J'suis grave à la bourre. Heureusement, la rétro finit aujourd'hui
Le moulin du Pô (1949)
En 1880, alors que des meuniers, et leur moulin flottant, subissent des taxes écrasantes du gouvernement, des paysans voisins commencent à adhérer à des thèses socialistes quand leur propriétaire foncier entend moderniser les techniques agricoles pour réduire la main d’œuvre.
Du bon et du moins bon dans ce drame sous grosse influence de
la Terre tremble que je voulais voir depuis pas mal d'années, notamment pour la présence de Fellini au scénario.
Premier gros point noir : l’interprétation est pénible de vociférations, de cabotinages et de gesticulations outrancières. Ca en devient strident dès que la famille des meunier est à l'image, surtout le fiston avec son jeu sous amphétamine grimaçant.
Ensuite, contrairement au film de Visconti, le scénario est loin d'avoir la même justesse, la même intégrité et sincérité. Son ancrage social semble presque être un argument publicitaire. D'ailleurs, la dimension néo-réaliste disparait tout simplement du dernier acte qui n'est plus qu'une histoire de vengeance mélodramatique.
De quoi gâcher un postulat assez riche qui brassait beaucoup de sujets et devait permettre de dresser un portrait nuancé et non manichéen de l'époque entre injustice sociale, début des luttes politiques, conservatisme (pour ne pas dire obscurantisme), manque de mixité entre les différentes corps de métiers, place de l'église, première "suffragette" etc...
C'est d'autant plus rageant que visuellement, Lattuada se surpasse et offre une succession de plans tous plus inspirés les uns que les autres avec une photographie de toute beauté. Certains moments sont d'une beauté quasi Fordienne quand d'autres sont d'une force picturale remarquable comme lorsque les femmes font face aux soldats venus faucher les blés à la place des grévistes.
Mais on ne ressent que très rarement une adéquation entre le fond et la forme qui sont traités comme deux choses distinctes.
La steppe (1962)
A la mort de sa grand-père, un orphelin est envoyé chez une tante qu'il n'a jamais vu pour un long voyage où il est accompagné d'adultes qui lui sont inconnus.
Une ambitieuse adaptation de Tchekhov dont la copie présentée à la cinémathèque ne lui rendait pas honneur : couleurs un peu virées, état endommagé, et plusieurs passages manquants avec une dizaine de minutes en moins à priori. Pas toujours facile de savoir si la narration est parfois bancale à cause de ces trous involontaires ou à cause du cinéaste, ce qui ne serait qu'à moitié surprenant venant de Lattuada.
On trouve donc autant de bonnes choses que des maladresses gênantes. Le principal regret que j'aurais est que le film n'est pas entièrement focalisé sur le garçon, avec pas mal de séquences où ce dernier est absent. C'est pourtant lui qui est au cœur de l'histoire pour un périple initiatique qui annonce la fin de son enfance et de son innocence.
Les meilleures séquence sont celles où il reste témoin de la vie de la nature et sa population pour une mise en scène attentive au rythme et à une certaine exaltation, mêlant inquiétude et curiosité.
Et formellement, c'est souvent un régal avec un scope qui impressionne dès les premiers plans à capturer jusqu'à la texture même du mobilier et des paysages. Le film a beau avoir été filmé en Yougoslavie, Lattuada est pleinement imprégné de l'esprit Russe.
Je rêve désormais de le voir dans de meilleure conditions, un p'tit blu-ray tiré d'un master 4k par exemple. Mais quelque chose me dit que c'est pas pour tout de suite.