fait pervertir par les élucubrations d'Harold Pinter, le goût pour les mouvements de caméra, les acteurs et actrices célèbres, tout ça quoi :mrgreen:
Michel Ciment me convient donc plus puisqu'il aime tout lui :)
Bon j'aime pas beaucoup Lourcelles à la base, et je l'aime de moins en moins à chaque fois que je lis une citation de son cru !
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Tancrède »

Avec M. Klein, le seul que j'ai revu recemment, c'est Eva et j'ai vraiment été emballé. Par contre, j'avoue qu'en 1h45, ça me convient très bien parce que le plaisir est surtout esthétique...
ça alors.
ça m'intéresserait vraiment de te lire sur Eva, film que j'avais trouvé d'une abstraction franchement insupportable.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Wagner »

Watkinssien a écrit :
Phnom&Penh a écrit :
Bref, ceux de la période où selon Lourcelles, le "moins intellectuel des cinéastes américains" s'est fait pervertir par les élucubrations d'Harold Pinter, le goût pour les mouvements de caméra, les acteurs et actrices célèbres, tout ça quoi :mrgreen:
Michel Ciment me convient donc plus puisqu'il aime tout lui :)
Bon j'aime pas beaucoup Lourcelles à la base, et je l'aime de moins en moins à chaque fois que je lis une citation de son cru !
Il vaut mieux lire les commentaires des films qu'il aime plutôt que ceux des films qu'il n'aime pas.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

Tancrède a écrit :ça m'intéresserait vraiment de te lire sur Eva, film que j'avais trouvé d'une abstraction franchement insupportable
J'en ai dit un petit mot dans les quinzaines, musique - le jazz, mais j'écrirai un truc ici après l'avoir revu. J'adore l'esthétique du film, le noir et blanc à Venise, les mouvements de caméra, les plongées verticales, les miroirs, les escaliers, les masques. Je trouve que l'idée de mettre une musique de jazz de Legrand sur l'architecture italienne pour faire ressortir la particularité et la force du personnage d'Eva est géniale, d'autant qu'avec Billie Holiday, Losey donne aussi une belle fragilité au personnage. Et je trouve que Tyvian Jones a bien mérité ce qui lui arrive, même si je suis un peu triste pour Francesca. Voilà en résumé :)
Wagner a écrit :Il vaut mieux lire les commentaires des films qu'il aime plutôt que ceux des films qu'il n'aime pas.
+ 1. D'autant que pour la littérature et les démontages de mauvaise foi, il y a meilleur que lui. Voir plus bas.

En fait, j'avais commencé, après mes achats de DVD, par les films que j'avais le plus envie de voir/revoir, M. Klein et Eva. Et puis, j'ai tout de suite arrêté, justement parce que j'ai relu ce que les critiques écrivaient sur Losey.

Pour résumer:
Lourcelles: grand cinéaste de la violence rentrée, excellents premiers films, se perd dans les tarabiscotages Pinderiens après, contaminé par la décadence qu'il aimait tant décrire, en gros.
Mourlet: je n'ai lu que des généralités où il cite Losey, il est plus concret que Lourcelles, mais sur la qualité des films, il est plus ou moins du même avis.
Daney, là c'est très grand (j'en ai dit plein de bien ailleurs, alors je peux bien m'amuser un peu :mrgreen: ): homosexuel refoulé, Losey fait du cinéma théâtral qui se regarde le nombril et il ne comprend rien aux enfants :lol: Cela dit, pour le seul plaisir de la littérature, je recommande sa critique du Messager. La façon dont il part d'autres films pour dégager l'idée du personnage qui fait le lien entre les rôles principaux et qui fait "embrayer" un film, pour en venir à ce que Le Messager n'embraye pas, c'est du grand art.
Tavernier / Coursodon (en l'occurence je suppose qu'il s'agit plutôt de Tavernier): très honnête dans le sens où il revient dessus à chaque nouvelle édition pour tempérer son propos et revaloriser l'oeuvre dans son ensemble, mais la première évaluation du cinéaste est très "théorique": les personnages ne comptent pas, ils sont les jouets d'un décor qui représente la société.

Quand après tout ça, j'ai lu ce qu'en disait Michel Ciment, beaucoup plus modéré à la fois dans ses enthousiasmes et ses regrets, et surtout donnant beaucoup la parole au réalisateur (alors que Tavernier sous-entend dans son premier texte qu'il vaut mieux ne pas lire Losey pour comprendre son travail :P ), je me suis dit que Losey était un bon exemple de ce qu'on brûlait après l'avoir adoré, et que le mieux était de prendre les films par le début pour me faire une idée de l'évolution de sa carrière.
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par bruce randylan »

Phnom&Penh a écrit :Time without Pity - Temps sans Pitié (1957)
Je l'avais trouvé méga lourdingue celui-là. Voilà, ce que j'en disais il y a quelques mois
Il y avait de quoi faire un thriller tendu et intense à l'image de la brillante ouverture autant baroque que très violente.
Sauf que le Losey verse rapidement dans une hystérie fatigante avec un jeu d'acteur outrageusement exagéré et une musique qui passe son temps à s'exciter sans raison. Le suspense en prenne un coup et il est bien dommage de ne pouvoir profiter de quelques séquences où Losey parvenait à installer une pression d'enfer.
Quoiqu'il en soit, le final ridicule et invraisemblable plonge le second pied de ce film bancal dans la tombe des rendez-vous manqués.
Joli texte en tout cas ( mais pas suffisant pour me donner envie de le revoir :mrgreen: )
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Re: Joseph Losey (1909-1984)

Message par Phnom&Penh »

bruce randylan a écrit : Joli texte en tout cas ( mais pas suffisant pour me donner envie de le revoir :mrgreen: )
Merci!
En ce qui concerne la musique, j'avais déjà remarqué que tu avais l'oreille plus délicate que moi :wink:
Après, je pense que c'est juste que tu attendais un thriller alors que Losey cherche à caricaturer un homme de pouvoir qui n'est qu'un sale gosse égocentrique persuadé que le pouvoir lui donne le droit, et qui va se réfugier dans les jupes quand ça tourne mal (je n'en dirai pas plus, je ne voudrais pas spoileriser la fin même si elle est effectivement assez outrancière). C'est pour ça que je vois Time without Pity plus proche de la fable que du film noir.
Par contre, je pense que tu ne serais pas indifférent au charme de The Big Night, même si la fin est aussi un peu appuyée. L'intrigue est d'ailleurs plus subtile tandis que Time of Pity se veut violent avant tout.
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