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poet77
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Message par poet77 »

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Les prix littéraires n’ayant jamais guidé mes choix de lecture, ce n’est pas parce que ce roman vient de décrocher le Goncourt que j’ai entrepris de le lire, mais plutôt parce que, dès sa parution, il a eu droit à des critiques très élogieuses, et aussi et surtout parce que son action se déroule non loin de mon berceau d’origine, autrement dit en Moselle dans la vallée de la Fensch. Il est d’ailleurs intéressant, pour qui connaît ce territoire, d’apprécier l’art de Nicolas Mathieu qui a su se l’approprier pour en faire quelque chose qui, à la fois, ressemble à l’original et s’en distingue, et ce pas seulement parce qu’il en a changé la plupart des noms, renommant Heillange la ville de Hayange, Lameck la ville de Fameck et la Henne la rivière la Fensch.
En avril dernier, je m’étais amusé à lire le savoureux ouvrage intitulé « Tour de France des Villes incomprises ». Son auteur, Vincent Noyoux, racontait, avec beaucoup d’humour, comment il était parti à la découverte des villes les moins attractives de France, Mulhouse, Vesoul, Guéret, Vierzon, etc. Or un chapitre de ce livre était consacré non pas à une ville mais à toute une vallée : la vallée de la Fensch, bien évidemment. Qui aurait l’idée d’aller visiter un endroit pareil, on se le demande ? Et ne parlons pas d’aller y passer ses vacances !
Or c’est précisément ce que propose, d’une certaine façon, Nicolas Mathieu, dont le roman se déroule sur quatre étés, ceux de 1992, 1994, 1996 et 1998. Quatre étés chauds et étouffants qui suffisent à battre en brèche le préjugé selon lequel il fait toujours gris en Lorraine. Ce n’est pas le ciel qui est gris dans ce roman, mais bien plutôt l’environnement, le lac aux odeurs de pétrole, le vestige rouillé du haut-fourneau, la ville sans attrait. Même la statue de fonte de la Vierge érigée par Wendel au-dessus de la vallée n’y peut rien : elle semble n’avoir plus d’autre fonction que de servir de point de rendez-vous pour les adolescents désoeuvrés.
Deux d’entre eux, Anthony et Hacine, sont au cœur du roman et, autour d’eux, gravitent beaucoup d’autres personnages : leurs parents et d’autres jeunes de Heillange comme Steph, Clem, Elliott, etc. Avec un réalisme souvent très cru, usant d’un style constellé d’argot qui convient parfaitement à son propos, Nicolas Mathieu raconte des vies brisées et des rêves qui ont peu de chances de se réaliser. Les adultes (surtout les hommes) ont déjà baissé les bras ou sont sur le point de le faire jusqu’à, pour certains d’entre eux, sombrer dans l’alcool. Les femmes, d’une certaine façon, s’en sortent mieux, surtout précisément quand elles sont seules, divorcées ou mêmes veuves, c’est-à-dire pouvant enfin profiter librement de ce qui leur reste de vie.
Quant aux jeunes, il n’en est pas un qui ne rêve de quitter la vallée pour se construire une autre vie (qui ne ressemblerait pas à celle de leur père). Or cette aspiration se heurte à de dures réalités et, quand il en est un qui parvient à s’échapper, c’est, le plus souvent, pour être forcé de revenir quelque temps plus tard. Nicolas Mathieu décrit avec justesse la banalité des vies, mais sans en rajouter dans la désolation. La vallée de la Fensch, certes sinistrée, n’en bénéficie pas moins de quelques atouts, parmi lesquels la proximité du Luxembourg où « les paies [sont] bonnes [et] les protections minces ». Quant à Anthony, Hacine et aux autres jeunes, même si leurs vies sont plus ou moins engluées dans des réalités poisseuses, ils ne sont pas dénués de la vitalité qui convient à leur âge.
On ne saurait parler de Nicolas Mathieu comme d’un Zola de seconde classe. Il décrit une réalité qui n’a rien de mirobolant avec le talent d’un homme qui perçoit parfaitement les ambiguïtés d’un territoire et de ses habitants, mais aussi, plus largement, d’une époque. Il le fait, par exemple, non sans ironie, en décrivant, à la fin du livre, l’illusion d’une unité retrouvée lorsque toute la France vibre à l’unisson à l’occasion de la Coupe du Monde de Football de 1998. Il le fait aussi, tout au long du roman, lorsque se présente une opportunité. Car Nicolas Mathieu sait comment caractériser une époque, ses chimères et ses déboires, il sait comment décrire la couleur du temps.
Ainsi, lorsque Anthony, à l’occasion de funérailles, entre dans une église. « Il regardait les vitraux, écrit Nicolas Mathieu, les sculptures, ces images de supplice et de gloire, sans rien comprendre. Le sens de cette langue, pour lui et beaucoup d’autres, était perdu. Il ne demeurait qu’un décorum prétentieux et des gestes tournant à vide. » Peut-on mieux dépeindre, en quelques lignes, le fossé qui sépare désormais le plus grand nombre de nos contemporains d’avec les représentations de la foi catholique ? Rien n’est irrémédiablement perdu cependant, comme le fait remarquer plus loin l’écrivain : « Anthony avait beau ne pas croire à cette fantasia biblique, l’élancement de la pierre, les bleus du vitrail, cette verticalité, ça faisait quand même un truc. » Il reste « un truc », quelque chose que beaucoup ne savent pas nommer et qui, cependant, n’a besoin que d’une occasion, l’entrée dans une église pour un enterrement, pour s’éveiller à la conscience. La question qui se pose à la lecture de ce roman, l’une des questions en tout cas, c’est précisément de pouvoir à nouveau nommer avec davantage de précision et de contenu ce qui n’est qu’un « truc ». Cela vaut pour ce qui concerne le sentiment religieux, pas totalement disparu comme on le constate, comme pour tout le reste. Y a-t-il quoi que ce soit, aujourd’hui, qui puisse donner le goût de vivre et d’entreprendre à ceux qui sont désenchantés ? L’euphorie suscitée par les succès des bleus à l’occasion de la Coupe du monde de football a peu de chance d’y suffire…
Ne nous y trompons pas, ne soyons pas rebutés par la trivialité du style dont use Nicolas Mathieu. Il lui permet de rester au plus près de personnages qui n’emploient pas d’autre langage que celui-là. Le ton est toujours juste et le texte vibre de beaucoup de résonances qui vont droit au cœur. 8/10
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Martine Cachet
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Message par Martine Cachet »

Moi, en ce moment, je suis sur Robinson Crusoé après avoir été très secoué par Sa majesté des Mouches de Golding.

Et j'ai bizarrement énormément de mal avec le premier qui est sur le point de me tomber des mains. Je ne vois en lui qu'une sorte de guide de survie en milieu hostile. Toutes les considérations sur la religion, censées m'éclairer sur le ressenti du personnage, me passent un peu au-dessus.

Est-ce normal ?
Je ne peux rien citer, j'ai pas de mémoire...
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poet77
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Message par poet77 »

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Prévu initialement comme un scénario devant être filmé par André Cayatte (mais le projet cinématographique fut abandonné) et publié pour la première fois en octobre 1968, ce roman de science-fiction a connu, au fil des rééditions, un succès tel qu’il est considéré aujourd’hui comme un classique. Les éditions des Saints Pères viennent d’ailleurs d’en publier le manuscrit original. Mais on peut, bien sûr, se contenter d’un exemplaire de poche disponible aux éditions Pocket. Ce que j’ai fait, pour mon plus grand plaisir de lecteur, un plaisir qui n’a pas faibli un instant tout au long des 410 pages qui le composent.
J’ai lu ce roman avec d’autant plus d’enthousiaste que j’ai compris, dès les premières pages, que j’avais affaire non seulement à un ouvrage formidablement bien écrit mais à une œuvre qui, soixante ans après sa rédaction, reste brûlante d’actualité. Les meilleurs romans de science-fiction sont ceux qui, par le biais d’une histoire totalement fictive se déroulant dans un autre temps que le nôtre, nous parlent d’aujourd’hui.
Quand Barjavel écrivit « La Nuit des Temps », certes, la géopolitique était différente de celle que nous connaissons en 2018. Mais on peut se demander si, fondamentalement, le monde a beaucoup changé. Les menaces qui pèsent sur l’humanité sont d’ailleurs probablement encore plus grandes de nos jours qu’elles ne l’étaient en 1968, ce qui renforce encore la pertinence du roman, lui donnant un caractère quasi prophétique.
Sauf si l’on est de mauvaise foi, on est bien obligé d’admettre, en effet, à présent, que la survie de l’espèce humaine est en jeu. D’ici un laps de temps assez court, la planète Terre pourrait devenir inhabitable. Or, le roman de Barjavel nous fait voyager sur notre planète il y a 900 000 ans, à la rencontre d’une civilisation dont les restes sont enfouis sous les glaces de l’Antarctique. Une civilisation dont on découvre que, précisément, elle a été détruite à cause d’un cataclysme planétaire qu’elle a elle-même déclenché.
Avant d’en arriver là, avant de faire découvrir au lecteur le sort qu’a connu ce monde maintenant enfoui sous la glace, Barjavel raconte comment une mission de scientifiques français est alertée par un son émis dans les profondeurs. Rejointe par des savants du monde entier qui viennent prêter main forte, c’est ainsi qu’est mise à jour la cité disparue sous les glaces dont on finit par apprendre qu’elle se nomme Gondawa. Or, non seulement il en reste des vestiges figés dans le froid de l’Antarctique, mais on finit par découvrir, en son centre, deux rescapés, si l’on peut dire, un homme et une femme cryogénisés depuis 900 000 ans dans l’attente d’un éventuel réveil.
Les scientifiques se mettent à l’œuvre et c’est la femme qui est choisie pour être, la première, éveillée de son sommeil de glace. Non sans difficultés, on parvient, en effet, non seulement à la faire revenir à la vie consciente mais à décrypter sa langue très complexe et à établir un dialogue avec elle. Elle se nomme Eléa et c’est par elle que, petit à petit, se dévoile le sort funeste de Gondawa. Elle raconte l’histoire de sa civilisation condamnée et elle raconte sa propre histoire ainsi que celle de deux de ses compagnons : Païkan, l’homme qu’elle a aimé et qu’elle aime toujours à la manière des gens de son espèce, et Coban, celui qui a imaginé le procédé de cryogénisation devant sauver deux des individus de leur peuple, c’est-à-dire lui-même en vertu de son incomparable science et Eléa en vertu de son incomparable beauté.
Je n’en dis pas davantage pour ne pas dévoiler toutes les péripéties d’un roman qui se présente comme un récit d’aventures à la manière de Jules Verne. Mais ce n’est là qu’un des aspects d’un ouvrage qui, si on le lit attentivement, s’offre au lecteur avec plusieurs niveaux de lecture. On peut, certes, se laisser séduire par les rebondissements d’une histoire très captivante, voire rocambolesque, mais on peut également être attentif à ce que le roman suggère d’un point de vue, disons, philosophique. Car, manifestement, Barjavel a introduit dans ce récit beaucoup de lui-même, beaucoup de ses propres convictions. Je voudrais, pour finir, relever trois d’entre elles.
D’abord ce qui concerne la sexualité ou la jouissance des corps. Barjavel se sert de son style le plus affiné pour raconter, avec un talent sidérant, l’union des corps et, en particulier, de celle d’Eléa et de son aimé Païkan. Ce qu’on comprend, en lisant attentivement ces pages magnifiques, c’est que l’auteur prône une sorte d’innocence des corps et de leur jouissance lorsqu’ils s’unissent l’un à l’autre. Autrement dit, il récuse le regard suspicieux porté sur l’acte sexuel par une grande partie des catholiques depuis saint Paul. Une phrase, qui a retenu mon attention, le dit d’ailleurs assez explicitement (page 323) : « La merveilleuse, la totale innocence d’Eléa leur montrait (aux scientifiques qui découvrent son histoire passionnelle avec Païkan) à quel point la civilisation chrétienne avait – depuis saint Paul et non depuis le Christ – perverti en les condamnant les joies les plus belles que Dieu ait données à l’homme. » C’est donc, selon Barjavel, saint Paul qui est le grand fautif ayant biaisé les regards en les orientant vers une fâcheuse méfiance quant à l’acte sexuel. Je ne peux commenter longuement ce sujet car, pour ce faire, il faudrait rédiger des pages et des pages. Mais j’invite à y réfléchir et à s’interroger quant au rôle joué par saint Paul dans l’élaboration du christianisme naissant.
Une autre conviction qui s’affirme dans le roman de Barjavel peut se résumer plus simplement en écrivant que l’auteur est un pacifiste pessimiste. Autrement dit, il prône la paix, mais sans croire que l’homme soit capable de la préserver. Cette conviction s’exprime à la page 347 lorsqu’un savant anglais propose l’élaboration d’une Déclaration de Loi Universelle qui se résumerait en une phrase : « Je refuse la guerre, quelles qu’en soient les raisons. » Belle déclaration mais dont on comprend rapidement que, l’humanité étant ce qu’elle est, elle ne restera qu’un vœu pieux.
Enfin, la troisième conviction qui m’a sauté aux yeux en lisant ce roman, c’est que, pour l’auteur, la prétendue évolution de l’espèce humaine progressant nécessairement vers le mieux n’est que fantaisie. Ce n’est pas par hasard si Barjavel raconte l’histoire d’un monde disparu il y a 900 000 ans et qui, par bien des aspects, était supérieur au nôtre (ce qui ne l’a d’ailleurs pas empêché d’être anéanti dans un cataclysme). « … il serait peut-être bon, écrit Barjavel à la page 358, il serait peut-être temps de se demander si la perfection n’est pas dans l’enfance, si l’adulte n’est pas qu’un enfant qui a déjà commencé à pourrir… ». Plus crûment et en faisant preuve d’un pessimisme total, l’auteur s’interroge sur l’humanité qui a fini par repeupler le monde longtemps après la catastrophe ayant anéanti le Gondawa : « Ils ont repeuplé le monde et ils sont aussi cons qu’avant, et prêts à faire de nouveau sauter la baraque. C’est pas beau, ça ? C’est l’homme ! ». 9/10
Max Schreck
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Message par Max Schreck »

poet77 a écrit :Prévu initialement comme un scénario devant être filmé par André Cayatte (mais le projet cinématographique fut abandonné)...
J'ignorais ça, et ça ne m'étonne qu'à moitié parce que je me suis toujours dit que ce magnifique roman pourrait très bien se prêter à une adaptation (avec les moyens adéquats pour éviter la SF de pacotille). Bizarre que ça n'ait jamais eu lieu. Alors que côté auteurs de SF français, Pierre Boulle, Robert Merle et Wul ont inspiré le cinéma, j'ai l'impression que seul Barjavel est passé à côté (même Fallet a vu sa Soupe au choux adaptée).
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Jack Griffin
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Message par Jack Griffin »

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Démolir Nisard - Eric Chevillard - 2006

Entreprise de démolition d'un écrivain/ critique littéraire du XIXième siècle , aujourd'hui oublié, prétexte pour Chevillard de jouer avec la figure de l'auteur en en faisant ici une sorte de Némésis sur laquelle va se déployer toute un imaginaire délirant de l'affrontement, de l'injure et du déshonneur proche parfois du cartoon
C’est comme si nous étions reliés par un élastique. Plus je le repousse plus il revient sur moi. Et plus j’y mets de vigueur, plus ce retour est rapide. […] Nous voici confondus dans une embrassade écœurante et contre-nature dont je tente maladroitement de me dépêtrer, entravé par l’élastique emmêlé qui à présent nous ligote l’un à l’autre
L'excès du ton, la liberté de la langue sont ici lié à un humour que j'apprécie, où la démesure et le dérisoire se marient.

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La seule histoire - Julian Barnes 2018

Relation clandestine et amoureuse entre une jeune homme de 19 ans et une femme de 30 ans son aîné dans l'environnement étouffant de la petite bourgeoisie anglaise. Pas de pathos, une écriture limpide, épurée. Livre d'une très grande maitrise dont l'émotion sait surgir avec peu d'effet...ça m'a donné envie de me plonger dans l'oeuvre de Barnes

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Beloved - Toni Morrison, 1988

Récit fantastique dans lequel j'ai eu un peu de mal à rentrer. Je soupçonne la traduction d'être en partie responsable tant l'écriture peine à restituer de façon fluide le parler afro-américain. Le livre baigne dans d'incessantes réminiscences ce qui le rend d'autant plus difficile d'approche mais le récit de cet infanticide et de ce deuil impossible finit par traduire avec élégance la réalité de l'esclavage dans toute sa violence.
Pas vu l'adaptation qu'en a fait Jonathan Demme
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Message par bracesbox »

Ma dernière lecture, "bébé Shanghai" de Wei Hui.
Je vais sur ce site et achète la braces box ici. C'est le meilleur.
The Eye Of Doom
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Message par The Eye Of Doom »

Je viens de terminer un recueil de trois nouvelles de Henry James : les amis des amis, édité par Borges dans la collection célèbre "La Bibliothèque de Babel" chez FMR.
La première qui donne le titre au recueil est remarquable.
On retrouve cet art bizarre d'aller au bout d'une idée simple et de la creuser à fond quitte à amener une réflexion totalement différente. Bon c'est pas clair.
Une mécanique se met en place sur une idée de base dont James tire une intrigue d'une richesse étonnante: ici deux personnes que tout le monde cherche à faire se rencontrer, sans succès . C'est le propre d'un grand écrivain de nouvelles bien sûr.
On comprend en tout cas ce qui a séduit Borges et l'affinite littéraire de l'auteur de La Bibliothèque de Babel pour celui du Tour d'écrou .
Je ne comprend pas vraiment pourquoi cette œuvre est classée dans le registre fantastique. On ne sait jamais ce qui est vraiment arrivé lors de la fameuse soirée et rien ne dit que la narratrice n'est pas en plein délire.
La seconde nouvelle Owen Wingrave est par contre décevante, la chute proposée n'est pas à la hauteur de l'intrigue mise en place. Dommage
La troisième "La vie privée" est plus intrigante. Sous couvert de dépeindre une micro société complètement "hors sol" , pour employer une expression à la mode, James pousse une nouvelle fois son idée à fond sur une piste inattendue, ici jusqu'au frontière du non sens:
Spoiler (cliquez pour afficher)
" un des personnages n'existerait que lorsqu'on le regarde, un autre serait double".
Je connais mal Henry James, une poignee de nouvelles saisissantes et suit preneur de conseils avisés pour de découvrir ses romans.
Max Schreck
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Message par Max Schreck »

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J'avoue que le contenu s'est déjà évaporé de ma mémoire. Mais j'avais plutôt bien aimé cette poignée de nouvelles existentielles.


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Ayant ça sous la main, j'ai eu la curiosité de les lire, curieux d'en savoir un peu plus sur cette histoire. Pas grand chose de neuf, mais c'est toujours intéressant de plonger dans le récit de ce qui fut aux yeux de tous un procès politique. Le bouquin de Barber se veut assez exhaustif sur la procédure, et c'en est presque marrant de constater à quel point certains juges ne pouvaient considérer des aveux qui n'avaient pas été préalablement validés par la torture.


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Brève étude critique et biographique que j'avais envie de lire depuis longtemps. Et qui m'a surtout donné envie de relire Lovecraft, auteur qui a bien accompagné mes terreurs adolescentes.


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Relecture de ce fabuleux roman, qui me laisse admiratif de la richesse de la langue, de l'intelligence des réflexions, et emprunt d'une profonde tristesse. Sensation précieuse de se retrouver dans un monde que l'auteur fait ressurgir du passé avec une incontestable authenticité.


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C'est mon gros coup de cœur. Ça peut certes se lire comme le makingof ahurissant d'un film qui n'aurait jamais du voir le jour, écrit, produit et réalisé en dépit du bon sens, et c'est effectivement souvent hilarant. Mais le texte ne verse jamais dans la moquerie facile pas plus que dans le freak show. J'ai vraiment été touché par le portrait croisé de ces hommes qui tente de mener leur barque et d'accomplir leur destin dans ce miroir aux alouettes qu'est Los Angeles. Sistero et Bissel soignent autant le fond que la forme, une vraie compréhension de la nature humaine s'exprime entre les lignes, et c'est remarquablement écrit. Et oui, ça donne évidemment aussi envie de (re)voir The Room en ayant à l'esprit la manière dont ont été obtenues telle ou telle scène.
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Message par Max Schreck »

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(ça se voit pas forcément ici mais en vrai, les visuels de ces couvertures sont honteusement pixelisés comme si Babel était parti d'un jpg tout pourri)
Alors oui il y a des passages saisissants, et j'ai abordé ce texte avec l'intimidation du lecteur devant ce qu'il estime l'aboutissement d'une œuvre, le dernier roman d'un auteur qui m'a toujours comblé. Ça fait en tout dans les 1200 pages, et cette longueur m'a semblé totalement injustifiée, mettant à plusieurs reprises ma patience à l'épreuve. Mais je me suis acharné.

Markowicz a beau défendre la fidélité au texte, j'en viens à croire que Dosto a été laissé ici plus que jamais en totale roue libre et a livré un manuscrit laissé à l'état de premier jet. Chez un Céline, la loggorhée verbale est constitutive du style. Ici ça fait qu'on se retrouve incapable de suivre des personnages balançant sans arrêt d'un extrême à l'autre. Entre hypocrisie, aveuglement et mensonge, leur indécision est portée à un tel paroxysme qu'ils en deviennent insupportables, capables de penser tout et son contraire dans la même. J'ose écrire que j'ai trouvé la construction du récit pesante, presque théâtrale, avec le dialogue pour seul moteur à la narration. Sans tenir compte des digressions, l'action des 800 premières pages semble ramassée sur une poignée de jours, ce qui pourrait relever de la prouesse. Sauf que les personnages ne cessent de se croiser d'heure en heure comme si la ville n'était constituée que d'une rue et trois maisons. Et je me demande à quoi peut bien ressembler l'adaptation qu'Hollywood en a tiré ?



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Passionnant pavé que j'ai dévoré. C'est une somme non seulement sur l'Histoire de Marvel (j'ignorais que Stan Lee était déjà sur les rangs dans les années 40), mais plus largement sur toute l'Histoire du comic book de super-héros, puisqu'évidemment les 2 se confondent. Portrait inévitablement peu flatteur dès lors qu'il est question du manque total de reconnaissance de ce milieu pour des artistes surexploités et qui n'avaient aucun droit sur leurs œuvres (apparemment même chez DC ils étaient mieux traités). Sans jamais verser dans le réquisitoire, Howe ne se livre pas à une interprétation personnelle, c'est un vrai connaisseur qui reconstitue une chronologie et organise une masse de témoignages à la première personne, sans forcément trancher lorsque des versions divergent. On y croise donc tout le monde, de Kirby et Ditko à Frank Miller, en passant par les Romita, Starlin et autres Neal Adams, sans oublier les odieux McFarlane et Liefeld dont le caractère de gros bourrins se voit ici bien confirmé. On assiste comme si on y était aux moments charnières de la Maison aux idées, aux lancements de séries et de personnages emblématiques (des X-men à Howard the duck), les impasses, les excès, mais aussi les impitoyables fusions-acquisitions qui ont bousculé ses méthodes d'édition.

Dommage d'avoir un visuel de couverture aussi anonyme voire repoussoir pour cette édition française. Et j'ignore ce qu'il en est de l'américaine, je trouve regrettable de n'avoir aucune iconographie, alors que Panini ne devrait pas avoir de difficulté à obtenir quelques droits. Howe fait régulièrement des commentaires bienvenus sur l'art de tel ou tel dessinateur, sur ce qu'a apporté son style à l'industrie, et il s'attarde notamment sur des couvertures ou des épisodes particuliers. C'aurait été magnifique d'avoir quelques illustrations en regard de ces passages permettant de mieux saisir leur importance et de mettre un style en face d'un nom.
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Message par hellrick »

Max Schreck a écrit : Image
Passionnant pavé que j'ai dévoré.
Spoiler (cliquez pour afficher)
C'est une somme non seulement sur l'Histoire de Marvel (j'ignorais que Stan Lee était déjà sur les rangs dans les années 40), mais plus largement sur toute l'Histoire du comic book de super-héros, puisqu'évidemment les 2 se confondent. Portrait inévitablement peu flatteur dès lors qu'il est question du manque total de reconnaissance de ce milieu pour des artistes surexploités et qui n'avaient aucun droit sur leurs œuvres (apparemment même chez DC ils étaient mieux traités). Sans jamais verser dans le réquisitoire, Howe ne se livre pas à une interprétation personnelle, c'est un vrai connaisseur qui reconstitue une chronologie et organise une masse de témoignages à la première personne, sans forcément trancher lorsque des versions divergent. On y croise donc tout le monde, de Kirby et Ditko à Frank Miller, en passant par les Romita, Starlin et autres Neal Adams, sans oublier les odieux McFarlane et Liefeld dont le caractère de gros bourrins se voit ici bien confirmé. On assiste comme si on y était aux moments charnières de la Maison aux idées, aux lancements de séries et de personnages emblématiques (des X-men à Howard the duck), les impasses, les excès, mais aussi les impitoyables fusions-acquisitions qui ont bousculé ses méthodes d'édition.

Dommage d'avoir un visuel de couverture aussi anonyme voire repoussoir pour cette édition française. Et j'ignore ce qu'il en est de l'américaine, je trouve regrettable de n'avoir aucune iconographie, alors que Panini ne devrait pas avoir de difficulté à obtenir quelques droits. Howe fait régulièrement des commentaires bienvenus sur l'art de tel ou tel dessinateur, sur ce qu'a apporté son style à l'industrie, et il s'attarde notamment sur des couvertures ou des épisodes particuliers. C'aurait été magnifique d'avoir quelques illustrations en regard de ces passages permettant de mieux saisir leur importance et de mettre un style en face d'un nom.
Je l'ai trouvé très chouette aussi même si la seconde partie (sur les titres plus récents) avait un peu trop tendance à se focaliser sur le nombre d'exemplaires vendus de tel ou tel titre.
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The Eye Of Doom
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Message par The Eye Of Doom »

Max Schreck a écrit :Image
(ça se voit pas forcément ici mais en vrai, les visuels de ces couvertures sont honteusement pixelisés comme si Babel était parti d'un jpg tout pourri)
Alors oui il y a des passages saisissants, et j'ai abordé ce texte avec l'intimidation du lecteur devant ce qu'il estime l'aboutissement d'une œuvre, le dernier roman d'un auteur qui m'a toujours comblé. Ça fait en tout dans les 1200 pages, et cette longueur m'a semblé totalement injustifiée, mettant à plusieurs reprises ma patience à l'épreuve. Mais je me suis acharné.

Markowicz a beau défendre la fidélité au texte, j'en viens à croire que Dosto a été laissé ici plus que jamais en totale roue libre et a livré un manuscrit laissé à l'état de premier jet. Chez un Céline, la loggorhée verbale est constitutive du style. Ici ça fait qu'on se retrouve incapable de suivre des personnages balançant sans arrêt d'un extrême à l'autre. Entre hypocrisie, aveuglement et mensonge, leur indécision est portée à un tel paroxysme qu'ils en deviennent insupportables, capables de penser tout et son contraire dans la même. J'ose écrire que j'ai trouvé la construction du récit pesante, presque théâtrale, avec le dialogue pour seul moteur à la narration. Sans tenir compte des digressions, l'action des 800 premières pages semble ramassée sur une poignée de jours, ce qui pourrait relever de la prouesse. Sauf que les personnages ne cessent de se croiser d'heure en heure comme si la ville n'était constituée que d'une rue et trois maisons. Et je me demande à quoi peut bien ressembler l'adaptation qu'Hollywood en a tiré ?
.
Je n'ai jamais pu aller au bout.
Tout à fait en phase avec ta proposition. On as l'impression que le texte a été écrit d'un jet et est livre tel quel.
Il faut un effort certain pour rentrer dans cette intrigue qui n'existe que grâce aux personnages écorchés vif qui la porte ( de mémoire). Le lyrisme l'emporte par moment, ce qui a fait que j'ai tenu environ 800 pages. Au 1er tiers du tome deux, une énieme disgression a eu raison de mon courage.
Je n'ai lu que l'Idiot, dans la version du meme traducteur. Pas facile non plus mais c'était plus construit et/ou soutenu dans la progression. (J'ai bien aimé la version de Kurosawa, découverte après).
Si tu as un autre livre à conseiller, je ferais peut être une nouvelle tentative.
J'ai l'impression que Dostoievski est un ecrivain pour ado.
Il faut etre jeune, fébrile et exalté pour apprécier.
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Mama Grande!
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Message par Mama Grande! »

The Eye Of Doom a écrit : Si tu as un autre livre à conseiller, je ferais peut être une nouvelle tentative.
J'ai l'impression que Dostoievski est un ecrivain pour ado.
Il faut etre jeune, fébrile et exalté pour apprécier.
Je n'ai pas encore lu Les freres Karamazov. Des Dostoievski que j'ai lus, toujours dans la traduction de Markowicz, j'ai rarement eu du plaisir pendant la lecture. Néanmoins, des passages hallucinants (dans l'Idiot) et des réflexions (dans Crime et Chatiment) ont continué à m'accompagner depuis. Ce qui est tres rare dans mon cas. Je pense aussi que mon ignorance de la Russie et de sa culture, de sa société, ne m'aide pas.

Si je peux t'en conseiller un, ce serait l'Eternel mari: court, peu de personnages, et percutant.
Max Schreck
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Re: Vos dernières lectures

Message par Max Schreck »

Mama Grande! a écrit :
The Eye Of Doom a écrit : Si tu as un autre livre à conseiller, je ferais peut être une nouvelle tentative.
Je n'ai pas encore lu Les freres Karamazov. Des Dostoievski que j'ai lus, toujours dans la traduction de Markowicz, j'ai rarement eu du plaisir pendant la lecture. Néanmoins, des passages hallucinants (dans l'Idiot) et des réflexions (dans Crime et Chatiment) ont continué à m'accompagner depuis. Ce qui est tres rare dans mon cas. Je pense aussi que mon ignorance de la Russie et de sa culture, de sa société, ne m'aide pas.

Si je peux t'en conseiller un, ce serait l'Eternel mari: court, peu de personnages, et percutant.
J'avais adoré Crime et chatiment, Le Double et je place très haut ses Notes d'un souterrain (retitré parfois Carnets du sous-sol).
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-Kaonashi-
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Re: Vos dernières lectures

Message par -Kaonashi- »

Sur les Karamazov : je l'ai lu il y a deux ans, avec passion, sans être "jeune, fébrile et exalté", tout en retrouvant par instants un côté brouillon de Dostoïevski. Il me semble qu'il a souvent écrit pour éponger ses dettes de jeux, donc en étant certainement pas trop regardant sur la longueur de son texte...
Quoi qu'il en soit, j'avais adoré ce roman, ses personnages forts et fous, indécis, perdus ou illuminés... tout en restant sur le côté à deux reprises, lors des passages forts réputés avec le grand inquisiteur. Dans ces passages, j'ai malheureusement retrouvé ce qui me plaît le moins chez Dostoïevski : une écriture saccadée, répétitive, des phrases sans fin et déstructurées, une incompréhension du sens recherché. Comme dans Le Double et surtout Carnets de sous-sol justement, deux livres que je n'ai pas pu terminer.

Le sentiment de longueur, de fortes digressions, je l'avais eu avec L'Idiot : même si j'étais fasciné par ses personnages, et par des passages fulgurants, la lecture n'avait pas été évidente tout du long.
Et si j'ai eu aussi un peu ce sentiment avec Crime et châtiment, ce n'était pas pour me déplaire, c'est son roman qui m'a le plus séduit et remué. La lecture a été un plaisir ininterrompu.

Je conseille également L'Eternel mari, relativement court, mais également Le Joueur.

Par contre je n'ai aucune attirance pour les adaptations ciné ou scéniques de ses romans. Vouloir adapter Les Frères Karamazov en film, c'est pour moi quelque chose d'aussi saugrenu et improbable que d'adapter Voyage au bout de la nuit ou Cent ans de solitude, c'est oublier qu'au-delà de ce qui est raconté dans ces œuvres littéraires, ce qui en fait la force, l'intérêt et la singularité, c'est le mélange de l'histoire et des thèmes avec un style fort
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angel with dirty face
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Re: Vos dernières lectures

Message par angel with dirty face »

Jack Griffin a écrit :Beloved - Toni Morrison

Récit fantastique dans lequel j'ai eu un peu de mal à rentrer. Je soupçonne la traduction d'être en partie responsable tant l'écriture peine à restituer de façon fluide le parler afro-américain.
J'ai connu la même chose avec Jazz du même auteur, et j'ai tout de suite pensé à un problème de traduction.
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