Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

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joe-ernst
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par joe-ernst »

Commissaire Juve a écrit :
joe-ernst a écrit : Reçu ! :D :D :D
J'allais demander s'il était en rupture de stock (comme l'indique Amazon).
Ann Harding a écrit :Vous pouvez dès à présent pré-commander mon livre sur le site de La Tour Verte.
Mais je crois que j'ai compris.

Cela dit, il me semble avoir lu quelque part que -- dans la vente de livres -- les gens d'Amazon se comportaient comme des gangsters (genre : "la bourse ou la vie").
La livraison de la part de l'éditeur a été très rapide : livre envoyé le 17, reçu le 20 (et j'habite en Suisse !).
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Commissaire Juve »

Supfiction a écrit :L’épisode du train et du chantage des nazis est confirmé par Franck Ferrand dans son podcast de la semaine dernière...
Cela dit, c'était déjà dit dans le doc "L'Occupation sans relâche : Les artistes pendant la guerre" https://www.youtube.com/watch?v=0Ks2SpFO4Lc (voir à partir de 43'20 et tout particulièrement 44'59). Le chroniqueur de Télérama a la mémoire courte (ou il ne regarde pas assez la télé).
Dernière modification par Commissaire Juve le 26 oct. 17, 16:01, modifié 1 fois.
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Ann Harding »

Supfiction a écrit :L’épisode du train et du chantage des nazis est confirmé par Franck Ferrand dans son podcast de la semaine dernière.
Et pour l’anecdote, « Je ne vous aime pas, je ne vous aime pas, je ne vous aime pas » est repris en hommage par Françoise Hardy dans son avant-dernier album.
Je crois que tu ferais mieux de lire mon livre. Il contient de nouvelles informations sur le Voyage à Berlin qui n'ont jamais été publiées auparavant.
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Commissaire Juve »

Sacrée, Ann ! :mrgreen: Bon : je viens de commander ton livre.

C'est moi ou on entend comme une musique céleste ?
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Message par Supfiction »

Je vais probablement l’acheter. Ann, as-tu en partie résolu, l’un des plus grands mystères du cinéma français, le mystère Alfred Greven ?

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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Ann Harding »

Supfiction a écrit :Je vais probablement l’acheter. Ann, as-tu en partie résolu, l’un des plus grands mystères du cinéma français, le mystère Alfred Greven ?
Greven n'aura plus rien d'un mystère quand tu l'auras lu.
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Ann Harding »

Mon livre a été mentionné hier dans Le Masque et la plume sur France Inter par Pierre Murat. On peut réécouter l'émission ici. Ce sont les dernières minutes.
"Un livre formidable écrit par Christine Leteux et publié à La Tour Verte. Il y a beaucoup d'auteurs qui ont écrit sur la Continental et le cinéma allemand, en particulier Jacques Siclier qui avait fait un bouquin... Et là, deux avantages à Christine Leteux, d'abord elle écrit simplement, c'est pas une thèse universitaire. On comprend absolument tout; on comprend que trop bien ce qui s'est passé. Et deuxièmement, elle a eu affaire à toutes les archives, donc c'est vraiment le point définitif. Ca se lit comme un polar et on voit absolument ceux qui se sont très bien conduits et ceux qui se sont un petit moins bien conduits. Et c'est absolument formidable."
Dernière modification par Ann Harding le 6 nov. 17, 14:34, modifié 1 fois.
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Message par Supfiction »

Ann Harding a écrit :
Et c'est absolument formidable."
Je l’entends rien qu’en le lisant, comme si j’y étais.
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Commissaire Juve »

Supfiction a écrit :
Ann Harding a écrit :
Je l’entends rien qu’en le lisant, comme si j’y étais.
Il* a toujours abusé de ce terme. Et c'est savoureux lorsqu'on en connaît l'étymologie. A la base, un truc "formidable", c'est d'abord quelque chose qui suscite la peur, l'effroi ! :lol:

Mais aujourd'hui, cette acception du mot est pratiquement perdue.

Sinon, j'ai reçu le livre depuis un moment (je ne le voyais pas comme ça... en taille... et je me dépêche d'ajouter que ce n'est pas un reproche :mrgreen: ... je suis même bien content qu'il soit comme il est). Mais -- malheureusement -- je n'aurai pas le temps de le lire avant un petit moment.

EDIT : * Je n'avais pas vu le message du "Masque et la plume". Je pensais que tu parlais de Tavernier (qui, lui, voit des trucs "formidables" partout !)
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Message par Ann Harding »

Critique parue dans Le Canard Enchaîné du 8 novembre 2017:
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Message par Commissaire Juve »

Ann Harding a écrit :Critique parue dans Le Canard Enchaîné du 8 novembre 2017:
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Bravo ! 8) (hier, Le Canard n'était pas arrivé, sinon je l'aurais sûrement vu)
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Ann Harding »

Critique publiée dans Télérama du 15 novembre 2017 (à paraître demain):
Le superbe livre de Christine Leteux (Continental Films, Cinéma français sous contrôle allemand, éd. La Tour Verte) remet les pendules à l’heure. Certes, Greven est un allemand raffiné, qui accroche, chaque jour, telle une provocation, son manteau et son chapeau au buste de Hitler dans son bureau, mais il sait aussi se montrer implacable. Harceler Edwige Feuillère qui refuse de travailler pour la Continental après que la firme a racheté son contrat. Forcer Danielle Darrieux à prendre, avec d’autres vedettes, un train pour Berlin, en 1942, pour la première allemande de Premier Rendez-vous.
Le récit se lit comme un roman d’aventures tragiques. Il fait le point sur ce fameux voyage à Berlin en différenciant les acteurs ravis d’en faire partie (Suzy Delair se plaint de ne pas avoir été présentée à Goebbels) et ceux qui y assistent contrains et forcés. Christine Leteux est la seule à avoir réussi à consulter toutes les archives françaises et allemandes sur le sujet, ce lui a permis d’éclaircir des cas très douloureux, comme celui d’Harry Baur.
Il est l’un des comédiens les plus populaires de l’époque : on l’a vu dans Les Misérables, Mollenard, Un Carnet de bal, Volpone, L’Assassinat du Père Noël. C’est dire la stupéfaction des Français lorsqu’ils apprennent que leur vedette adorée a accepté de tourner, en Allemagne, Symphonie eines Lebens. En fait le comédien, dont la femme est juive, a tenté mille prétextes pour refuser. Son état de santé : mais les autorités lui ont promis la présence d’un médecin 24 heures sur 24. Sa méconnaissance de la langue allemande : mais un coach la lui apprendra à vitesse grand V… De retour à Paris après deux séjours éprouvants en Allemagne, Harry Baur et sa femme sont arrêtés, sur la dénonciation d’un ami d’enfance du comédien. Devenu un antisémite forcené, il avait même reproché à un journal d’avoir publié sur la même page la photo de son ex-camarade, un « enjuivé, sale, taré, lâche » et celle d’un être « aussi beau, aussi moral que le Führer ». L’acteur est enfermé dans la prison du Cherche-Midi. A l’un de ses tortionnaires qui s’étonne de le voir se lever alors qu’il s’apprête à le rouer de coups, Harry Baur dit « Ce sera moins lâche, pour vous, de frapper un homme debout. » Il meurt en avril 1943. Un médecin, venu le voir avant son décès, constate qu’il « avait été brutalisé, rossé et frappé avec une violence extrême ».
Le livre s’attache à démêler les responsabilités de chacun. Ceux qui se ruaient sur Alfred Greven avant même qu’ils ne les sollicite (Fernandel, Tino Rossi). Ceux qui travaillaient pour la Continental mais luttaient pour leur indépendance (le cinéaste Henri Decoin). Et ceux qui, au mépris de tout danger, refusaient la moindre proposition (les comédiens Paul Meurisse et Pierre Blanchar). Parmi les comportements les plus détestables, Christine Leteux insiste sur celui de Léo Joannon, réalisateur de second ordre, auteur, avant la guerre, de comédies pas inoubliables : Bibi-la-Purée et Vous n’avez rien à déclarer ? Le scénariste Henri Jeanson l’appelait « la mouche du Boche ». Pour réaliser Caprices, en 1941, Joannon va se livrer à des magouilles ignobles. Il fait signer des contrats antidatés aux vrais auteurs du scénario : Jacques Companeez et Raymond Bernard, interdits de travail parce que juifs, pour s’approprier leur œuvre. Il refuse de les payer, comme il l’avait promis, une fois qu’il est sorti d’affaire. Et lorsque l’un d’eux – Raymond Bernard, se rebiffe et ose l’attaquer en procès, il menace de le dénoncer aux autorités… Le film ne vaut que pour une scène formidable : dans un restaurant huppé, Danielle Darrieux et Albert Préjean créent la panique, à propos d’un lustre gigantesque qui pourrait tomber… On ne peut s’empêcher, aujourd’hui, de mesurer ce que cette fantaisie cachait de lâchetés et d’ignominies. Pierre Murat
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Commissaire Juve »

Désolé, Ann, je réagis simplement parce que je lis tes messages.
... Caprices, en 1941… Le film ne vaut que pour une scène formidable : dans un restaurant huppé, Danielle Darrieux et Albert Préjean créent la panique, à propos d’un lustre gigantesque qui pourrait tomber… On ne peut s’empêcher, aujourd’hui, de mesurer ce que cette fantaisie cachait de lâchetés et d’ignominies. Pierre Murat
… Le film ne vaut que pour ...
C'est le genre de remarque qui me rappelle pourquoi j'ai cessé d'acheter Télérama. Ce côté "arbitre des élégances" avec un zeste de "Fouquier-Tinville", ça me les brise.

"Caprices" est un film très sympa, point barre. Et le fait que Joannon se soit comporté comme une ordure ne fait rien à l'affaire (que je sache : ni les comédiens ni les techniciens ne se sont comportés comme lui... on peut respecter -- et apprécier -- leur boulot).
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par joe-ernst »

Ma petite chronique du livre d'Ann Harding :

Tout d’abord il faut se féliciter qu’un livre paraisse sur un sujet finalement peu ou pas étudié : la Continental Films, soit une compagnie cinématographique dont les fonds allemands servirent à financer des films français pendant l’Occupation.

Le format du livre (un semi-poche) est très agréable et le texte bien mis en page. Le style de Christine Leteux est d’une grande clarté, évitant tout jargon universitaire ; il est même alerte, au point que l’on se surprend à tourner les pages comme s’il s’agissait d’un thriller.

Parlons du fond maintenant : la grande force de ce livre consiste dans le dépouillement des procès-verbaux des commissions d’épuration conservés aux Archives de Paris, rendus publiques il y a quelques années. Cela nous permet de voir comment fonctionnait le système, et ce qu’on a pu reprocher à ceux qui ont travaillé pour la Continental (réalisateurs, acteurs, scénaristes, techniciens) et ce qu’ils ont répondu.

On sent l’empathie et la compréhension de l’auteur pour ces gens de cinéma pendant cette période très dure et tourmentée, où chacun a dû adapter son comportement aux circonstances, sans pour autant renier certaines valeurs. Quelques-uns ont même fait preuve de beaucoup de cran. Si la plupart n’a fait que son travail, parfois contraint et forcé, d’autres en revanche se sont révélés être de véritables ordures. Son approche humaniste la fait aussi parler des petites mains du cinéma, et l’évocation de l’habilleuse de Renée Saint-Cyr est émouvante.

Des chapitres sont consacré à certains films en particulier, et c’est passionnant (pour ma part, parmi tous les films évoqués, j’aimerais beaucoup découvrir Les caves du Majestic et La vie de plaisir).

La limite de ce livre reste cependant la quasi absence de confrontation avec d’autres sources. Certes il faudrait peut-être plusieurs volumes pour étudier les attitudes des uns et des autres, vérifier certaines affirmations ou révélations. Ainsi, parmi ces révélations, celle stupéfiante (pour reprendre les termes de Tavernier au point qu’on peut se demander s’il y croit vraiment lui-même) concernant le destin de Mireille Balin. Pourquoi a-t-on raconté la même triste histoire pendant toutes ces années ? Pourquoi n’a-t-elle pas retravaillé ensuite, au point de finir dans la misère ? Ce livre malheureusement n’apporte pas de réponse. On ne peut donc que souhaiter que d’autres historiens s’emparent du champ de recherche ouvert par Christine, l’amende ou le complète.

Maintenant, pour terminer, un coup de gueule : comment se fait-il qu’en 2017, avec tous les outils informatiques à disposition, il n’y ait pas d’index ? C’est proprement incompréhensible !
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Re: Continental Films - Cinéma français sous contrôle allemand

Message par Ann Harding »

Merci, Joe-ernst. En ce qui concerne l'index, j'en aurais volontiers réalisé un, mais mon éditeur ne le souhaitait pas.
Sache que j'ai fait un vrai travail de confrontation des mémoires en consultant une masse énorme de PV où j'ai soigneusement vérifié les affirmations des uns et des autres. J'ai éliminé beaucoup d'accusations sans fondements. D'ailleurs, les commissions d'épuration du CLCF ont fait un travail remarquable avec des confrontations entre accusateurs, accusés, témoins, etc. Donc, il y a eu un travail en amont de vérification. J'en ai fait une synthèse pour raconter une histoire au jour le jour de la Continental.
Quant à Mireille Balin, c'était un élément un peu accessoire dans mon histoire. Mais, les documents officiels que j'ai trouvés étaient trop importants pour que je ne les mentionnent pas. D'autres pourront approfondir le sujet.
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