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Grâce à la bibliothèque juste à côté de l'appart à Paris, je peux enfin découvrir un manga qui m'attirait bien depuis un moment par son sujet, mais dont le prix me forçait à patienter un peu.
Il s'agit de Gen d'Hiroshima, de Keiji Nakazawa.
Comme le laisse deviner son titre, ce manga a pour sujet central Hiroshima et les évènements dramatiques de 1945.
Pour être plus précis, le premier volume raconte la survie difficile d'une famille japonaise type à Hiroshima pendant l'année 1945, pour se terminer sur le bombardement atomique.
La famille de Gen, petit garçon de 7 ans, est l'objet de violentes critiques et de répressions pour l'engagement du père contre la guerre. Il déclare ouvertement son opposition à l'armée qui appauvrit le Japon et utilise sans vergogne le peuple déjà à bout, et il fustige sans se cacher le bellicisme et le racisme de ses contemporains. En conséquence, le fils aîné de la famille se révolte violemment contre son père et s'engage dans le conflit, pour ne plus avoir à subir les humiliations et insultes des voisins. Le second fils est dans un centre militaire à la campagne, dans la région. Gen vit donc avec ses parents, sa soeur aînée et son frère cadet, à Hiroshima.
Ce premier volume est donc le récit de leur survie dans le Japon en guerre de 1945, et l'auteur décrit les conflits idéologiques et humains dans une situation aussi extrême. On peut reprocher un certain sentimentalisme dans ces anecdotes, mais on sent une certaine vérité, d'autant plus que l'auteur évite la plupart du temps d'être manichéen. Quand il l'est, c'est pour dénoncer la bêtise et l'hypocrisie de l'armée japonaise et sa suprématie. Le 2e volume est le début de l'horreur absolue, du cauchemar brutale et persistant, de l'incompréhension, de l'ignorance. Beaucoup de personnages disparaissent, la description de la ville le 6 août 1945 est sans concession, et si le trait rond et simple de Nakazawa permet un peu de recul, mais l'horreur est bien là, dans la ville, sur les gens, dans les gens, dans leurs réactions et leurs réflexes de survie. Ce volume se concentre sur une période courte, entre le 6 et le 10 août, et c'est en gros une horreur à chaque page. La narration fait très fort car en dépit de ces nombreuses violences, il n'est pas facile d'arrêter la lecture, comme si on espérait que d'un coup, tout aille mieux.
Le 3e volume se déroule entre le 11 et le 18 août (à vérifier). Le Japon a capitulé, mais la situation n'est pas pour autant améliorée pour les survivants d'Hiroshima. Les conséquences de cette bombe, dont ils ne savent rien et ne comprennent pas l'usage, continue à apparaître, encore et encore. Sur la santé des victimes, mais aussi sur le comportement des Japonais de la province proche d'Hiroshima. Sentiment de honte à l'égard d'un membre brûlé, humiliations et quolibets pour les victimes mais aussi pour les survivants, dépouillés de tout, et même souvent d'aides extérieurs.
Je préfère rester évasif sur les faits et gestes de Gen et sa famille dans la suite, pour garder une part de surprise aux éventuels lecteurs. Ce manga fait au total 10 volumes. je vais m'empresser d'aller chercher les 4e et 5e volumes.
La dernière fois que je suis allé à la bibliothèque, j'ai voulu prendre un autre manga, moins déprimant. J'ai aperçu Le Pays des cerisiers de Fumiyo Kôno en rayon, je me souvenait avoir eu envie de le lire, sans me rappeler le sujet...
Bingo ! Ça parle aussi d'Hiroshima, 10 ans et 60 ans après.
Ce qui n'empêche pas les deux nouvelles composant ce volume d'être très joli, assez légère, mais bien claire sur le traumatisme et le souvenir de la bombe chez ceux qui ont vécu l'un des bombardements de près.