Alexandre Angel a écrit :Il me semble que c’est toi qui me sur interprètes.
Je pensais pourtant avoir pris quelques précautions. Relis-moi, Major, s’il te plaît. Je n’essayais aucunement de dire qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Je ne décèle rien de monstrueux chez Polanski à faire cet inventaire.
Simplement, quand j’entends (dans la vidéo en question) qu’il n’y a pas d’apologie du viol dans son œuvre, ce qui est une évidence, j’entends les mots « œuvre » et « viol » et je ne peux empêcher que quelque chose qui ressemble à une connexion clignote en mon for intérieur. Ce n’est pas une preuve de quoique ce soit, c’est juste une intuition cinéphilique. Son œuvre ne fait pas l’apologie du viol mais il est fortement question de viol dans son œuvre.
Et ça m’interpelle.
Et tu as beau dire (tout en ayant raison de rationnaliser), le thème est là, et bien là, dans toute à sa récurrence : qu’il soit apporté par Polanski lui-même, par le scénario ou le matériau d’origine, le résultat est là.
Donc oui, sérieusement.
Quant au Pianiste, c’est quand un petit garçon mortellement blessé (blessé comment, on ne le voit pas), s’échappe d’un vasistas en contrebas d’une allée, titube et s’écroule mort devant Adrian Brody, qui passait par là.
Juste avant, toujours hors-champ, on entend (et tu rappelais à juste titre l’effet très suggestif du sound design chez Polanski) une femme hurler. On ne voit rien mais si on connait déjà Macbeth, on se souvient des hurlements (terrifiants) des duègnes que les tueurs envoyés par Macbeth sont en train de violer et d’assassiner pendant que dans une pièce à l’écart, un petit garçon est froidement poignardé.
Je t'ai très bien lu.
Oui c'est un thème de sa filmographie... mais tu n'as pas dis ça, tu as dit que c'est "très très présent" et parlé d' "obsession". J'ai parfaitement compris que tu ne voulais pas l'accabler ou faire un lien stupide, mais la raison que ce thème paraît "très présent" est parce qu'il renvoie, malheureusement, à son affaire.
Un titre d'un de ses courts-métrages,
Le Gros et le maigre (donc grosso modo le fort et le faible), pourrait éventuellement résumer la vraie obsession de Polanski au cinéma: la cruauté et la mesquinerie du monde.
Et de là, différents thèmes divisent sa filmographie:
Le crime (les meurtres ou les viols précédemment énumérés),
La mort (présente dans tous ses films),
Le pouvoir (le costaud Richard et le craintif George dans
Cul-de-sac, le tout-puissant Noah Cross dans
Chinatown, Ruth Lang dans
The Ghost Writer, les sorciers et sorcières dans
Rosemary's Baby ou
Macbeth, l'esclave et son maître dans
Le Gros et le maigre, le comte Von Krolock, etc.),
L'humiliation (en lien avec le pouvoir, car ce sont les forts qui humilient les faibles, comme Don Alfonso Felipe Salamanca de la Torré faisant manger du rat à ses prisonniers dans
Pirates, les nazis faisant danser des juifs dans la rue ou les frappant et les obligeant à marcher dans le caniveau),
La haine (les hooligans dans ses courts-métrages
Deux hommes et une armoire ou
Cassons le bal, les nazis du
Pianiste encore),
La maladie (l'agonisant capitaine Linares dans
Pirates, l'hôpital du
Locataire, le vampirisme du
Bal des vampires, un tremblant colonel atteint de syphilis dans
J'accuse)
L'escroquerie (les profiteurs sans scrupules dans
Le Pianiste, la cleptomane de
La Rivière de diamants, les pirates de
Pirates, les cambriolages dans
Le Locataire, Frantic, ou dernièrement
J'accuse),
La vanité, l'égoïsme, la sexualité, la folie, les hallucinations, etc. etc.
(Aussi j'ai mis entre parenthèses quelques exemples mais ils sont bien plus nombreux.)
Si on voulait parler d'obsessions, elles seraient nombreuses.
Ironiquement,
Tess ou
La Jeune fille la mort sont les films qui évoquent le plus (et de face) le thème du viol (déclinant ensuite sur d'autres thèmes que je viens de lister)... et ce sont des films féministes, même si le réalisateur s'appelle Roman Polanski.