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Test dvd
Image de la jaquette

Stalker

DVD - Région 2
Potemkine
Parution : 15 novembre 2011

Image

Très (trop ?) sombre dans les passages en noir et blanc, la copie est parfois légèrement floue dans ceux en couleurs (chose visible lors du premier arrêt dans la Zone sous un porche, par exemple). C'est d’autant plus dommage que le rendu de celle-ci nous convient en revanche tout à fait. Comme l’expressivité chromatique nous importe plus que la netteté parfaite, le tout reste d’une tenue recommandable.

Son

On nous propose la VO mono ou DD 5.1. Que l’on écoute le voyage sur une draisine pour se rendre dans la Zone, le clapotement de l’eau dans la Chambre des Désirs, le sound design le plus élaboré de l’œuvre d'Andrei Tarkovski a bénéficié ici d’un travail à sa mesure.

Suppléments

Commentaire de Pierre Murat (15 min)
L’occasion pour le critique de parler de son film préféré du cinéaste (« le plus pur ») dont il narre la découverte à Moscou dans une projection officielle (alors que le film était paradoxalement interdit). Il commente le caractère polémique du film dans sa métaphore S-F, le reproche que Tarkovski fait par Stalker aux « pseudo-scientifiques » et « pseudo-intellectuels » qui ne sont pas à la hauteur de la connaissance. L’ascendance dostoïevskienne du Stalker est rappelée, trouvant son origine dans le personnage de L’Idiot. Comme chez Dostoïevski, ce sont les faibles qui pour Tarkovski sauveront le monde. Tous ses héros le sont, de Ivan à Alexander, car ce sont eux qui cherchent un sens salutaire. Stalker est défini par le critique comme le film le plus évident de son auteur, une ligne droite, nous menant à nous interroger sur ce que chacun de nous fait de « sa vie, sa foi, son art, son existence.» On peut en effet ricaner des litanies du Stalker, cette « larve » et n’y voir que des bondieuseries slavisantes, mais on peut aussi, au contraire, s’interroger sur où nous nous situons nous-mêmes, par rapport à l’exigence qu’il fixe pour une vie humaine.

Entretien avec le directeur de la photographie Alexandre Kniajinski (6 min)
Dernière interview nous annonce-t-on, du chef-opérateur par la TV russe. « Tous sont morts. Le film a été entièrement tourné en lumières crépusculaires. » C’est un visage à la fois enfantin et mélancolique qui commence ainsi son témoignage. Il commente des photos du tournage, des vidéos d’archives du tournage parsèment ses mots. Il parle plus de l’ambiance du plateau que de son propre travail de chef-opérateur. « C’est à pleurer. Nous étions jeunes, plein d’entrain. Et voilà, plus des trois quarts sont morts. Tout a disparu des lieux où nous avons tourné. Ca me donne une terrible nostalgie. » Un carton nous annonce la mort de Kniajinski en 1996.

Entretien avec le décorateur Rashit Saffiouline
Dans son atelier, le décorateur raconte l’état de grande tension dans lequel était Tarkovski au moment du tournage, de par un financement insuffisant. Le caractère dévastateur pour lui de la mise au rebut d’une année de travail (puisque la pellicule n’a pu une première fois être développée) est rappelé par ce collaborateur. « Peut-être un coup monté. » Toujours est-il que Tarkovski se remit au travail, percevant ce second tournage comme une seconde opération après une première ayant raté. Ce sont les financiers, et non lui-même, qui insistaient pour un deuxième tournage. Tarkovski réussit pourtant à atteindre son ambition, avec les restes d’un budget déjà dépensé pour un tournage inutile. On comprend alors le caractère on ne peut plus économique du film. « Il fallait faire l’impossible. » Dont acte.

Entretien avec le compositeur Edouard Artemiev (21 min)
Artemiev raconte sa collaboration dès Solaris avec ce metteur en scène pour qui la bande sonore avait une importance prépondérante. Il ne s’agissait pas de « faire un concert », de développer de simples thèmes, mais ajouter à l’ambiance quand l’image appelait un autre support. Le travail d’Artemiev et avec Tarkovski a constitué un apport notable au cinéma contemporain, son appréhension du son par rapport à l’image. Artemiev explique aussi le besoin du cinéaste d’inclure les grands maîtres classiques (musicaux; mais aussi picturaux) dans son œuvre. Il rappelle avoir commencé jeune à travailler avec le cinéaste (ce qui explique son plus jeune âge par rapport à certains autres intervenants du coffret). « Je ne lui ai connu qu’un ami vraiment proche : Anatoli Solonitsyne. J’ignore quels liens mystérieux existaient entre ces deux hommes. Ils sont morts du même mal, c’est incroyable. Il y avait un lien mystique entre eux. » Bon rappel, au milieu des dithyrambes, de quel homme secret et avare en âmes sœurs fut Tarkovski. Artemiev, lui, regrette à demi-mots son manque d’intimité avec lui. Des images du metteur en scène, assis dans son fauteuil en salle de montage, égrènent l’entretien : des rapports professionnels, donc. « Tous ses films, je les ai vécus avec les nerfs à vifs. En ignorant si la musique serait utilisée ou non. » Point de copinage, mais les besoins du film à tout prix. Il continue en prenant l’exemple de la musique orientale comme explication de la difficulté qu’il y a  dans le travail créatif à arriver à la simplicité. Au détour de la conversation se révèle sa frustration de ne pas avoir vu sa musique utilisée pour StalkerIl manque une musique au film »).  Artemiev en arrive au Miroir. Ce résumé qui ne dit pourtant pas tout est un peu long. C’est que les entretiens qui constituent les bonus de cette édition Potemkine rappellent que les Russes sont prolixes.

Par Jean Gavril Sluka - le 17 février 2012