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Test blu-ray
Image de la jaquette

L'Armée des ombres

BLU-RAY - Région B
Studiocanal
Parution : 12 mai 2015

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Il y a probablement deux manières d'accueillir la sortie en Blu-ray de L'Armée des ombres, les deux manières incluant l'enthousiasme et la satisfaction de voir un film d'une telle importance enfin honoré par la haute-définition.

La première, un peu inconditionnelle, serait d'aller comparer avec la précédente édition du film, en SD, par StudioCanal en 2005, dont nous reconnaissions à l'époque les qualités tout en émettant quelques réserves, notamment au niveau de la compression. Ces travers sont ici bien évidemment corrigés, et le gain de définition étant (par vocation) considérable, on ne peut que se réjouir de voir enfin une édition française à la hauteur de ce monument.

La deuxième approche serait d'affiner un peu la bouche, en se demandant pourquoi le pays d'origine du film aura dû attendre si longtemps : cette édition s'avère en effet n'être qu'un repackaging de l'édition HD sortie au Royaume-Uni en... avril 2013 - rappelons que l'édition américaine Criterion (légèrement différente, mais pas moins satisfaisante, pour résumer les choses) avait, elle, eu les honneurs d'une sortie dès janvier 2011 (en région A, ceci étant).

Ceci étant posé, on peut se livrer au petit jeu des comparatifs, notamment entre les éditions haute-définition : premier constat, le transfert semble être le même, ce qui permet d'affirmer qu'à bien des égards (principalement au niveau de la définition ou de la luminosité - ce deuxième point étant primordial compte tenu de la photographie très sombre du film), ces éditions sont extrêmement proches. Le principal point de différence se situe au niveau de l'étalonnage et de la gestion des couleurs, et on peut d'ailleurs, de façon plus surprenante, également noter quelques différences colorimétriques entre le DVD StudioCanal de 2005 (supervisé par Pierre Lhomme, rappelons-le) et cette édition Blu-ray 2015 : pour résumer les choses, le rendu de cette nouvelle édition renforce assez nettement les dominantes vertes et jaunes (quitte à ce que cela soit assez frappant pour les scènes de jour), en atténuant assez fortement les rouges, plus marqués sur l'édition DVD et sur l'édition HD Criterion (au rendu global plus "gris métallique").


BR Critérion 2011


BR StudioCanal 2015


DVD StudioCanal 2005

Au rayon des remarques complémentaires, trop anecdotiques pour s'appesantir mais qu'il convient de mentionner, signalons une très légère perte sur les bords haut et bas de l'image (visible par exemple sur le haut des deux premières images ci-dessus). On peut par ailleurs soupçonner, en plusieurs occasions, de légers effets de DNR (réduction de bruit) mais sans que cela n'implique ni lissage excessif ni perte de grain abusive. A noter enfin quelques plans à la définition moindre, mais le master ici utilisé n'est pas en cause.

Tout bien pesé, il s'agit d'une belle édition - et le film la méritait. Mais on aurait pu croire que la longue attente du film dans nos contrées allait se concrétiser par une édition française exceptionnelle, tant en terme de qualité d'image que de suppléments. Il n'en est rien.

Son

Le rendu de la version française DTS-HD Master Audio 2.0 est très satisfaisant : les sons d'atmosphère, la voix-off de Lino Ventura ou la partition musicale d'Eric Demarsan s'équilibrent et se répondent avec un relief et un dynamisme appréciables (le Blu-ray Criterion propose, lui, une version mono 1.0 LPCM absente ici, sans que cela soit spécialement grave).

Suppléments

L'édition Criterion était, en terme de suppléments, particulièrement fournie. Cette édition-ci fait le choix du qualitatif, avec un unique supplément sur le disque, L'Armée des ombres... Le dessous des cartes (87 min - HD), réalisé par Dominique Maillet et particulièrement plaisant à suivre.


Plusieurs intervenants aux fonctions diverses se succèdent pour parler du film, de son tournage, des protagonistes y ayant contribué, dans un découpage en trois parties : la première est principalement consacrée au rapport entre Jean-Pierre Melville et la Résistance française, au sein de son parcours d'homme comme de cinéaste.

Olivier Bohler revient notamment sur les liens qui unissent L'Armée des ombres au Deuxième souffle : selon lui, ce dernier titre peut être considéré, à plusieurs égards, comme une répétition de L'Armée des ombres, et établit plusieurs points de comparaison qui rendent l'adaptation au moins aussi proche de ce précédent film que du roman original de Joseph Kessel.

Il est également question du parcours politique de Jean-Pierre Melville, depuis ses années communistes jusqu'à son estime marquée pour le Général De Gaulle, et le fameux plan de L'Armée des ombres voyant apparaître le Général est ainsi abondamment commenté, tant pour sa mise en place (pour le moins rudimentaire) que pour sa pertinence (largement discutée). Dans ce panorama, la figure du frère de Jean-Pierre Melville, Jacques Grumbach, promis à une carrière politique et disparu pendant la guerre, en 1942, est également convoquée.


Les deux parties suivantes reviennent plus spécifiquement sur le tournage du film, et contiennent de nombreuses anecdotes concernant le comportement de Jean-Pierre Melville sur un plateau, ou son mode de fonctionnement de cinéaste. L'un des témoignages les plus intéressants provient du passionnant Pierre Lhomme, extrêmement précis dans ses commentaires, qui explique notamment leur volonté commune de faire un film en couleur (par impératif commercial) qui ait l'esprit du noir et blanc, plus "digne". Pierre Lhomme conclue d'ailleurs ses souvenirs en disant que c'est à la fin de cette collaboration avec Melville qu'il s'était senti "devenir chef' op".

Il est également beaucoup question des rapports entretenus par Jean-Pierre Melville avec ses comédiens, et notamment Lino Ventura, qui l'appelait "la hyène". Plusieurs raisons sont envisagées pour expliquer la brouille entre les deux hommes, la plus probable renvoyant au choix de Ventura de tourner Le Clan des Siciliens en dépit d'un engagement contractuel avec Melville, qui ne lui aurait jamais pardonné. Curieusement, les souvenirs des intervenants divergent sur la présence et le rôle de Howard Vernon durant le tournage de L'Armée des ombres, et notamment sur sa participation à une "version anglaise" du film que conteste le producteur Jacques Dorfmann, malgré plusieurs témoignages concomitants. Est enfin évoqué le cas particulier de Simone Signoret, que Melville "détestait" et refusait de ménager, quand bien même elle traversait une phase difficile de sa vie. De toutes ces riches anecdotes ressort un portrait de Jean-Pierre Melville comme d'un homme intransigeant, sûr de son geste artistique, et qui dégageait une aura de "patron" ou de "parrain", comme il est plusieurs fois appelé.

Dans le boîtier du Blu-ray figure également un livret d'une quinzaine de pages (abondamment illustré) qui contient un texte d'Olivier Bohler, évoquant à la fois le film (et notamment le polémique du défilé devant l'Arc de Triomphe qui l'ouvre), la réception critique à sa sortie ou la réhabilitation tardive (venue notamment des Etats-Unis) du film.

En savoir plus

Taille du Disque : 48 891 746 043 bytes
Taille du Film : 36 012 539 904 bytes
Durée : 2:24:41.666
Total Bitrate: 33,18 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 27000 kbps / 1080p / 24 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: DTS-HD Master Audio / French / 2085 kbps / 2.0 / 48 kHz / 2085 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Audio: DTS-HD Master Audio / German / 2084 kbps / 2.0 / 48 kHz / 2084 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)

Par Antoine Royer - le 13 mai 2015