Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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The Boogeyman
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Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par The Boogeyman »

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Réalisation et scénario : M. Night Shyamalan
Musique : West Dylan Thordson
Avec : James McAvoy / Bruce Willis / Samuel L. Jackson /Anya Taylor-Joy / Sarah Paulson / Spencer Treat Clark / Charlayne Woodard

Dernière modification par The Boogeyman le 17 janv. 19, 20:24, modifié 1 fois.
" Accélère minouche !" - Michel Poiccard /// “When you have to shoot shoot don't talk” - Tuco Benedicto Pacifico Juan Maria Ramirez /// "Alors tu vois où elles nous ont menées tes ondes négatives, tu devrais avoir honte.” - Oddball dit Le Cinglé /// "Wake up !... Time to die" - Leon Kowalski /// "C'est quoi minouche ?" - Patricia Franchini
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The Boogeyman
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par The Boogeyman »

Glass - 2019 / M. Night Shyamalan _ 6,5

Fini la subtilité et la délicatesse de Incassable, M. Night ouvre les vannes à fond dans une intrigue assez mal rythmée, fait des choix souvent grotesques, se perd lui même dans un récit qu'il veut trop grand mais qu'il a oublié de vraiment construire - et qu'il n'a malheureusement pas pu construire il y a 19 ans.
Le film propose un "trop plein" : comme si Shyamalan saisissait enfin la (sa) "dernière" :?: chance de replonger dans cet univers en ne prenant pas le risque de ne pas assez en raconter dans le cas de ne pas pouvoir en faire un autre. Mais il propose aussi un "pas assez", donnant l'impression qu'il manque un ou deux films entre Incassable et celui ci pour vraiment rendre crédible et cohérent son univers.
Sinon le film tient plutôt bien dans sa 1ere partie, la réalisation de Shyamalan est inventive, entre cadrages tarabiscotés et extensions de scènes du passé. James McAvoy bouffe le film face à un Bruce Willis complètement transparent. Samuel L. Jackson en demi teinte dans un rôle concept qui va au delà de son interprète et de son interprétation.
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harry
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par harry »

Bon ben au final, le twist de Split c'etait pas que c'etait un "spin off" a Unbreakable mais que Shyamalan avait refait un film correct.
Glass c'est le retour a la normale...
Spoiler (cliquez pour afficher)
Par rapport a son illustre original, tout est a cote de la plaque dans ce film. Le twist de merde de la societe secrete sorti tout droit de son cul, le plan naze de Price, la remise en cause des pouvoirs qui ne sert a rien, Willis en mode "rien a foutre" (as usual), le discours "meta/comics" qui aurait pu etre plus pertinent par rapport a la soupe comic books actuelle...
Dernière modification par harry le 24 janv. 19, 10:59, modifié 1 fois.
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Jack Griffin
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Jack Griffin »

Ce que je disais sur Split
[quote]
En premier lieu une mise en scène très travaillée qui ne cesse de jouer avec le spectateur. C'est agréable de voir un film dans lequel chaque cadre, point de vue, choix de hors champ est pensé et réfléchi dans le seul but de faire monter la sauce, de nous laisser dans cet état d'incertitude et d'excitation sur ce qui va suivre...qui plus est avec une grande économie de moyens là encore (de simples face à face assez captivant).
Mais le film déçoit émotionnellement bien que la richesse du scénario avait de quoi emmener le film ailleurs. Shyamalan ne retrouve pas encore la singularité qui le caractérisait pleinement au moins jusqu'à The Happening.
Je ne sais pas si la photo en est la cause ou bien les choix de casting (McAvoy est bien mais paradoxalement sans aspérité, quand à l’héroïne elle n'est pas à la hauteur du poids de son histoire) mais la réduction de l'intrigue au destin des personnages m'a ici à moitié convaincu...Alors que pendant au moins un bon 3/4 d'heure j'étais intrigué (l'ouverture du film est vraiment chouette).
Quand au dernier plan je trouve affolant qu'il fasse autant parler de lui. La vrai déception du film est là : voir Shyamalan se lancer dans ce genre d'entreprise. J'y vois du cynisme et une manière de baisser les bras.
Je n'ai jamais vraiment pensé à une forme de déclin chez ce cinéaste mais plutôt à une grande difficulté à trouver sa place dans le système hollywoodien actuel...Tant qu'il était supporté par Sam Mercer avec à priori une grande liberté artistique il avait les moyens de ses ambitions.
J'ai peur que l'entrée dans les prods Blumhouse ne le fige un peu dans des trucs convenus (c'est pas encore le cas mais ça peut le devenir). Y'a des choses dans The Visit pas trop mal mais comme dit précédemment, je pense que c'est un cinéaste qui mérite des très bons chef op avec une vrai personnalité.[/quote]


Contrairement à ce que je craignais, c'est à dire une "blumisation" de Shyamalan, le cinéaste revient à une certaine essence de son style et le pousse même à une certaine extrémité.
Bien que le film s'affiche comme le volet final d'une trilogie sur le super-héroisme, Shyamalan s'amuse (s'impose?) une grande économie de moyens.
Le film aurait pu être tourner dans une pièce avec 4 acteurs et rappelle la façon dont se terminait la plupart de ses œuvres précédentes (une cave, un abri).
ça entraine du bon et du moins bon...
Dans les points positifs, il y a un plaisir évident de mise en scène dans le travail chorégraphique des nombreux plans séquences et des changements d’échelle à l’intérieur de ceux ci. Une fascination aussi pour ses acteurs mais principalement McAvoy qui vampirise peut être un peu trop l'espace du film. Son jeu arrive à un point d'hystérie et de démonstration technique encore plus poussé que Split.
Le montage, fait de quelques flash back et de reprises d'extraits d'Incassable a du mal à créer une cohésion et une unité même si le film avance de façon un peu surprenante au début et crée un liant un peu étrange entre les personnages qui fait penser à Shining (la musique, réussie, de West Dylan Thordson y fait penser).
Après, le film vire dans un truc théorique et boiteux dont le réalisateur a le secret mais qui ne fonctionnera que moyennement chez le spectateur tant le film a du mal à créer ses propres enjeux. Le film reste très dépendants de ces prédécesseurs (surtout d'incassable en fait) et n'arrive jamais à prendre son envol. Le rétrécissement des lieux, du nombre de protagonistes n'ouvre sur une aucune émotion, aucun dépassement et se recroqueville comme un petit objet référentiel triste et terne.
LordAsriel
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par LordAsriel »

« Je » est un autre... et l'autre, c'est moi


Complexe est le rapport que j'ai avec le cinéma de M. Night Shyamalan. En résonance très forte avec plusieurs de ses obsessions, avec le caractère à la fois mystique et ludique du regard qu'il pose sur l'existence, j'avais à peu près adoré tous ses films jusqu'à Lady in the water (un peu moins The Village, sans doute), sorte de point-limite génial et casse-gueule de son cinéma tout d'allégories introspectives, taquinant régulièrement la lisière du grotesque dans sa foi absolue en les puissances du faux comme instrument d'appréhension du vrai.
Complexe, de fait, ne peut être que le rapport qu'on peut entretenir avec Glass, film-somme et film-vertige qui fonctionne à la fois de manière totalement indépendante en tant que « récit des origines » (d'un éveil, d'un soulèvement...) pour paraphraser Elijah Price son personnage-clé, et à la fois comme le point final de la fable racontant son auteur ainsi que la vision du monde qu'il porte.

Lorsque Split était sorti il y a deux ans, je n'avais pas tout à fait compris l'engouement presque général qui l'avait accompagné. J'y voyais une jolie série B, un peu facile, un peu bourrine sur la rencontre de deux souffrances (celle de Kevin, son héros aux multiples personnalités coupable d'enlèvements sauvages, et celle de Casey l'une des victimes de ces rapts aveugles), mais pas du tout le « retour aux affaires » du cinéaste de Philadelphie que certains annonçaient. A vrai dire, je lui avais préféré The Visit, humble mais maligne incursion dans le genre très codifié du found footage qui était sortie un peu plus d'un an auparavant.
Mais j'aimais bien au final l'idée gonflée d'assumer la constitution d'un Shyamalan Universe, au même titre que ceux édifiés par les firmes Marvel et DC Comics, en assimilant la diégèse de Split à celle de Unbreakable, et l'émergence du Super Vilain The Horde, l'Homme-bête aux 24 facettes, à celle du Super Héros en cape de pluie David Dunn, The Overseer, observée dans ce qu'on pourrait considérer comme le film de la plénitude pour son auteur, conçu il y a presque vingt ans alors qu'il était auréolé par le succès-critique et public de The Sixth Sense. Aussi, quand un prolongement à ces deux longs-métrages super-héroïques a été annoncé, c'est avec curiosité mais sans empressement que je l'ai attendu.

Au final, si chronologiquement Glass se présente comme une suite directe de Split, le film est en réalité thématiquement une œuvre centrale, une sorte de point de symétrie autour duquel se projettent et se rencontrent les deux films précédents, lesquels semblent miraculeusement s'éclairer l'un l'autre, et se compléter à l'exemple des deux faces d'une même pièce. Et absolument TOUT fonctionne sur ce mode de la projection symétrique dans le film, depuis l'écriture jusqu'à la mise en scène.

Dans le récit, il met en regard deux personnages diamétralement opposés qui fonctionnent comme des miroirs inversés l'un de l'autre : le taiseux et ténébreux Super Héros face au fébrile et volubile Super Vilain. Tout l'enjeu de leur réunion réside en vérité en l'illustration de leur parenté secrète. Au fond en effet, l'un comme l'autre ont été forgés par une suite de traumatismes ; l'un comme l'autre s'épanouissent dans le noir (David joue aux anges gardiens dans l'anonymat, Kevin s'est enfoui dans la Horde de ses autres personnalités...) ; l'un comme l'autre ont longtemps été habités par un sentiment de solitude et de marginalité, et ils émergent tous deux d'une douloureuse quête identitaire... Le premier vertige est là, dans le parallèle éclatant qui voit en les antagonistes premiers du récit deux sortes de frères ; ce vertige-là, certes, n'est pas nouveau : il a déjà été esquissé dans le discours final d'Unbreakable où Elijah Price, le fameux Mister Glass qui se révélait être une figure du Mal, expliquait à David Dunn que dans les comics, le héros et son ennemi commençaient souvent par être des amis chers. De manière générale en fait, ce point de friction entre l'horreur et l'idéal est une clé d'écriture de la figure héroïque, parce que c'est la fêlure qui rend un personnage humain, et parce que plus celui-ci se trouve en équilibre sur le fil qui sépare le Vice et la Vertu, plus fascinant il en devient. La figure de Satan, en particulier celle développée dans le Lost Paradise de Milton, découle de cette logique même - et tous ses avatars littéraires et cinématographiques, de Vautrin à Anakin Skywalker, également. Dans les comics, nombre de héros parmi les plus populaires sont travaillés autour de ce fil, c'est d'ailleurs l'un des sujets du très beau long-métrage d'animation inspiré de la série animée Batman dans les 90's, Mask of the Phantasm.
Quoi qu'il en soit, pour scander cette idée, Shyamalan utilise l'affrontement attendu entre les deux personnages et le découpe en deux moments symétriquement placés dans le récit, et animés par la même dramaturgie : face-à-face iconique, entame d'un pugilat homérique, impasse. Choix qui peut apparaître surprenant dans ces deux morceaux de bravoure, et qui pourtant se révèle d'une logique implacable : le point de vue adopté par la caméra. Celle-ci multiplie les plans subjectifs dans la peau de l'un ou l'autre belligérant, et regarde l'adversaire en face, alors que le décor tournoie dans le cadre avec la tension du combat. Ce parti-pris esthétique, repris également à des moments plus calmes dans le récit, répond à une grammaire cinématographique inhabituelle mais tout à fait astucieuse, car il aplanit le regard que pose le spectateur sur les personnages, et permet une identification totale – d'une part d'un personnage à l'autre, d'autre part du spectateur à chaque personnage, avec lequel il se retrouve comme en dialogue.

Au-delà de ces deux protagonistes, on peut citer énormément d'autres éléments fonctionnant en écho l'un à l'autre : depuis Casey l'ex-victime de Kevin et Joseph le fils de David, les deux soutiens complémentaires aux antagonistes, aux infirmiers diversement paumés de l'hôpital psychiatrique qui accueille la partie centrale de l'intrigue, en passant même par le rôle repris par le réalisateur pour son caméo – il incarne en effet l'ex-petite frappe qu'il jouait dans Unbreakable, rédimé et reconverti dix-huit ans plus tard dans le travail de gardien...
Surtout, tous ces éléments sont examinés sous le prisme d'un double regard : celui de la psychiatre Ellie Staple, qui cherche à persuader ses interlocuteurs que leurs prétendus pouvoirs sont illusoires et qu'ils se trouvent dans un délire hallucinatoire ; et celui de son pendant Elijah Price, alias Mr Glass, qui voudrait maintenir en ses partenaires d'asile la foi en leurs aptitudes particulières. La parole de chacun va tour à tour jouer un rôle de révélateur dans l'esprit des êtres autour d'eux, et confronter tous les personnages à eux-mêmes ainsi qu'aux autres.

Difficile à partir de là de ne pas dévoiler des pans importants de l'intrigue pour poursuivre l'analyse. Mais disons simplement que ce qui est stupéfiant, c'est la somme de pistes et de vertiges que le film fait naître et grandir en suivant ce dispositif.
Entre autres, on peut évoquer la dimension politique du récit. Car qu'est-ce qui se joue dans le débat entre la rationalisation d'Ellie et la foi d'Elijah, sinon LA question essentielle qui agite les sociétés modernes en crise ? A savoir : l'individu est-il important ? Peut-il émerger au sein de la collectivité, et exercer un poids sensible sur elle ? Si oui, alors il doit embrasser ses responsabilités et s'efforcer d'agir sur le monde avec les attributs qui sont les siens (ce sont les regroupements citoyens, les mouvements spontanés, l'écocitoyenneté... et encore bien d'autres sujets du moment qui sont en jeu ici). Si non, alors il peut se résigner à regarder le monde et les hommes tomber, parce que de toute façon aucune initiative personnelle ne peut aboutir à quoi que ce soit, seules les institutions établies ont un pouvoir d'action sur le système. Évidemment, en exposant cette interrogation fondamentale, Shyamalan se trouve dans le prolongement direct de questionnements qui étaient déjà au cœur d'Unbreakable, mais aussi d'une autre manière de Signs par exemple, qui s'inquiétaient tous les deux des voies de la destinée, et de la place que chaque être pouvait jouer dans la grande boucle de l'existence.

Mais il va peut-être encore plus loin en donnant aux arbitres du débat une nature pour le moins ambiguë, qu'on pourra reprocher non sans raison au film : on rappelle ainsi, par exemple, qu'Elijah est à l'origine un individu qui a déjà programmé froidement la mort en masse de centaines, voire de milliers d'individus à travers des actes de sabotage ; aussi, donner à sa parole une part de légitimité peut-il apparaître problématique...
Mais il me semble que s'arrêter à ce problème et le stigmatiser serait oublier l'autre cœur battant du film, et de la trilogie entamée il y a une vingtaine d'années pour s'achever ici : la question de la souffrance et de la possibilité de résilience de ses personnages. En ce sens, on doit se rappeler la mission que se fixe la Horde avant toute chose : venger les brisés, parce qu'il n'est lui-même qu'un paquet de souffrance. On doit plus encore se souvenir qu'Elijah, en tant qu'homme de verre, apparaît lui-même d'une certaine façon comme la Douleur incarnée. A ce titre, le personnage me paraît résumer, à travers sa clairvoyance et sa folie mêlées, quelque chose du monde moderne – malade, en pleine déliquescence, engagée dans une fuite en avant, au-delà du débordement, dans sa violence sale et tragique. Et quelque part, cela fait sens, et le film aurait presque pu se terminer avec la même réplique que le premier volet de la trilogie, Elijah comprenant – selon lui - son rôle dans la marche du monde :
I should have known way back when... you know why, David ? Because of the kids... They called me Mr Glass.
De fait, si Elijah est le Verre brisé, et qui brise les autres existences, il est aussi, indirectement, l'instrument optique de rencontres et de reconnaissances : celle d'un jeune homme et d'une jeune femme abîmés par la vie, celle d'un père et de son fils dont la communication était coupée, celle de gens qui ont perdu des êtres chers...
Et pour terminer sur le film, et reprendre un commentaire que j'avais laissé ailleurs je trouve au final que Glass forme avec les deux films qui l'ont précédé une sorte d'objet cathartique ultime. Ce qui me donne notamment des frissons est le fait que les trois titres réunis des œuvres fassent à la fois référence aux trois protagonistes du cycle, à leur auteur et à l'évolution de sa carrière, à une sorte de radiographie de l'état du monde actuel tel qu'il évolue depuis vingt ans, avec une conscience collective grandissante que les sociétés modernes courent au désastre... et aussi, d'une certaine manière, à ce qui pourrait ressembler au parcours intérieur de toute vie humaine : les âges de l'enfance et le besoin d'assurance pour avancer (tu dois oublier tes doutes et t'efforcer d'être Inébranlable) ; les âges de remise en question qui parsèment ta vie d'adulte, laquelle te met En Morceaux et t'induit à une introspection et à une réinvention perpétuelle ; l'âge du bilan qui te fait voir en le monde et les autres le Miroir de ta propre vie. C'est aussi évidemment un grand film sur l'art comme enregistreur et révélateur de nos existences. En ce sens le cinéma de la croyance qui est celui de Shyamalan s'affirme plus que jamais comme le roman-miroir qu'on promène le long du chemin tel que le concevait Stendhal, comme ce qui rend la vie plus intéressante que l'art comme le disait Filliou, tandis qu'à l'instar de Hugo dans la préface des Contemplations, le cinéaste nous murmure à l'oreille, avec sans doute un peu plus de malice et d'autodérision : "Ah ! Insensé qui crois que je ne suis pas toi !"
Cela faisait un certain temps que je n'avais pas eu un tel vertige au moment d'un générique de fin, et arrivé au terme de ce cycle, alors que la démarche de Shyamalan me rappelle en les éléments que je viens de développer le cinéma de Richard Linklater, je lui trouve aussi une qualité essentielle : l'émotion qui vient par le geste. Une main accrochée fermement à un être en miettes ; d'autres serrées les unes contre les autres pour signifier l'espoir et la réconciliation ; les larmes et le hochement de tête d'un enfant... Sans doute les cyniques trouveront-ils certaines de ces images naïves. Pourtant, il suffit de peu au cinéaste américain pour arriver à suggérer l'idée de la seule lumière certaine susceptible de nous guider dans le brouillard de nos consciences et de nos vies : celle de l’œil bienveillant qui reconnaît en notre propre étrangeté à nous-même une part de la sienne.
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Jack Griffin
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Jack Griffin »

Chouette texte
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Flol
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Flol »

Gros ratage à l'écriture pachydermique (la moindre chose est surlignée 8000 fois par les dialogues, là où auparavant Shyalaman passait principalement par la mise en scène pour faire avancer son récit), aussi visuellement terne que musicalement inepte (le score est catastrophique, rendez-nous Newton Howard !).
Les seuls frissons sont venus des flashbacks, me rappelant à quel point Incassable est un film immense. Quand ce Glass est juste un petit machin tout étriqué que j'aurais oublié dans 2 heures.
Cette suite me faisait craindre le pire...et j'ai effectivement eu droit au pire.
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Alexandre Angel
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Alexandre Angel »

Flol a écrit :Gros ratage à l'écriture pachydermique (la moindre chose est surlignée 8000 fois par les dialogues, là où auparavant Shyalaman passait principalement par la mise en scène pour faire avancer son récit), aussi visuellement terne que musicalement inepte (le score est catastrophique, rendez-nous Newton Howard !).
Les seuls frissons sont venus des flashbacks, me rappelant à quel point Incassable est un film immense. Quand ce Glass est juste un petit machin tout étriqué que j'aurais oublié dans 2 heures.
Cette suite me faisait craindre le pire...et j'ai effectivement eu droit au pire.
Ah c'est malin : moi qui était exalté par le texte de LordAsriel.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par LordAsriel »

C'est un cinéma qui a toujours été très clivant, et ce dernier film ne fait pas exception.
Personnellement je suis un peu attristé d'être le seul ici à le défendre, mais en même temps je ne suis pas tant étonné. Même les raisons qui repoussent ou attirent les personnes dans l’œuvre sont très diverses, je le constate parmi mes connaissances - certains trouvant le film bien fichu mais moralement problématique, d'autres théoriquement passionnant mais assommant sur la forme...

En revanche, il me semble que la dimension méta et lourdement explicative des dialogues est absolument voulue parce qu'elle contribue à caractériser le personnage d'Elijah. Et selon moi c'est très malin parce que justement le film ne va pas exactement là où ses panneaux nous l'indiquent.
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par tenia »

Je ne suis pas sûr que Split ou Glass soit particulièrement clivant, mais il est surtout possible que tu aies juste trouvé ces films mellleurs que ce que la plupart des gens l'ont fait.
Et dans ces cas là, gare à la suranalyse.
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Outerlimits »

LordAsriel a écrit :C'est un cinéma qui a toujours été très clivant, et ce dernier film ne fait pas exception.
Personnellement je suis un peu attristé d'être le seul ici à le défendre, mais en même temps je ne suis pas tant étonné.
Au vue des notes de plusieurs membres du forum, tu es loin d'être le seul (j'apprécie moi-même le film).
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par LordAsriel »

Outerlimits a écrit :
LordAsriel a écrit :C'est un cinéma qui a toujours été très clivant, et ce dernier film ne fait pas exception.
Personnellement je suis un peu attristé d'être le seul ici à le défendre, mais en même temps je ne suis pas tant étonné.
Au vue des notes de plusieurs membres du forum, tu es loin d'être le seul (j'apprécie moi-même le film).
Tant mieux si c'est le cas, mais je parlais essentiellement des interventions sur ce fil. :wink:
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par LordAsriel »

tenia a écrit :Je ne suis pas sûr que Split ou Glass soit particulièrement clivant, mais il est surtout possible que tu aies juste trouvé ces films mellleurs que ce que la plupart des gens l'ont fait.
Et dans ces cas là, gare à la suranalyse.
A vrai dire je parle d'expérience, et pas seulement depuis Split : parmi les cinéphiles autour de moi, j'ai été régulièrement, dès ses premiers films, témoin de déchirements entre ceux qui adorent Shyamalan et ceux qui le considèrent comme un imposteur dont ils espèrent à chaque film qu'il fera long feu auprès de ses thuriféraires. Et de fait j'ai plus souvent été témoin de réactions tranchées que de réactions tièdes à la sortie d'un film de ce cinéaste. Ce qui n'empêche pas qu'on peut s'en foutre aussi, hein... :mrgreen:

Quant à la question de la suranalyse, je n'entrerai pas dans le débat, c'est un sujet toujours un peu biaisé, à mon avis. Disons qu'à partir du moment où c'est le film le sujet, et pas seulement un sentiment à son propos, c'est tout ce qui m'intéresse.
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par Flol »

LordAsriel a écrit :En revanche, il me semble que la dimension méta et lourdement explicative des dialogues est absolument voulue parce qu'elle contribue à caractériser le personnage d'Elijah. Et selon moi c'est très malin parce que justement le film ne va pas exactement là où ses panneaux nous l'indiquent.
C'est quand même très facile comme argument ça, non ? Pour moi rien ne peut excuser ou expliquer la sursignifiance des dialogues, ni la répétitivité des situations (on en parle du fait que quand Kevin change de personnalité, la personnalité en question se présente obligatoirement à son interlocuteur, comme si on était incapable de comprendre qu'il s'agit d'une autre personnalité ? 1 ou 2 fois ça va...mais tout le temps, c'est vraiment d'une bêtise à pleurer).

Quant à l'aspect méta, il est non seulement difficilement évitable, étant donné qu'on le répète environ 1 ligne de dialogue sur 2, mais en plus TOUT avait déjà été dit et en bien mieux dans Unbreakable il y a quasiment 20 piges !
Donc dès le départ on sait très bien que Shyamalan va dejouer toutes nos attentes, à ce niveau là il n'y a aucune surprise à attendre (c'est l'inverse, qui aurait été étonnant...genre ce fameux climax en haut de la tour, c'est ÉVIDENT qu'on n'y aura pas droit).
J'y vois vraiment une faiblesse d'écriture et un manque de foi dans l'intelligence du spectateur qui caractérisaient déjà son atroce The Happening.
En gros, oui : j'ai vraiment l'impression que Manoj m'a pris pour un gros teubé pendant 2h10 (enfin moins, parce que j'allais quand même pas m'infliger l'immonde musique du générique de fin jusqu'au bout).
Et ça, c'est jamais très agréable.

PS : je tiens quand même à préciser que je suis étrangement un défenseur de The Lady in the Water.
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Re: Glass (M. Night Shyamalan - 2019)

Message par LordAsriel »

Flol a écrit :
LordAsriel a écrit :En revanche, il me semble que la dimension méta et lourdement explicative des dialogues est absolument voulue parce qu'elle contribue à caractériser le personnage d'Elijah. Et selon moi c'est très malin parce que justement le film ne va pas exactement là où ses panneaux nous l'indiquent.
C'est quand même très facile comme argument ça, non ?
Non, ce n'est pas facile, parce que ce que j'essaie de dire, c'est que précisément, pour moi les dialogues ne sont pas sursignifiants : ils ne font que traduire la logique étriquée d'un étudiant en école de scénario, et s'amuser avec cela. Sauf que la question "comment est fabriqué un comic book ?", ou "qu'y a-t-il derrière le mythe du super héros ?", c'est vraiment un cœur secondaire du film pour moi. D'une part parce que sur ce point Shyamalan ne fait effectivement que prolonger des choses entamées dans Unbreakable, comme tu le disais (bien que TOUT n'eût pas été dit, puisque ici le super pouvoir n'est plus seulement la métaphore d'une vocation à chercher, mais celle d'une force à ne pas étouffer) ; d'autre part parce que l'important, ce sont les trajets intérieurs, pas le reste. Sans déconner, on est censé en avoir quelque chose à foutre qu'il y ait un climax spectaculaire ou qu'il n'y en ait pas ? L'acmé dramatique advient de toute façon, qu'elle soit annoncée ou pas. Et en cela (dans sa progression dramatique, je veux dire) je ne crois pas que le film cherche à être surprenant pour le spectateur.

En ce qui concerne le reste, la musique censément immonde, je t'avoue que je ne l'ai pas remarquée. Et pour les personnalités de Kevin qui se présentent à chaque fois, c'est tout simplement faux, elles se présentent essentiellement lorsqu'elles apparaissent pour la première fois (mais il y en a beaucoup, c'est vrai).
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