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Test blu-ray

La Femme qui faillit être lynchée

BLU-RAY - Région B
Sidonis / Calysta
Parution : 9 septembre 2019

Image

Western peu connu mais très intéressant, La Femme qui faillit être lynchée bénéficie cette année d’une sortie en HD chez l’éditeur Sidonis/Calysta. Ce dernier, qui annonce un master restauré, a très probablement mis la main sur celui utilisé par l’éditeur américain Olive Films pour son Blu-ray datant de 2015 (testé alors sur notre site). La bonne surprise est ainsi de mise : nous avons ici affaire à une édition haute définition d’une grande qualité générale. En premier lieu, la copie est parfaitement stable et plutôt propre (à quelques très rares fines rayures et points blancs près). L’image présente surtout une palette de gris bien nuancée et vraiment très agréable à l’œil. De leur côté, les contrastes sont soutenus avec des noirs profonds ; on relèvera simplement des hautes lumières parfois un peu surexposées lors de certaines scènes (principalement en extérieurs). Le piqué est généralement au rendez-vous (en témoigne l’excellent rendu des matières et des étoffes) et l’aspect argentique est bien respecté avec une présence de grain « palpable ». En résumé, Sidonis propose un Blu-ray très séduisant et digne du support, qui nous présente ce western dans des conditions optimales.

Son

Annoncée comme restaurée également, la bande-son originale se montre claire dans l’ensemble avec un mono équilibré et dynamique et un souffle minimal très peu gênant. Cette piste mono DTS-HD MA 2.0 d’assez bonne qualité se révèle bien étagée avec des voix, des ambiances et une bande musicale bien distinctes à l’écoute. Certaines hautes fréquences vrillent un peu les oreilles mais le rendu sonore général n’est pas trop altéré et reste très satisfaisant. L’éditeur présente également une bande-son française, ce qui pourra combler certains. Mais à part pour les plus réticents à la VO, cette piste est à éviter tant le message sonore paraît trop artificiel : le rendu est étriqué, le doublage est raté, une légère réverbération se fait sentir et les voix sont bien trop détachées des ambiances comme si les doubleurs nous parlaient d’une pièce à côté...

Suppléments

Le disque nous accueille par une longue bande-annonce alléchante (6 min 37) présentant diverses sorties de l’éditeur. Il y a d’abord dans la collection Westerns de légende déjà disponibles en combo Blu-ray / DVD : A l’ombre des potences, La Vallée maudite, Ton heure a sonné, Les Desperados, La Vallée de la peur, La Pampa sauvage, Kansas en feu, L’Homme aux colts d’or, L’Aventurier du Texas, La Flèche brisée, La Dernière flèche ; et en DVD : Le Bandit et Sierra. On trouve ensuite le Coffret encyclopédique du Film noir comprenant 20 films en DVD, l’ouvrage de Patrick Brion et un jeu de photos d’exploitation. Suivent les sorties de septembre 2019 : Le Traquenard des sans-loi (DVD), La Chevauchée de l’honneur (DVD), Les Chevaliers du Texas (combo BR/DVD), Le Triomphe de Buffalo Bill (combo BR/DVD), La Femme qui faillit être lynchée (combo BR/DVD) ; les sorties d’octobre 2019 : La Nuit des morts-vivants (1990) en digibook BR, un cycle Charles Bronson (avec Les Baroudeurs en DVD pour décembre, Un justicier dans la ville et Un justicier dans la ville 2 en BR) ; les sorties de novembre 2019 : Les Rivaux du rail (combo BR/DVD), Le Bourreau du Nevada (combo BR/DVD) ; et pour décembre Le Train sifflera trois fois (digibook BR/DVD). Enfin, une quinzaine de coffrets de fin d’année sont annoncés regroupant nombre de sorties en DVD et Blu-ray.

Présentation du film par Bertrand Tavernier (35 min 21 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - HD - 2019)
Après avoir brièvement évoqué la période qu’a passée Allan Dwan au studio Republic, notamment ses relations houleuses avec Vera Ralston, Bertrand Tavernier aborde avec éloquence et grand intérêt le film dont il est question ici. Le cinéaste français, qui a découvert avec délectation La Femme qui faillit être lynchée dans sa jeunesse, avoue aujourd’hui l’avoir un peu surévalué. Tavernier cite quelques défauts du film dus au scénario (malgré des touches d’humour bienvenues) et à la caractérisation du personnage de Quantrill trop édulcoré (auteur dans la réalité de crimes terribles) avant d’enchaîner sur les apports de Dwan à sa réussite comme surtout sa « bienveillance souriante ». Il parle du prologue « mémorable » mettant en scène le petit garçon au moment du lynchage, marqué par l’ironie coutumière de Dwan (qui rappelle ses films muets). A ce sujet, Tavernier revient sur les questions posées par Peter Bogdanovich à Allan Dwan, qu’il estime « déplacées » et « absurdes », sur l’idée que le cinéaste aurait tourné des parodies, ce en quoi il s’inscrit en faux. Enfin, Tavernier aborde le cœur du film : l’originalité pour l’époque du traitement des protagonistes féminins, placés ici au premier plan. Bien entendu le personnage de la mairesse « formidable » campé par Nina Varela, et son conseil de femmes à la tête de la ville, chose très singulière pour le genre. Mais surtout le duo qui fait avancer l’intrigue, interprété par Audrey Totter et Joan Leslie qu’il trouve « jubilatoire » de les voir s’affronter dans une bagarre au saloon puis en duel au pistolet. Pour Tavernier, le féminisme de Dwan s’observe dans le fait qu’il a toujours filmé les femmes avec une « grande empathie ». Il revient enfin plus précisément sur Joan Leslie, dont il défend la justesse de jeu ainsi que  la carrière (hélas limitée du fait qu’elle eut maille à partir avec la Warner). Comme toujours, un documentaire passionnant à écouter, mais les auteurs de cette présentation auraient eu intérêt à dynamiser un peu plus son montage et à couper dans les hésitations du cinéaste.


Présentation du film par Patrick Brion (9 min 46 - 4/3 - DTS-HD MA 2.0 - HD - 2019)
Filmé en noir et blanc, Patrick Brion commence par préciser que 1953 fut une grande année pour le western et cite de nombreux films importants sortis à cette époque. Il aborde La Femme qui faillit être lynchée par la problématique concernant les questions de Bogdanovich relatives à l’aspect parodique du film, une approche que Dwan lui a confirmée. Ce qui semble aussi absurde à Patrick Brion qu’à Bertrand Tavernier. Brion parle ensuite du personnage de Quantrill, présent dans de nombreux westerns, un personnage « qui recoupe l’histoire du Far West ». A ce propos, il a une bien meilleure opinion de l’interprétation de Brian Donlevy que Tavernier. Il en vient évidemment au trait original du film : l’affrontement au premier plan des deux femmes, et évoque lui aussi la première séquence et son ton ironique. On apprend au débotté que le film aurait dû être tourné en Trucolor, procédé appartenant à Republic Pictures. Plus intéressant, Brion nous apprend également la présence dans l’introduction de La Femme qui faillit être lynchée de master-shots provenant de L’Escadron noir de Raoul Walsh, chose coutumière dans le western pour des films produits par une même société. Il insiste enfin sur la nécessité de redécouvrir la carrière d’Allan Dwan, ce en quoi on ne peut lui donner que raison.

Présentation du film par Philippe Ferrari (9 min 59 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - HD - 2019)
Ce passionné de western, et ancien programmateur de télévision, argumente à son tour sur le film d’Allan Dwan. Il aborde avant tout le rôle primordial des femmes à forte personnalité qui caractérise La Femme qui faillit être lynchée face à des personnages masculins sacrifiés - selon lui, interprétés par des acteurs à la « personnalité fade ». Les années 50 sont une décennie de westerns pour Dwan, marqués aussi par son féminisme. Ferrari rappelle les motivations des personnages féminins (elles veulent « sauver leurs hommes et agissent par amour »). Il finit par évoquer quelques moments clés de la carrière de Brian Donlevy. Le thème de l’Inversion des genres dans ce western, avec le rôle en retrait des hommes, était bien mieux traité par Bertrand Tavernier. Cette intervention, illustrée par trop d’extraits du film, tire en longueur et se révèle - malheureusement - souvent superficielle.

Par Ronny Chester - le 21 septembre 2019