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rodoliv
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Message par rodoliv »

Max Schreck a écrit :
rodoliv a écrit :Merci, je teste ainsi que "Intérieur nuit" que tu mentionnes plus haut :wink:
Je décline toute responsabilité en cas de déception, hein, mais c'est bien le but de ces notes que d'encourager à la curiosité. De mes dernières lectures, je reste quand même sur Les Gens dans l'enveloppe d'Isabelle Monnin, comme plus gros coup de cœur.
Pas de souci, je suis curieux et les quatrième de couv m'ont bien intrigués, je vais jeter un oeil sur Isabelle Monnin itou
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Message par NotBillyTheKid »

Si vous ne savez pas quoi lire cet été... Avant que la prochaine rentrée efface définitivement la précédente, je me permets un petit rappel sur le mien, sorti en septembre denier, avec ce topo sur les critiques parues dans l'année. :D
http://quidamediteur.com/catalogue/made ... aux-abords
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poet77
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Message par poet77 »

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Annie Dillard (née en 1945) est une femme de lettres américaine plutôt discrète, n'aimant guère donner des interviews, et ayant publié des récits autobiographiques, des essais, des poèmes, des romans et des ouvrages de critiques littéraires. Un article du journal « Le Monde » m'apprend qu'elle s'est convertie au catholicisme qu'elle considère comme « une tradition intellectuelle majeure ».

Dans « L'Amour des Maytree », elle entreprend de se réapproprier, en la renouvelant par la singularité de son regard, l'histoire la plus simple et la plus universelle qui soit, celle d'un amour. Mais en vérité, on ne sait pas s'il faut dire d'un ou de deux amours.

En effet, il est question d'un homme appelé Toby Maytree qui, à son retour de la Seconde Guerre mondiale, rencontre et séduit une jeune femme nommée Lou. Tous deux se marient et s'installent à la pointe du Cap Cod (Massachusetts), un lieu où se rassemblent beaucoup d'écrivains et d'artistes non-conformistes. Ils ne tardent pas à avoir un enfant, ce qui n'empêche pas Toby, quelques années plus tard, de partir avec une autre femme, Deary, une femme bohème et séduisante, avec qui il coule des jours heureux dans l'Etat du Maine. La page semble être tournée pour toujours, et pourtant non. Toby retrouvera, bien plus tard, celle avec qui il a vécu en premier, Lou, et non pour une querelle mais pour de vraies retrouvailles et une vie commune.

Singulière histoire, à la fois simple et étonnante, que Annie Dillard raconte avec élégance et un grand sens des détails (trop grand peut-être d'ailleurs, à mon avis...). En filigrane, elle s'interroge sur ce qu'est l'amour. Qu'est-ce qui fait que deux personnes s'aiment, entre des milliards d'autres ? Quelle est cette attirance ? S'agit-il vraiment d'amour ? L'amour peut-il perdurer, même après une rupture ? Autant de questions qui sont posées dans ce livre sans, bien évidemment, recevoir de réponses toutes faites. Mais le plus important n'est-il pas de bien poser les questions plutôt que de fournir les réponses ?

7/10
Max Schreck
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Message par Max Schreck »

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J'ai un peu de mal à retenir le patronyme vraiment trop passe-partout de cet auteur... De Dubois, j'avais seulement lu son Vous plaisantez Monsieur Tanner ?, amusant mais relativement anecdotique. Celui-ci est évidemment d'une toute autre ambition, puisque son sujet est, comme son titre l'indique, celui d'une vie. Vie d'un homme dont les principes ont été en osmose avec les idéaux de mai 68, et qui nous raconte ici ses années de formation, ses amours, ses coups de bol, son regard sur la société française de la Ve république (les chapitres portent les noms des présidents successifs, jusqu'au début des années 2000). Tel que décrit là, ça semble évidemment pas particulièrement intéressant, et c'est le genre de bouquin dont il n'est pas évident de vanter les qualités. C'est la lecture elle-même qui va provoquer l'expérience, le style étant un régal, élégant mais sans tomber dans la préciosité. Et le fait de partager toutes les existences mises ici en scène finit par devenir très émouvant.
C'est toujours raconté à la première personne, et on est souvent tenté de croire que l'auteur y a mis beaucoup de lui-même (plus ou moins le même age, toulousain également).
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Message par poet77 »

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Est-ce parce que son auteur (de son vrai nom Rodney Whitaker 1931-2005) n'a cessé d'entretenir le mystère autour de sa propre personne ? Je n'en sais rien, mais toujours est-il que j'ai du mal à comprendre les louanges accordées à cet auteur et à ce roman en particulier ! La lecture n'en est pas désagréable, mais il ne s'agit, somme toute, que d'un roman d'espionnage à la trame on ne peut plus rebattue et au texte pollué tout du long par une multitude de partis pris qui laissent pantois.
Son héros se nomme Nicholaï Hel, il est élevé au japon où il est initié au jeu de go au point qu'il en devient un maître. Mais, arrêté et torturé par les Américains, lui qui rêvait d'atteindre le shibumi, sorte de détachement suprême transmis par la sagesse japonaise, en vient à mener une vie de vengeur et de tueur des plus expérimentés. Enfin, il décide de se retirer au Pays Basque, de se consacrer à sa passion pour la spéléologie en compagnie d'un étonnant et truculent compagnon appelé Le Cagot, de se délecter dans la volupté d'aimer avec sa compagne Hana, en résumé d'atteindre enfin le shibumi tant désiré. Mais le destin le rattrape en la personne d'une jeune femme prénommée Hannah, poursuivie et recherchée par une agence internationale aux visées meurtrières, la Mother Company, et qui ne demande qu'à en profiter pour se débarrasser du même coup de Nicholaï Hel en personne.
Rien de très original dans cette trame qui associe l'espionnage et l'aventure en les agrémentant d'un soupçon d'érotisme, comme je l'ai déjà indiqué. Il n'y a pas de quoi s'extasier. Ce qui donne au roman un peu d'intérêt, ce sont quelques-uns de ses personnages et les contextes dans lesquels ils évoluent. Mais malheureusement, sur ce point-là, l'auteur a cru bon de farcir son livre de tous les préjugés possibles sur les individus, les peuples et les nations. Au point que ça en devient de plus en plus agaçant au fil des pages. On ne sait pas s'il faut attribuer tous ces préjugés à l'auteur lui-même ou aux personnages caricaturaux qu'il a imaginés, toujours est-il que, même si l'on peut prendre un peu de plaisir à la lecture du livre, on ne peut pas ne pas en repérer les gros défauts. Le personnage de Le Cagot, aussi fantasque soit-il, apparaît comme un fleuron de la caricature. Les Japonais, les Français, les Basques, tous les peuples n'ont droit qu'à un traitement des plus conventionnels, farci de tous les préjugés habituels et mille fois rabâchés. Mais le pire, c'est le sort réservé aux Américains qui sont décrits comme n'étant tous que des marchands ignares, un peu comme si tous les habitants des Etats-Unis étaient des clones de Donald Trump. Je veux bien admettre qu'il y ait pas mal d'individus de cette espèce dans ce pays, mais de là à leur mettre à tous une telle étiquette !!! Même l'ordinateur de la Mother Company semble atteint par les limites que l'auteur se délecte à attribuer aux Américains !
Cet anti-américanisme primaire ainsi que tous les autres raccourcis et préjugés dont le livre est rempli nuisent beaucoup à sa qualité. Que l'un ou l'autre critiques parlent de ce roman comme d'un des « plus grands de la littérature américaine » me déconcerte totalement. Fort heureusement, il ne manque pas de grands écrivains aux Etats-Unis dont les œuvres sont de qualité bien supérieure à « Shibumi ».
5/10
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Message par poet77 »

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Paru pour la première fois en 1985, ce roman a aussitôt été couronné de succès au point qu’il a été traduit dans de multiples langues, n’a cessé d’être réédité et a été vendu, de par le monde, à des millions d’exemplaires. Déjà adapté au cinéma par Volker Schlöndorff en 1990, le voici aujourd’hui arrangé sous forme de série télévisée (que je n’ai pas encore pu voir, mais qui a droit à beaucoup de critiques très élogieuses). Du coup, le récit de Margaret Atwood, qui, paraît-il, est parfois brandi aux États-Unis par les féministes comme un manifeste anti-Trump, connaît un succès encore plus grand qu’avant et ses éditions se vendent comme des petits pains !
Essayons de le lire sans à priori, sans tenir compte de l’engouement dont il fait l’objet, et d’en mesurer la valeur avec un regard neuf autant qu’il est possible. Je m’y suis efforcé et, comme de nombreux autres lecteurs, j’ai été conquis. L’auteure s’est clairement inspirée des grands romans dystopiques (c’est-à-dire décrivant une société imaginaire à tendance cauchemardesque) déjà écrits (et, eux aussi, très justement célèbres) comme « Le Meilleur des Mondes » de Aldous Huxley et « 1984 » de George Orwell. Mais elle a su créer son monde à elle, si l’on peut dire, y insérant des menaces et des peurs spécifiques et ancrées dans les réalités contemporaines. De ce point de vue, même si le livre a été rédigé au milieu des années 80, il est clair que l’arrivée au pouvoir de Donald Trump en réactive considérablement la pertinence.
Le roman étant écrit à la première personne du singulier, il faut accepter, en tant que lecteur, de ne percevoir le monde auquel il nous confronte que de manière partielle, par le truchement du regard de sa narratrice. De plus, comme cette dernière fait partie des classes les plus réprimées et les plus soumises de sa société, sa perception en est forcément affectée. Ce n’est donc que par bribes, et quasiment jamais de manière globale, que l’on découvre l’environnement glaçant dans lequel elle évolue. Seules des « notes historiques », insérées à la fin de l’ouvrage, nous en donnent une vision plus complète en nous faisant appréhender quelque peu les événements qui ont conduit à l’instauration d’un état dictatorial appelé Gilead.
Auparavant, le lecteur doit se contenter de découvrir cet univers terrifiant, dont les frontières semblent se confondre avec celles des États-Unis d’aujourd’hui, en compagnie de Defred, puisque tel est le nom qui a été imposé à la narratrice par ses oppresseurs. Si ce pays semble menacé par des guerres du côté précisément de ses confins, il n’en est pas moins entièrement bâti sur le modèle le plus despotique qui soit : tout y est strictement hiérarchisé et chacun de ses membres doit se conformer au rôle qui lui est attribué, sous peine, s’il s’en écarte, d’être envoyé dans un bagne appelé « les Colonies » ou même puni de mort lors d’une cérémonie macabre, les corps des suppliciés étant ensuite exposés sur un Mur. Il va sans dire que la surveillance est totale, si totale et si répressive que ceux qui en sont chargés sont appelés les « Yeux ».
Au fil du récit sont nommés les différentes catégories de personnes qui composent la société hiérarchique et rigide de Gilead : entre autres, du côté des hommes, en plus des Yeux, les Anges (qui semblent être des combattants) et les Commandants ; du côté des Femmes, les Épouses, les Tantes, les Marthas (qui semblent être des surveillantes) et les Servantes. Ces dernières, dont fait partie Defred, ont pour seule fonction d’être des reproductrices. La baisse de fécondité ayant atteint un seuil critique, les femmes capables de procréer en sont réduites à n’être rien de plus que des réceptacles devant mettre au monde des bébés. Elles doivent être fécondées par les Commandants au cours de Cérémonies au rituel implacable et machinal se déroulant en présence des Épouses, tout cela étant justifié par la lecture de passages bibliques !
Car, il faut le préciser, l’État totalitaire de Gilead a été fondé par des fanatiques religieux : la Bible leur sert de référence ou plutôt des extraits bien choisis de la Bible, car la lecture intégrale en est interdite. Seuls les Commandants sont habilités à lire les passages censés justifier leur conduite. Quant à la religion, au sens le plus rétrograde du terme, elle imprègne tous les comportements et tous les protocoles auxquels sont soumis les habitants de Gilead.
Mais, bien sûr, et c’est ce qui en fait l’intérêt, ce roman ne se contente pas de décrire cette société, il en montre aussi les failles et les hypocrisies. Toute collectivité, aussi assujettie soit-elle, comporte ses fragilités. Derrière les apparences, se dissimulent des réalités cachées, des sentiments interdits, des lieux inattendus, et aussi un réseau secret de rébellion. Et donc, peut-être, un espoir de libération pour Defred et ses semblables…
Étant donné les thèmes qu’il aborde, ce roman à la fois terrifiant et passionnant garde toute sa pertinence. Comme tous les grands récits dystopiques, il prend en compte des réalités de notre temps en les exacerbant afin de nous mettre en garde et de nous rendre vigilants. Que deviendraient nos pays aux mains de fanatiques rétrogrades qui, s’appuyant sur une religion, quelle qu’elle soit, en la dévoyant, asserviraient la population et feraient des femmes des esclaves ? Ces périls, nous rappelle Margaret Atwood dans une brève mais fort intéressante postface, ne sont pas des chimères : c’est « la brutale théocratie de la Nouvelle-Angleterre puritaine du XVIIe siècle, avec ses préjugés contre les femmes » qui est le fondement profond des États-Unis, écrit-elle. En lisant « La Servante écarlate », c’est ce qui vient à l’esprit : soyons sur nos gardes et battons-nous pour que les errements et les terreurs du passé ne se réactivent pas dans le futur ! 9/10
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Profondo Rosso
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Message par Profondo Rosso »

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Tokyo Vice est le récit de l'expérience de Jake Adelstein, seul journaliste occidental ayant pu officier à la rubrique fait divers du Yomiuri, le plus important des journaux quotidien japonais. Le livre narré à la première personne constitue autant une plongée dans les moeurs et la culture japonaise qu'un sacré polar. On y suit l'apprentissage d'Adelstein au sein du journal, des petits larcins provinciaux où il se fait les dents, aux criminels financiers, serial-killer bien tordu ou encore des aspects bien sordides comme une affaire de traite des blanches de femmes occidentales au Japon. Le choc culturel est constant tant dans les rapports singuliers entre journaliste et policier, sur l'indéniable machisme de la société japonaise (tant dans les rapports hommes/femmes au travail que par le traitement assez scandaleux des affaires de viol) et nous fait découvrir une facette vraiment étonnante du pays. Les aspects les plus fascinants restent quand Adelstein s'enfonce vraiment dans les bas-fonds, notamment la description toujours hallucinée du quartier des plaisir de Kabukicho dans les 90's, vrai Sodome et Gomorhe à ciel ouvert. Le recul et l'humour de l'auteur amènent une distance bienvenue même dans les moments les plus glauques et malgré la dimension "histoire vraie" la progression dramatique est remarquable pour nous mener au pic de ce périple japonais, quand Adelstein menacera les intérêts d'un chef yakuza et verra sa vie et celle de sa famille menacée. Passionnant de bout en bout pour les amateurs de récits policier cru et de la culture japonaise.

Lucky Jim de Kingsley Amis

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Premier roman de Kingsley Amis et une des oeuvres clés du courant des "angry young men" dans l'Angleterre sclérosée des années 50. On suit donc les mésaventures du malheureux Jim Dixon, chargé de cours dans une université de province qui a bien du mal à faire son chemin dans une atmosphère guindée et pédante où domine encore la lutte des classes. Sens de l'observation acéré, personnages haut en couleurs, humour corrosif et un héros poissard très attachant, c'est un vrai petit régal à lire, la dimension sociale s'agrémentant d'un triangle amoureux rondement mené. Excellent et ça donne envie de lire d'autres Kingsley Amis (pas beaucoup traduit en français on dirait malheureusement) et de voir l'adaptation qu'on signés les frères Boulting du livre (mais le dvd anglais a l'air assez pourri argh), c'est vraiment taillé pour leur humour féroce.
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Message par Rashomon »

Profondo Rosso a écrit :Excellent et ça donne envie de lire d'autres Kingsley Amis (pas beaucoup traduit en français on dirait malheureusement)
Oui, et c'est assez bizarre que les éditeurs l'ignorent alors que son fils est lui plébiscité. Les Britanniques que je connais sont toujours intrigués de l'apprendre, car le consensus chez eux est que Kingsley est le meilleur des deux. Comme quoi...
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Message par nobody smith »

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La Momie par Anne Rice s’est un peu comme un Twilight avant l’heure. Soit une figure horrifique majeure se retrouvant embarquée dans une histoire à l’eau de rose où la romantisme consiste à répéter toutes les deux pages "y é tro bo". Je suis un chouïa méchant là, l’écriture de Rice étant un peu plus évoluée que celle de Stephenie Meyer. Ce qui n’empêche pas le livre de crouler sous un monceau de caricature plutôt amusant au second degré. La dernière partie voyant une Cléopâtre ressuscité jouer les psychopathes est assez irrésistible en ce sens. J’ai comme l’impression qu’à ce stade du récit, Rice n’avait plus la moindre idée sur la manière de relancer son histoire. Au moins, ça donne un bon petit plaisir coupable.
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Message par Profondo Rosso »

Rashomon a écrit :
Profondo Rosso a écrit :Excellent et ça donne envie de lire d'autres Kingsley Amis (pas beaucoup traduit en français on dirait malheureusement)
Oui, et c'est assez bizarre que les éditeurs l'ignorent alors que son fils est lui plébiscité. Les Britanniques que je connais sont toujours intrigués de l'apprendre, car le consensus chez eux est que Kingsley est le meilleur des deux. Comme quoi...
J'ai pu le constater à Gibert en cherchant un autre Kingsley Amis à lire, il y avait Lucky Jim dans le rayon et tout le reste c'était du Martin Amis :mrgreen:
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Message par Max Schreck »

Lectures estivales :

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J'ai préféré l'édition surdécoupée par J'ai Lu, plus facilement transportable que les monstrueuses intégrales, et ces deux tomes correspondent donc au 1er volet (A game of thrones). Je ne suis pas grand amateur de littérature fantasy, mais la série d'HBO a suffisamment nourri ma curiosité pour que je me décide à me plonger à la source, en espérant que l'auteur aura achevé le cycle d'ici à ce que j'arrive au bout de ce qui a été publié pour l'instant (je ferai sans doute des pauses). Et ça ne me gène pas de me faire spoiler l'intrigue par la série. Mon envie étant précisément de replonger et reparcourir ces terres désormais familières, d'assister aux conflits vécus par cette incroyable foule de personnages tous formidablement campés. Et la satisfaction est au rendez-vous. Quand bien même la traduction serait contestée, le style est aussi précis que fluide, qu'il s'agisse de décrire des lieux rendus étonnamment crédibles, ou les tourments intérieurs de personnages aussi complexes qu'attachants, et bien sûr de mettre en scène des dialogues vifs et émouvants. Et Martin fait preuve d'un talent de conteur d'une redoutable efficacité qui fait de son bouquin un pur page-turner. Quand bien même la construction qui alterne entre différents points de vue pourrait paraître lourde, elle encourage en réalité l'envie d'avancer. C'est aussi l'occasion de constater à quel point les auteurs de la série ont fait preuve d'une volonté de fidélité admirable, et même rare. La saison 1 est en effet parvenue, sans raccourcis et encore moins de trahison, non seulement à capturer l'essence du récit, mais pratiquement à restituer l'ensemble de ses péripéties, sans jamais donner l'impression d'un manque de moyens (travail sur les décors et costumes plein de zèle). L'occasion aussi de reconnaître la réussite du casting, puisqu'évidemment on a en tête les visages des acteurs pendant la lecture et que ça colle merveilleusement. Bref, je me régale de cette lecture, et ai même envie de me retaper la série du début avant d'enchaîner avec la saison 7.



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Le hasard a fait que j'ai enchaîné ces deux livres, tous deux narrés par un enfant à la première personne (dans la lignée de L'Attrape-cœur, de La Vie devant soi, ou d'En attendant Bojangles), avec ce que celà suppose d'inventions lexicales, de tournures faussements naïves et d'expressions cocasses. Sauf que chez Olmi, le fond de l'histoire est plutôt triste, alors que chez Calbérac la mélancolie est transfigurée par la drôlerie des situations et des personnages, rendant la lecture pleine de moments irrésistibles. Les deux livres sont très bons.



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Après le formidable Spin, j'avait été un peu déçu par l'autre roman de Wilson que j'avais lu jusqu'ici, à savoir Julian. Derrière son titre passe-partout que j'ai déjà oublié, ce À travers temps fut plus qu'une bonne pioche. Il s'agit d'un roman publié en 1991 mais où tout le talent de l'auteur est déjà là, à savoir cette capacité à peindre des personnages vrais, et pas du tout des pantins au service d'un pitch-gadget de SF. Le pitch en question est en l'occurence ici génialement exploité, mais si le roman m'a à ce point touché, c'est bien pour ses personnages, dont on partage l'existence de près, leurs espoirs, leurs faiblesses, leurs doutes. C'est un texte finalement assez triste, et passionnant par son sens du suspense. Donc, Wilson reste dans ma liste d'auteurs à suivre.


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Ecrit avec efficacité, avec toujours cette façon de capturer des instants de réel, avec ces scènes de rue, régulièrement observés du balcon par ses personnages. C'est plein de rage, porté par un quête d'idéal. Un bon roman, mais ça reste un "petit" livre.
« Vouloir le bonheur, c'est déjà un peu le bonheur. » (Roland Cassard)
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Message par poet77 »

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Bien que très peu prolifique, Italo Svevo (1861-1928) est considéré aujourd’hui, à juste titre, comme un des grands romanciers du XXe siècle. Pourtant, il n’a écrit que trois grands romans, le troisième seul lui ayant apporté le succès : « La Conscience de Zeno », chef d’œuvre écrit en 1923, 5 ans avant sa mort. Auparavant, il avait publié « Une Vie » en 1892 et « Senilità » en 1898, qui fut un échec critique et commercial au point que Svevo renonça à la littérature pendant plus de vingt ans.
Comme dans ses deux romans ultérieurs, l’écrivain italien raconte, dans « Une Vie », l’histoire d’un antihéros, Alfonso Nitti, un homme dont les illusions de réussite finissent toutes par s’effondrer. Quittant sa terre natale, laissant sa mère, il vient s’établir à Trieste et se voit contraint, pour subsister, d’accepter un travail peu gratifiant et peu rémunéré dans une banque. Assez bien noté cependant, au point qu’il est un jour invité chez le banquier en personne, il y noue une amitié avec un certain Macario, jeune homme ambitieux, et y rencontre une jeune fille de bonne famille prénommée Annetta avec qui il ne tarde pas à nouer une relation, au départ purement intellectuelle. Les deux jeunes gens, en effet, tous deux passionnés de littérature, s’attellent à la rédaction d’un roman écrit à quatre mains. Tout semble sourire à Alfonso qui rêve de gloire littéraire, d’un travail mieux payé et, bientôt, car il se laisse vite toucher par ses charmes, d’un possible mariage avec Annetta. Mais l’intraitable Svevo n’accorde rien à son antihéros : au gré des circonstances et des nécessités (l’obligation de retourner dans sa région d’origine pour être au chevet de sa mère mourante, par exemple), Alfonso se retrouve dépossédé de tout ce qu’il convoitait, y compris d’Annetta qui s’est fiancée à Macario. A la fin du roman, il ne lui reste rien et le choix qu’il fait est le plus désespéré de tous.
Italo Svevo était un écrivain sombre et foncièrement pessimiste, c’est vrai. Et l’on devine que, dans « Une Vie », il a mis beaucoup de lui-même, de ses propres difficultés et de ses propres doutes. Comme Alfonso, son personnage, il rêvait de gloire littéraire tout en se défiant fortement de ses capacités auxquelles il ne croyait guère. Il lui faudra attendre bien des années encore, jusqu’à la parution de « La Conscience de Zeno » pour être enfin reconnu comme un grand écrivain. A l’époque d’ « Une Vie », il n’en est qu’à ses débuts et n’ose croire en ses talents. Ils sont pourtant réels et, si « Une Vie » ne peut prétendre au rang de chef d’œuvre comme « La Conscience de Zeno », ce n’en est pas moins un roman aux qualités d’écriture et de construction tout à fait remarquables. Quant au personnage d’Alfonso, tout empêtré dans ses maladresses et ses incapacités, il n’en est pas moins émouvant. Svevo le rend attachant, d’une certaine façon, en adoptant un ton distancié, voire ironique, qui atténue le caractère foncièrement pessimiste de l’œuvre. 8/10
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Message par poet77 »

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C’est avec ce récit de voyage, édité en Italie en 1986, que Claudio Magris a acquis à juste titre une grande renommée. Certes, la configuration de l’Europe ayant été bouleversée après la chute du mur de Berlin, le livre peut sembler aujourd’hui quelque peu daté, voire obsolète. En vérité, il n’en est rien. Si, de fait, lorsque l’auteur passe de l’autre côté de ce qui était le rideau de fer, il narre ses impressions sans jamais pressentir les changements proches, si, par exemple, il parle de Ceausescu sans aucunement deviner son renversement imminent, ce qu’il relate concernant l’histoire et la géographie de ces contrées n’a évidemment rien perdu de sa pertinence. Le cours du Danube, lui, n’a pas changé, ni les faits historiques qui se sont déroulés aux abords de ses rives.
Se laisser guider par Claudio Magris au fil du fleuve Danube, depuis sa source (ou ses sources, car il y a controverse à ce sujet, au point que le fleuve majestueux pourrait même naître d’une simple gouttière !) jusqu’à son embouchure dans la mer Noire, c’est entreprendre une lecture constamment passionnante, surprenante, instructive et stimulante. Le livre refermé, on n’a qu’un désir, qui est de partir à son tour, de refaire le trajet décrit par l’auteur et de se laisser envoûter à son tour et de visu par la géographie, l’histoire, les peuples, celles et ceux qui ont marqué de leur présence ces régions, etc.
Si le livre de Claudio Magris suscite autant d’intérêt chez le lecteur, c’est parce que, manifestement, l’auteur est curieux de tout, du présent comme du passé des villes et des territoires traversés. Tout le captive, l’émerveille, le questionne et, comme on a affaire à un conteur de grand talent, on ne demande pas mieux, en tant que lecteur, que de suivre l’auteur dans ses recherches et d’adopter ses points de vue. Partout, l’on devine qu’on a affaire à la fois à un chercheur, à un érudit et à un observateur, mais jamais à un professeur ni à un pédant. S’il se plaît volontiers, en s’appuyant sur ses observations ou sur ses connaissances, à exprimer sa philosophie du monde ou de l’histoire, ce n’est jamais de façon prétentieuse et c’est toujours pour tenir des propos judicieux. Ainsi, sa visite du Musée national de l’Horlogerie de Furtwangen, dont il tire parti pour réfléchir sur le temps et l’histoire, ou le souvenir du poète latin Ausone qui lui offre l’occasion de songer aux bienfaits d’Éros, ou encore les émouvantes réflexions qui lui viennent à l’esprit à la vue d’un handicapé dans la ville hongroise de Sopron.
De pays en pays, de territoire en territoire et de ville en ville, partout Claudio Magris détecte et recherche les ombres de celles et ceux, plus ou moins célèbres, qui y ont vécu, qui en ont façonné l’histoire ou qui y ont exercé leur art. Ils sont nombreux, les bords du Danube ayant été le théâtre de beaucoup d’évènements et ayant donné naissance ou ayant attiré beaucoup de personnages plus ou moins illustres, des plus ténébreux (comme les sinistres bourreaux nazis Mengele et Eichmann) aux plus lumineux (comme Hans et Sophie Scholl, originaires de la ville d’Ulm et s’étant opposés à Hitler jusqu’au sacrifice de leur vie, à qui l’auteur consacre un court mais bouleversant chapitre).
En chemin, l’on croise aussi les destinées de princes et de princesses (comme Sissi dont les poèmes ne parlaient que d’insatisfaction et de manque), de musiciens (comme Anton Bruckner, dont la chambre, à Linz, était pauvre et nue, et Franz Liszt), de philosophes (comme Heidegger, aimable pour ses voisins de Forêt-Noire, mais incapable de s’ouvrir aux réalités du monde) et surtout d’écrivains. Ces derniers, bien évidemment, attirent tout spécialement l’attention de Claudio Magris. Tous les pays baignés par le Danube sont aussi des berceaux de littérature : on y marche sur les traces de Céline, trouvant un refuge momentané à Sigmaringen, de Jean-Paul (du côté de Lauingen et Dillingen, villes empreintes de religiosité et de recueillement), de « La Chanson des Nibelungen » (qui fait prévaloir l’amour sur les liens du sang, contrairement à la légende de l’Edda des pays nordiques), d’Adalbert Stifter, de Karl Kraus (qui haïssait Vienne), de Joseph Roth (expert en mélancolie), de Kafka (ayant séjourné dans un sanatorium des Tatras), de Herta Müller, de Paul Celan (dont la poésie se penche sur les bords du silence), d’Elias Canetti, de Ionesco, de Panaït Istrati, et j’en passe.
De la Forêt-Noire, d’Ulm, de Günzburg, d’Ingolstadt, de Ratisbonne, de Passau, de Linz, de Saint-Florian, de Vienne, d’Eisenstadt, de Bratislava, de Budapest (la plus belle ville du Danube, selon Magris), de Pécs (et son vin blanc !), de Bistritza, de Ruse et de plein d’autres lieux, de paysages divers, d’empreintes culturelles multiples, de brassages de populations, de langues, de patrimoines, de tout ce vivier qui a pour point commun le Danube, Claudio Magris nous fait découvrir, en grand écrivain, les mille richesses. C’est un voyage qu’on n’oublie pas. 9/10
Max Schreck
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Re: Vos dernières lectures

Message par Max Schreck »

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Sous ce titre tiré d'un précepte yi-king se cache une compilation relativement dense d'articles, reportages, chroniques, conférences et autres notes d'intentions pour projet de film, publiés par l'auteur au cours des 25 dernières années. Le lecteur familier avec l'œuvre de Carrère pourra légitimement reprocher d'inutiles redondances : pas mal de ces textes auront en effet servi de point de départ à ses ouvrages, et le seul intérêt de les voir reproduits ici serait donc avant tout documentaire. L'idée de tout donner à lire est plutôt louable, mais en ce qui concerne ces reportages qui donneront ensuite lieu à des livres aussi riches que L'Adversaire, Un roman russe, D'autres vies que la mienne et Limonov, je n'y ai pas trouvé de plus-value, tant il s'y voient développés.

Heureusement, il reste suffisamment d'autres textes pour compenser cette impression, réflexions vraiment passionnantes sur la méthode de l'écrivain, touchants portraits d'artistes, critiques de livres, et récit de voyage en Russie où la patte de Carrère est toujours présente (et c'est ce que j'apprécie), où la figure de l'auteur ne se dissimule jamais derrière son sujet, affirme pleinement sa présence, sa subjectivité, ses limites. Et c'est là que la note en 4e de couverture se montre pertinente, à savoir que l'ensemble de ces textes peut d'une certaine façon se lire, aussi, comme une autobiographie.

Un recueil que je n'estime donc pas indispensable, et qui à mes yeux serait quand même plutôt destiné aux amateurs de l'écrivain.
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Re: Vos dernières lectures

Message par poet77 »

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Un ouvrage de Mario Vargas Llosa (« Le Paradis – un peu plus loin ») retraçant les destinées exceptionnelles de Paul Gauguin et de sa grand-mère Flora Tristan avait été ma lecture exaltante de juillet 2015. L’écrivain péruvien y décrivait, à sa façon, c’est-à-dire à la manière d’un romancier, les quêtes éperdues de ses deux illustres personnages, tous deux cherchant leur illusoire « paradis ». Ce livre remarquable, passionnant, n’avait cependant pas totalement épuisé mon désir, ou ma soif, de connaître, autant que faire se peut, Paul Gauguin, de déchiffrer un peu, s’il est possible, l’énigme de ce fascinant personnage, encore aujourd’hui décrié, en tant qu’homme sinon en tant que peintre, par des conformistes de tout acabit. Il est toujours si facile, n’est-ce pas, de décrier les mœurs abominables d’autrui, fussent-elles celles d’un peintre mort en 1903 aux îles Marquises, plutôt que de s’examiner soi-même et d’y trouver autant de turpitudes que chez autrui ! Engagé sans limites dans sa quête éperdue, irréaliste mais ne manquant pas de beauté, Paul Gauguin, au fil des années, s’est enfoncé dans une marginalité qui, bien sûr, ne pouvait que susciter de la méfiance et des soupçons du côté d’une certaine bien-pensance hypocrite.
Par rapport à l’ouvrage de Mario Vargas Llosa, celui de Jean-Luc Coatalem me semble apporter un complément précieux et nécessaire. L’écrivain péruvien racontait Paul Gauguin en romancier, il en faisait un personnage de roman, tandis que l’écrivain français propose une approche beaucoup plus historique, sinon documentée. Pour la rédaction de son livre, Jean-Luc Coatalem s’est rendu sur les lieux mêmes, partout où Gauguin a vécu, il a mené son enquête, parfois même retrouvé des descendants du peintre, il a fait un travail d’historien. Du coup, pour qui aime Gauguin et veut sonder un peu du mystère de cet homme, voilà un ouvrage inestimable. Il n’y a rien d’hagiographique dans le portrait que dresse l’écrivain, le peintre se dévoile avec ses petitesses, ses maladresses, ses effrayants égoïsmes. Humainement et artistiquement, il est loin d’être parfait. Non, il est simplement un frère en humanité, mais décidé à aller jusqu’au bout d’un rêve fou, ce rêve qui le conduit à Tahiti, puis aux Marquises où, malade, exténué, il meurt à l’âge de 54 ans. L’homme était sauvage, brutal, refusant de plus en plus la prétendue civilisation qui avait apporté bien des malheurs aux populations autochtones, il détestait les pharisaïsmes et s’en gardait comme de la peste, ce qui, bien sûr, ne convenait pas à tout le monde. Il y avait, chez lui, du paganisme et du christianisme, les deux, mêlés, pour son inlassable recherche de sens. « D’où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? » : un peintre dont l’une des œuvres porte ce titre ne peut pas être quelqu’un de superficiel !
A la page 301 du livre de Jean-Luc Coatalem se trouve un paragraphe résumant parfaitement le portrait de Gauguin qu’il a voulu tracer . Le voici : « Étrange et si marquant destin, subi autant que forcé, désiré autant que haï, mille fois arrangé et recomposé, transcendé et éprouvé à la fois… Paul Gauguin. Faut-il voir dans cette diagonale systématique, cette fuite fondamentale, une leçon de vie ? Il fut courageux et lâche à la fois, déterminé et calculateur, intransigeant et arriviste, généreux dans son art plus que dans son existence. Et pourtant, jusqu’au bout, il reste cet homme qui désire sans fin, obstinément lui-même, jusqu’à l’épure, cherchant à se rapprocher du « centre mystérieux de la pensée ». Avec lui, expliquera l’historien René Huyghe, « s’achève en pleine conscience cette poursuite du réel et des apparences dont l’art d’Occident ne s’était jamais départi depuis le treizième siècle… ». Certes. Mais derrière cette poursuite, qui réinvestit le primitif, il y a une quête mystique, lancinante supplique posée à Dieu lui-même, fût-il inca, chrétien ou maori : « D’où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? ». 9/10
Dernière modification par poet77 le 9 sept. 17, 12:07, modifié 2 fois.
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