Le cinéma français contemporain
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Re: Le cinéma français contemporain
A mon avis, il y a plusieurs choses dans le "Bon Dieu" (que j'ai vu et que je n'ai pas aimé) :
- Des personnages très typés selon leur origine. Cette caricature a fait rire, un rire censé être libératoire puisque chacun en prenait pour son grade et que l'on riait aux dépens de personnages de cinéma et non de vrais personnes. Mais des clichés sur les uns et les autres sont ainsi ressassés, et ce qui est mis en avant c'est d'abord l'appartenance à une minorité (ou une majorité) : on ne voit jamais la personne en premier, on voit toujours son type, et ce typage reste très superficiel (il n'est jamais enlevé des personnages) et ne se fait pas toujours sur un mode franchement comique comme dans un Rabbi Jacob.
- Ces personnages typés sont au fond tous des gens sympathiques. Ce constat a rassuré.
- Un déroulement du film où les différences des uns et des autres sont acceptées et n'empêchent pas la constitution d'une communauté autour des valeurs de la famille.
- Quant au point de vue du réalisateur, Clavier est certes ridicule, mais c'est autour de lui que tourne le suspense du film (va-t-il accepter des beaux-fils issus de minorités ?) et c'est donc par lui que le sujet est traité. Je pense que c'est un film plus symptomatique qu'offensif, et qui a des qualités, mais le "niveau" du film, c'est me semble-t-il celui d'une conversation de café du commerce ou d'une histoire censée être drôle mettant en scène, un chinois, un juif, un arabe, etc. Elle est peut-être injuste (j'ai regardé le film assez distraitement à la télévision pendant qu'il faisait rire le reste de ma famille) mais c'est l'impression que j'en ai eue.
- En revanche, l'interprétation est bonne.
- Des personnages très typés selon leur origine. Cette caricature a fait rire, un rire censé être libératoire puisque chacun en prenait pour son grade et que l'on riait aux dépens de personnages de cinéma et non de vrais personnes. Mais des clichés sur les uns et les autres sont ainsi ressassés, et ce qui est mis en avant c'est d'abord l'appartenance à une minorité (ou une majorité) : on ne voit jamais la personne en premier, on voit toujours son type, et ce typage reste très superficiel (il n'est jamais enlevé des personnages) et ne se fait pas toujours sur un mode franchement comique comme dans un Rabbi Jacob.
- Ces personnages typés sont au fond tous des gens sympathiques. Ce constat a rassuré.
- Un déroulement du film où les différences des uns et des autres sont acceptées et n'empêchent pas la constitution d'une communauté autour des valeurs de la famille.
- Quant au point de vue du réalisateur, Clavier est certes ridicule, mais c'est autour de lui que tourne le suspense du film (va-t-il accepter des beaux-fils issus de minorités ?) et c'est donc par lui que le sujet est traité. Je pense que c'est un film plus symptomatique qu'offensif, et qui a des qualités, mais le "niveau" du film, c'est me semble-t-il celui d'une conversation de café du commerce ou d'une histoire censée être drôle mettant en scène, un chinois, un juif, un arabe, etc. Elle est peut-être injuste (j'ai regardé le film assez distraitement à la télévision pendant qu'il faisait rire le reste de ma famille) mais c'est l'impression que j'en ai eue.
- En revanche, l'interprétation est bonne.
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Re: Le cinéma français contemporain
Bah, faut dire, il suffit de voir "Qu'Est-ce qu'on a fait au Bon Dieu?" ou "La Famille Bélier" pour s'en rendre compte.Supfiction a écrit :ça transpire dans le discours de Thoret. Il voit des réactionnaires (et des marchands) partout, dès lors il lui est impossible de se détendre.
Ensuite, ça n'est que la partie émergée de l'iceberg mais le fait que ce soit ça qui cartonne, ça, c'est inquiétant et effectivement, on peut en faire une lecture politique (pas forcément au sens "politicien" mais dans ce que ça dit sur l'évolution de la vision du monde).
"Qu'Est-ce qu'on a fait au Bon Dieu?" n'aurait jamais pu être un tel succès il y a 20-30 ans.
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Re: Le cinéma français contemporain
Comme Thoret le dit à un moment, un des problèmes (et qui pour moi est un des plus importants) c'est que ce sont des films anachroniques.
Intouchables, Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? Bienvenue chez les Ch'tis, La Famille Bélier, Aladdin ou les Astérix, sont des films qui auraient pu être réalisés il y a 25, 35 ans. Et encore, le problème n'est même pas qu'ils soient "décalés" par rapport à aujourd'hui, mais que s'ils avaient été réalisés il y a 30 ou 40 ans, ils auraient bénéficié de beaucoup plus de libertés et de prises de positions osées. Au niveau de l'humour, nous sommes en plein dans l'ère du politiquement correct et où à la moindre blague "raciste" on risque, si ce ne sont les froncements de sourcils des lobbies communautaires, de passer sous les fourches caudines d'une presse (même pas people) qui raffole des scandales. Personne à part Thoret ne trouvait bizarre que les figures stéréotypées de Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? soient des modèles d'intégration ou des caricatures de racistes (Clavier est bien gentil par rapport à ce qui existe réellement et qui pourrait être discrédité par l'humour) ? En cela, le film devient raciste car un "bon Arabe" ou un "bon Juif" connaît la Marseillaise, boit du pinard, fait des blagues racistes, etc. Vive le multiculturalisme...
Et s'ils mentent dans leurs films, ils mentent même de leurs films pour le marketing (Les Profs 2, dont il fallait augmenter graduellement le son, pour éviter que certains spectateurs ratent le gag suivant à cause de ceux qui rient encore du gag d'avant), ou la pluie de critiques dithyrambiques écrites par la production d'Aladdin sur Allociné...
Ils sont loin, les films comme Marche à l'ombre ou les Ripoux qui montraient des squats ou donnaient une image assez négative du métro et de la police, mais aussi Banzaï avec Coluche en assureur raciste mais spécialisé dans les voyages à l'étranger, Les Malheurs d'Alfred et sa dénonciation des jeux télés (télé qui, aujourd'hui, produit le cinéma), ou encore L'Œil au beur(re) noir qui, bon, voilà. Films inconcevables à l'heure actuelle, mais dont le succès perdure à travers des sites, des communautés internet rediffusant des extraits et les font connaître à une nouvelle génération qui a volé au "vieux con" sa rengaine du "C'était mieux avant". Dans 30 ans, je doute honnêtement qu'on fasse de même avec les comédies actuelles. Thoret n'a pas tort sur le fait que ces comédies soient passéistes, les sujets de société font peur aux producteurs et distributeurs et il faut se tourner vers quelque chose d'autre (et il ne reste plus grand chose). Le cinéma de comédie faisant marche arrière, les cinéastes sont bien obligés de redoubler d'efforts (ou d'envisager une reconversion professionnelle) pour essayer de faire rire le public d'aujourd'hui. Mais "faire rire" avec quoi, alors ? Souvent avec des sujets plus ou moins consensuels, insipides, ou juste un peu trop universels (les histoires d'amour en général). Dernièrement, j'ai souri devant Une heure de tranquillité ou Les Gamins, et c'est tout. C'est déjà bien me dira-t-on, mais est-ce que j'ai envie de les revoir comme je peux avoir envie de revoir Viens chez moi, j'habite chez une copine ? Non. À une époque, Jugnot et Blanc descendaient dans la rue, chez les "petites gens", les chômeurs ou les SDF, et tournaient en dérision des histoires a priori sinistres, détournant le spectateur du cafard pour lui proposer de rire de sa propre misère. On ne propose pas aujourd'hui à ce même spectateur de rire de ce qu'il connaît, des réseaux sociaux ou du téléchargement illégal par exemple (et quand ça arrive ils se plantent par manque de connaissances du sujet), mais de ce qu'il ne connaît pas, et de choses éloignées de ses préoccupations. Dommage. Ces films marchent (malgré ses innombrables défauts, Bienvenue chez les Ch'tis a bien battu La Grande vadrouille), ça ne change rien au fait que c'est un cinéma de piètre qualité, sans inventivité, sans talent ni grâce... C'est tout ce qu'on propose à un public, qui, j'en suis sûr, irait voir de meilleurs films si seulement on leur en proposait (et en les vendant avec les mêmes services marketing racoleurs ou preneurs d'otages que ceux de Thomas Langmann).
Intouchables, Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? Bienvenue chez les Ch'tis, La Famille Bélier, Aladdin ou les Astérix, sont des films qui auraient pu être réalisés il y a 25, 35 ans. Et encore, le problème n'est même pas qu'ils soient "décalés" par rapport à aujourd'hui, mais que s'ils avaient été réalisés il y a 30 ou 40 ans, ils auraient bénéficié de beaucoup plus de libertés et de prises de positions osées. Au niveau de l'humour, nous sommes en plein dans l'ère du politiquement correct et où à la moindre blague "raciste" on risque, si ce ne sont les froncements de sourcils des lobbies communautaires, de passer sous les fourches caudines d'une presse (même pas people) qui raffole des scandales. Personne à part Thoret ne trouvait bizarre que les figures stéréotypées de Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? soient des modèles d'intégration ou des caricatures de racistes (Clavier est bien gentil par rapport à ce qui existe réellement et qui pourrait être discrédité par l'humour) ? En cela, le film devient raciste car un "bon Arabe" ou un "bon Juif" connaît la Marseillaise, boit du pinard, fait des blagues racistes, etc. Vive le multiculturalisme...
Et s'ils mentent dans leurs films, ils mentent même de leurs films pour le marketing (Les Profs 2, dont il fallait augmenter graduellement le son, pour éviter que certains spectateurs ratent le gag suivant à cause de ceux qui rient encore du gag d'avant), ou la pluie de critiques dithyrambiques écrites par la production d'Aladdin sur Allociné...
Ils sont loin, les films comme Marche à l'ombre ou les Ripoux qui montraient des squats ou donnaient une image assez négative du métro et de la police, mais aussi Banzaï avec Coluche en assureur raciste mais spécialisé dans les voyages à l'étranger, Les Malheurs d'Alfred et sa dénonciation des jeux télés (télé qui, aujourd'hui, produit le cinéma), ou encore L'Œil au beur(re) noir qui, bon, voilà. Films inconcevables à l'heure actuelle, mais dont le succès perdure à travers des sites, des communautés internet rediffusant des extraits et les font connaître à une nouvelle génération qui a volé au "vieux con" sa rengaine du "C'était mieux avant". Dans 30 ans, je doute honnêtement qu'on fasse de même avec les comédies actuelles. Thoret n'a pas tort sur le fait que ces comédies soient passéistes, les sujets de société font peur aux producteurs et distributeurs et il faut se tourner vers quelque chose d'autre (et il ne reste plus grand chose). Le cinéma de comédie faisant marche arrière, les cinéastes sont bien obligés de redoubler d'efforts (ou d'envisager une reconversion professionnelle) pour essayer de faire rire le public d'aujourd'hui. Mais "faire rire" avec quoi, alors ? Souvent avec des sujets plus ou moins consensuels, insipides, ou juste un peu trop universels (les histoires d'amour en général). Dernièrement, j'ai souri devant Une heure de tranquillité ou Les Gamins, et c'est tout. C'est déjà bien me dira-t-on, mais est-ce que j'ai envie de les revoir comme je peux avoir envie de revoir Viens chez moi, j'habite chez une copine ? Non. À une époque, Jugnot et Blanc descendaient dans la rue, chez les "petites gens", les chômeurs ou les SDF, et tournaient en dérision des histoires a priori sinistres, détournant le spectateur du cafard pour lui proposer de rire de sa propre misère. On ne propose pas aujourd'hui à ce même spectateur de rire de ce qu'il connaît, des réseaux sociaux ou du téléchargement illégal par exemple (et quand ça arrive ils se plantent par manque de connaissances du sujet), mais de ce qu'il ne connaît pas, et de choses éloignées de ses préoccupations. Dommage. Ces films marchent (malgré ses innombrables défauts, Bienvenue chez les Ch'tis a bien battu La Grande vadrouille), ça ne change rien au fait que c'est un cinéma de piètre qualité, sans inventivité, sans talent ni grâce... C'est tout ce qu'on propose à un public, qui, j'en suis sûr, irait voir de meilleurs films si seulement on leur en proposait (et en les vendant avec les mêmes services marketing racoleurs ou preneurs d'otages que ceux de Thomas Langmann).
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Re: Le cinéma français contemporain
Je trouve que mettre Intouchables, et les chtis ou le bon Dieu dans la même catégorie reste sacrément réducteur...
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Re: Le cinéma français contemporain
J'ai déjà complétement oublié Intouchables ("sitôt vu sitôt zappé", la mise en scène de téléfilm cause un tort considérable à certains films...) pourtant je crois que je l'avais plutôt apprécié, sur le coup... dans le doute, moi je veux bien le retirer, mais rien que pour Cluzet je ne le reverrai pas.Rockatansky a écrit :Je trouve que mettre Intouchables, et les chtis ou le bon Dieu dans la même catégorie reste sacrément réducteur...
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Re: Le cinéma français contemporain
Je te dis pas de l'adorer, mais j'y vois plus d'ambition que dans les chtis ou le truc du bon Dieu ou les bélieseries
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Re: Le cinéma français contemporain
Non, pas dans le doute "de l'adorer", dans le doute "de ce que ça raconte" j'veux bien l'enlever, puisque je l'ai oublié...Rockatansky a écrit :Je te dis pas de l'adorer, mais j'y vois plus d'ambition que dans les chtis ou le truc du bon Dieu ou les bélieseries
On le vend quand même comme une comédie avec un festival Omar Sy... tu le mettrais sur un pied d'égalité avec Rabbi Jacob au niveau de l'ambition ?
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Re: Le cinéma français contemporain
Vu que je ne trouve pas vraiment Rabbi jacob ambitieux, je veux bien le mettre au dessus
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Re: Le cinéma français contemporain
Pareil ; et franchement j'ai beaucoup plus ri à Intouchables qu'à n'importe quel OuryRockatansky a écrit :Vu que je ne trouve pas vraiment Rabbi jacob ambitieux, je veux bien le mettre au dessus
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Re: Le cinéma français contemporain
Ah bah pareil, enfin pas pour dire que Intouchables c'est meilleur que du Oury, mais je ne suis pas non plus très fan de son cinéma.
Par exemple Zidi est infiniment supérieur à Oury niveau humour. Zidi cherche à faire rire parce que c'est dans sa nature de "gagman" sympathique. Pour prendre un exemple, si pour les besoins d'une scène drôle improvisée sur place il faut qu'une voiture fasse des tonneaux, Zidi peut faire tourner sa caméra sur elle-même plutôt que de faire appel à un cascadeur. Je peux me tromper mais devant un Zidi, je vois l'équipe qui improvise des trucs avec plus ou moins de réussite, dans la bonne ambiance, et qui cherche à nous amuser via le Système D. Ça paie, et fera peut-être plus marrer encore que prévu.
Oury en revanche, c'est prévu dans le scénario longtemps à l'avance (limite avec "Rires" entre parenthèses), il demandera beaucoup de fric, fera bloquer les Champs Élysées, ça demandera une préparation (le temps pour la blague de retomber) et ce sera impeccablement fait, toujours avec des engueulades (cf. making of du Corniaud par exemple où il se prend pour David Lean), mais nettement moins drôle. Les interprètes sauvent ses films (De Funès, Bourvil, Belmondo, Wallach, Coluche, etc.) N'évoquons même pas les scénarios écrits par sa fille...
Par exemple Zidi est infiniment supérieur à Oury niveau humour. Zidi cherche à faire rire parce que c'est dans sa nature de "gagman" sympathique. Pour prendre un exemple, si pour les besoins d'une scène drôle improvisée sur place il faut qu'une voiture fasse des tonneaux, Zidi peut faire tourner sa caméra sur elle-même plutôt que de faire appel à un cascadeur. Je peux me tromper mais devant un Zidi, je vois l'équipe qui improvise des trucs avec plus ou moins de réussite, dans la bonne ambiance, et qui cherche à nous amuser via le Système D. Ça paie, et fera peut-être plus marrer encore que prévu.
Oury en revanche, c'est prévu dans le scénario longtemps à l'avance (limite avec "Rires" entre parenthèses), il demandera beaucoup de fric, fera bloquer les Champs Élysées, ça demandera une préparation (le temps pour la blague de retomber) et ce sera impeccablement fait, toujours avec des engueulades (cf. making of du Corniaud par exemple où il se prend pour David Lean), mais nettement moins drôle. Les interprètes sauvent ses films (De Funès, Bourvil, Belmondo, Wallach, Coluche, etc.) N'évoquons même pas les scénarios écrits par sa fille...
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Re: Le cinéma français contemporain
Je suis à vous tout de suite (2015)
Réalisation : Baya Kasmi
Avec Vimala Pons , Ramzi, Agnes Jaoui, Bruno Podalydès, Christophe Paou, Zinedine Soualem, Carole Franck, Claudia Tagbo, Anémone, Camélia Jordana, Laurent Capelluto..
Hanna a 30 ans, beaucoup de charme et ne sait pas dire non : elle est atteinte de la névrose de la gentillesse. Ce drôle de syndrome familial touche aussi son père, Omar, "épicier social" et sa mère, Simone, "psy à domicile". Avec son frère Donnedieu qui se fait appelé desormais Hakim depuis qu'il s'est focalisé sur ses racines algériennes et sa religion, le courant ne passe plus vraiment...
Co-scénariste du Nom des gens de Michel Leclerc (mais aussi d'Hippocrate et de La vie très privée de Monsieur Sim), Baya Kasmi creuse le même sillon et met une nouvelle fois les pieds dans le plat. Ce film singulier est une preuve parmi d'autres que non le cinéma français contemporain n'a pas moins de liberté et moins d'audace que celui d'hier et que oui il est pleinement ancré dans son époque lorsqu'il en a l'ambition.
A l'instar du superbe Nom des gens, Je suis à vous tout de suite est à la fois humaniste et gonflé. Baya Kasmi y dit beaucoup de choses sur cette France minée par le communautarisme, l'individualisme et les préjugés, sur la crise identitaire, le sexisme, le machisme et les cases dans lesquelles les gens veulent absolument vous faire rentrer, en particulier lorsqu'on est gamin dans une citée.
La famille Belkacem est le prétexte pour aborder ces sujets difficiles. C'est une famille très proche de l'une des deux familles du Nom des gens.
Ainsi Vimala Pons, par sa sexualité décomplexée et sa fraîcheur bien connu des cinéphiles, n'est pas très éloignée du personnage fantasque de Sara Forestier dans le film de Michel Leclerc. Forestier couchait avec des hommes pour les inciter à voter à gauche, Vimala Pons couche pour les consoler de leurs tracas. Aussi, en tant que DRH, elle passe à la casserole à chaque fois qu'elle doit licencier un employé.
Ramzi reprend quant à lui pratiquement à l'identique le personnage du père de famille serviable et d’une gentillesse excessive joué précédemment par Zinedine Soualem (ce dernier revenant lui en gérant d'un magasin hallal dans une scène qui donne l'occasion de se moquer des excès ridicules de cette pratique) tandis qu'Agnès Jaoui reprend celui, caricatural, de la mère gauchiste et idéaliste précédemment incarné par Carole Franck dans Le nom des gens. Ces acteurs ne sont pas là par hasard, car le cinéma de Leclerc et Kasmi s'inscrit dans la lignée de celui de Bacri/Jaoui et de Klapisch : un cinéma qui ambitionne de dire des choses tout en restant drôle et populaire.
Le casting est également riche de petits rôles : Claudia Tagbo en prostituée (de carte postale), Bruno Podalydès (acteur qui se bonifie de film en film) en employé licencié, Anémone en grand-mère fauchée qui fume des joints et tape sa fille et son petit-fils, Christophe Paou une nouvelle fois la bite à l'air en clin d’œil à L'inconnu du lac) ..
Un mot sur Ramzi qui, loin de ses pitreries habituelles avec Eric Judor, confirme après une tentative en 2011 (Des vents contraires de Jalil Lespert) qu'il a le potentiel pour jouer de beaux personnages attachants et dramatiques. Il n'a jamais été aussi touchant qu'ici, plein d'humanité et de tendresse. La suite nous dira si ce potentiel émotionnel saura être exploité par d'autres auteurs.
Meh
Quelques réserves tout de même. Le film de Baya Kasmi n'est pas aussi abouti que son désormais illustre prédécesseur en dépit de son casting impeccable. Bien que son propos soit riche et courageux, elle peine à développer une véritable intrigue originale. Le film avance par introspection dans la vérité et le passé des personnages davantage que par leurs actions (le film s'articule d'ailleurs davantage autour des choix du frère qui se radicalise et s'enferme dans la religion qu'autour du personnage de Vimala Pons). Mais cela fonctionne grâce à une structure en flashbacks (alternance de scènes de l'enfance et de l'adolescence avec le contemporain) limpide mais qui par contrecoup donne une impression statique. En outre, peut-être à cause de son abondance de personnages, il manque un peu de véracité et de profondeur dans les rapports familiaux (entre Ramzi et Agnes Jaoui par exemple, on ressent peu de complicité).
Mal vendu comme une enième comédie lambda avec son affiche calquée sur tant de précédentes (celle de Pour mériter ça.. euh.. non Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? ou de Il reste du jambon ?), Je suis à vous tout de suite ne déclenche pas des crises de rire. Quelques scènes font sourire par l'incongruité ou l'absurdité des situations (Kasmi utilisant une nouvelle fois la nudité de ses acteurs pour créer le décalage) mais on sent à chaque instant, derrière la tendresse et la fausse légèreté apparente, le poids d'un climat sociétal lourd, celui de la France de 2015 et de ses banlieues.
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Re: Le cinéma français contemporain
Si j'en crois le tableur de notes de Karras, personne n'est allé voir Deux Rémi, deux, le film de Pierre Leon ?
Pas aventurier le Classikien.
J'avais peur que le film ne tienne pas deux semaines sur Paris, a priori il continue son exploitation au Reflet et à l'Archipel.
J'y vais demain.
Pas aventurier le Classikien.
J'avais peur que le film ne tienne pas deux semaines sur Paris, a priori il continue son exploitation au Reflet et à l'Archipel.
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Dernière modification par 7swans le 8 mars 16, 22:07, modifié 1 fois.
Comme les Notting Hillbillies : "Missing...Presumed Having a Good Time (on Letterboxd : https://letterboxd.com/ishenryfool/)"
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Re: Le cinéma français contemporain
Je ne suis pas sûr que l'on ait parlé dans ce fuseau du récent Ce Sentiment de l'été de Mikhaël Hers. C'est dommage. Un beau film qui mériterait bien son propre fuseau et qui montre que tout ne va pas mal dans le cinéma français contemporain.
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Re: Le cinéma français contemporain
C'est vrai qu'il y a un peu de ça, les deux scènes sont très proches.Commissaire Juve a écrit :Je suis hors-sujet, mais je viens de visionner le DVD.1kult a écrit : Pas vu, mais affiches moches, bande annonce immonde, qui nous promet un traitement peu original et pour le moins éculé (flic infiltré gnagnagna... dilemme et histoire d'amour poufpoufpouf...) d'un sujet qui semble traité avec les codes esthétiques d'aujourd'hui (2 stars, caméra portée, image filtrée en bleue).
ca fait partie des films quand même très mal vendus - si tant est que le résultat soit plus original que ce qu'il annonce, ce qui s'est déjà vu.
Alors : "noir c'est noir ! Il n'y a plus d'espoir !" Plus sérieusement : énormément de séquences en basse lumière ou carrément dans le noir. Je ne sais pas ce que ça aurait donné en HD. Un festival de postérisation ?
Sinon, comme c'est un film à petit budget, on a beaucoup de plan serrés (qui permettent d'économiser sur les décors), beaucoup de gros plans, c'est un peu étouffant. Mais... ça m'a bien plu. J'ai passé un bon moment, je suis content de mon achat.
Moins de 50.000 entrées : ça peut se comprendre (vu le sujet, vu la distribution), mais c'est injuste.
C'est un peu Donnie Brasco chez les anarchistes. (pour ceux qui connaissent leurs classiques, je me demande même si la scène du costume à échanger n'est pas une référence à la scène des je-ne-retire-pas-mes-santiags dans le resto japonais).1kult a écrit :... un traitement peu original et pour le moins éculé (flic infiltré gnagnagna... dilemme et histoire d'amour poufpoufpouf...
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Tahar Rahim est très bien, l’œil pétillant inspirant la sympathie. Il y a aussi Gouix mais surtout Swann Arlaud, un acteur à suivre de prêt. Le problème c'est Adèle Exarchopoulos. Si physiquement, avec ses longs cheveux, on pourrait croire en son personnage de femme anarchiste de 1899, dès qu'elle ouvre la bouche, on y croit plus. Cette fille est torride et très belle mais il faut qu'elle se paye des courts de diction. Elle me semble incapable actuellement d'incarner une femme d'une autre époque que la notre.
D'une manière générale, ça manque de gouaille parisienne pour qu'on se sente pleinement dans l'époque.
« Je ne suis pas venu pour la gloire, je suis venu pour le danger »
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Re: Le cinéma français contemporain
Ah tiens ? N'ayant pas énormément de sympathie pour le personnage public ("attention, chuis jeune, rebelle et j'emmerde les bourgeois"), j'y étais allé en me disant "ça passe ou ça casse". Et ça a passé !Supfiction a écrit :... Le problème c'est Adèle Exarchopoulos. Si physiquement, avec ses longs cheveux, on pourrait croire en son personnage de femme anarchiste de 1899, dès qu'elle ouvre la bouche, on n'y croit plus...
Ouuuf !
Elle parle bizarrement. Un parler un peu faux qui me rappelle Jean-Pierre Léaud dans les Antoine Doinel. Mais ça ne m'a pas dérangé.
Pour revenir au film : en dépit de la tendance à cadrer "serré", j'ai trouvé le voyage dans le temps convaincant. J'ai souvent pensé à mes arrière-grands-parents ; je me suis dit que ça "devait être comme ça" quand ils étaient jeunes (ça correspond aux photos de famille ).
Petit coup de cœur de prof pour les scènes d'usine (le bruit... là, j'ai tout de suite pensé que c'était un truc à montrer à des élèves ).
Oué, hein ?Supfiction a écrit :C'est vrai qu'il y a un peu de ça, les deux scènes sont très proches.Commissaire Juve a écrit : C'est un peu Donnie Brasco chez les anarchistes. (pour ceux qui connaissent leurs classiques, je me demande même si la scène du costume à échanger n'est pas une référence à la scène des je-ne-retire-pas-mes-santiags dans le resto japonais).
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Puisqu'on en parle : tout à l'heure, en y repensant, je me suis demandé si le personnage de Jean avait changé de nom. "Donnie Brasco", c'est un pseudo. Mais dans "Les Arnarchistes", il me semble bien que le flic infiltré garde son vrai nom. Pas très malin.
Ça, c'est un problème. C'est vrai qu'il inspire la sympathie. Mais comme en face on n'a pas des anars réellement antipathiques, il finit par...Supfiction a écrit : Tahar Rahim est très bien, l’œil pétillant inspirant la sympathie...
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La vie de l'Homme oscille comme un pendule entre la douleur et l'ennui...