Le Cinéma britannique

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Profondo Rosso
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The Clouded Yellow de Ralph Thomas (1950)

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David Somers se fait virer des services secrets. Il décide alors de s'installer avec les Felton dans leur maison de campagne. Il tombe amoureux de la nièce des Felton, Sophie. Bientôt, celle-ci est accusée du meurtre de Hick, l'homme à tout faire de la maison.

Un remarquable exercice de thriller hitchcockien qui permet à Jean Simmons de délivrer une de ses plus intéressantes prestation. Sans être un film d'espionnage, The Clouded Yellow en arbore plusieurs aspect par l'intermédiaire de son héros Trevor Howard. Ancien espion révoqué, il est contraint pour un temps de s'installer à la campagne pour exercer la tâche ingrate de répertorier des papillons. Il se lie rapidement avec la nièce de la famille qui l'héberge, incarné par Jean Simmons. L'atmosphère supposément bucolique se trouve pourtant progressivement troublé par plusieurs nuages. Sophie (Jean Simmons) s'avère fort fragile psychologiquement, hantée par un traumatisme d'enfance et ne s'avère guère soutenue par son entourage que ce soit sa tante éveillant sans cesse sa fébrilité et surtout un employé de maison concupiscent qui la harcèle. Le scénario crée remarquablement le malaise en orchestrant des situations troubles et pleine de secrets sans aucune menace tangible dans un premier temps. La mise en scène de Ralph Thomas instaure un voile de mystère par le jeu d'ombre rendant inquiétant ce cadre rural inoffensif et Jean Simmons par ses allures d'enfant apeurée trouble et éclaire les autres personnages l'oppressant sans motif d'un tour bien plus inquiétant. Cela renforce également le lien avec Trevor Howard, figure bienveillante et solide.

Après cette première partie tout en ambiance, la suite s'oriente vers la pur course poursuite façon Les 39 Marches lorsque Howard et Simmons fuient la police à travers l'Angleterre, cette dernière étant accusée à tort de meurtre. Là encore l'efficacité de Thomas fait merveille avec quelques séquences haletantes comme lorsque notre couple est traqué en rase campagne par une horde policier, les évasions astucieuses d'un Trevor Howard très convaincant en espion dur à cuir et une dernière demi heure ébouriffante de suspense. Le seul problème est le manque d'audace de Thomas dans la manière de traiter la facette psychologique du récit. La solution entière de l'énigme repose sur le trauma d'enfance de Sophie et celui ci aurait pu occasionner nombres de séquences inventives. Thomas n'en fait rien pourtant, pas un flashback tarabiscoté à se mettre sous la dent et toute les allusions à ce souvenir passeront par le dialogue, la performance remarquable de Jean Simmons faisant néanmoins ressentir cette tension. Le film se rattrape par la manière d'incorporer des éléments d'espionnage dans ce qui est un thriller assez classique finalement. Les différents contact de son ancienne profession que Howard est contraint de solliciter dans sa fuite nous font ainsi découvrir sous l'Angleterre interlope un monde sous-terrain truffé de passeurs, fabricant de faux papiers et étrangers dissimulant des anciens agent, étonnant.

Si on voit largement venir le retournement final, la dernière partie partie accumulant les lieux, situations et péripéties est assez épatante et offre un ultime clin d'oeil à Hitchcock en réservant à son méchant un sort digne de celui de Joseph Cotten dans L'Ombre d'un doute. Très efficace donc ! 4,5/6

Dvd zone 2 UK dépourvu de sous-titres mais vraiment aucune difficultés de compréhension particulière, vocabulaire simple et pas d'accent intempestif.
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Profondo Rosso
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Le Meilleur des mondes possible (O Lucky Man) de Lindsay Anderson (1973)

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Mick Travis, jeune homme ambitieux, est décidé à faire fortune le plus vite possible. Cette rage de réussir enthousiasme Gloria Rowe, une publicitaire, qui l'engage pour représenter la marque Imperia Coffee. Mick se voit bientôt confier la prospection de tout le nord-est de l'Angleterre. Mais il joue de malchance et, au cours d'une tournée, il est pris pour un espion et fait prisonnier par le service de sécurité d'un centre de recherche atomique secret. Il parvient cependant à s'échapper et se retrouve dans la voiture d'un infirmier en quête de volontaires pour des expériences médicales...

Devenu superstar grâce à Orange Mécanique Malcolm McDowell décidait de renouer avec le rôle qui l'avait révélé, le Mick Travis du If.... de Lindsay Anderson. Difficile cependant de faire lien entre l'ado rebelle de If... et le héros de ce O Lucky man et plutôt qu'une suite directe ce nouveau film constitue plutôt un prolongement des idées et réflexions de If.... L'idée de départ vient donc de Malcolm McDowell qui rédige un premier script s'inspirant de sa courte carrière de vrp en café à une période de vache maigre. Pas totalement satisfait Anderson remanie le scénario en lui donnant plus d'ampleur (finalement la vente itinérante de café ne constitue qu'un court épisode au début) et y ajoute certaines trouvailles comme d'adjoindre les chansons d'Alan Price (l'idée lui vient après une tentative de documentaire avortée sur la tournée de l'ancien organiste des Animals) pour commenter ironiquement les mésaventures de Mick Travis.

On avait quitté Malcolm MacDowell armes au poing mitraillant les figures d'autorité à la fin de If..., c'est dans un tout autres état d'esprit qu'on le retrouve là faisant son entrée dans le monde de l'entreprise, en salarié conciliant et ambitieux (hilarante scène où il éclipse ses rivaux par son sourire carnassier et hypocrite). Mick Travis est donc rapidement chargé de prendre en main tout un secteur régional de vente et Anderson retrouve la verve grinçante de If... pour dénoncer les travers des notables locaux qui vont rapidement corrompre Mick. O Lucky Man souffre cependant d'un gros problème par rapport a son prédécesseur, celui de privilégier le discours à l'émotion ou en tout cas d'être incapable de les équilibrer. If.... fonctionnait aussi bien en tant que brûlot contestataire que de vrai drame humain, était aussi drôle que touchant. Ici Lindsay Anderson a la grande ambition de revisiter le Candide de Voltaire au monde capitaliste en crise des 70's et l'histoire fait finalement plus office de fable morale que de vraie fiction. De même Anderson conserve le même groupe d'acteurs (dont certains déjà de l'aventure de If...) pour incarner plusieurs personnages tout au long du film comme pour symboliser un visage uniforme de cette société gangrénée et sans valeur humaine. La démarche est donc très (trop) cérébrale et pensée et finalement ça ne fonctionne jamais réellement malgré le contenu explosif de l'ensemble. Le seul fil conducteur est la soif de réussite démesurée de Mick et les obstacles qu'il rencontre durant ses pérégrinations, chacune dénonçant une tares particulière dans des sphères de plus en plus haut placées. On passe donc de l'expérimentation pharmaceutique sauvage à la chasse au communiste en passant par l'exploitation de la main d'oeuvre du tiers monde par les grands groupe capitalistes. Il y a au moins la matière pour 5 films dans O Lucky Man, c'est beaucoup trop et l'ensemble s'étale sur trois longues heures.

Il y a heureusement de vrais moments amusant et réussis dans cette longue démontration mais trop peu. La conclusion montre la verve intacte de Anderson qui après nous avoir montré l'inhumanité des nantis fait de son héros un illuminé soudainement soucieux de la causes des plus démunis. Ces derniers ne semble pas en mériter tant entre les sans abris vu comme une entité monstrueuse et ingrate ou encore cette longue séquence où Mick tente de sauver du suicide une mère de famille qui a renoncé a tout espoir, sans parler de la compassion à inventaire de l'église déjà une des grande cible de If.... Au final les chansons de Alan Price constituent une fausse bonne idée qui ressassent ce qui est déjà très lourdement appuyé tout au long du film. Le contenu prend donc le pas sur le cinéma dans un ensemble froid et ennuyeux malgré les fulgurances. L'autosatisfaction et le nombrilisme de l'entreprise est à son summum lors de la conclusion où Mick se présente à un casting (où le réalisateur n'est autre que Lindsay Anderson himself) où le rôle exige d'avoir comme accessoires une pile de livre et une mitrailleuse, soit les signes distinctifs de son personnage dans If.... La boucle est (bien mal) bouclée et ça laisse craindre le pire pour le troisième volet Britannia Hospital si ça reste dans cette veine froide et détachée. 2,5/6
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Re: Le cinéma britannique

Message par Federico »

Profondo Rosso a écrit :Le Meilleur des mondes possible (O Lucky Man) de Lindsay Anderson (1973)

La boucle est (bien mal) bouclée et ça laisse craindre le pire pour le troisième volet Britannia Hospital si ça reste dans cette veine froide et détachée. 2,5/6
Je n'ai pas vu O Lucky Man qui a du pas mal marcher à l'époque si j'en crois le titre de l'excellent docu réalisé par Jan Harlan sur McDowell en 2006 : O Lucky Malcolm !.
Britannia Hospital ? Il me semble me souvenir d'une hénaurme farce assez lourdingue. En jetant un oeil sur sa distribution, elle est croquignolette : Alan Bates, Mark Hamill et Leonard Rossiter, un des excentriques à visage élastique des écrans britanniques d'alors (vu entre autre chez Kubrick).
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

J'ai Britannia Hospital sous la main aussi mais après O Lucky Man ça m'a bien refroidi de m'y frotter alors que je comptais enchaîner direct. Effectivement ça a l'air assez gratiné et il semble que Malcolm MacDowell soit au second plan vu le casting de luxe. Bon déjà il n'a pas l'air de durer 3h c'est déjà ça j'ai souffert le martyre pour finir O Lucky Man :mrgreen: . Sinon si je me souviens bien l'excellent doc O Lucky Malcolm se trouve en bonus sur le collector de Orange Mécanique aussi en zone 2 (et aussi en bonus du zone 1 de O lucky Man pas regardé encore...).
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

Les yeux du témoin (Tiger Bay) de Jack Lee Thompson (1959)

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Gillie, une fillette de 12 ans, a vu le jeune marin polonais Korchinsky abattre sa petite amie avec un révolver. Gillie lui subtilise l'arme, mais lorsque la police la découvre en possession du révolver, elle invente des histoires, car des liens particuliers se sont tissés entre elle et le meurtrier...

Une très belle découverte que ce déroutant mélange de thriller et de récit initiatique sur l'enfance. Le film marque la première apparition à l'écran de la jeune Hayley Mills, fille de l'acteur John Mills (également là dansle rôle de l'inspecteur de police) dont l'impressionnante performance lui vaudra une pluie de récompense et d'être l'enfant star des productions Disney du début 60's.

Tout le film est affaire de dualité, entre ombre et lumière, innocence et manipulation, attachement et rejet. Le jeune et avenant marin polonais Korchinsky revenu de mer découvre que sa fiancée l'a trompée et est entretenue par un autre homme, et face au violent rejet qu'elle lui oppose la tue dans un moment d'égarement. La jeune Gillie (Hayley Mills) témoin de la scène va parvenir suite à un concours de circonstance à s'emparer de l'arme du crime un revolver et une poursuite va alors s'engager. Le film prend alors un tour étonnant puisque passé quelques haletantes séquences à suspense le scénario cesse soudain d'opposer poursuivant et poursuivie pour les rapprocher. Des signes avant-coureurs nous auront montrés que les deux personnages incarnent finalement deux solitudes qui ne pouvait que se reconnaître. Elevé sans passion par sa tante, Gillie est une fillette livrée à elle même cachant son mal être et le rejet des autres dans une exubérance et une mythomanie mettant à rude épreuve son entourage. Quant à Korchinsky, il a vécu toute sa vie en mer et quant son seul rattachement à la terre et une vie normale le trahit cruellement, c'est un véritable déchirement.

Le ton du film oscille ainsi constamment entre la dureté du récit policier et une certaine candeur dans la relation entre ses deux personnages. Jack Lee Thomson alterne visuellement une authenticité qui annonce le "free cinéma" des 60's avec son Cardiff portuaire et cosmopolite, une stylisation typiquement "film noir" lors des séquences nocturnes où la ville prend un tour oppressant dans les yeux de la fillette (et l'esprit agité de Korchinsky) et un naturalisme tout en douceur lors de tout les échanges entre Gillie et Korchinsky. Toutes ses facettes peuvent même s'entrecroiser comme lors de ce moment ambigu (qui se renouvellera lors de la conclusion) où Korchinsky a l'occasion de se débarrasser radicalement de cette gamine gênante mais ne peut s'y résoudre. Horst Buchholz en écorché vif trop nerveux mais au coeur tendre est épatant de bout en bout et Haley Mills en petite teigne est parfaite et déploie un registre impressionnant pour son jeune âge dans un récit aussi sombre. Jack Lee Thomson envisageait d'ailleurs au départ le rôle pour un petit garçon avant d'être soufflé par les capacités de Hayley Mills.

Les repères sont si perturbés que le personnage le plus droit et équilibré du film en deviendrait presque antipathique avec l'inspecteur de police joué par John Mills traquant le coupable sans relâche. sa pugnacité sans faille est d'ailleurs l'occasion de vingt dernière minutes soufflante de suspense en pleine mer où Jack Lee Thomson (qui signe là un de ses tous meilleurs films) déploie des trésors d'inventions pour faire grimper la tension. Si (forcément) la morale est sauve au final, le film nous aura brillamment emmené tout du long dans des émotions inattendues. 5/6

Pour le dvd l'édition Carlton a des sous-titres anglais, même si le film est relativement aisé à suivre même sans. Sinon Commissaire Juve t'as eu la dent dure avec le dvd j'ai trouvé l'image vraiment très belle le noir et blanc est splendide maniaque va ! :mrgreen:
Dernière modification par Profondo Rosso le 23 juin 11, 15:06, modifié 1 fois.
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Message par joe-ernst »

Profondo Rosso a écrit :Les yeux du témoin (Tiger Bay) de Jack Lee Thompson (1959)
Merci pour ce compte-rendu et pour avoir signalé l'existence de sta sur le dvd : je l'ai mis dans ma wish list ! :)
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Message par Commissaire Juve »

Il est vachement bien, ce film... Faut que tu voies Le vent garde son secret, maintenant. 8)
Profondo Rosso a écrit :...
Pour le dvd l'édition Carlton a des sous-titres anglais, même si le film est relativement aisé à suivre même sans. Sinon Commissaire Juve t'as eu la dent dure avec le dvd j'ai trouvé l'image vraiment très belle le noir et blanc est splendide maniaque va ! :mrgreen:
La dent dure ? J'ai écrit que l'image était "bonne", qu'il y avait une "belle échelle de gris" (qu'est-ce qu'il faut ?)... Mais il est vrai qu'il y a un edge enhancement plus ou moins prononcé sur certains passages (des plans larges, des extérieurs-jour, notamment au tout début du film).

En tout cas, s'il était édité en blu, je n'hésiterais pas à repasser à la caisse.
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

Commissaire Juve a écrit :Il est vachement bien, ce film... Faut que tu voies Le vent garde son secret, maintenant. 8)
Profondo Rosso a écrit :...
Pour le dvd l'édition Carlton a des sous-titres anglais, même si le film est relativement aisé à suivre même sans. Sinon Commissaire Juve t'as eu la dent dure avec le dvd j'ai trouvé l'image vraiment très belle le noir et blanc est splendide maniaque va ! :mrgreen:
La dent dure ? J'ai écrit que l'image était "bonne", qu'il y avait une "belle échelle de gris" (qu'est-ce qu'il faut ?)... Mais il est vrai qu'il y a un edge enhancement plus ou moins prononcé sur certains passages (des plans larges, des extérieurs-jour, notamment au tout début du film).

En tout cas, s'il était édité en blu, je n'hésiterais pas à repasser à la caisse.

Oui j'avais lu le commentaire sur ton site mais je me suis étonné d'avoir une copie aussi belle je n'ai presque pas vu les défauts, bon après c'est vrai que je ne suis pas spécialement bien équipé. Très bon film en tout cas merci c'est suite à ton commentaire que je l'ai pris, bon vais tenter Le Vent garde son secret elle a vraiment une belle filmo hors Disney Hayley Mills pour l'instant je n'ai rien vu qui m'ait déçu avec elle ! :D
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Message par julien »

Profondo Rosso a écrit :elle a vraiment une belle filmo hors Disney Hayley Mills pour l'instant je n'ai rien vu qui m'ait déçu avec elle ! :D

Twisted Nerve
et Endless Night même si ça se regarde, c'était quand même pas terrible. Des thrillers de seconde zone.
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

julien a écrit :
Profondo Rosso a écrit :elle a vraiment une belle filmo hors Disney Hayley Mills pour l'instant je n'ai rien vu qui m'ait déçu avec elle ! :D

Twisted Nerve
et Endless Night même si ça se regarde, c'était quand même pas terrible. Des thrillers de seconde zone.
Ah pas vu ces deux là je tenterais éventuellement à l'occasion pour me faire une idée... Sinon Whistle down the wind commandé ! 8)
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

Contre-espionnage (They met in the dark) de Karel Lamac (1943)

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Dégradé après avoir perdu son navire sur de faux ordres ennemis, Le commandant Heritage se lance a la recherche des espions responsables de sa destitution.

Brillant, alerte et inventif, They met in the dark est un des thrillers d'espionnage les plus réussis du cinéma anglais de l'époque. Comme souvent dans ce type de production, le mètre étalon qualitatif est Hitchcock et si ce n'est la mise en scène moins inspirée de Karel Lamac on est tout proche des sommets du Maître du Suspense. L'aspect qui frappe en premier sur ce terrain là est le rythme trépidant du film. Le récit s'ouvre sur le procès de l'officier britannique Heritage (James Mason) qui dupés par des ordres erronés est responsable de la perte de son navire et se trouve alors d'entrée radié de l'armée. Pas de scène introductive du drame ni même une séquence en flashback pour montrer le déroulement des évènements dramatiques qui lancent l'histoire, on est directement lancé sur l'enquête que va mener Heritage revenu à la vie civile pour prouver son innocence.

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Tout le film se poursuit sur ses bases de pure efficacité elliptique porté par un scénario particulièrement astucieux et riches en coup de théâtre surprenant. Heritage croise sur sa route Laura Verity (Joyce Howard) jeune femme fraîchement débarquée de son Canada natal dans une demeure qu'il inspecte et où va se trouver un cadavre dont elle va le soupçonner d'être le meurtrier. Cadavre qui va se volatiliser lorsqu'elle amènera la police sur les lieu et il va ainsi s'ensuivre un piquant chassé croisé amoureux entre les deux personnages, Mason devant parallèlement à ses investigations protéger la jeune femme bien décidée à prouver la vérité de ses dires. James Mason est absolument parfait de prestance, d'esprit et d'humour en espion séducteur et forme un duo étincelant avec l'oubliée Joyce Howard qui transcende par sa vivacité et son charme ce qui s'annonçait comme un rôle de faire valoir féminin écervelé et il n'en est rien. Les scènes de séduction ou d'altercation entre eux évoque le meilleur de la screwball comedy et amènent constamment une touche de décontraction bienvenue dans cette intrigue tortueuse.

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Le script nous amène ainsi sur la piste d'une compagnie de spectacle aux agissements douteux et dont les membres dissimulent des agents nazis. Cet univers du spectacle amènent son lot des situations inattendues quant à l'usage des talents des artistes espion avec une révélation franchement épatante dans la dernière parti quant au plan ennemi et qui explique l'escamotage narratif si étonnant en ouverture. Le film croise la touche typiquement british (l'humour constant, les personnages secondaires loufoque comme le bras droit de Mason joué par Edward Rigby) avec une esthétique plus influencée par les origines disparates de ses instigateurs. Karel Lamac d'origine tchèque retrouve ainsi son compatriote Otto Heller à la photo, le tout produit par l'émigrant roumain (et producteur très interventionniste) Marcel Hellman. Certaines séquences surprennent ainsi par leur expressionnisme très prononcé comme la poursuite dans la nuit noire campagnarde en début de film, tout en ombres inquiétantes. Le montage percutant d'un certain Terrence Fisher est au diapason du côté mystérieux et déroutant du film et on ne s'ennuie pas une seconde. Excellent casting pour compléter avec notamment David Farrar et surtout une mémorable galerie de méchant avec un Karel Stepanek adepte de l'étranglement au foulard ou encore Tom Walls qui se joue de son image d'amuseur pour révéler un manipulateur machiavélique. Très bonne surprise donc ! 5/6

Pour le dvd aucun sous-titres mais si on se débrouille un minimum en anglais vraiment aucune difficulté majeure de compréhension ça se suit sans problème !
Dernière modification par Profondo Rosso le 16 août 11, 03:17, modifié 1 fois.
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Re: Le cinéma britannique

Message par Rick Blaine »

J'ai l'impression que ce film va me plaire, il faut que je regarde ça très vite!
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

Le Vent garde son secret (Whistle Down the Wind) de Bryan Forbes (1961)

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Un magnifique film sur l'enfance et la perte de l'innocence qui constitue en quelque sorte le pendant anglais de Du Silence et des Ombres
et qui était une nouvelle fois l'occasion de constater le talent précoce d'Hayley Mills. Le film est d'ailleurs une adaptation (par elle même au scénario avec Keith Waterhouse) d'un roman de Mary Hayley Bell , la mère d'Hayley Mills et on y retrouve cette atmosphère rurale si particulière qui fera le charme de Sky West and Crooked, le premier rôle adulte qu'elle écrira pour sa fille dans un film réalisé par son époux John Mills.

L'aspect racial de To Kill a Mockingbird disparaît totalement ici pour une approche de la religion naïve et touchante par un regard enfantin. Kathy (Hayley Mills) est donc une fillette vivant en campagne avec ses jeunes frères et soeurs Nan et Charles. Ayant perdu leur mère, il sont élevé par leur rugueuse tante et leur père (joué par Bernard Lee le futur M des 11 premiers James Bond) qui est bien plus occupé par la gestion de son domaine fermier. Ainsi livré à eux même, les trois enfants menés par leur grande soeur vivotent au gré de leur pérégrination dans la nature environnante de leur ferme et de leur petit village. Un jour, après avoir sauvé des chatons de la noyade, Kathy a un mot malheureux où elle remet en cause l'existence de Jésus ce qui lui est fortement reprochée par sa soeur. tenaillée par le remords elle croit ainsi voir le Christ revenu sur terre dans sa grange alors qu'il ne s'agit que d'un meurtrier blessé et en cavale (Alan Bates dans son premier rôle à l'écran). Une étrange relation va s'ensuivre.

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Le film offre ainsi une vision contrastée de la religion selon l'interprétation qu'en font les enfants ou les adultes. La naïveté et l'innocence de l'interprétation qu'en font les enfants rend finalement toute sa simplicité bienveillante au message originel, parvenant à ébranler la dureté d'un criminel endurci (d'ailleurs hormis un avis de recherche placardé Alan Bates presque jamais nommé par son vrai nom comme pour maintenir l'illusion des enfants). A l'inverse, les adultes y voient des principes à respecter plus qu'une croyance, des paroles sacrées à retenir plus qu'à comprendre. Une scène s'avère criante à ce titre lorsque Kathy souhaite consoler son frère de la perte de son chaton et interroge le curé sur la raison pour laquelle Jésus laisse certains être mourir. Ce dernier n'a qu'une formule toute faite et insipide à lui offrir, sans comprendre les interrogations de l'enfant face à l'injustice de la mort. La croyance imprègne ainsi cette communauté mais de manière superficielle à l'image du personnage de Patricia Heneghan officiant à l'armée du salut et passant le film à psalmodier mécaniquement des paroles vidées de leurs sens. Finalement dans leur erreur les enfants s'avèrent donc paradoxalement les plus sincères.

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Bryan Forbes capte magnifiquement cette atmosphère campagnarde par sa mise en scène épurée et un cadre magnifié par le superbe noir et blanc de Arthur Ibbetson. Le film est gorgé de symboles plus ou moins prononcés faisant le rapprochement entre l'aventures des enfants et les Evangiles. L'ombres des rois mages plane lorsque les trois enfants viennent apporter des présents à Alan Bates réfugié dans leur grange (les halo de lumière traversant l'obscurité du lieu) instille aussi cet atmosphère, un gamin malmené par la brute du village va renier trois fois avoir vu Jésus un sifflement se faisant entendre au loin (et donnant son sens au titre) à la troisième imprécation. La mise en scène de Forbes joue largement de cette analogie, la visite du groupe d'enfant dans la grange évoque par sa disposition les disciples entourant Jésus, plus tard un cadrage en plongée de Nan s'adressant à Alan Bates (réfugié en haut de la grange) accentue l'aura divine que lui associent les enfants et le final voyant l'arrestation de Bates le montre adopter la posture en croix christique selon le point de vue de Hayley Mills. Le film évite tout prosélytisme puisque toutes interprétations religieuses sont soumis au regard et à la foi innocente des enfants et en particulier Hayley Mills une nouvelle fois très touchante. Le ton est d'ailleurs très ludique sous le drame grâce à la candeur et l'espièglerie des enfants et des stratagèmes dont il font preuve pour nourrir leur Messie.

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Alan Bates n'est jamais embelli ni investit d'un grand message mais l'émotion qui le gagne face à la confiance et l'amour que lui donnent les chérubins estompe progressivement son aura menaçante, et on comprend aisément le mystère (Forbes jouant judicieusement de l'analogie physique avec sa barbe et son regard bienveillant) que peut dégager pour les jeunes héros son mutisme . La traque dont il est l'objet ne fait d'ailleurs que renforcer l'illusion des enfant en transposant sa persécution à l'ère moderne dans un beau final tout en retenue. Un beau film à l'impact certain sur la culture populaire anglaise puisque une transposition en comédie musicale suivra plus tard dans les années 90 et plusieurs groupes pop placeront des références à Whistle in the wind dans leur chanson comme New Order sur Vanishing Point( issue de l'album technique) avec cette ligne fort parlante "and they gave him away, like in 'Whistle Down the Wind,' by the look on his face, he never gave in". 5/6

Et c'est dispo en zone 2 anglais avec vosta !
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Re: Le cinéma britannique

Message par Profondo Rosso »

Easy Money de Bernard Knowles (1948)

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Easy Money est un très plaisant et amusant film à sketch satirique autour de la tradition anglaise du "football pool", soit les paris sur les matchs du championnat. Le film marquait la prise de pouvoir du producteur Sidney Box aux studios Gainsborough, auréolé du succès extraordinaire du Septième Voile un des films les plus populaire du cinéma anglais qu'il écrivit (avec sa femme Muriel Box) et produisit. Jusque là spécialisé dans le mélodrame en costume, le studio Gainsboruough change de direction sous l'influence d'un Sidney Box souhaitant amener une touche plus contemporaine et réaliste au films du studios. Easy Money par son mélange des genres, son humour caustique et surtout son sujet très terre à terre parlant à un public subissant encore les privations de l'immédiat après guerre est donc assez emblématique de ce nouvel élan.

Après une introduction ironique nous présentons le goût des anglais pour les jeux d'argent et plus particulièrement pour le "football pool", le film se divise en quatre sketch nous présentant avec humour les réactions diverses et variées de diverse tranche de la population face à des gains inattendus.

Le premier sketch nous présente une famille anglaise de classe moyenne heureuse et aimante mais qui a tout de même du mal à joindre les deux (le fils et la fille aîné adultes ainsi que la grand mère vivant toujours avec la famille souligne de manière sous-jacente cet aspect économique difficile). Tout change lorsque le père (Jack Warner) découvre avec stupeur que son traditionnel pari est gagnant. L'argent n'est pas même arrivé que la famille se déchire déjà, entre les affaires douteuse du fils, le désaccord entre mari et femme pour déménager au bord de la mère et la grand-mère scandalisée d'avoir des parieurs sous son toit. Gros problème cependant, la fille cadette (jouée par une toute jeune Petula Clark, oui celle de Downtown !)a oubliée de poster le billet gagnant à la loterie nationale... Simple et efficace, le sketch montre assez habilement comment l'argent devient pomme de discorde et réveille les vieilles rancoeurs à l'opposé de la modeste condition de départ qui amenait tout le monde a se serrer les coudes. Les protagonistes très attachants évite au sketch de tourner à la rhétorique démonstrative et l'ensemble se suit avec plaisir.

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Le second sketch est plus ouvertement caustique et distancié, mais aussi plus tragique. Atkins, un modeste employé (Mervyn Johns) découvre qu'il est vainqueur de son dernier pari sportif. La nouvelle a de quoi alarmer cet homme faible et effacé qui ne sait comment gérer la situation sans mettre à mal sa discrétion naturelle. Mervyn Johns est épatant en esprit faible pris entre sa femme qui l'incite à démissionner de son emploi ingrat et son patron qu'il n'ose pas même regarder dans les yeux (et une belle idée de ne signaler sa présence qu'en voix off et vue subjective qui le rend plus imposant encore pour le malheureux héros). La chute est assez cruelle avec un stratagème farfelu qui tourne bien mal.

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Le troisième sketch est le plus luxueux avec son univers du music-hall et lorgne sur le film noir. C'est d'ailleurs à Gilda qu'on pense avec une Greta Gynt se la jouant Rita Hayworth en chanteuse au sex-appeal ravageur et affolante en robe longue fendue. Une vraie femme fatale qui va causer la perte de son amant Joe (Dennis Price futur héros de Noblesse Oblige), employé de loterie qui va truquer la billetterie afin d'avoir les moyens de l'entretenir. Une bonne petite intrigue policière habilement mené et à la chute bien cynique dominée par la prestation de Greta Gynt aussi vénale que sensuelle.

Le dernier sketch est aussi le plus léger et drôle de l'ensemble. Edward "Teddy" Ball (Edward Rigby) est un vieux contrebassiste méprisé par son chef d'orchestre qui ne lui accorde qu'un espace minimale d'expression (son jeu est génialement limité) et ne cesse de le railler. Lorsqu'à son tour il devient riche grâce au "football pool" l'occasion lui sera donné de prendre une éclatante revanche. Le vétéran Edward Rigby est génial en vieux musicien bougon et le sketch est le seul à montrer son héros réellement jouir de sa nouvelle condition. Le second degré est omniprésent avec la bande son envahi par la seule note de contrebasse que Rigby peut (sait ?) jouer nous guidant vers une chute éclatante de drôlerie.

Très bon et homogène (c'est rare) film à sketch donc, une belle réussite dans le genre. 4/6

Comme toujours avec cet éditeur aucun sous-titres mais si on est pas allergique à l'anglais pas de difficulté majeure de compréhension, pas de vocabulaire complexe ni d'accent régional intempestif...
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Rick Blaine
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Re: Le cinéma britannique

Message par Rick Blaine »

Merci pour cette critique, j'avais hésité à le prendre, je crois que je vais le commander la prochaine fois.
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