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Test blu-ray
Image de la jaquette

Les Aventures de Pinocchio

BLU-RAY - Région B
Le Pacte
Parution : 1 octobre 2019

Image

Ce Blu-ray reprend le master restauré il y a deux ans, que le distributeur Les Acacias avait utilisé pour la ressortie en salles en décembre 2017. Si l’on garde en plus à l’esprit la nature de la source, à savoir un téléfilm (ou plutôt un remontage d’une série télévisée), force est donc de reconnaître que nous avons affaire ici à une très belle image, dont le rendu haute définition est patent. En premier lieu, les couleurs s’avèrent magnifiques, très naturelles, qui savent parfaitement retranscrire la photographie délicate d’Armando Nannuzzi dans ses nuances, ses différentes saturations et ses dominantes selon les séquences (grise, marron, bleue...). De leur côté, les contrastes montrent une belle profondeur (même si parfois les noirs peuvent être bouchés) avec du détail dans les ombres (si celles-ci sont de moyenne intensité). Une image HD, oui, mais avec cependant une définition variable et loin d’être ciselée, mais les raisons à cela peuvent être nombreuses (l’origine télévisuelle, le tournage avec quelques mouvements saccadés et un usage fréquent du zoom). Cela étant dit, le piqué se révèle quelquefois très séduisant, avec un rendu des matières et des textures éloquent. Autre point très positif : une stabilité et surtout une propreté jamais prises en défaut. Enfin, le travail d’authoring est de grande qualité, sans scories. Cependant, il est évident que le DNR (le réducteur de bruit) a été appliqué sur ce master car une copie de cette provenance devrait montrer une forte granulosité. Or le grain qui la texture est très fin, voire absent parfois, ce qui aboutit à une image lissée, mais bien heureusement sans effet « musée Grévin » (les visages de cire) comme nous aimons à l’appeler sur notre site. Somme toute, malgré quelques défauts mineurs, ce Blu-ray est une véritable réussite technique.

Son

Ce disque propose deux pistes sonores DTS-HD MA mono, italienne et française, de nature assez proche. Il faut se souvenir que les Italiens postsynchronisaient toutes les bandes-son, même dans la langue originale. Elles ont manifestement été toutes les deux nettoyées et sont d’une grande propreté et très limpides. La version italienne présente un bon mixage, plutôt bien étagé même si l’information sonore reste très centrale. L’équilibre entre les voix (un peu trop dans les aigus parfois), les ambiances (bien mises en valeur) et la musique est assez naturel et permet une excellente immersion. Quant à la version française, si elle place - comme très souvent - les voix en avant, elle se montre respectueuse des ambiances et du mixage musical. Elle affiche un peu de réverbération dans les voix mais celle-ci n’est en rien gênante pour l’oreille. On s’étonnera que cette VF coupe brutalement la musique au milieu du générique de fin mais cela reste anecdotique.

Suppléments

Présentée sous la forme d’un mediabook, cette belle édition comporte un livret de 24 pages illustré (10 photos) vraiment instructif. On y trouve d’abord un extrait d’une interview donnée par Luigi Comencini à Aldo Tassone en 1982 dans laquelle le cinéaste parle de son approche personnelle du conte, du rôle des enfants et de sa vision de l’enfance qui imprime le film. Puis le chapitre consistant De l’écrit à l’écran effectue une comparaison entre le Pinocchio de Collodi et celui de Comencini. Enfin, le chapitre La Dramaturgie est une analyse - courte mais pointilleuse - de la structure narrative et des enjeux dramatiques développés par le cinéaste. Voilà un livret qui n’a rien de décoratif ou de purement informatif, qu’il est conseillé de lire après la vision du film bien entendu.

Entretien avec l’acteur Andrea Balestri (16 min 40 - 16/9 - DD 2.0 - VOST - HD - 2019)
Cette production Com’ on Screen réalisée pour l’éditeur Le Pacte convie le comédien qui jouait Pinocchio pour une interview rétrospective. Âgé de 7 ans au moment du tournage, cet enfant énergique, tout en « vivacité et en spontanéité » selon ses propres dires, avait été choisi par le réalisateur Luigi Comencini parmi sept candidats après l’étude de 3 000 photos ! Balestri raconte son expérience du tournage des Aventures de Pinocchio, qui représentait pour lui « plus un jeu qu’un travail ». A travers plusieurs anecdotes, il évoque la direction d’acteurs du cinéaste, ses relations avec Comencini (chaleureuses, il le considérait « comme un père »), Nino Manfredi (tendres et drôles, qui le prenait sous son aile « comme un oncle chaleureux ») et Gina Lollobrigida (catastrophiques). A ce sujet, Balestri évoque un épisode pas piqué des hannetons sur leurs relations conflictuelles où la comédienne et lui-même en sont venus aux insultes puis aux coups ! Sa personnalité d’enfant « rebelle » ressort bien dans ce témoignage (pour preuve son insolence vis-à-vis de Vittorio De Sica, qui validait pourtant le casting du réalisateur). L’interview s’achève par le souvenir de la séance familiale pour la vision de la série à la télévision, celui plus gênant de se faire appeler Pinocchio à l’école, et enfin par un hommage appuyé au travail de Comencini.


Entretien avec l’historien Italo Moscati (23 min 27 - 16/9 - DD 2.0 - VOST - HD - 2019)
Dans cet entretien, Italo Moscati commence par situer l’importance considérable des Aventures de Pinocchio de Carlo Collodi dans la culture et la nation italiennes. Il en rappelle l’histoire, les thématiques et son inscription sociale. L’historien volubile se livre après à une comparaison avec l'adaptation de Luigi Comencini, en précise l’apport singulier, le découpage du récit par le cinéaste, sa faculté de « capter la magie de l’histoire » tout en livrant un film naturaliste. Pour Moscati, les allers-retours entre le pantin et le garçon « marquent les deux aspirations que porte un enfant : l’une tournée vers l’imaginaire, l’autre vers le rapport au réel. » Il félicite le cinéaste d’avoir accompli une « fusion entre les deux ». Mais l’essentiel de son témoignage va porter sur Comencini et son œuvre. Il relate d’abord sa rencontre et sa collaboration avec le réalisateur pour mener à bien le projet de documentaire L’Amour en Italie, film-enquête qui interroge des citoyens italiens sur l’amour et la sexualité. Ensuite, en s’appuyant sur certains de ses films, Moscati évoque quelques caractéristiques du cinéma de Comencini : un cinéma réaliste (« mais non néoréaliste »), sa vision de la société italienne, son humour essentiel, sa capacité à changer de registres, l’attention portée aux femmes, sa proximité avec les jeunes avec lesquels « il adorait discuter », sa faculté à « transmettre ses convictions » au moyen de son art, son « élégance aristocratique sur les tournages ». Il en ressort de ce portrait un artiste d’une profonde humanité.


Entretien avec les filles de Luigi Comencini (37 min 33 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - HD)
Ce troisième supplément fait appel aux trois filles de Luigi Comencini (Francesca, Cristina et Paola), également professionnelles dans le milieu du cinéma et qui s’expriment ici dans un français parfait. Ce qui n’est pas surprenant puisqu’on apprend que le jeune Luigi fut un jeune émigré en France (il y souffrit de discrimination), où il accomplit sa scolarité jusqu’au bac et où surtout il attrapa « le virus du cinéma » qui fut pour lui une sorte de refuge. Les trois intervenantes font un rappel de leur histoire familiale et réussissent toujours à placer leur vision des Aventures de Pinocchio dans le cheminement personnel et professionnel de leur père au fort esprit rebelle, pour qui le cinéma fut « synonyme de liberté ». Elles abordent l’historique de la série (une commande de la RAI), l’ambition du cinéaste en tournant cette adaptation qui mêle le réalisme à la fable, le processus d’inversion marionnette/enfant, la reconstitution très minutieuse de la Toscane pauvre, l’aspect artisanal du film (des décors, des accessoires, des effets mécaniques) qui confine à la poésie, la relation étroite et « sentimentale » avec l’acteur enfant Andrea Balestri, la collaboration avec Nino Manfredi, son « alter ego adulte » dans le film, le thème du manque du père, le personnage de la fée/mère détesté par Comencini (de la même façon qu’il n’appréciait pas l’actrice qui l’incarne). Le questionnement de la condition de l’enfance (essentiellement des garçons) apparaît comme la principale thématique de l’œuvre de Comencini. On retiendra une déclaration très intéressante de sa fille Francesca : « L’Incompris est l’enfant qu’il a pu être et Pinocchio l’enfant qu’il aurait voulu être. » La reconnaissance tardive de Comencini comme grand cinéaste, contrairement à son statut en Italie, termine cet entretien aussi émouvant qu’instructif. Car les trois femmes apportent un témoignage intime bienvenu tout en manifestant une vraie capacité d’analyse à la fois du cinéma de leur père que de Pinocchio. On regrettera seulement la présence de trop longs extraits du film mais ce documentaire, même s’il aurait donc pu être plus resserré, se révèle finalement très précieux pour qui s’intéresse à Luigi Comencini.


Bande-annonce (1 min 37 - 4/3 - DTS-HD MA 2.0 - VOST - HD)
Il s’agit du film-annonce réalisé pour la reprise du film en salles et distribuée par les Acacias en 2017. Réalisée à partir du master restauré, cette bande-annonce est donc techniquement impeccable.

Par Ronny Chester - le 8 octobre 2019