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Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 16:09
par Julien Léonard
Le péplum italien... ce peplum si baroque et si fou, et qui méritait bien un topic à lui tout seul.
Le péplum américain se présente sous forme de très grosses productions budgétées, à base de stars, en règle générale doté de décors faramineux et de mouvements de foules très impressionnants. Vitrine pour les grands studios et leur richesse, le péplum américain doit s'affirmer comme un divertissement noble, long (en général pas moins de 2H30, et cela jusqu'à près de 4H) et surtout austère : les sentiments humains s'y confrontent, s'y déchirent entre eux, les personnages souffrent de façon tragique au sens le plus noble du terme, et l'inceste, la famille, la religion, la violence y sont souvent des sujets bien traités. On citera volontiers Ben-Hur, Cléôpatre, La tunique, Les gladiateurs (suite de La tunique), Spartacus, La terre des pharaons, L'Egyptien, La chute de l'Empire romain, Quo vadis... Du moment que cela reste du récit situé dans l'antiquité (généralement Rome et l'Egypte).

Le péplum italien, c'est très différent. On y voit Rome, l'Egypte, mais aussi beaucoup la Grèce. Le budget est bien moindre, les films moins longs (en moyenne 1H20 ou 1H30, parfois un peu plus) et les sujets traités entre deux eaux. L'italie, c'est le baroque, les couleurs criardes, les décors à la limite de la Fantasy ou de la SF, et des héros plus grands que la vie. On peut y croiser :

-Un registre noble (Les légions de Cléopâtre, La guerre de Troie, Carthage en flammes, Le colosse de Rhodes...). Du drame historico-fictionnel, mélangeant diverses influences, souvent aidé par un budget convenable, même si cela n'a rien à voir avec le péplum américain et sa démesure.

-Un registre plus routinier, sur le mode de l'aventure (Les travaux d'Hercule, Hercule et la reine de Lydie, Hercule à la conquête de l'Atlantide, Maciste et les mines du roi Salomon, Maciste et les filles de la vallée, La terreur des Kirghiz, Le géant de Metropolis...). Le budget va du convenable à l'insuffisant, les idées de l'intéressant au grotesque.

-Une dose d'humour. Selon les metteurs en scène, et cela de manière volontaire ou involontaire (ce qui est plus embêtant), on y trouve souvent de bonnes répliques assez drôles ou des situations kitschs à souhait. Ce n'est d'ailleurs pas pour déplaire au spectateur.

-Un érotisme encore suggéré mais plus démonstratif qu'à Hollywood. Les femmes y sont fort belles et souvent en partie dévêtues. Bien entendu, tout ceci reste chaste, suffisamment pour ne pas encourir les foudres de la censure.

-Des héros bodybuildés, souvent ex-champions du monde de culturisme, plus habitué à bander les muscles qu'à jouer la comédie. De Steve Reeves (le plus connu) à Reg Park (le plus sympathique), en passant par Mark Forest et Gordon Mitchell. Hercule, Maciste et autres guerriers pseudo-historiques y sont ainsi fort musclés.

-Une "réalité" qui ne prétend pas au réalisme de l'histoire ou à la crédibilité : l'Histoire est fantasmée, et non rapportée.


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Hercule à la conquête de l'Atlantide (Ercole alla conquista di Atlantide) - Réalisé par Vittorio Cottafavi / 1961 :

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Vittorio Cottafavi est visiblement un réalisateur davantage intellectuel, éduqué et aristocratique. Sa venue dans le monde du péplum ne s'est faite que par défaut, à cause d'une carrière souvent critiquée. Son intelligence se reflète néanmoins dans ses péplums, offrant ainsi au public quelques-uns des meilleurs fleurons du genre : l'intéressant Messaline et le superbe Les légions de Cléopâtre. Il signe ici son deuxième Hercule, c'est à dire chronologiquement le quatrième Hercule produit en Italie à cette époque me semble-t-il (depuis Les travaux d'Hercule en 1958). Un excellent spectacle, fort rythmé et plastiquement magnifique. Les couleurs y sont célébrées avec brio et les décors s'insèrent parfaitement dans une histoire où le mythe de l'Atlantide a toute sa place. Le scénario est intelligent (avec une parabole moderne sur le nazisme et le danger nucléaire) et le rythme trépidant. On ne s'ennuie pas une seule seconde, on rit bien en certaines occasions (notamment avec la maladresse de jeu de Reg Park), on suit les nombreuses péripéties avec plaisir (bagarres, destruction massive du décor, poursuite en chars, incendies...) et on regarde les effets spéciaux désuets avec sympathie. Reg Park atteint très vite les limites de son jeu, c'en est parfois un peu ridicule, mais son physique massif et son air débonnaire en font un Hercule très convaincant, moins souple mais plus attachant et tranquille que celui de Steve Reeves.
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Hercule à la conquête de l'Atlantide est un film parfait pour entrer dans le péplum italien avec tout ce qu'il a de plus kitsch et aventureux. Le discours est simple mais rigoureux, l'ensemble se tient admirablement, et sans parler de chef-d'oeuvre, on peut sans problème parler d'un très bon film d'aventure pour toute la famille. L'un des meilleurs Hercule de cette période italienne.
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Et grâce à Reg Park (un vrai beau gosse), on se marre bien !

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 16:32
par Père Jules
Ça c'est une chic idée d'autant que je n'y connais absolument rien.
Deux ou trois titres "phares" pour démarrer à me proposer (hormis cet Hercule) ?

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 16:45
par Jeremy Fox
J'en ai vu une bonne vingtaine lorsque Canal + en diffusait au sein de sa case cinéma de quartier mais je n'ai souvenir d'aucun même s'il me semble avoir passé de bons moments devant les Cottafavi. Même le péplum de Leone m'avait passablement ennuyé :oops: Je reste plus hollywoodien concernant le peplum mais lirais avec attention les divers avis.

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 16:52
par julien
Le film précédent de Cottafavi, La Vengeance d'Hercule n'était pas terrible par contre il y avait quelques séquences assez rigolotes, notamment une où Hercule se retrouve en enfer et se bat contre une sorte d'homme chauves-souris. Bon c'est sûr, il faut aimer le kitsch.

[youtube]5xedgzD8eX0 [/youtube]

J'ai jamais su d'ailleurs qui avait composé cette étrange musique électronique que l'on entend sur la séquence. Je pense pas que ça soit Alexander Derevitsky, le compositeur crédité au générique, c'est pas tellement son style. Gino Marinuzzi jr peut-être ?

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 17:04
par Julien Léonard
Père Jules a écrit :Ça c'est une chic idée d'autant que je n'y connais absolument rien.
Deux ou trois titres "phares" pour démarrer à me proposer (hormis cet Hercule) ?
Voici trois ou quatre titres, histoire de commencer :

Hercule à la conquête de l'Atlantide : avis ci-dessus.
Hercule contre les vampires : très étonnant, avec encore une fois Reg Park dans le rôle titre.
Hercule et la reine de Lydie : le deuxième opus, avec Steve Reeves, très sympathique.
Les légions de Cléopâtre : le chef-d'oeuvre de Cottafavi concernant le péplum. Très beau !
Le géant de Metropolis : SF, péplum et aventure, visuellement très beau... Kitsch, oui, mais très inattendu. Et puis les actrices (ci-dessous)... :oops:
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Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 17:10
par hellrick
J'y ajoute
- Le fils de Spartacus
- Le Triomphe d'Hercule
- Maciste en enfer
- Le géant de Thessalie
- Les Titans

:wink:

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 17:25
par Profondo Rosso
Dans les indispensable j'ajouterais

Les Titans de Duccio Tessari : Peplum mythologique avec un Giulano Genma qui change complètement des musculeux habituel, une sorte de héros de cape et d'épée astucieux et sautillant venu s'incruster dans le péplum et jouant plus de son esprit que de sa force, vraiment génial (Asterix n'est pas loin dans l'esprit).

Attila fléau de dieu de Pietro Francisi : Grand péplum aux moyens inhabituel pour le genre, Anthony Quinn fabuleux en Attila, des scènes de batailles impressionnante et une reflexion plutôt intéressante.

Ulysse de Mario Camerini : La meilleure adaptation de L'Illiade, là aussi gros moyen vu que c'est une coproduction entre De Laurentis et les US. Kirk Douglas parfait en Ulysse, Silvana Mangano magnifique en double rôle Circé/Penelope de la poésie de l'aventure c'est excellent.

Theodora imperatrice de Byzance de Riccardo Freda : Entre rigueur historique et gros sérial une trépidante évocation de l'ascension de l'impératrice issue du peuple Théodora avec une très sexy Gianan Maria Canale :oops:

Et sinon oui les quatre premiers Hercule son vraiment bon d'accord avec Julien Leonard surtout les deux Cottafavi. Je verrai bien Les Légions de Cléôpatre d'ailleurs jamais pu mettre la main dessus. Je n'ose citer le Caligula de Tinto Brass mais sacrée ovni quand même :mrgreen: . Très fan du péplum italien pour ma part !
hellrick a écrit :.
- Le géant de Thessalie.:
Celui là je l'ai découvert l'an dernier à la Cinémathèque à l'occasion de la rétrospective Riccardo freda. j'n attendais beaucoup vu qu'il est régulièrement cité dans les classiques du genre j'ai trouvé ça très mauvais grosse déception...

J'en avais dit ça
Le Géant de Thessalie de Riccardo Freda (1960)

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Et bien grosse déception j'en attendais beaucoup de celui là c'est assez mauvais. L'histoire se veux une illustration de l'épopée de Jason et ses argonautes, mais les scénaristes n'ont pas dû réviser leur mythologie grecque tant ça s'emmêle les pinceaux. L'enjeu du voyage de Jason n'est donc plus de ramener la toison d'or pour reconquérir son royaume (du moins au départ) mais d'apaiser la colère de Zeus qui par mécontentement a plongé la Thessalie dans le chaos avec des éruptions volcanique quotidienne (qu'on ne verra jamais question de budget sans doute). En fait bien que gardant certains détails de l'histoire de Jason le film est surtout un décalque médiocre de l'Odyssée et plus précisément du "Ulysse" de Mario Camerini auquel il reprend des pans entier de séquences comme le passage avec les sorcières copié sur celui de Circé (jusqu'à utiliser le même artifice avec la même actrice dans un double rôle comme Silvana Magano qui jouait Circé et Pénélope) ou le final vengeur (seul moment un peu palpitant où Freda retrouve ses réflexe des films de cape et d'épée). Sinon c'est incroyablement mou, cheap et mal joué, Roland Carey en Jason a le charisme d'une huitre et Massimo Girotti en Orphée seul personnage intéressant est totalement transparent tandis que Alberto Farnese assure le minimum syndical en méchant. Ca n'arrive même pas à avoir le petit degré de naïveté qui donnerait du charme tant certains effet sont laids, voir l'affrontement avec un Cyclope (L'Odyssée encore) qui justifie son nom uniquement par l'oeil sur son front, parce que sinon c'est un bon vieux recyclage de costume de gorille (on remercie cet escroc de Carlo Rambaldi). La copie fatiguée de la cinémathèque n'aidait pas non plus même si la photo était assez belle, mieux vaut se revoir la version Harryhausen que d'endurer ça. 2/6

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 17:53
par riqueuniee
Et j'ajouterais deux films (qui sont, d'ailleurs, parmi les premiers films que j'ai vus en salles, hors films pour enfants)
Romulus et Remus ( Sergio Corbucci, 1961) avec Steve Reeves et Virna Lisi
Nefertiti, Reine du Nil (Fernando Cerchio, 1961), avec Jeanne Crain, Edmund Purdom et Vincent Price.
Allons, pour la rigolade, Deux nuits avec Cleéopâtre (Mario Mattoli, 1953, avec Ettore Scola parmi les coscénaristes !) , avec Sophia Loren et Alberto Sordi.
Ce film est une parodie, où Sophia Loren interprète à la fois Clopâtre et une jeune femme qui est son sosie.

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:04
par feb
Excellente idée de topic Julien et comme toujours un grand plaisir à lire tes analyses :wink:
Comme Père Jules, je n'y connais rien dans ce type de films mais je suis curieux d'en savoir plus surtout que j'ai remarqué une phrase assez importante dans le 1er message...
Julien Léonard a écrit :Les femmes y sont fort belles et souvent en partie dévêtues.
Je vous prie de bien vouloir insérer des captures à chacune de vos critiques :mrgreen:

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:07
par Julien Léonard
Oui, mais la plupart du temps ça reste dans des proportions raisonnables, pas de quoi faire fuir les enfants de devant la TV. :mrgreen: Et tant mieux d'ailleurs, car j'ai toujours eu une préférence pour le suggestif au cinéma. Bref, en partie dénudées... :wink:

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:12
par feb
Ce qu'il est intéressant de noter c'est que déjà à l'époque la permanente et le maquillage étaient parfaitement maitrisés :mrgreen:

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:16
par Julien Léonard
feb a écrit :Ce qu'il est intéressant de noter c'est que déjà à l'époque la permanente et le maquillage étaient parfaitement maitrisés :mrgreen:
Un art féminin qui transcende les époques ! :mrgreen: Et puis c'est dingue aussi ce que les étés sont caniculaires...

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:18
par daniel gregg
Il y a aussi du même Freda, ce film que je n'ai pas vu et qui apparemment vaut le détour, Spartacco, datant de 1952 avec Massimo Girotti.
Sinon avant le Fabiola de Blasetti (1948) et Scipion l'Africain de Carmine Gallone (1937).

Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:25
par Profondo Rosso
daniel gregg a écrit :Il y a aussi du même Freda, ce film que je n'ai pas vu et qui apparemment vaut le détour, Spartacco, datant de 1952 avec Massimo Girotti.
Très sympa celui là vu aussi lors la rétro Freda à la Cinémathèque ça ne vaut pas la version Kubrick mais c'est le fait bien. Avec une nouvelle fois Gianna Maria Canale dans un rôle bien vénéneux et puisqu'on réclamait des photos :mrgreen:

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Re: Le péplum italien

Publié : 20 juil. 11, 18:29
par daniel gregg
Continuons d'afficher des photos, dés fois que Père Jules ait l'idée de poster une capture pendant que Feb sera tout absorbé dans ce topic... :mrgreen:
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