Douglas Sirk (1897-1987)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Beule
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Message par Beule »

Ballin Mundson a écrit : Si Rock Hudson peut paraître terne dans "écrit sur du vent", ce n'est rien comparé à Lana Turner dans imitation of life (au point de ne pas être franchement crédible dans son personnage de vedette charismatique de la scéne et de l'écran).
Oui. Mais je ne suis pas certain que Turner soir à mettre en cause sur ce coup. De mémoire, si on lit entre les lignes (Sirk on Sirk), on constate, primo que Sirk détestait la comédienne et ce qu'elle représentait, secondo qu'il n'avait pas plus de considération pour son personnage (de fait effectivement haïssable). Il l'aurait dirigée dans le sens du non jeu. Il suffit de visionner Les ensorcelés pour voir ce qu'elle est pourtant capable de fournir dans un registre voisin. Force est de constater que tout ce qui a trait à la famille blanche dans Imitation of life est totalement dénué d'intérêt, et véritablement du niveau du roman de gare auquel le travail du cnéaste est souvent assimilé. Le film est bancal, inégalement interprété (Gavin fait de la figuration, Sandra Dee est à claquer) et pire, très douteux sur le fond. Pourtant l'émotion, artificielle certes, est grandiose. Un mystère...
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Holly Golightly
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Message par Holly Golightly »

J'ai trouvé Lana Turner excellente dans Mirage de la vie :shock: J'étais même très surprise de la qualité de son jeu, car si je la trouve admirable dans Les Ensorcelés, je ne l'ai jamais considérée comme une "bonne" actrice. Et je trouve tous les autres acteurs remarquables dans le Sirk. Je dois avouer que j'adore ce film, je le trouve extraordinaire.
En revanche, j'ai été très déçue par Ecrit sur du vent, que j'ai trouvé assez ennuyeux et pas forcément aussi riche (au niveau du contenu thématique) que Mirage de la vie. Et je trouve aussi que Rock Hudson joue comme un mérou, mais je n'avais d'yeux que pour la divine Lauren... :oops:
- Seriez-vous lâche. Je connais vos griffes puissantes. Accrochez-les dans la vie. Défendez-vous! Effrayez la mort.
- Belle, si j'étais un homme, sans doute je ferais les choses que vous me dites. Mais les pauvres bêtes qui veulent prouver leur amour ne savent que se coucher par terre et mourir.
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Message par Holly Golightly »

Beule a écrit : Le film est bancal, inégalement interprété (Gavin fait de la figuration, Sandra Dee est à claquer) et pire, très douteux sur le fond. Pourtant l'émotion, artificielle certes, est grandiose. Un mystère...
Je ne suis absolument pas d'accord avec le reste de ton message, mais je pense que c'est une simple question de divergence de goût :wink: . En revanche, je ne vois vraiment pas en quoi Mirage de la vie est douteux sur le fond. Est-ce le discours sur le racisme ? Parce que le film est quand même très très clairement anti-raciste (et la franchise avec lequel cette opinion est abordée et développée m'a d'ailleurs beaucoup frappée pour un film de 1959).
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Beule
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Message par Beule »

Holly Golightly a écrit : En revanche, je ne vois vraiment pas en quoi Mirage de la vie est douteux sur le fond. Est-ce le discours sur le racisme ? Parce que le film est quand même très très clairement anti-raciste (et la franchise avec lequel cette opinion est abordée et développée m'a d'ailleurs beaucoup frappée pour un film de 1959).
Anti-raciste ? Plutôt l'expression d'une bonne conscience de la middle class américaine de l'époque. Oui les Noirs sont ici acceptés, ce sont de braves gens, à condition qu'ils restent dans l'ombre, qu'ils n'essaient pas d'échapper à leur condition. Le modèle est celui de la ségrégation larvée plus que de l'intégration. Le comportement du personnage de Turner, qui ne doit sa réussite qu'au dévouement de Juanita Moore, est de bout en bout exemplaire de cet état d'esprit, parfaitement abject par le peu de considération portée à son "amie" (boniche). C'est d'ailleurs ce qui rend les instincts autodestructeurs de la bouillonnante Sarah Jane aussi bouleversants. Et en ce sens, la détresse finale de la jeune fille, son aveu ("C'est de ma faute !), m'apparaissent bien embarrassants.
Ce qui quoi qu'il en soit ne m'empêche pas d'y aller de ma petite larme :wink: .
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Robert McCall
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Message par Robert McCall »

Beule a écrit :
Holly Golightly a écrit : En revanche, je ne vois vraiment pas en quoi Mirage de la vie est douteux sur le fond. Est-ce le discours sur le racisme ? Parce que le film est quand même très très clairement anti-raciste (et la franchise avec lequel cette opinion est abordée et développée m'a d'ailleurs beaucoup frappée pour un film de 1959).
Anti-raciste ? Plutôt l'expression d'une bonne conscience de la middle class américaine de l'époque. Oui les Noirs sont ici acceptés, ce sont de braves gens, à condition qu'ils restent dans l'ombre, qu'ils n'essaient pas d'échapper à leur condition. Le modèle est celui de la ségrégation larvée plus que de l'intégration. Le comportement du personnage de Turner, qui ne doit sa réussite qu'au dévouement de Juanita Moore, est de bout en bout exemplaire de cet état d'esprit, parfaitement abject par le peu de considération portée à son "amie" (boniche).
Je n'ai pas l'impression que Sirk valide forcément cette bonne conscience: il a plutôt l'air de constater cette hypocrisie middle-class dans les scènes où Turner bonne princesse accepte de signer vaguement une pétition pro-civil rights et surtout lorsqu'après toutes ces années de proximité, elle s'aperçoit que Juanita Moore participe à une chorale (de mémoire) : "vous ne me l'avez jamais demandé, madame".
C'est d'ailleurs ce qui rend les instincts autodestructeurs de la bouillonnante Sarah Jane aussi bouleversants. Et en ce sens, la détresse finale de la jeune fille, son aveu ("C'est de ma faute !), m'apparaissent bien embarrassants.
Je trouve ses déchirements intéressants : a-t-elle tort ou raison de vouloir gommer ses origines, de les dépasser? C'est franchement insoluble : elle prend acte, elle s'en prend plein la gueule; elle se ment à elle-même, elle fait souffrir sa mère. Dans tous les cas, elle est condamnée à la détresse.
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Jack Griffin
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Douglas Sirk (1900-1987)

Message par Jack Griffin »

Du 9 novembre au 30 décembre 2005

http://www.cinematheque.fr/fr/nosactivi ... 0000000297

LE TEMPS DE VOIR ET D’AIMER SIRK

Soyons honnêtes : sans Rainer Werner Fassbinder, je n’aurais jamais entendu parler de Douglas Sirk. En découvrant ses films, on voit bien tout ce que Fassbinder lui a “piqué”, mais en voyant ceux de Fassbinder, on a l’impression que tous ceux de Sirk ont quelque chose de fassbindérien !
Sirk doit autant à Fassbinder que Fassbinder à Sirk. Je me demande si le plus beau mélo, ce n’est pas cette histoire d’amour entre deux cinéastes séparés par l’âge et l’océan. On s’attendait un jour à un éloge funèbre de Rainer sur la mort de Douglas, et c’est le contraire qui s’est produit... On dirait qu’après sa carrière hollywoodienne, l’Allemand Sirk est revenu au pays pour tourner quelques dernières images de son fils spirituel... Quoi de plus triste qu’un maître vivant la mort de son disciple ? Disciple au sens où Michel-Ange l’était de Signorelli, rajoutant des muscles à ses élus et damnés. L’élève a sorti le maître de l’ombre, parce que le maître de l’ombre a fait sortir l’élève de la lumière.
Ça ne se démontre pas seulement par Tous les autres s’appellent Ali, le “remake” que Fassbinder a tourné de Tout ce que le ciel permet... Si ce film semble le plus sexuel et le plus cruel de Sirk, c’est peut-être parce que Fassbinder en a donné directement sa vision, déformée bien sûr... Chez ce dernier, le jardinier n’est plus seulement un Américain un peu rustre qui tombe amoureux d’une veuve mûre, mais un Arabe ouvrier qui se marre avec ses potes quand on prend son grand amour pour sa grand-mère. D’ailleurs, celle-ci n’a plus une dizaine d’années de plus que lui, mais vingt-cinq ; ses enfants ne se contentent pas de lui acheter un téléviseur pour la consoler, mais l’un d’eux envoie un coup de pied dedans lorsqu’elle leur apprend qu’elle va épouser un type pareil... Aux différences d’âge et de milieu social, Rainer rajoute le racisme, pêché peut-être dans Imitation of Life (double hommage). Pourtant, c’est Sirk qui a le dernier mot. À la fin, si le jeune premier est alité, ce n’est pas parce qu’il s’est tapé un ulcère au boulot, mais parce qu’il est tombé de haut alors qu’il appelait dans le vide sa bourgeoise bien-aimée... Un exemple entre mille de la cruauté sirkienne. Il y en a dans tous ses mélos qui mélangent, d’une façon criante (et quelquefois criarde), tragédie antique et romanphoto. Sirk, c’est Nous deux par Euripide ! Ça finit bien, mais à quel prix ! Les rares happys ends chez Sirk sonnent comme des glas. Pour lui, il n’y avait rien de plus triste qu’une happy end...
L’imprévisibilité de Sirk est peut-être le trait le plus fort de son style. Et depuis le début ! Dans sa période allemande, alors qu’il s’appelait encore Detlef Sierck, Douglas Sirk était le roi pour multiplier les fausses pistes et inventer des histoires aberrantes. Quand La Habanera commence, on peut penser à un petit film exotique des années 30 avec corridas et espagnolades. La brusquerie raffinée de Sirk accélère les choses : en un baiser, Zarah Leander, la Suédoise en mal de Sud, abandonne sa tante qui rentre au pays et se donne à Don Pedro au puissant seigneur de l’île. Dix ans après, opprimée par son mari, elle se morfond aux Caraïbes. Elle est nostalgique de sa Suède et promet en chansons à son fils de lui faire bientôt découvrir son pays, et en attendant joue avec lui à la luge sur le tapis... Apologie de la neige aux Canaries ! Survient alors l’amour de jeunesse de Zarah, un chercheur qui vient pour enquêter sur la fièvre qui décime le pays du soleil et surtout pour ramener la belle. Don Pedro est jaloux et arrête le chercheur qui vient de trouver l’antidote au mal. Soudain, il tombe foudroyé par la fièvre : on pourrait le sauver grâce à l’antidote, mais il vient de le faire saisir et détruire. “ Il a creusé sa propre tombe ” dit le jeune savant Suédois.
Pas d’ironie ou alors l’ironie du sort. Le Kyle d’Écrit sur du vent veut tuer son meilleur ami parce qu’il est persuadé que sa femme l’a trompé avec lui puisque lui est stérile : il la frappe, ce qui lui fait perdre l’enfant, mais c’était bien de lui qu’elle était enceinte (sa stérilité était une erreur médicale)... La Madame Phillips du Secret magnifique, devenue aveugle, ne peut pas reconnaître chez celui qu’elle aime le responsable de la mort de son mari... L’Ernst du Temps d’aimer et le temps de mourir tue un autre SS qui voulait exécuter des prisonniers : il les libère mais l’un d’eux le tue à son tour. Il s’écroule mort près d’une rivière qui emporte dans son courant la lettre de sa femme lui annonçant qu’elle va avoir un bébé...
Manques de pot ! Malencontreux hasards... Avalanches de catastrophes, scoumounes en cascades... Et aussi substitutions de forces, fatalités piégées, retournements de situations, volte-faces du destin, taquineries divines, foutages de gueule du fatum... Bref, grande cruauté de Dieu et compassion pour tous les hommes. La caméra de Sirk cherche à s’insinuer partout où elle va surprendre le plus de subtilités : elle gêne les acteurs, ou plus exactement les personnages. Si on la chasse par la porte, elle revient par la fenêtre. Ah ! Les fenêtres ! C’est chez Sirk homme chez Fassbinder une magnifique obsession. Tout est vu à travers une vitre. On croit toucher la réalité et c’est soi qu’on voit se refléter, c’est contre son reflet qu’on se casse le nez. Dans Summer Storm, George Sanders envoie son violon dans le miroir quand il surprend celui-ci en train de le refléter. La réalité visiblement inaccessible derrière une vitre : c’est peut-être ça, le cinéma... Fassbinder le virtuose a appliqué cette leçon à la lettre dans tous ses films. Une vitre est aussi un miroir. Sirk, mystique du miroir, disait qu’une glace montrait l’envers de l’homme. C’est cette distance qui empêche le spectateur de s’incarner bêtement dans le personnage, comme dans les oeuvres d’art naturalistes.
Sirk ne faisait pas de différence entre un film d’action et d’émotions : “ l’émotion, c’est une action à l’intérieur d’une personne”. Il l’a dit : en arrivant en Amérique, la façon dont on appelait les films lui a donné une indication de ce qu’il avait à faire. Movies motions pictures : images émouvantes mises en mouvement... Pour Sirk, la caméra est
son double, elle doit être une jumelle de l’artiste... Elle passe à travers les portes, les rampes d’escaliers, les cannelures des chaises, derrière les paravents, les stores striant les visages... Rien ne l’arrête sauf un miroir. Un animal qui se voit dans un miroir ne comprend pas que c’est lui, mais chez Sirk les hommes sont pareils : chacun pense qu’il est un autre, et il a raison !... Les crises d’identité sont fréquentes : quelqu’un fait quelque chose à la place d’un autre, ou bien quelqu’un devient quelqu’un d’autre grâce à un autre.
Voilà pourquoi les transformations deviennent vite des rédemptions. Le Colonel “ Killer ” Hess de Battle Hymn a bombardé une école en Corée (37 enfants morts) : il va devenir une autre sorte de héros en créant un orphelinat. Dans All I Desire, l’actrice prétentieuse Murdoch, après avoir abandonné les siens, renonce à sa carrière médiocre et reprend sa vie de famille enrichie... On pourrait multiplier les exemples de rédemption
chez Sirk jusqu’au sommet, le célèbre Hitler’s Madman avec John Carradine dans le rôle d’Heydrich qui, après avoir terrorisé la Bohème, tombe sous les balles des maquisards.
Attention ! Tout est piégé chez Sirk, même les rédemptions... Heydrich sur son lit de mort a mal. On croit qu’il va demander pardon, mais non, au contraire, il s’est trouvé trop “faible”, il n’est pas dupe de l’illusion nazie, et prophétise à Himmler que les SS vont perdre la guerre. Himmler mentira au Führer ensuite au téléphone en lui faisant croire qu’Heydrich est mort en y croyant encore. Sirk arrive à émouvoir le spectateur sur ce
monstre qu’on a vu pendant le film pousser une jeune Tchèque à se jeter par la fenêtre, ou bien interrompre un curé en pleine procession, le gifler, s’essuyer les bottes avec son linge sacré, et pour finir le tuer... Comment Sirk parvient-il à rajouter dans une telle “ fiction de haine ” (aujourd’hui on dirait plutôt un docu-drama), une empathie pareille ? Parce que le diabolique Reichprotektor apparaît le plus lucide de tous... Heydrich, c’est l’athée complet qui veut vivre et non pas mourir pour une cause. C’est là que réside la véritable charge contre le nazisme : dans ce désaveu d’Hitler (même pour de mauvaises raisons), et dans cet amour de vie de la part de quelqu’un qui aime aussi la mort. En ce sens, le Heydrich de
Sirk est un sacrilège ambulant et par là même le seul vrai mystique, celui qui se bat contre toute fausse religion, que ce soit la grotesque mixture en Bohème de paganisme et de christianisme ou bien l’autre, en Allemagne, qui mélange aussi pitoyablement nationalisme et socialisme... Au moment où il meurt, Heydrich n’est pas humain parce qu’il souffre, mais parce qu’il reste lui-même, c’est-à-dire un homme sans foi ni loi. Un
fou, mais pas d’Hitler, un fou de vivre...
Pour faire ça, il faut avoir une vision pas très catholique de la culpabilité… Pourquoi ne pas le dire ? Une vision protestante... Dans toutes les disciplines, les grands artistes protestants peuvent être d’un lyrisme inégalé (Strindberg, Pierre Loti, Lester Young, D.H. Lawrence, Van Gogh, Nietzsche bien sûr...). Le christianisme de Sirk est celui d’un protestant absolument pas américain, mais nordique et germanique. D’où cette obsession de réparer les choses qui vont mal... Réparer la vie ! Les héros des films de Sirk sont comme des mécaniciens chargés de démonter une voiture pour la réparer, ils s’en mettent plein les mains. Ils y arrivent quelquefois, mais jamais ils ne parviennent à la remonter...
Ça commence par des pluies de diamants qui remplissent l’écran, et ça se termine par des avions en feu qui se fracassent contre des pylônes à damiers. Entre temps, il y a eu beaucoup de froncements de sourcils, de cris coincés dans la gorge, de gifles et de serrements dans les bras... Le tout dans de superbes couleurs bleutées et toutes sortes de jaunes, sauf d’oeuf... Comme chez Bernstein lorsqu’il montre la nunucherie des riches
(d’ailleurs, Bernstein n’a pas écrit un Mélo pour rien), on assiste chez Sirk aux conséquences désastreuses de la bêtise et de l’insensibilité de la bourgeoisie, de sa lenteur à réagir et de ses préjugés de tous ordres. L’oeuvre de Sirk est une attaque à l’acide sulfurique du nouveau continent qui l’accueillait. Aucun américain n’aurait pu, dans le cadre d’Hollywood, écorcher vive cette Amérique des années 40 et 50. Qui oserait, surtout aujourd’hui ! montrer un aviateur noir américain pleurant contre sa carlingue au retour d’une “mission” où il vient de mitrailler des enfants ?
Un Sirk, c’est tellement tiré par les cheveux que toute la perruque reste dans la main...
Un jeune cynique tombe amoureux de la veuve de celui qui est mort par sa faute, le plus fort c’est que c’est réciproque ! Et comme si ça ne suffisait pas, il est également responsable d’un accident qui rend cette pauvre femme aveugle, avant de reprendre ses études de chirurgie pour être capable de l’opérer lui-même à crâne ouvert (Le Secret magnifique). Un pilote d’avion qui fait un numéro de foire autour de pylônes forme un
ménage à trois avec sa femme et son mécanicien jusqu’au jour où un journaliste veut devenir le quatrième larron. Chacun à sa façon pousse le pilote à monter dans un avion défectueux jusqu’à ce qu’il se crashe sous les yeux de son fils coincé dans un avion de manège (La Ronde de l’aube). Charmant ! Afin de protéger son amant, une chanteuse de cabaret s’accuse d’avoir falsifié un chèque et est condamnée à sept ans de bagne en Australie. Au retour, elle annonce à cet amant qu’elle ne l’aime plus. Ça se passe la veille de son mariage à lui, et il se suicide. L’ex-prisonnière supplie alors à la porte du bagne qu’on la réenferme, car maintenant, elle a une bonne raison d’être coupable de quelque chose et punie pour ça (Paramatta, bagne de femmes).
Ça vous va ou je continue ? On pourrait raconter les films de Sirk pendant des heures, et à force ils pourraient devenir drôles, tellement ils sont énormes. Malentendus, quiproquos, révélations, saletés morales qui pourrait faire penser à du vaudeville, mais tragique.
Le “baroquisme” de Sirk n’est pas seulement dans son art de filmer, mais aussi dans la variété des thèmes et des époques. Il tape aussi bien chez les Irlandais que chez les Apaches, les jésuites, les aviateurs, les soldats américains ou nazis, ou bien les Huns ! Le Paris de la Restauration comme l’Arizona du Far-West ne lui font pas peur... Ni les figures historiques Cochise, Attila, Vidocq, Heydrich, dont il tire les portraits comme personne.
Le Vidocq de Sirk existe plus fort que le “vrai”, et même que le faux qui inspira Balzac... Quand Sirk est adaptateur, il l’est au sens électrique : il charge l’oeuvre originale d’un nouveau courant! Faulkner trouvait La Ronde de l’aube mieux que son Pylon. Et pour bien montrer que Sirk avait eu raison de corriger son titre, Erich Maria Remarque joue un rôle dans son Le Temps de vivre et le Temps de mourir. Les personnages qui paraissent les plus pourris sont les plus purs : Marylee dans Écrit sur du vent, Sarah Jane dans Imitation of Life, LaVerne dans La Ronde de l’aube. Les jeunes délurées sont souvent les anges gardiens de ces femmes mûres pleines de rêves et d’égoïsme interprétées par Lana Turner, Jane Wyman ou Barbara Stanwyk... Séparées rêveuses ou veuves peureuses, ce sont surtout des femmes fortes et “artistes”, confrontées à de vrais sentiments mais continuant à affronter la vie comme dans un théâtre. Quant aux hommes, c’est à eux que revient la palme de l’ambiguïté. Rntre la force et la faiblesse, leur coeur balance tellement qu’il finit par se décrocher... Robert Stack dans La Ronde de l’aube et Écrit sur du vent, mais surtout l’acteur sirkien par excellence : Rock Hudson !
Dans presque tous ses films, Hudson est là. Fassbinder disait que Sirk filmait Hudson comme un simple figurant... Comment prendre un acteur médiocre et en faire le meilleur du monde ? Quelles que soient les situations incroyables dans lesquelles le film le fourre, Rock Hudson n’est jamais ridicule parce que Sirk le prend au sérieux. Qu’il incarne un journaliste, un jardinier, un aviateur, ou un Peau-Rouge, Rock Hudson est toujours, finalement, une sorte d’amant de Lady Chatterley... Une armoire à glace dans laquelle les dames aiment à se refléter jusqu’à se vomir... Il faudrait écrire un livre sur chaque film de Sirk pour espérer en venir à bout.Quelques lignes ne suffisent pas à en épuiser les richesses d’interprétations à tous les niveaux. D’ailleurs, Fassbinder dans son fameux texte sur les six films principaux de Sirk ne se prive pas d’en dire le plus possible. Il suffit de lire le texte de Godard sur le maître du mélo, plein de jeux de mots et de dérision, et celui de Fassbinder, bourré de sensibilité et de générosité, pour mesurer tout ce qui les sépare rtistiquement...O.K, on ne fait pas de grand art avec de bons sentiments, mais ici il ne s’agit pas de bons mais de beaux sentiments. Chaque malheur (la mort, la cécité, la fuite, le coma) se résout dans la plus grande noblesse.
Il a fallu beaucoup d’amour à Sirk pour faire ses films, mais il en faut beaucoup au spectateur pour les recevoir. Ça prend du temps de voir et d’aimer Douglas Sirk... Dire que je vais découvrir tous ceux qui me hantent depuis si longtemps !... Taza, fils de Cochise... Le Signe du païen... La Première Légion... Le Sous-marin mystérieux... Films
aux titres étranges exprès... Je me suis longtemps consolé en sachant que Rainer luimême en avait vus très peu...
Le plus beau texte sur Sirk, c’est Fassbinder qui l’a écrit, on s’en doute. Mais le plus beau texte sur Fassbinder, ce n’est ni Schuhl ni moi qui l’avons écrit, c’est Sirk. Voilà pourquoi, pour finir, je leur laisse la parole, en les mettant face à face comme deux miroirs qui se reflètent l’un l’autre :“J’ai vu un bien trop petit nombre de films de Sirk. Je voudrais les avoir tous vus, tous ses trente-neuf films. Peut-être serais-je alors allé plus loin en moi-même, plus loin dans ma vie, plus loin avec mes amis. J’ai vu six films de Douglas Sirk au nombre desquels se trouvent les plus beaux films du monde.” “Rainer Werner Fassbinder est mort. Je perds aujourd’hui un ami, et l’Allemagne un génie. Moi, vieil homme, je n’aurais jamais cru voir ce triste jour. Les films de Fassbinder sont longtemps restés objets de controverse, et le resteront encore, je l’espère, car c’est
ce qui est soumis à la contradiction qui aura la force de durer.”

Marc-Édouard Nabe
Robert McCall
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Message par Robert McCall »

La Ronde de l'Aube (The tarnished angels).

Grand titre en français et en anglais, grand film. Sirk trouve un bô sujet et un bô cadre, celui d'un genre de cirque aérien pendant la crise des années 30, avec un parfum d'On achève bien les chevaux version coucou et où on ferait n'importe quoi pour survivre. Sirk distille ses signes habituels entre fatalisme et ironie - un fêtard au masque de mort pendant Mardi Gras, les miroirs déformants, les cadres dans les cadres, le manège d'avions pour gosses -, profite du scope pour nous en mettre plein la vue pendant les vols. Dorothy Malone emporte le morceau pendant tout le film : tout le monde la veut et nous aussi; et comme Ecrit sur le vent, Elle et Stack (ancêtre de Sean Penn) sont les personnages les plus intéressants. Rock Hudson, un peu écrasé, a pourtant son heure de gloire vers le monologue de fin avec le rédac'chef, où il gueule contre le cynisme ambiant, peut-être sa meilleure perf' chez Sirk. Grand film à l'histoire simple mais implacable, aux héros trop rentrés, courant après leur rêve. L'imagerie d'anges déchus est particulièrement bien trouvée. :D

Le Secret Magnifique (Magnificent Obsession).

Hudson, riche oisif, fait une connerie qui coûte à Jane Wyman (sans âge) et se transforme en bon samaritain auprès d'un peintre, personnage fusion de Dieu et d'Obi-Wan Kenobi. Le mélo est ici en pilotage automatique, avec critique du matérialisme : la réalisation de Sirk a l'air d'être un peu plus fonctionnelle, ce qui n'empêche pas une magnifique scène avec Wyman dans le noir et le geste dérisoire de sa belle-fille qui allume les lampes alors que... bon, ben comme pour la biche qui me gênait un peu dans Tout ce que le ciel permet, ici, c'est le peintre (je suis peintre, la preuve : j'ai une pipe) venu d'ailleurs genre Jiminy Criquet qui m'horripile un peu. Un peu trop de sirop, et d'ailleurs un discours familier de réalisation de soi comme pour Tout que le ciel... (le personnage de Wyman parlant même d'un jardinier alors que le film est antérieur). :!:
Nestor Almendros
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Message par Nestor Almendros »

MIRAGE DE LA VIE de Douglas Sirk (Cinéma de Minuit)

Je continue de découvrir certaines oeuvres phares de Sirk. Et au fil des visionnages je reste quand même un peu déçu. Ici, je suis gêné par cette accumulation de pathos, qui aujourd'hui sonne aussi très cliché (la fille qui tombe amoureuse de l'ami de sa mère...). Même si je n'accroche pas sur certains détails le film reste intéressant à suivre, bien qu'un peu long. Et j'avoue ne pas avoir été ému par l'histoire de Sarah Jane et de sa mère noire (sauf quand la fille murmure "au revoir" à sa mère vers la fin - très beau moment). Je crois aussi que ce qui me gêne un peu c'est la représentation de cette société américaine, toujours riche (le photographe de plage qui devient pdg d'une marque de bière... il fallait oser!), toujours très propre sur elle (même si c'est une apparence). Je suis aussi circonspect devant le final, et ce pathos (religieux cette fois)...
Autre détail: la fille de Lana Turner est blonde, pure, gentille, tandis que Sarah Jane est brune, et un peu méchante... Ils sont terribles à Hollywood! Le personnage de Susie adolescente m'a aussi exaspéré, sauf vers la fin où elle murit comme par hasard...

Bon, j'arrête là les critiques, c'est facile de se plaindre. J'ai quand même un peu apprecié. Mais j'ai plutôt préféré TOUT CE QUE LE CIEL PERMET...

(et en effet le recadrage et le master correct mais sans plus, c'est dommage...)
Miss Nobody a écrit :Je viens de regarder Mirage de la vie enregistré hier, et personnellement j'ai trouvé ce film magnifique. Lana Turner se revele etre une grande actrice, autant dans le facteur sonne toujours deux fois elle manquait un (petit) peu de charisme (quoique cela ne m'a pas réellement choqué, j'adore ce film), autant là, je dit WhaoOo! Les autres acteurs sont également très bons, même les deux petites filles (generalement les enfants dans les films m'agacent). L'histoire est très belle, un peu larmoyante par moment, mais jamais de trop, et elle expose assez bien la triste réalité des années 50 : les actrices choisies pour leur physique qui doivent coucher pour reussir, le racisme, et la misère affective d'une fille et d'une mère abandonné. Un bon moment: Je dit bravo et je met 8/10. :)

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Private Joker a écrit :Je viens de le redécouvrir et la magie de cette oeuvre est toujours intacte... Un sommet dans l'oeuvre de Douglas Sirk qui se place, pour moi, juste derrière La Ronde de l'Aube. :wink:
Ratatouille a écrit :Bon bah voilà : tout pareil. Comme j'ai pu le dire dans un autre topic, j'ai été ébloui de bout en bout par ce film, par la complexité des rapports mère/fille, par la diversité des sujets abordés (ceux qu'a cités Miss Nobody)...difficile de retenir ses larmes pendant le final (SPOILER les dernières paroles d'Annie, le gospel pendant l'enterrement).
S'il n'y avait pas eu le Crocro, ce serait mon film du mois.
takezo a écrit :La voix déchirante de Mahalia Jackson m'a arraché une grosse larme. Plus que la complexité des rapports mère/fille, j'y ai vu la complexité des rapports maitre/esclave.
Tavernier et Coursoudon reproche à Sirk de condamner la fille métisse, qui se révolte, et d'encenser la mère noire qui est dans le renoncement. Je ne partage pas du tout leur point de vue. Sirk montre habilement la solitude profonde qu’impose sa condition de métisse. Elle n’est pas dans la révolte, mais dans la névrose. Pour être reconnu du monde des blancs, elle doit nier ce qu’elle est, arracher une partie d’elle-même, renoncer aux sentiments qu’elle a pour sa mère. Quoi de plus douloureux ? Très beau film.
Max Schreck
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Message par Max Schreck »

Robert McCall a écrit :Le Secret Magnifique (Magnificent Obsession).

Hudson, riche oisif, fait une connerie qui coûte à Jane Wyman (sans âge) et se transforme en bon samaritain auprès d'un peintre, personnage fusion de Dieu et d'Obi-Wan Kenobi. Le mélo est ici en pilotage automatique, avec critique du matérialisme : la réalisation de Sirk a l'air d'être un peu plus fonctionnelle, ce qui n'empêche pas une magnifique scène avec Wyman dans le noir et le geste dérisoire de sa belle-fille qui allume les lampes alors que... bon, ben comme pour la biche qui me gênait un peu dans Tout ce que le ciel permet, ici, c'est le peintre (je suis peintre, la preuve : j'ai une pipe) venu d'ailleurs genre Jiminy Criquet qui m'horripile un peu. Un peu trop de sirop, et d'ailleurs un discours familier de réalisation de soi comme pour Tout que le ciel... (le personnage de Wyman parlant même d'un jardinier alors que le film est antérieur). :!:
J'aime bien ce résumé.

J'avoue que le premier quart d'heure m'a un peu fait peur (même les couleurs semblent sortir d'une page d'un Nous deux millesimé 50's), et puis je me suis laissé prendre au jeu. Je me suis accroché en particulier à toute la dimension mystique du récit, surprenante et traitée sans détours. Le scénario est d'une inventivité constante, multipliant les rebondissements, les révélations. On ne sait jamais où tout ça va nous emmener. L'histoire d'amour est vraiment très belle et émouvante. Rock Hudson et Jane Wymann m'ont véritablement emporté et j'espérais leur bonheur.

La mise en scène de Sirk est d'une sagesse exemplaire, créant sans efforts des moments de pure fascination. Mention spéciale à la musique, qui est bien plus qu'un simple tapis sonore comme c'est souvent le cas dans les productions hollywoodiennes. La musique soutient parfaitement les émotions et enrichit réellement la lecture des scènes.
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Jack Griffin
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Message par Jack Griffin »

Taza, fils de cochise (1954) (copie en mauvaise état, virant dans les teintes rouges)

Image

Incursion de Sirk dans le western, toujours épaulé par un Rock Hudson, ici maquillé. Le film adopte un point de vue plutôt original puisque se plaçant intégralement du côté des indiens, approfondissant leur psychologie et décrivant leur mode de vie sans que le qualificatif kitsh ne vienne à l'eprit. L'autre, avec qui l'on doit malgré tout composer, est donc l'homme blanc.
Taza, joué par Hudson, est un personnage idéaliste essayant de réconcilier deux mondes, celui des blancs et des indiens et qui se verra opposer à des difficultés de plus en plus importantes lor de son entreprise impossible (il porte à un moment l'uniforme du soldat et de l'indien en même temps). Une sorte de variation en mode mineur de Tout ce que le ciel permet sans sa composante amoureuse.
La dimension historique, trompeuse, donne une image idéalisé des réserves indiennes un peu génante.
George Bailey
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Message par George Bailey »

Je continue ma découverte de Sirk grâce à la cinémathèque :
Après la ronde de l'aube et tout ce que le ciel permet, je viens de voir demain est un autre jour et j'ai beaucoup aimé :
Le film alterne comédie et mélo tout en y injectant une satire de la famille bourgeoise américaine et en s'attaquant à la monotonie d'une vie de famille.
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Jack Griffin
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Message par Jack Griffin »

Meet me at the fair

Comédie musicale, principalement chanté, où l'on suit un sympathique charlatan (Dan Dailey), vendeur ambulant de potions tonifiantes, qui un beau jour prend sous son aile un orphelin évadé d'un centre de détention. Le film vaut principalement pour sa reconstitution d'une petite ville américaine du début du siècle, dont les détails peuvent relever l'intérêt. Inutile de chercher du côté de l'histoire, insipide au possible ou de la mise en scène, désespérément plate même lors des passages musicaux. Un calvaire.
On y croise quand même le joli minois de Diana Lynn et un tout jeune Scatman Crothers avec quelques cheveux.

Le Temps d'aimer et le temps de mourir

Le temps d’une permission, un jeune soldat allemand de retour dans sa ville natale, tombe amoureux d’une amie d’enfance.
L’histoire d’amour, simple et banale, se veut avant tout universelle et l’intelligence de traitement ainsi que la sensibilité dont Sirk fait preuve ont réussit à m’impliquer totalement. Tout concoure à nous rendre perceptible cette notion du temps présente dans le titre et du même coup au caractère fugitif des choses et des sentiments. Les scènes sont amples, les détails sont précis et crédibles et l’interprétation des acteurs se révèle excellente. Que demander de plus à ce drame bouleversant qui oscille constamment entre rêve et cauchemar, témoigne des absurdités et des cruautés du monde en maniant ambiguité et ironie.

Mirage de la vie

Là aussi grand film sur les illusions et la réalisation impossible de nos fantasmes lorsqu’il s’agit de composer avec l’autre. Les histoires de tous les personnages parlent de ça et le film les entrecroise avec brio. Sirk maîtrise totalement son sujet et sa complexité jouant du symbolisme dans le générique ou dans les paroles d’une chanson (I’m empty, empty, empty) tout en gardant une grande finesse dans la psychologie des personnages. La violence psychologique est très grande et le cinéaste s’épanche donc beaucoup et longtemps dans une fin très solennelle, où un des personnages réimpose sa présence comme pour compenser sa relative absence dans le reste du film. A cela s’ajoute une réalisation faisant parfois preuve d’une étonnante modernité (
Spoiler (cliquez pour afficher)
tabassage de Sarah Jane
)…Enormément de belles choses. Chef d’œuvre.

Ecrit sur du vent / La ronde de l’aube

Deux films où l’on retrouve le même trio d’acteur (Stak, Dorothy Malone, Rock Hudson), la même structure dans le générique et un récit mêlant chassé-croisé amoureux et drame.
Ecrit sur du vent adopte un lyrisme plus appuyé qui happe littéralement lors de son ouverture. Beaucoup de moments fort mais aussi quelques creux et baisses d’attention pour ma part dans une atmosphère assez étouffante.
La ronde l’aube est moins exalté mais plus séduisant. L’atmosphère de fête enrobe le film de manière interessante. Une expression des sentiments qui se jouerait et se symboliserait à la porte à côté, dans les rues ou se justifierait dans des tours de manèges.
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Message par Max Schreck »

Imitation of life (Mirages de la vie), Doug Sirk, 1959
Mon enregistrement date d'un paquet d'années et est également extrait d'un cycle Sirk du ciné de minuit. Ça devait être exactement la même copie diffusée récemment puisque plein écran et pleine de scratches. Rien néanmoins qui m'ait empêché d'apprécier ce beau film qui se montre en réalité vraiment sévère avec ses personnages. Personne ne semblant avoir réellement trouvé sa place et son accomplissement. Sirk traite avec pas mal d'audaces de certaines réalités sociales de son temps, en particulier le rôle accordé aux femmes. Photo et mise en scène réservent de superbes moments, et certains passages sont vraiment déchirants.
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Monsieur X
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Message par Monsieur X »

Je suis en train de me faire l'intégrale Sirk... Merci le Libre Pass.


SLEEP, MY LOVE (L'Homme aux lunettes d'écaille) (1948)
Avec Claudette Colbert, Robert Cummings, Don Ameche.
Une jeune femme richissime est la victime d’une machination ourdie par son époux..

Un thriller virevoltant qui fait souvent penser à Hitchcock, avec son héros idéalement trop soupconneux, qui découvre une étrange machination à base de "vraies-fausses" hallucinations, et qui va tout faire pour sauver la victime atteinte de somnanbulisme parce que celle-ci avait bu du chocolat chaud servi par son mari qui y avait versé des somnifères. Très plaisant. 5/6


SLIGHTLY FRENCH (1948)
Avec Dorothy Lamour, Don Ameche, Janis Carter, Willard Parker.
Un metteur en scène tyrannique est renvoyé par sa production pour avoir poussé à bout son actrice principale. Ayant absolument besoin d’une vedette française pour retrouver son travail, il fait passer pour telle une danseuse qu’il découvre dans une fête foraine.

Comédie légère et pétillante sur un triangle amoureux entre un metteur en scène, sa nouvelle star et le producteur. Les scènes musicales sont très jolies. Un petit enchantement, très ravissant et souvent drôle. 5/6


CAPTAIN LIGHTFOOT (Capitaine Mystère)
Les aventures d’un capitaine qui lutta, dans la première moitié du XIXe siècle, pour l’indépendance de l’Irlande.

Film d'aventures à l'ancienne, typique du pur cinoche de quartier, pas transcendant mais assez divertissant. En tout cas, je sais maintenant quelle est l'origine de "Thunderbolt et Lightfoot".
3/6
Monsieur X
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Message par Monsieur X »

WEEK-END WITH FATHER (1951)
Avec Van Heflin et Patricia Neal.
Un homme et une femme, tous deux veufs, se rencontrent en emmenant leurs enfants en colonie de vacances. Ils tombent amoureux mais ces derniers s'opposent à leur union.

THE LADY PAYS OFF (1951)
Avec la sublime Linda Darnell, déja remarquée dans Chaines Conjugales
Une femme qui vient d’être élue « professeur de l’année » joue et perd une somme importante au casino. Le directeur menace de tout révéler à la presse à moins qu’elle n’accepte de devenir le précepteur de sa fille.

Voilà deux comédies très charmantes, très enlevées, des oeuvres sans doute mineures dans la carrière de Sirk, mais qui possèdent un attrait irrésistible pour la très bonne humeur qu'elles dégagent, l'air de rien... Qu'il s'agisse de relations entre couples, ou entre parents et enfants, Douglas Sirk sait toujours faire vivre ses personnages, et chaque geste ou chaque réplique sonne vrai, parce que tout est sincère, sans aucune impression d'artifice. Donc on se marre franchement, sans même se forcer, d'autant plus que Douglas Sirk laisse déjà transparaitre son goût pour les situations cocasses et rocambolesques, le tout avec un rythme enjoué et une absence de prétention qui font vraiment plaisir.

Allez, 5/6 pour les deux !
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