Anthony Mann (1906-1967)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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phylute
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Message par phylute »

Je n'avais pas non plus participé à ce top... difficile classement à faire !

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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Cinetudes a écrit :Ben moi justement je suis resté à la porte de ce film qui m'a profondément ennuyé du début jusqu'a la fin et si certaines scènes avec Joaquin Phoenix sont vraiment bien, ni la plastique, ni le souffle épique ne m'ont parus dignes d'interêt et pourtant j'étais vraiment motivé de retrouver enfin du Peplum au cinéma (et je ne parles même pas de sequences profondément ridicules dans l'arêne).

Mais on n'est pas la pour faire le procés de Gladiator mais pour ma part pour encenser le superbe film de Mann qui fait tout dans la finesse et je le repête la poursuite dans la forêt de pins est l'une des cascades les plus impressionnantes dont je me souvienne au cinéma.

Stefan
La fameuse poursuite est superbe mais je trouve que l'ensemble du film souffre lui d'un manque de souffle justement (contrairement au film de Scott au moins dans sa première partie, car moi aussi les scènes de combats m'ont agacé)
Cinetudes
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Message par Cinetudes »

Je reconnais qu'effectivement le début du film de Mann est assez empesé mais je trouve que cela colle à la thématique du film même si effectivement cela est moins plaisant pour le spectateur.

J'ai surtout eu des problèmes avec Gladiator concernant la modernisation de la figure du héros classique de Peplum encore plus monolithique et manichéen que dans les plus z des peplums italiens, incarné par un acteur qui en rajoute dans le sens de l'homme "parfait" (mais alors sans aucun aucun défaut) qui lutte pour reconquérir la place qui aurait du être la sienne.

Stefan
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L'étranger...
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Re: THE FALL OF THE ROMAN EMPIRE

Message par L'étranger... »

francis moury a écrit :je préfère LA CHUTE DE L'EMPIRE ROMAIN qui est un des meilleurs péplums américains réalisés au CID que je trouve en revanche très ennuyeux et convenu en dépit de ses honnêtes qualités plastiques (normal puisque le cinéaste est un bon technicien) même s'il nous renvoie à ce cher Pierre Corneille que nous avons tant étudié étant adolescent dans nos lycées. Le scénario du péplum de Mann comme son traitement sont très riches : c'est un film-somme et un film matriciel à la fois...
C'est exactement ce que je pense de ces deux films, mais au moins Francis le dit mieux que je ne l'aurais fait! :wink:
En gros "La chute..." manque d'un héro charismatique mais le film reste grandiose. Alors que pour "Le Cid", j'adore Charlton Heston (acteur qui me déçoit rarement) mais j'ai du mal à rentrer dans le film...
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Tom Peeping
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Message par Tom Peeping »

Pour les décors, la composition des images et la musique, le film de Mann enterre tout de même Gladiator, qui l'a d'ailleurs honteusement plagié. Et les inexactitudes historiques de Gladiator me sont restées en travers de la gorge.
Dans La Chute... , la scène des funérailles sous la neige est ce que le peplum classique a produit de plus réussi, non ? Un film lent oui, mais d'une lenteur mélancolique qui correspond bien à son thème. Mon peplum préféré.
... and Barbara Stanwyck feels the same way !

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Lord Henry
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Message par Lord Henry »

Il ne me paraît pas hérétique de retirer plus de plaisir et d'émotion du lyrisme et de l'inspiration plastique de La Chute de l'Empire Romain - fussent-elles passées sous les fourches caudines Bronstoniennes - que de l'académisme un soupçon hiératique du Ben-Hur façon Wyler.

Même si le second reste, et restera, l'indéboulonnable classique que l'on sait.
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Lord Henry a écrit :Il ne me paraît pas hérétique de retirer plus de plaisir et d'émotion du lyrisme et de l'inspiration plastique de La Chute de l'Empire Romain - fussent-elles passées sous les fourches caudines Bronstoniennes - que de l'académisme un soupçon hiératique du Ben-Hur façon Wyler.

Même si le second reste, et restera, l'indéboulonnable classique que l'on sait.
Et pourtant, hiératique est un adjectif que j'aurais attribué au film de Mann en l'occurence.

Mais j'en attendais peut-être autre chose, un film spectaculaire justement. Vous me donnez envie de lui redonner une chance d'un seul coup.
Cinetudes
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Message par Cinetudes »

Je suis d'accord avec vous my Lord !!

J'aime bien Ben-Hur mais pour causer gras, il à un sacré balais dans le cul le Charlton :lol: .

Et il est vrai que ce film reste un monument de grand spectacle un peu paralysé par l'introduction de motifs religieux et une certaine mièvrerie mais quelle gueule quand même ce Charlton. Le scénario est parfois surprenant de finesse à côté de moments plus pachydermiques.

Et la course de chars, quel moment !! Je peux vous assurer que grace au superbe DVD et à mon projecteur c'est un moment immense qui se soit d'être vécu sur grand écran.

Stefan
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francis moury
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Oui + commentaire comparatif

Message par francis moury »

Lord Henry a écrit :Il ne me paraît pas hérétique de retirer plus de plaisir et d'émotion du lyrisme et de l'inspiration plastique de La Chute de l'Empire Romain - fussent-elles passées sous les fourches caudines Bronstoniennes - que de l'académisme un soupçon hiératique du Ben-Hur façon Wyler.

Même si le second reste, et restera, l'indéboulonnable classique que l'on sait.
Beau débat sur des beaux films dans la bonne tradition de ce site. Je peux dire de ce jugement de Lord Henry ce que L'étranger avait dit du mien : il me convient pleinement même si Cinétudes - Stefan a raison de refaire un peu peser la balance en faveur du Wyler bien sûr très beau et qui n'est pas un remake indigne du Niblo et se tient bien sur ses jambes en y apportant le Scope couleurs et un sublime casting.

Bon cela dit, je vous livre un commentaire comparatif de l'original de Mann et du remake de Scott. Ce débat m'en fournit l'occasion idéale je pense. Et j'ai laissé la note additionnelle qui l'augmente, elle n'est pas inintéressante non plus, enfin je vous en laisse juge. Et vous pardonnerez la longueur du tout qui excède un peu les proportions habituelles d'un "post" de débat... enfin peut-être Jeremy, Roy et certains autres internautes cinéphiles avaient-ils déjà lu tout ça sous sa première forme mais elle est un peu modifiée et augmentée. Et pour les autres, ce sera du neuf absolu donc voici...


Ce texte reprend des commentaire parus sous forme d’annexes « postées » sous les tests en ligne des DVD de GLADIATOR et BLACK HAWK DOWN sur le site http://www.dvdrama.com : l’auteur les a revus, modifiés, augmentés et corrigés à l’occasion de cette reprise (Paris 8 février 2004 puis encore un peu cette nuit).

D’Anthony Mann à Ridley Scott : renaissance et éternité du « péplum »
+ Note sur la thématique de Ridley Scott


Je suis surpris que la majorité des critiques et des spectateurs français n’aient pas immédiatement vu que GLADIATOR [Gladiator] (USA 2000) de Ridley Scott est en grande partie un « remake » - certes novateur et intéressant - de THE FALL OF THE ROMAN EMPIRE [La chute de l’empire romain] (USA 1964) d’Anthony Mann. L’oubli ou l’ignorance d’une telle relation est un inquiétant symptôme en ce qu’il témoigne d’une grave méconnaissance de l’histoire du cinéma le plus classique et le plus populaire à la fois.
La différence essentielle entre les deux films tient essentiellement à ce que les scénaristes du film de Scott ont rajouté l'idée que Livius (Stephen Boyd dans le film de Mann) / Maximus (Russel C. dans le film de Scott) devient gladiateur. Le début des deux films est strictement identique : une bataille dans la forêts contre des barbares germaniques. Puis exposition des rapports de force et d'amitié/hostilité : Marc-Aurèle va mourir, il sait que son fils Commode n'a pas l'étoffe d'un empereur (et pour cause : il sombre dans la folie au fur-et-à-mesure du film), etc. Le rôle de Marc-Aurèle est interprété par Richard Harris (chez Scott) comme il l'était par Alec Guinness (chez Mann) : vision intime d'un empereur stoïcien mourant, anxieux et désabusé. Son fils Commode interprété par Christopher Plummer (chez Mann) est aussi flamboyant, névrosé et terrible que l'est le Commode scottien sauf que l'acteur de Scott joue d'une façon moins théâtrale. La fin ultime des deux films : un duel entre Commode et Livius/Maximus dans les deux cas, qui se termine de la même manière, mais une vision optimiste chez Scott (rétablissement de l'idéal républicain) tandis que Mann finissait sur une "mise aux enchères publiques" de l'Empire assez apocalyptique et très pessimiste.
J'ai vu le très beau film d'Anthony Mann plusieurs fois. Je viens de découvrir celui de Scott avec retard à l'occasion de sa projection sur la câble. Les critiques américains sont très sensibles au fait que Scott a voulu mélanger SPARTACUS de Kubrick (sans oublier celui de Riccardo Freda en N&B réalisé vers 1953 et les autres versions de Corbucci, etc.) et LA CHUTE DE L'EMPIRE ROMAIN. C'est possible : l'idée n'est pas condamnable en soi et d'ailleurs seul le résultat compte. Ils sont aussi très sensibles au fait que le public du Coliseo n'est composé que de 50 personnages dans le film de Scott alors qu'il se comptait par millier de vrais figurants chez Mann. C'est un argument qui n'est pas très pertinent à mes yeux. Les moyens matériels importent peu au cinéma : c'est le résultat qui compte. Tourner aujourd'hui d'une façon "réaliste" et pas « numérique » GLADIATOR aurait peut-être coûté 700 ou 800 millions de $US comme le dit à juste titre une critique américaine de THE FALL OF THE ROMAN EMPIRE sur http://www.imdb.com. Les commentateurs ordinaires – ceux qui donnent leur avis sur les films mais ne sont pas des critiques professionnels - du même site Internet américain ont une position assez proche de certains critiques privilégiant la lisibilité et la clarté du découpage des combats et des scènes de bataille dans la mise en scène de Mann au dépend de l'esthétique moderne de Scott. Là encore, je pense que l'argument n'est pas pertinent et un commentateur du DVD zone 1 a expliqué à sa façon que la vision "objective-subjective" de Scott lui semblait au contraire très réaliste du point de vue phénoménologique de la perception du combat par le combattant. C'est un peu la touche "stendhalienne" de Scott (voir la description célèbre de Stendhal des combats vus par son héros dans LA CHARTREUSE DE PARME)... et je crois cet argument très recevable.
Ce qui m'a le plus intéressé dans le film de Scott, ce sont les plans urbains de Rome, plans d'ensemble en plongée - annonciateurs des plans de Mogadiscio dans BLACK HAWK DOWN [La chute du faucon noir] (USA 2001) du même Ridley Scott* - mais aussi de demi-ensemble : la rencontre des deux sénateurs au marché, je la trouve, par exemple, très bien et très vraie. Je pense que c'est le premier véritable bon film de Scott depuis l’honnête BLACK RAIN (USA 1988) - à ne pas confondre pour cause d’homonymie croisée, rétrospectivement, avec KUROI AME [Pluie noire] (Japon 1989) de Shohei Imamura sorti presque simultanément en France - et qu'il annonce en bien des points BLACK HAWK DOWN. Idée excellente par exemple que celle de faire agresser par suprise les gladiateurs dès qu'ils entrent dans l'arêne : on est pris aux tripes et on craint pour leur vie à chaque seconde.
Reste quelques plans qui posent un problème de sens ou de signification :
- un gladiateur "oriental" à la tête de taureau est emprunté au Minotaure du SATYRICON de Fellini mais Scott l'intègre aux autres membres du groupe. Intéressante idée qui pourrait vouloir dire "- Voyez : le clou d'une séquence d'un Fellini, eh bien moi j'en fais un figurant parmi d'autres et l'effet plus discret est en même temps plus réaliste et plus efficace." Et c'est peut-être vrai : la scène est réussie et fait peur. Scott emprunte mais travaille son emprunt.
- le célèbre plan d'ouverture : la main caressant le blé... on l'a beaucoup critiqué mais je ne comprends pas pourquoi, au fond. Les romains étaient à l'origine un peuple agraire, campagnard... raison pour laquelle ils n'ont jamais réussi à obtenir d'équivalents dans leur vocabulaire abstrait aux mots d'origine grecque.
- À la fin de LA BATAILLE DE MARATHON de Jacques Tourneur et Mario Bava, il y a un magnifique plan final : Steve Reeves cultive son arpent de terre tandis que la caméra montre au premier-plan son épée sanglante fichée dans la terre, éclairée par le soleil couchant... Scott place cette image au début parce que le héros va mourir et ne pourra plus faire ce geste. Mais c'est une image profondément romaine, une idée profondément romaine. Certains dialogues ou certaines images sont un peut trop "modernes" par rapport à cette "romanité" mais la critique du système "panem et circenses" est absolument romaine. Des romains l'ont proférée. Le film a donc une valeur éducative comme tout bon péplum.
Je conclus : le film de Scott est un « remake » novateur du film d’Anthony Mann. il est filmé d'une façon très novatrice. C'est un film estimable. On lui a reproché sa longueur mais l'original de Mann durait une demi-heure de plus... et à la lecture du test de l'interactivité du DVD zone 1 comme zone 2 de GLADIATOR, on peut même regretter que certaines scènes en aient été coupées. Enfin, ce film a un mérite historique indéniable à mes yeux : faire revivre le péplum. Depuis la fin du "Second âge d'or du péplum" (1953-1965), c'est une des rares tentatives pour faire renaître ce genre. J'en suis très heureux. Scott renoue et tente de synthétiser ce que la veine américaine a donné dans ce genre. Il emprunte et veut innover tout à la fois. Le pari était bien sûr a priori trop ambitieux et immodeste pour les connaisseurs puristes du genre mais il est noble en soi. Le résultat, je l'avoue sans la moindre honte, est intéressant et parfois très bon. On parle déjà d'un remake de THE 300 SPARTANS [La Bataille des Thermopyles] de Rudolf Maté (USA 1962) et de bien d'autres projets... Ce sera grâce au succès public de GLADIATOR. Grâce à Scott donc. Pour ça aussi il faut aimer ce film. Il l'aura mérité.
*****************************
Note rétrospective sur la thématique de Ridley Scott à propos de BLACK HAWK DOWN
*Je viens de revoir BLACK HAWK DOWN qui me semble passionnant en raison de sa réflexion, qui m'apparait évidente, sur la difficulté de percevoir la réalité en raison de la multiplication des points de vue. La discussion du pilote blessé prisonnier avec ses ravisseurs en constitue une illustration par le dialogue. Mais la mise en scène se charge aussi de l'illustrer en présentant de la même scène sa vision à terre, d'hélicoptère, d'au-dessus de l'hélicoptère, sa perception sur écran vidéo et les commentaires radios. Cette multiplicité ne facilite pas l'action : elle la rend impossible. Parce que finalement ceux qui doivent décider le font chacun à leur niveau avec un décalage. Ce décalage est le trou par lequel s'engouffre la mort et le chaos. Elle interdit en outre une information rationnelle : la scène du petit garçon brandissant son téléphone portable pour faire entendre le bruit des hélicoptères est mal interprétée par l'équipage. Elle engendre enfin une impossibilité de reconnaître, avant qu'il ne soit trop tard, la rationalité de l'autre, voire l'irrationnel. Ce sont deux civilisations, deux rationnalités (l'une présentée comme civilisée et l'autre comme barbare mais chacune "fonctionnant" correctement dans le contexte de la guerre totale) qui qualitativement sont équivalentes. Ce n'est que par la quantité (technologie et quantité de matériel et d'équipement) que les américains viennent finalement à bout de cette mission - en fait un échec tactique. Un triomphe par la quantité mais qui qualitativement laisse froid ceux de l'autre camp qui "pensent" la situation : le vendeur d'arme qui fournit Aïdid boit son thé tandis que les hélicoptères décollent. Il sait, lui, que tous ne reviendront pas... les geôliers du pilote aussi le savent.
Entre Charybe et Scylla donc : entre quantité d'hommes (s'entretuant parfois - scène démente de la sortie du soldat américain dans la ruelle pris entre deux feux) et quantité de munitions (celles des petits hélicoptères "gunships" qui ont la puissance de feu nécessaire mais ne "voient" pas précisément leur cible la nuit sans l'aide de marqueurs au sol), Scott renvoie peut-être dos à dos les adversaires. Comme, mis à part le happy end de rigueur puisque le film est destiné au grand public, il l'avait déjà fait dans BLACK RAIN où il opposait - à sa façon lourde et subtile à la fois - civilisation japonaise et américaine. Comme dans ALIEN et BLADE RUNNER où il opposait l'humain et l'inhumain absolu (le monstre). Et même comme GLADIATOR dans lequel l'empire romain est le monstre inhumain et le général "rebelle" le héros.
Les plans aériens de la ville en plongée à 90° ressemblent un peu à la peau de la caverne découverte dans ALIEN : fugitivement mais assez nettement ce sont plus des plans d'une chose vivante qu'une topographie aérienne. Comme si on était au-dessus d'un monstre : Mogadiscio ! Effet impressionnant mais thématiquement important puisqu’il y a cette même dialectique de l'intérieur et de l'extérieur dans ALIEN : les rangers au sol sont à l'intérieur d'une sorte de monstre dont les parois stomacales peuvent se refermer sur eux à tout instant. Ceux qui sont dans les hélicoptères ou qui contemplent l'action sur des écrans de contrôle sont à l'extérieur (au-dessus). C'est quand on tente de changer de niveau que la destruction intervient, de même que, dans ALIEN, c'est lorsque le monstre sort du corps qu'il le détruit et/ou qu'on peut le détruire. De même que dans GLADIATOR, l’entrée des combattants dans l’arène du Coliseo est filmée comme une pénétration dans une sorte de bouche à plusieurs niveaux : le thème est visuellement archi-connu et exploité par le « péplum » depuis sa naissance mais il nous semble que Scott lui confère une qualité strictement analogue du point de vue thématique, donc qu’il le renouvelle d’une manière intelligente. Et tout à fait d'accord pour la référence graphique - évoquée par certains - à ZULU [Zoulou] (GB 1964) de Cyril R. Enfield sans oublier d’ailleurs ZULU DAWN [L’ultime attaque] (GB 1980) de Douglas Hickcox. Les scènes de déplacements collectifs, de groupes en furie, y renvoient clairement. Je crois que Ridley Scott aurait pu couper quelques plans de la séquence de fin et quelques plans de la caserne au début : le film aurait pu commencer avec la scène du marché puis enchaîner directement avec la tentative d'arrestation du clan du général Haïdid. Le rythme y aurait trouvé son compte et on aurait fait connaissance tout aussi bien avec les protagonistes par la suite.

La thématique de Ridley Scott semble donc relever, du moins dans ses meilleurs films, fondamentalement du cinéma fantastique - depuis son premier film DUELLISTES (1977) qui était déjà la stricte relation, glacée et objectivement impressionnante, de la perversité meurtrière d'un psychopathe terrifiant, d'après une nouvelle de Conrad dont l'un des thèmes favoris est le mal et l'angoisse voire l'épouvante qu'il provoque - et persister formellement quelque soit le genre qu’il illustre ponctuellement. C'est bien elle qui fait de GLADIATOR comme de BLACK HAWK DOWN non seulement de très belles « superproductions » mais surtout des films authentiquement passionnants.
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vic
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Message par vic »

Texte passionnant, Francis.

Il m'a coinvaincu sans problème qu'il faut que je revois le Mann, et vois enfin Black Hawk Down.
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Jeremy Fox
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Re: Oui + commentaire comparatif

Message par Jeremy Fox »

francis moury a écrit :
La thématique de Ridley Scott semble donc relever, du moins dans ses meilleurs films, fondamentalement du cinéma fantastique - depuis son premier film DUELLISTES (1977) qui était déjà la stricte relation, glacée et objectivement impressionnante, de la perversité meurtrière d'un psychopathe terrifiant, d'après une nouvelle de Conrad dont l'un des thèmes favoris est le mal et l'angoisse voire l'épouvante qu'il provoque - et persister formellement quelque soit le genre qu’il illustre ponctuellement.
Je ne pense pas que le thème de la nouvelle soit celui-ci et je ne pense pas non plus que ce soit la thématique principale du romancier (dont j'ai lu l'intégralité de l'oeuvre, Conrad étant pour moi le plus grand écrivain)
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Message par Tuck pendleton »

vic a écrit :Texte passionnant, Francis.

Il m'a coinvaincu sans problème qu'il faut que je revois le Mann, .
Je vais retenter aussi même si ça sera la troisième tentative...Belle défense
Brice Kantor
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Message par Brice Kantor »

La Chute de l'Empire Romain est le seul Mann que j'ai vu et j'en garde un très bon souvenir, particulièrement pour tout ce qui tient de la mise en scène, gestion de l'espace, des décors et de l'architecture. la photo est également superbe, le récit beaucoup plus convaicant que celui de "Gladiator"... Esthétiquement c'est quand même carrément autre chose. C'est mon péplum préféré avec "Spartacus" et "Cléopâtre". J'ai quelques réserves sur le casting un peu faiblard, hormis Mason et Guinness. Il faut que je me décide à voir d'autres films du réalisateur :oops:
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Re: Oui + commentaire comparatif

Message par phylute »

Jeremy Fox a écrit :
francis moury a écrit :
La thématique de Ridley Scott semble donc relever, du moins dans ses meilleurs films, fondamentalement du cinéma fantastique - depuis son premier film DUELLISTES (1977) qui était déjà la stricte relation, glacée et objectivement impressionnante, de la perversité meurtrière d'un psychopathe terrifiant, d'après une nouvelle de Conrad dont l'un des thèmes favoris est le mal et l'angoisse voire l'épouvante qu'il provoque - et persister formellement quelque soit le genre qu’il illustre ponctuellement.
Je ne pense pas que le thème de la nouvelle soit celui-ci et je ne pense pas non plus que ce soit la thématique principal du romancier (dont j'ai lu l'intégralité de l'oeuvre, Conrad étant pour moi le plus grand écrivain)
Voilà, je voulais rebondir là dessus aussi :D
Je souscris donc à 100% au propos de Jeremy !
Les films sont à notre civilisation ce que les rêves sont à nos vies individuelles : ils en expriment le mystère et aident à définir la nature de ce que nous sommes et de ce que nous devenons. (Frank Pierson)
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Re: Oui + commentaire comparatif

Message par Jeremy Fox »

phylute a écrit :
Jeremy Fox a écrit :
Je ne pense pas que le thème de la nouvelle soit celui-ci et je ne pense pas non plus que ce soit la thématique principal du romancier (dont j'ai lu l'intégralité de l'oeuvre, Conrad étant pour moi le plus grand écrivain)
Voilà, je voulais rebondir là dessus aussi :D
Je souscris donc à 100% au propos de Jeremy !
Oui car quand je lis psychopate terrifiant, ça me fait tout drôle : ça donne encore une mauvaise image d'un film, on a l'impression de voir Un silence des agneaux au 18ème siècle :)
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