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Test dvd
Image de la jaquette

L'Enfance nue

DVD - Région
Gaumont
Parution : 1 mars 2008

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Le département DVD de Gaumont se faisait tailler des croupières par Bertrand Tavernier il y a de cela quelques mois, sur ces mêmes pages. A tort ou à raison, à vous de juger… toujours est-il que le coffret Pialat constitue un événement majeur de l’édition numérique, projet dans lequel Gaumont semble s’être investi corps et âme, au point de repousser sans cesse la sortie de l’objet. On ne sait exactement les raisons de ces multiples retards, mais une chose est sûre : ça valait le coup d’attendre ! Doté d’une photographie plutôt terne, L’Enfance Nue ne flatte pourtant pas spécialement l’œil (telle n’est pas son intention), toutefois, le travail de restauration soulève une fois de plus l’enthousiasme : master nickel, compression invisible, contrastes au poil. Jamais ce film assez rare n’a pu être vu dans de si bonnes conditions. Une franche réussite (mêmes éloges pour le court-métrage en bonus), à l’image du coffret dans son ensemble.

Son

Clairement pas le DVD idéal pour tester votre 5.1 mais voilà bien un mono de première qualité, malgré les prises de sons de l’époque. Dialogues intelligibles, clarté des voix, pas de souffle : du beau boulot.

Suppléments

Un travail éditorial de première qualité, tout en sobriété et pertinence. Bonus répartis sur 2 disques.

Entretien avec Arlette Langmann (scénariste) : Evocation des conditions (assez folkloriques) de tournage par Arlette Langmann, qui fourmille d’anecdotes. On sent que quelques rancoeurs et non-dits traînent encore quelques 37 ans plus tard, comme le prouvent certains passages sur Vera Belmont. Intéressant et instructif. A noter qu’il n’est étrangement pas fait mention de Patrick Grandperret dans l’intitulé de ce bonus, qui pourtant participe bien à la discussion.

L’amour existe. Court métrage (21mn, restauration exceptionnelle) de Maurice Pialat. A première vue, ce magnifique poême visuel détonne dans la filmographie, certes naissante, de Pialat. On connait le dégoût du réalisateur pour la Nouvelle Vague, aussi s'étonne-ton de constamment penser à Alain Resnais (magnificence de lents travellings), à François Truffaut (voix-off très littéraire), ou au Jean-Luc Godard des origines (jeux de mots, rimes visuelles...). Est-ce d'ailleurs un hasard si le film est produit par Pierre Braunberger, et mis en musique par George Delerue ? Très fluide, d'une beauté plastique imposante tant dans le cadre que dans le montage, L'amour existe n'a apparemment que de lointains rapports avec le cinéma de Pialat. Et pourtant, déjà, se dessine un monde. Celui de Maurice Pialat : attachement pour les petites gens, discours social brut, raccords saisissants, majesté du silence. Jusqu'à une fin sublime. En deux plans et un changement d'axe bouleversant, tout est dit d'un pays et d'un peuple. Bonus majeur. Film majeur.

Champ contre champ (1973, archives INA) : Interview de Maurice Pialat par Maurice Frydland après la première diffusion télévisée de L''Enfance nue. Un morceau de choix, indispensable. Maurice Pialat s’exprime avec férocité sur son propre travail : l’occasion de découvrir ce phrasé si particulier, mêlant tendresse et cruauté, et cette manière de balancer vacheries sur vacheries dans un large sourire. A ce titre, on se repassera en boucle le déjà mythique "La preuve que mon film était voué à l’insuccès, c’est que même quand il est diffusé à la télévision, il passe dans votre émission et non dans celle d’en face", qu’il assène à un Frydland scotché sur place par le coup de poignard. Le reste est du même tonneau, Pialat ne cessant de descendre son propre film, lui trouvant tous les défauts du monde. Le tout avec une acuité rare, qui ne convaincra toutefois pas ses amateurs. Quelques réflexions passionnantes sur le cinéma hexagonal de l’époque, sur le climat social, sur l’enfance ponctuent par ailleurs un monologue de haute volée. Pour ne rien gâcher, la cravate seventies de Maurice Frydland est tout simplement… hallucinante ;)

Choses vues autour de l'Enfance nue (1969, archives INA). Plus qu’un "documentaire réalisé par Roger Stéphane auprès des enfants de l'assistance publique ayant inspiré le film" (comme indiqué sur le boîtier), ce documentaire est surtout l’occasion d’un retour sur les lieux du tournage en compagnie de Maurice Pialat, qui y retrouve les principaux protagonistes de son film : les époux Thierry, les jeunes acteurs, leurs familles… Un reportage qui montre, si besoin est, l’attachement et l’amour de Pialat pour les gens "simples". Pas question de "France d’en bas" chez le réalisateur, mais d’hommes et de femmes tout simplement, que le réalisateur aura pris le temps d’écouter, avant, pendant et après le tournage.

Sur les traces de Michel Tarrazon : entretien avec l'acteur principal du film, aujourd’hui opticien dans le Centre de la France, trente-sept ans plus tard. Petite interview de 15 minutes, plutôt intéressante, qui revient sur le parcours avorté de Tarrazon (on le reverra dans La maison des bois puis dans deux trois téléfilms obscurs avant qu’il ne change de voie) et les méthodes de travail de Pialat. Recommandé.

Bandes annonces originales du film

Par Xavier Jamet - le 17 octobre 2005