Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Michel2
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Michel2 »

El Dadal a écrit :Petite note de lecture au passage: Edward choisit très distinctement son moment pour faire parvenir le manuscrit à Susan. On voit d'ailleurs la Mercedes (présente dans le livre) s'arrêter devant la grille d'entrée après qu'elle soit arrivée chez elle le premier soir. Je me suis ainsi demandé depuis combien de temps le livre était rédigé, et s'il l'avait suivie partout, telle une sorte de boogeyman omniscient. Le livre a-t-il été écrit en réaction progressive à certains éléments déterminants de la vie de Susan, comme une sorte de commentaire sur ses qualités d'artiste à elle, ou bien si tout prenait racine dans l'événement traumatique initial?
Je me suis demandé après coup si le roman n'est pas en fait le fruit de l'imagination de Susan, qui inventerait le déclencheur de retrouvailles avec son ex d'il y a vingt ans pour fuir l'échec de son mariage avec Hutton et exorciser le sentiment de culpabilité né de son avortement. Le livre ne serait alors plus la revanche tardive d'un époux rejeté, mais un psychodrame fabriqué de toute pièce par l'héroïne pour parvenir à une sorte de catharsis par la fiction - et qui sait, peut-être créer les conditions d'une réconciliation aussi improbable que symbolique avec Edward, sur lequel elle n'a au fond jamais tiré un trait. Le fait que dans le livre, Susan s'identifie à Tony à la fin confirme ce que j'ai ressenti durant la projection, à savoir qu'Edward est une sorte de non-personnage qui n'existe qu'au travers des souvenirs de Susan, ou bien de Tony, son alter ego fictionnel. Du coup, toute la focalisation du récit bascule : ce n'est plus le fantomatique Edward qui tire les ficelles mais Susan qui projette sa mauvaise conscience sur un récit de fiction qu'elle élabore toute seule en l'attribuant à celui qu'elle a blessé.

Pour séduisante qu'elle soit, cette belle théorie achoppe bien sûr sur la scène où le secrétaire particulier réceptionne la manuscrit d'Edward et lit sa lettre à haute voix. Damned... Néanmoins, le film recèle quelques indices qui peuvent laisser entendre que Susan n'est pas une protagoniste fiable dans son rapport à la réalité : la scène du téléphone portable où elle voit un monstre menacer le bébé qu'elle aurait pu avoir si elle ne s'était pas faite avorter, ou encore l'étrange coup de fil nocturne passé à sa fille, alors que rien dans le récit ne laisse entendre qu'elle eu un enfant avec Hutton (ce dernier ne parle d'ailleurs jamais d'elle). Détail qui met la puce à l''oreille : la gamine est filmée nue dans une pose qui reproduit exactement celle des corps retrouvés dans le récit de fiction. Avancer que la scène avec le secrétaire (à laquelle aucun autre personnage extérieur n'assiste) pourrait n'exister que dans l'imagination de Susan est peut-être tirer un peu trop sur la pelote de ficelle de l'éxégèse, mais si Susan invente la fille imaginaire qu'elle aurait pu avoir si elle ne s'était pas faite avorter d'Edward, pourquoi n'inventerait-elle pas aussi ce manuscrit tombé du ciel qui appuie si précisément partout où elle a mal ? Dans ces conditions, l'absence d'Edward au rendez-vous final s'expliquerait non pas par une forme de cruauté de sa part ou une absence de besoin de revoir son ex-femme, mais par le fait qu'il n'a jamais été en contact avec elle et n'a jamais écrit le livre. Susan aurait fantasmé leur relation épistolaire de A à Z, le gros plan final sur son oeil renvoyant à la cécité de Tony dans le désert.

Honnêtement je ne sais pas si cette interprétation tient la distance - ce sont juste des idées qui me sont venues après la projection. Le film est suffisamment riche pour soutenir plusieurs lectures, mais je trouve l'idée d'une Susan construisant toute seule le psychodrame qui lui permet d'affronter les démons qu'elle a refoulé jusque-là autrement plus intéressante que la vengeance par roman à clés interposé d'un ex qui a ruminé sa bile pendant dix-neuf ans. C'est aussi une lecture qui rend le personnage de Susan plus fascinant : si le livre est bien l'oeuvre d'Edward, elle n'apparaît guère que comme une bourgeoise frustrée et rongée par la culpabilité qui subit passivement la vengeance de son ex. Si par contre elle est la seule architecte de son propre tourment, le personnage acquiert une complexité nouvelle et le film propose du coup une réflexion beaucoup plus intéressante sur le rôle et le pouvoir de la fiction.
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The Boogeyman
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par The Boogeyman »

Pour ma part la chose qui m'intrigue depuis la sortie de la salle, et jusqu'a présent je crois que personne n'en a parlé ici, c'est que Tom Ford insiste beaucoup sur l'insomnie du personnage de Susan.
Ce qui me semble une piste pas anodine pour essayer de comprendre ce que le personnage traverse.
L'hypersensibilité qu'elle éprouve à la lecture du roman, s'identifiant totalement, vivant le récit comme si il était sien, au point qu'il influe dans sa vie quotidienne, qu'il surgisse même à travers un téléphone (sur une vidéo de bébé, pas anodine, bien qu'on ne sache pas encore à ce moment pourquoi), mélangeant réel et fiction en projetant Edward comme représentation du personnage de Tony ...
L'insomnie a pour conséquence entre autre de créer des micro phases de sommeil indétectable par le sujet atteint, avoir aussi des répercussions psychiatriques... elle n'est effectivement peut être pas très claire dans sa tête la Susan :)
Lors de la discussion matinale avec son mari lorsqu'elle évoque Edward elle prétend d'abord ne pas l'avoir vu depuis 19 ans... puis ensuite prétend l'avoir revu il y a 2 ans. On ne verra pourtant jamais de flashback de cette rencontre (qui si Edward est bel et bien dans un tel sentiment de vengeance, c'est une rencontre qui n'aurait pas du bien se passer, hors Susan n'en fait pas cas).

Je vois dans la réception du livre et la lettre l'accompagnant un "effet déclencheur" dans l'état fragile de Susan.
Ses insomnies existent avant la réception du roman, sa vie ne lui convient pas, elle éprouve que dégoût et abandon.
Involontairement elle entre en catharsis à travers le roman. Elle soigne le mal par le mal. La lecture est pénible, mais arrivé au mot fin elle se libère.
La mort de Tony en serait la représentation visuelle. Mort au combien absurde. Tony c'est l'incapacité de Susan à agir, à prendre des décisions importantes, à se rebeller... et il est enfin mort.

Reste le final au restaurant que je ne m'explique pas. A-t-elle vraiment pris contact avec Edward.
Ou ce rendez vous fait il parti de sa psychose. Elle envoi son sms comme un appel à l'aide (je ne me souviens plus exactement où elle en est dans la lecture du roman à ce moment, mais c'est durant un passage pas agréable). Et la réponse d'Edward arrive lorsque Susan finit le roman. Conséquence de ses insomnies de mélanger réel et rêve ? ...

Comme je disais dans mon commentaire : comme une envie de se replonger dans l'univers pour y déceler et percevoir différemment les pistes.
Dernière modification par The Boogeyman le 12 janv. 17, 14:53, modifié 2 fois.
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Michel2
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Michel2 »

La piste de l'insomnie est intéressante : j'avais oublié d'en parler mais elle va effectivement dans le sens d'une perte de contact avec la réalité.

Ce qui est clair, c'est que bien qu'il apparaisse à l'écran sous les traits d'Edward, le personnage de Tony est l'incarnation de la culpabilité de Susan. En apparence, il concentre sur sa personne tous les reproches que lui faisait son épouse quand ils étaient ensemble : sensible donc faible et pas assez masculin (il se fait même traiter de "vagina man" pendant l'agression), lâche parce qu'il ne peut pas protéger sa famille et empêcher la mort de sa femme et de sa fille, etc. Mais c'est en fait Susan qui s'accuse de ces faiblesses : elle se trouve lâche parce qu'elle a pas eu le courage d'assumer sa relation avec Edward, elle se sent coupable d'avoir détruit son couple et causé la mort de sa fille en avortant, et elle qui reprochait à Edward d'être un écrivain médiocre et égocentrique a un sentiment d'imposture et de vacuité par rapport à son métier et sa vie.

Le film brouille les pistes en faisant croire que Tony est l'alter ego littéraire d'Edward alors qu'il est en fait le double de Susan : ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le roman d'Austin Wright dont est adapté le film de Ford s'appelle Tony and Susan, et non pas Edward and Susan - cf la remarque de Wontolia un peu plus haut.
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Demi-Lune
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Demi-Lune »

- SPOILERS - (évidemment)

Michel2, The Boogeyman, vos posts sont passionnants et attirent effectivement l'attention sur une probable autre lecture/dimension du film que, perso, je n'avais pas considérée jusqu'ici, mais qui quelque part, recoupe pourtant les sentiments étranges que j'ai eus à chaque fois que des flash-back intervenaient (flash-back qui densifient le personnage de Susan et la rétablissent en effet comme protagoniste à part entière du drame, là où elle n'était alors que dans un rôle incertain et passif de lectrice), et sur lesquels j'ai du mal à mettre des mots... L'impression de quelque chose de piégeux, de pas net, de "fabriqué", peut-être parce que les flash-back dialoguent justement avec la partie fictive... Pas forcément mensonger, mais distillant chez moi un certain malaise pour ce qu'ils révèlent des associations d'idées de Susan par rapport à la lecture du livre. Je ne sais pas si d'autres que moi sont également troublés. C'est assez difficile d'expliquer un tel trouble lancinant, mais j'ai ce malaise d'assister en fait moins à des souvenirs factuels (ça s'est passé comme ça) et indiscutables, qu'à des reconstructions mentales opérées par Susan dans un travail introspectif et psychanalytique complexe à la fois de légitimation (le rejet structurant de la figure maternelle, pour se "rassurer" et se donner raison dans la manière dont elle a mené sa vie) et de remise en question personnelles autour de refoulés qui l'assaillent encore des années plus tard, et qu'elle réincarne dans des situations possiblement réarrangées à un certain degré.
J'avais parlé plus haut de ce premier flash-back de retrouvailles que je n'avais justement pas immédiatement perçu comme étant un flash-back, mais je vais prendre un autre exemple en essayant d'être plus clair : Edward, apparaissant comme par magie sous la pluie, qui prend en flag' Susan et son mec dans la voiture, et ce immédiatement après l'avortement... si je ne m'abuse, c'est d'ailleurs la dernière scène de flash-back à laquelle on assiste. Les plus pragmatiques pourront toujours trouver que cette situation complètement improbable (que fout-il là ?!) trahit tout simplement une facilité d'écriture à la manière d'un soap, mais cela n'efface pas la bizarrerie de la coïncidence. En première lecture, cette trahison et cette humiliation provoquent la haine d'Edward contre Susan qui le conduira bien des années plus tard à lui envoyer le manuscrit en guise de solde de tous comptes ; mais en seconde lecture, si l'on retient l'option de la Susan pas claire dans sa tête (insomnies, fantasmes, tiraillement profond, etc), c'est un fait que ce qui se noue ici est la concrétisation d'un double refoulement de Susan autour de la culpabilité. Edward se retrouve associé à ce moment fatidique de façon presque arbitraire, comme un deus ex machina, peut-être justement parce qu'il n'était pas là en réalité, mais que sa présence devient psychanalytiquement indispensable pour que Susan, à ce stade de son introspection, fasse acte de contrition. Elle visualiserait en fait Edward à ce moment précis comme elle visualise l'assassin-violeur avec le bébé : l'effet provoqué à l'écran n'est évidemment pas le même mais semble relever pourtant des mêmes mécanismes de surmoi freudien, comme un dur rappel à la morale. Cet exemple est peut-être insuffisant pour rendre solide la mise en doute systématique des "souvenirs", mais que l'on ne puisse pas être complètement sûr de la manière dont fonctionne Susan sur le plan mental offre en effet une couche supplémentaire au film, décidément bien obsédant.
Dernière modification par Demi-Lune le 12 janv. 17, 14:52, modifié 1 fois.
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Alexandre Angel
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Alexandre Angel »

Ça a l'air d'être un sacré scénario cette histoire :shock:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par wontolla »

Alexandre Angel a écrit :Ça a l'air d'être un sacré scénario cette histoire :shock:
Oui!
Et j'avais lu le livre en 1996 (c'était dans une réédition par France-Loisirs - qui vendait des best-sellers et autre avec obligation d'achat une fois par trimestre) et je ne me souvenais plus vraiment vingt ans après de l'intrigue.

La lecture n'est probablement pas nécessaire ni indispensable. Toutefois, elle peut être éclairante après avoir vu le film, ne serait-ce que pour le revoir ensuite.

En tout cas, de mon côté, je m'y suis donc replongé dès après la vision presse. Il y avait surtout le fait que les premières scènes avec des "modèles adipeux" ne me disait rien et pour cause,

le roman commence
(AVANT)
immédiatement par une lettre que Susan reçoit d'Edward pour lui demander si elle accepte de lire son livre. Dès ce moment on passe en mode introspection jusqu'à ce qu'elle reçoive le bouquin une semaine après avoir accepté. C'est (un peu) plus tard qu'elle va se lancer dans la lecture.
Le récit se poursuit sur le mode
PREMIERE SOIREE DE LECTURE
huit chapitres
- Susan en introspection et/ou Susan qui fait état de ce qui se passe dans la maison, autour d'elle
- (texte du roman) Bête de nuit 1
et ainsi de suite

PREMIER INTERLUDE (soit les flashbacks dans le film)

DEUXIEME SOIREE DE LECTURE
huit chapitres
(...)
SECOND INTERLUDE

TROISIEME SOIREE DE LECTURE
huit chapitres
(...)
bêtes de nuit 26 (fin du roman dans le roman. Tony, aveugle, meurt en rêvant qu'il se voit arrivé dans sa maison du Maine ou l'attendent Laura et Hélène).
chapitre 9: réflexion de Susan sur le livre

APRES
deux chapitres
Susan attend le retour de son Arnold. Ils font l'amour.
Le lendemain, elle attend Edward. réfléchit, ne sait plus trop si elle lui a confirmé ou pas qu'elle serait présente.
Elle pense à ce qu'elle lui dira(it) - se voit se noyer avec Edward. Lui écrit une lettre.
"se souvenant qu'elle n'avait même pas été capable de l'appeler durant son séjour, et de toutes les questions qu'elle n'avait pas pu lui poser"
Elle déchire la lettre.
Ecrit un mot qu'elle va poster:
"Cher Edward, J'ai terminé ton roman. Désolé d'avoir mis si longtemps. Fais-moi signe si tu veux mon avis. Bien à toi. Susan".

Et les derniers mots du roman:
"Elle voulait punir Arnold, lui aussi, mais ne voyait pas comment, hormis en le forçant à lire le manuscrit d'Edward.
Il y consentirait si elle insistait, mais elle douta qu'il y voie autre chose que de l'encre."
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Michel2
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Michel2 »

Ce qui m'a mis la puce à l'oreille en voyant le film, c'est que l'intrigue semble tourner autour de la catharsis/vengeance d'un personnage dont on ne sait finalement presque rien et qui n'a aucune existence autonome dans le récit (si ma mémoire est bonne, Jake Gyllenhaal a trois scènes en Edward lors des flashbacks et il est Tony tout le reste du temps), tandis que l'héroïne, qui occupe tout l'espace narratif, n'a rien à faire sinon subir passivement. Du coup, je me suis dit que soit il y avait un problème de focalisation dans l'écriture du scénario, soit les choses ne sont pas ce qu'elles paraissent être.
Alexandre Angel a écrit :Ça a l'air d'être un sacré scénario cette histoire :shock:
Oui, hein ? :lol:

On a le droit de penser tout ce qu'on veut du film de Tom Ford, mais personne ne pourra dire qu'il ne stimule pas le débat.
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The Boogeyman
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par The Boogeyman »

On peut aussi ajouter que Edward, dans la temporalité "présent" (celle où Susan lit le livre), n'est mentionné que 2 fois, et dans les 2 les discussions portent d'abord sur les insomnies de Susan. (elles m'intrigues vraiment ces insomnies :uhuh: )

La 1ere / Discussion entre Susan et son mari, elle lui demande pourquoi il ne l'a pas rejointe en rentrant, il lui répond qu'il ne voulait pas la déranger. Ce à quoi elle répond qu'elle ne dormait pas (c'est à ce moment qu'est exprimé pour la première fois que Susan ne dort pas), puis la discussion bifurque sur le fait que Edward lui a envoyé son manuscrit. La réaction de Hutton (le mari) est assez étrange, semblant ne pas vraiment se souvenir de lui ni depuis combien de temps ils ne l'ont pas vu.

la 2ème / Dans le bureau de Susan, sa secrétaire vient lui faire remarquer qu'elle a une réunion. La secrétaire embraye sur le fait que Susan à une sale mine, qu'elle n'a encore pas dormi. Et Susan d'évoquer une nouvelle fois le roman et Edward, son ex mari, dont la secrétaire n'avait jamais entendu parlé.

Il est bien mystérieux ce Edward dans le "présent" à n'être pas là.
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Supfiction »

Harkento a écrit :
Demi-Lune a écrit :
Voilà. On a compris l'enjeu du manuscrit mais il manquait encore la chute de tout cela, le chef-d’œuvre de cette vengeance froide : faire payer Susan. Lui faire à la fois comprendre que rien ne pourra jamais se recoller, et qu'il allait vraisemblablement dans le même temps garder toute sa vie cette haine inguérissable (il s'est donné tant de mal pour parvenir à ce moment de vérité qu'il ne peut y avoir qu'une rancœur et une haine infinies à l’œuvre contre cette femme). J'ai ressenti ces derniers instants comme une véritable déflagration en même temps que l'onde sismique d'un sol se dérobant pour dévoiler un abîme sans fin, tout entier contenu dans le regard dévasté d'Amy Adams. Les quelques rides qui cerne ce regard résonne avec ce châtiment en forme de vertige : le temps l'a rattrapé et ne lui laisse rien que la découverte que sa vie aura été vaine.
Pas mieux ! Toute sa haine se cristallise dans cette dernière scène et on en sort autant dévasté et bouleversé que l'héroïne. :shock: Non seulement j'étais complètement sidéré et figé sur mon fauteuil jusqu'à la fin du générique, mais la fin du film et cette éprouvante révélation m'a accompagné de nombreuses heures après la séance ... ça à même duré toute la journée, il me semble (et juste le fait d'en reparler, ça me glace le sang :twisted: ) !
Un maelstrom de beauté, d'effroi, de tristesse, d'amour et de rage mêlés qui laisse le spectateur sonné lorsque le générique se déploie.
Il y a quelque-chose d'Il était une fois en Amérique et de Mulholland drive dans ce film magistral dont chacun se fait sa propre interprétation. Pas vrai, zemat :wink: A vrai dire j'hésite encore à lire tous les avis pour laisser mon esprit vagabonder dans le film et y voir ce que je veux y voir.
Y a t-il une unique interprétation de ce film pour ses auteurs eux-mêmes ?
Amy Adams est pour moi l'actrice américaine la plus intense, charnelle et mélancolique de ces dernières années et Tom Ford en réalisant un sans-faute avec ses deux premiers films fait partie de la courte liste des réalisateurs américains qui sauvent encore Hollywood.

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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Demi-Lune »

Je suis vraiment content que le film soulève finalement l'enthousiasme. Il s'est insinué en moi, je ne cesse d'y repenser. Moins pour l'interpréter que pour son pouvoir vénéneux, cette espèce de parfum entêtant et dérangeant qui me revient en permanence et me glace l'échine.

Le film a inévitablement inspiré quelques fan arts comme toujours variablement convaincants mais qui sont "amusants" pour ce qu'ils choisissent de mettre en avant.
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Supfiction »

Avez-vous remarqué de nouveau du Gainsbourg en fond sonore dans ce film ? L'espace de 2 secondes seulement. Il me semble que c'était à nouveau "Baudelaire" comme dans A single man quand Julianne Moore se maquille.

Hasard total, j'ai découvert dans la foulée du Tom Ford le film Blue Jay d'Alexandre Lehmann qui sonne étrangement comme un épilogue alternatif au film de Tom Ford.
Les deux films n'ont rien à voir dans la forme mais ils se font écho l'un l'autre je trouve. Je le recommande (très belle complicité entre Mark Duplass et Sarah Paulson).
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Flol »

Michel2 a écrit :La piste de l'insomnie est intéressante : j'avais oublié d'en parler
Peut-être parce que le perso d'Amy Adams ne ressemble pas DU TOUT à une personne qui ne dort jamais ? J'ai rarement vu quelqu'un d'aussi pimpant tout en dormant aussi peu.

Sinon pas convaincu par ce second essai de Tom Ford (alors que j'avais beaucoup aimé A Single Man), que j'ai trouvé comme irritant tout du long. L'impression de ne voir que de la pose et de la caricature, notamment dans la peinture du milieu de la mode et de la différence de classes (la mère bourgeoise qui ne veut pas de son gendre écrivaillon car forcément pauvre...wow on avait jamais vu ça). Au passage, joli brushing Laura Linney.
J'ai constamment eu le sentiment d'être face à un thriller psycho faussement alambiqué et ultra poseur. Alors j'applaudis l'ambition esthétique et narrative, c'est cool de voir qu'il existe encore un ciné US qui ose, mais grosse sensation de "toussapourssa" en sortant de la salle. Trop chic et toc pour moi.

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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par zemat »

Je me lance car j'ai une interprétation beaucoup plus terre à terre et complétement différente de ce que j'ai pu lire ici.
Spoiler (cliquez pour afficher)
- Tony/Edward dit à un moment à Susan que tous les écrivains utilisent leur vécu pour leur livre.
- Dans le mot accompagnant le livre, il lui dit qu'il a écrit qq chose de très différent.
- Donc le livre raconte son agression, le meurtre de sa femme et de sa fille, et sa recherche des meurtriers.
- Susan pense à tort qu'il n'a jamais été marié, elle dit aussi qu'elle a essayé de l'appeler il y a 2 ans et qu'il lui avait raccroché au nez (normal, il venait de vivre le drame).
- L'assistante de Susan ne sait pas qu'elle avait été mariée avant car elle a coupé complétement les ponts avec son ancienne vie. Même chose pour son mari actuel qui ne se souvient pas du nom de son ancien mari car il se désintéresse complètement de la vie de sa femme.
- L'échange par email entre Edward et Susan pour fixer le diner se fait avant que le flic n'appelle Edward pour lui dire qu'il a retrouvé Ray. Du coup Edward plante Susan au diner tout simplement parce qu'il est mort comme un con en se tirant une balle dans le bide.
Bon, ça peut paraitre simpliste face à la partie "Susan qui fait des insomnies", donc je ne suis pas sûr que mon hypothèse se tienne... :?
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Supfiction
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par Supfiction »

Ta vision est très tentante mais dans cette alternative, je ne vois pas pourquoi Edward/Jack prendrait la peine de dédicacer son roman à son amour de jeunesse après une telle tragédie. Cela me semble comme qui dirait un peu déplacé, non ?
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zemat
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Re: Nocturnal animals (Tom Ford - 2016)

Message par zemat »

Supfiction a écrit :Ta vision est très tentante mais dans cette alternative, je ne vois pas pourquoi Edward/Jack prendrait la peine de dédicacer son roman à son amour de jeunesse après une telle tragédie. Cela me semble comme qui dirait un peu déplacé, non ?
Parce qu'elle serait le déclencheur indirect de sa tragédie ? Sans sa décision de le quitter, pas de nouvelle vie / pas d'agression ?
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