Darren Aronofsky

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Avatar de l’utilisateur
Thaddeus
Ewok on the wild side
Messages : 6143
Inscription : 16 févr. 07, 22:49
Localisation : 1612 Havenhurst

Darren Aronofsky

Message par Thaddeus »

Image


π
Être génial peut donner de violentes céphalées : c’est le constat auquel arrive Max lorsqu’il finit par s’aérer le crâne à la perceuse. Sans doute voulu comme le nec plus ultra du cinéma indépendant section underground hardcore (soit plans tarabiscotés, noir et blanc filandreux et intrigue absconse), le film raconte l’histoire d’un jeune mathématicien new-yorkais reclus chez lui en quête du chiffre absolu qui combinerait le savoir universel et la connaissance de Dieu. Entre visions lynchiennes (période Eraserhead) et arabesques ésotériques à la Egoyan, il trace son propre sillon, n’hésitant pas à plonger le suc acide d’une paranoïa hypertrophiée dans une mélasse de plus en plus épaisse qui suscite un onirisme cauchemardesque. Si on est loin du chef-d’œuvre, ce devoir de fin d’école reste assez réussi. 4/6

Requiem for a dream
On connaît tous les spots figurant sur les DVD pour mettre en garde le spectateur, à la faveur d’un montage stroboscopique et d’une musique technoïde, contre les méfaits du piratage. Aronofsy s’emploie à étirer ce genre de clips vidéo sur deux heures, et révèle d’un coup sa nature fondamentale de créateur : un cinéaste très sûr de ses effets, dont la fatuité permanente se donne des airs emphatiques, et dont la forme ampoulée ne laisse aucune marge de manœuvre au spectateur en essayant de forcer son ressenti à grands coups de massue tapageurs. Martelant cette idée-truisme selon laquelle la drogue c’est mal, il opte pour une forme de terrorisme audiovisuel aussi assommant que stérile, traitant une série de pathologies compulsives avec un primarisme qui révèle vite sa part d’esbroufe. 3/6

The fountain
Le fond du gouffre. On y voit un petit Saint-Exupéry rasé qui vole au milieu de sphères célestes debout dans sa bulle de savon, le plus souvent en position de yogi. Tout cela au nom de quoi ? De l’Amour, bien sûr. On peine à imaginer jusqu’à quelles profondeurs de kitsch et de ridicule descend le cinéaste dans sa quête du sublime, tous sourcils froncés. Pris d’une soudaine bouffée de mégalomanie illuminée, le Darren se proclame plus grand métaphysicien-poète du monde et livre une bouillabaisse mystique à mourir de rire, qui aligne les plans grandiloquents en même temps qu’il développe un propos dont le simplisme new-age et l’arrogance satisfaite (toute l’histoire de l’humanité, de la Bible au Cosmos, en une 1h30 s’il-vous-plaît) laissent coi. Pas un film nauséabond, juste une énorme daube. 1/6

The wrestler
De façon inattendue, le cinéaste met alors son ego en veilleuse et témoigne d’une belle humilité pour évoquer la trajectoire rugueuse de ce catcheur sur le retour. Il livre ainsi un superbe mélodrame sur le vieillissement des idoles et l’épuisement d’une époque (les 80’s) dont il fait le requiem vibrant et chagriné. Sans commettre l’erreur d’approcher intellectuellement un sujet sans complexité, sans chercher non plus à en cacher la dimension conventionnelle, le réalisateur revigore les développements autour de la chute, du sacrifice et du rachat de son personnage de père et d’athlète dépassé avec une sincérité brute, une finesse psycho-physique presque hustoniens. Servi par un Mickey Rourke prodigieux, cette œuvre très sensible a pu faire reprendre, contre toute attente, espoir en Aronofsky. Mais chassez le naturel… 5/6
Top 10 Année 2008

Black swan
Psychologie de comptoir, quincaillerie freudienne et puritanisme anesthésiant le moindre trouble par une sorte de glacis chic très contrôlé, sans grâce ni mystère. Aronofsky bouffe à tous les râteliers (Polanski, Cronenberg, Argento, Kon) sans arriver à la cheville de ses modèles, grossit ses effets, surligne tout au stabilo (peluches roses, mère gorgone, overdose de miroirs…), histoire de bien se faire comprendre par les trois spectateurs du fond qui n’auraient pas tout suivi. La pyrotechnie déballée se fait le plus souvent ridicule, puis parvient à susciter un certain souffle lors du très beau final, qui rattrape pas mal de choses. Mais le cinéaste se noie bel et bien dans la lourdeur de ses intentions et de son symbolisme grossier, confirmant son tempérament de bourrin avec un melon énorme. Pachydermique. 3/6


Mon top :

1. The wrestler (2008)
2. π (1998)
3. Black swan (2010)
4. Requiem for a dream (2000)
5. The fountain (2006)

Je n’ai jamais compris l’engouement pour ce gros malin d’Aronofsky, cinéaste tape-à-l’œil et peu subtil ; ou plus exactement, je le comprends en ce qu’il est un parangon d’une conception actuelle du cinéma très en vogue mais à laquelle je suis totalement étranger. Son Wrestler restera sans doute l’exception d’une filmo sans grand intérêt pour moi.
Dernière modification par Thaddeus le 3 déc. 23, 18:58, modifié 3 fois.
Avatar de l’utilisateur
Rockatansky
Le x20, c'est dangereux
Messages : 44649
Inscription : 13 avr. 03, 11:30
Last.fm
Liste DVD

Re: Darren Aronofsky

Message par Rockatansky »

J'aime beaucoup ses deux premiers films, je trouve qu'il y avait quelque chose d'hypnotique, la suite me laisse plus dubitatif, pas réussi à aller au bout de The Fountain sans dormir, le succès critique de The Wrestler reste une totale énigme pour moi, resucée déjà vu à la sauce Rocky, mais le pire restait à venir avec Noé nanard cul béni avec un Russel Crowe illuminé assez ridicule, pas vu les 2 autres films et pas vraiment envie de les voir.
Clear Eyes, Full Hearts Can't Lose !
« S’il est vrai que l’art commercial risque toujours de finir prostituée, il n’est pas moins vrai que l’art non commercial risque toujours de finir vieille fille ».
Erwin Panofsky
Avatar de l’utilisateur
El Dadal
Producteur Exécutif
Messages : 7259
Inscription : 13 mars 10, 01:34
Localisation : Sur son trône de vainqueur du Quiz 2020

Re: Darren Aronofsky

Message par El Dadal »

Requiem for a Dream, c'est l'archetype du film que je me passais en boucle ado mais que je n'ai pas revu depuis des années. A contrario, j'avais craché sur le grand guignol de The Fountain à sa sortie, mais le film joue depuis une petite musique de chambre dans ma tête. The Wrestler, je suis d'accord pour dire que c'est une anomalie dans la carrière de son réal. Une ré-vision récente m'a démontré que le film reste toujours aussi beau et touchant (merci Mickey et Marisa quand même). Black Swan c'est bidon et Noé c'est marrant quand il fait du raisin à poil. J'ai π dans ma liste des dvds non visionnés depuis plus de 15 ans!
mannhunter
Laspalès
Messages : 17361
Inscription : 13 avr. 03, 11:05
Localisation : Haute Normandie et Ile de France!
Contact :

Re: Darren Aronofsky

Message par mannhunter »

Thaddeus a écrit :ce gros malin d’Aronofsky, cinéaste tape-à-l’œil et peu subtil. Son Wrestler restera sans doute l’exception d’une filmo sans grand intérêt pour moi.
Un peu le même ressenti, j'avais été touché par "Requiem for a dream" à sa sortie cinéma en 2001 mais le film s'est un peu dégonflé pour moi à la revoyure, "Noé" bof bof, "The fountain" attachant mais assez raté, "Black swan" sans plus quant au petit dernier :| ...il y a quelque chose de bourrin et un peu fatigant dans son style et la construction paroxystique (christique?) de ses récits. "The wrestler" est peut-être avec le recul son meilleur film, en bonne partie grâce à la prestation de Mickey Rourke.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22129
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Re: Darren Aronofsky

Message par Supfiction »

Et merci aussi Evan Rachel Wood. The wrestler effectivement largement au-dessus du lot grace à ses 3 acteurs.
Oui il y a du Rocky dedans mais alors avec une noirceur sans égal meme dans Rocky Balboa.
aelita
Accessoiriste
Messages : 1769
Inscription : 28 déc. 13, 18:34

Re: Darren Aronofsky

Message par aelita »

j'adore Pi., je trouve Requiem for a dream très intéressant (pas vu depuis longtemps). Par contre, j'ai été déçue par Black swan et je n'ai pas compris le succès critique du film. Sans être aussi sévère que Thaddeus, je trouve que, comme film sur la folie (ou du moins les troubles psychiques), c'est plutôt "léger" (des scènes spectaculaires, mais pas beaucoup de fond). Et comme film sur la danse, c'est pire : le film réunit tous les clichés sur le sujet sans en oublier un seul.
Natalie Portman est bien, mais ce qu'elle a à jouer est tout de même très convenu.
The wrestler, c'est pas mal du tout (et le film reste dans le domaine du pur réalisme). Mais je crois que le film doit beaucoup à la présence de Mickey Rourke dans le rôle du catcheur en fin de course (genre l'acteur dont on pensait qu'il avait touché le fond et qui revient avec un bon rôle). Et je m'aperçois que j'avais quasiment oublié le film...
Pas vu les autres films.
Dernière modification par aelita le 16 sept. 17, 23:37, modifié 2 fois.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (pensée shadok)
Avatar de l’utilisateur
G.T.O
Egal à lui-même
Messages : 4827
Inscription : 1 févr. 07, 13:11

Re: Darren Aronofsky

Message par G.T.O »

Difficile de savoir ce qui chez Arnofsky vieillit finalement le plus vite ou le plus mal. Les velléités et la mise en scène conçue comme butoir, véritable usine à gaz, le type de montage paroxystiques ( Requiem for a dream), amoncellement prodigieux d'images ridicules ( son chef-d'oeuvre, le délicieusement nanardesque the Fountain), superficialité de l'approche, ou bien l'indifférence que suscite chacun de ses films, malgré leurs efforts incessants à vouloir impressionner et agitations. Avec toujours au final, ce sentiment de gâchis lié à la pompe de l'approche voulant traiter chaque sujet possiblement intéressant ( folie, mort, solitude, deuil, création, déconstruire certains mythes fondateurs) dans le style le plus spectaculaire et putassier possible. De beaux thèmes souvent périphériques mais totalement annihilé par le traitement hyperbolique, frontal et myope d'Aronofsky. Au fond, un cinéma qui n'a pas trop confiance dans ses images. Arnofsky ou quand le nec plus ultra de la mode devient le truc le plus ringard. Donne une idée de ce qui va advenir à Mister Refn...
mannhunter
Laspalès
Messages : 17361
Inscription : 13 avr. 03, 11:05
Localisation : Haute Normandie et Ile de France!
Contact :

Re: Darren Aronofsky

Message par mannhunter »

7 184 entrées-France hier sur 230 copies pour THE WHALE...pour voir le dernier film d'Aronofsky sur un écran de cinéma, il va donc falloir faire vite.

Image
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 13984
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Darren Aronofsky

Message par Alexandre Angel »

En même temps je trouve ça redoutablement peu attirant.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
mannhunter
Laspalès
Messages : 17361
Inscription : 13 avr. 03, 11:05
Localisation : Haute Normandie et Ile de France!
Contact :

Re: Darren Aronofsky

Message par mannhunter »

Il fera pas les entrées de "Black swan", c'est sûr!
Avatar de l’utilisateur
Flol
smells like pee spirit
Messages : 54619
Inscription : 14 avr. 03, 11:21
Contact :

Re: Darren Aronofsky

Message par Flol »

Je suis sûr qu'il y a des gens qui y vont en pensant que le film s'appelle Bouleversant.
Avatar de l’utilisateur
Ouf Je Respire
Charles Foster Kane
Messages : 25906
Inscription : 15 avr. 03, 14:22
Localisation : Forêt d'Orléans

Re: Darren Aronofsky

Message par Ouf Je Respire »

:lol:
Spoiler (cliquez pour afficher)
Image
« Toutes choses sont dites déjà ; mais comme personne n’écoute, il faut toujours recommencer. » André Gide
Avatar de l’utilisateur
Alibabass
Assistant opérateur
Messages : 2621
Inscription : 24 nov. 17, 19:50

Re: Darren Aronofsky

Message par Alibabass »

Arp selection qui distribue sur 230 salles ? c'est un sacre risque ... au moins il est pas propose direct en vod, c'est A24 derriere.
Avatar de l’utilisateur
AtCloseRange
Mémé Lenchon
Messages : 25396
Inscription : 21 nov. 05, 00:41

Re: Darren Aronofsky

Message par AtCloseRange »

Alexandre Angel a écrit : 9 mars 23, 18:46 En même temps je trouve ça redoutablement peu attirant.
Bonjour la grossophobie...
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 13984
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Darren Aronofsky

Message par Alexandre Angel »

Bonjour la navrophobie, surtout
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Répondre