Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2014)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Edouard
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Edouard »

Watkinssien a écrit :
Mr-Orange a écrit :
Birdman - Alejandro Gonzalez Inarritu - 2015 : Je ne comprends pas ceux qui disent que ce film est tout sauf une proposition de cinéma.
On peut l'accuser de tricherie certes, le film n'est pas un réel et seul long plan-séquence. La Corde d'Hitchcock non plus, ça ne l'a pas empêché d'être un immense chef d'oeuvre. Et il cachait encore plus ses bricoles, le bougre. Et puis bon, le cinéma, c'est, dans sa globalité, en faisant de gros raccourcis, l'art de tricher, l'art de créer une illusion.
Et moi, même si le travail de mise en scène que je vois est illusoire, je m'en moque, car il n'empêche que c'est vraiment habile et virtuose. Une plongée intimiste et immersive dans un cadre chaotique et schizophrène, qui rappelle le nouveau tournant de Cronenberg, en plus incisif encore, et le film, par moments, m'a pas mal fait évoquer le troublant et fascinant Cosmopolis.
Mouvements effrénés dans la recherche d'espace, en toute urgence, du décor étouffant aux grandes bouffées d'air extérieures, le film regorge d'énergie. Tout comme les acteurs qui participent à cette course (contre quoi au final d'ailleurs ? le chaos ?), du génial Michael Keaton dans rôle taillé pour mesure, en passant par Norton, Watts, Stone, au plus que sympathique Zack Galifianakis.
Si le fond est très simpliste, il reste sacrément efficace, de la machine dévorante du spectacle et d'Hollywood à la critique de la critique (qui au final est caricaturale mais très juste, jusque dans sa finalité avec l'hypocrisie ambiante quand le tragique survient), parfumé d'un cynisme que d'aucuns peuvent considérer prétentieux et antipathique, moi je rentre dedans, c'est méchant, peut-être facile, mais jouissif et pertinent. Et l'envolée délirante suite à une crise de schizophrénie et d'orgueil du protagoniste est un des morceaux du cinéma les plus plaisants qu'il m'ait été donné de voir depuis un bout de temps.
Guyness l'a dit si bien, le film est facile, tant à détester qu'à adorer. Je me range dans la deuxième catégorie.
Ça en fera certainement hurler certains, mais c'est le plus beau film sur le déclin du Cinéma (même si il évolue dans le cadre du théâtre) depuis Holy Motors. 5/6
Intéressante que cette critique car elle évoque deux films auxquels j'ai pensé.
Tout d'abord, La corde, évidemment. Nous l'avons déjà dit, le plan séquence est ici faux et les "coupes-raccords" permettent de reposer l'œil du spectateur. De plus, si je reconnais le tour de force d'Hitchcock, ce n'est clairement pas son meilleur mais ce dernier est, par rapport à Birdman, est soutenu par une intrigue palpitante et James Stewart d'une justesse parfaite.
Ensuite, Cosmopolis. J'ai pensé que Birdman devait ressembler à Map to the stars mais ne l'ai pas vu car je n'apprécie pas le tournant cinématographique qu'à pris Cronenberg depuis ce Cosmopolis. Mr Orange lie Birdman à Cosmopolis. Or, en ce qui concerne ce dernier, c'est une des rares fois où j'ai failli sortir de la salle. Ainsi, il paraît presque quais-logique que je n'ai pas apprécié Birdman puisqu'il est proche de Cosmopolis.
Enfin, tout ce qui a plus à ce Mr Orange, et à toi aussi Watkinssien j'imagine, et qu'il évoque dans sa critique sont tous les éléments qui ne m'ont pas plu dans ce Birdman, qui était l'une de mes attentes 2015.
Mais je ne dis pas que vous avez tort, car vos arguments sont pertinents,... ni que vous avez raison :wink:
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Demi-Lune
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Demi-Lune »

bruce randylan a écrit :
Mosin-Nagant a écrit : J'applique cela aussi pour les plans-séquences. De Palma m'impressionne plus que Inárritu , tout simplement.
Pourtant De Palma n'hésite pas à tricher dans ses plans-séquences aussi... comme l'ouverture de Snake Eyes constitué d'au moins 3 plans.
Sauf que De Palma ne ferait jamais de faux plans à la grue numériques qui passent au travers d'une barrière en fer forgé pour que la caméra (enfin, le raccord) rentre par la fenêtre. Il devait en être fier de ça, Iñarritu, parce qu'il nous fait deux fois le coup dans le film. Panic room style et sa caméra qui passe par une anse de tasse de café.
Ça n'a l'air de rien cette histoire de plan impossible, mais c'est symbolique pour moi d'un film dont le mot d'ordre n'est que performance. Performance d'acteurs, performance de réalisation... on est dans la démonstration permanente, qui martèle ses intentions auteurisantes comme un bulldozer, à grands renforts de solos de batterie nerveux et de comédiens qui hurlent. Sauf qu'il n'y a pas grand-chose à se mettre sous la dent derrière tout cet étalage fatigant de gesticulations et d'excentricités pseudo inventives. Déjà, l'antipathie qui émane du regard porté par le cinéaste sur ses personnages n'appelle pas chez moi de participation émotionnelle : on a plutôt affaire à des pantins ou à des pions désincarnés déplacés au gré de l'impérieuse mise en scène, qui fait le show. Ensuite, l'argument de la mise en abyme apparaît au final bien maigre sinon vain par rapport au sentiment de fadeur et de déjà-vu qui étreint dès lors que l'on se remémore les grandes heures d'Opening night ou autres réflexions plus profondes sur le travail d'acteur. Pareil (voire pire) sur la forme, donc. Watkinssien va encore s'insurger, mais de la même manière que les pirouettes de la caméra de Gravity m'apparaissent vaines et prétentieuses, le parti-pris du plan-séquence unique n'obéit pour moi à aucune justification dramatique. J'y vois un étalage compétent mais arrogant et auto-satisfait de technique, rien de plus. Le film-bateleur. C'est bien interprété, mais avec Père Jules, on l'avait effacé de notre mémoire une heure plus tard.
Bref, Iñarritu c'est définitivement pas ma came.
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Watkinssien
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Watkinssien »

Non, en réalité, j'attendais ta réaction mais je savais que tu n'allais pas aimer, vu que cela participe d'une même "tendance" que Gravity. Ou plutôt, si tu avais aimé, j'aurais été (agréablement) surpris. :wink:

La performance peut se ressentir, comme elle peut être oubliée. Plus que les plans-séquences, ce sont les fascinants jeux de miroirs, le rythme endiablé et (tant mieux pour moi) une identification complète avec le personnage principal qui ont eu raison de moi et qui m'apparaissent comme une maîtrise incontestable.
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Edouard
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Edouard »

Demi-Lune a écrit :
bruce randylan a écrit : Pourtant De Palma n'hésite pas à tricher dans ses plans-séquences aussi... comme l'ouverture de Snake Eyes constitué d'au moins 3 plans.
Sauf que De Palma ne ferait jamais de faux plans à la grue numériques qui passent au travers d'une barrière en fer forgé pour que la caméra (enfin, le raccord) rentre par la fenêtre. Il devait en être fier de ça, Iñarritu, parce qu'il nous fait deux fois le coup dans le film. Panic room style et sa caméra qui passe par une anse de tasse de café.
Ça n'a l'air de rien cette histoire de plan impossible, mais c'est symbolique pour moi d'un film dont le mot d'ordre n'est que performance. Performance d'acteurs, performance de réalisation... on est dans la démonstration permanente, qui martèle ses intentions auteurisantes comme un bulldozer, à grands renforts de solos de batterie nerveux et de comédiens qui hurlent. Sauf qu'il n'y a pas grand-chose à se mettre sous la dent derrière tout cet étalage fatigant de gesticulations et d'excentricités pseudo inventives. Déjà, l'antipathie qui émane du regard porté par le cinéaste sur ses personnages n'appelle pas chez moi de participation émotionnelle : on a plutôt affaire à des pantins ou à des pions désincarnés déplacés au gré de l'impérieuse mise en scène, qui fait le show. Ensuite, l'argument de la mise en abyme apparaît au final bien maigre sinon vain par rapport au sentiment de fadeur et de déjà-vu qui étreint dès lors que l'on se remémore les grandes heures d'Opening night ou autres réflexions plus profondes sur le travail d'acteur. Pareil (voire pire) sur la forme, donc. Watkinssien va encore s'insurger, mais de la même manière que les pirouettes de la caméra de Gravity m'apparaissent vaines et prétentieuses, le parti-pris du plan-séquence unique n'obéit pour moi à aucune justification dramatique. J'y vois un étalage compétent mais arrogant et auto-satisfait de technique, rien de plus. Le film-bateleur. C'est bien interprété, mais avec Père Jules, on l'avait effacé de notre mémoire une heure plus tard.
Bref, Iñarritu c'est définitivement pas ma came.
Je suis d'accord avec Demi-Lune mais bizarrement j'avais apprécié la réalisation de Panic Room et de Gravity. Elle me semblait justifiée par rapport à l'histoire et peut être était-elle mieux amenée dans le sens où elle ne se révélait ne pas être uniquement une démonstration d'un tour de force.
Le coup du fer forgé m'a paru gadget aussi. Il fait deux fois le coup ? Je ne m'en souviens que d'un seul.
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-Kaonashi-
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par -Kaonashi- »

Mosin-Nagant a écrit :
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-Kaonashi Yupa- a écrit :Plus que la réticence de ce forumeur aux plans-séquences truquées, c'est ça première phrase que je trouve étrange :

Qu'est-ce qui te fait croire ça ? C'est incompréhensible comme argument.
Faire un procès d'intention sur les acteurs cités plus haut, c'est mon droit le plus absolu. Je les ai trouvé mauvais et peu subtiles.
Je ne suis pas dans leurs têtes, bien sûr, mais voilà ce que m'a inspiré leurs interprétations.

Par exemple, il n'y a qu'a voir la récente filmographie de N. Watts pour s'imaginer, sans peine, qu'elle doit bien vouloir se refaire une santé artistique avec un réalisateur qui a la carte. Voilà pourquoi elle me donne ce sentiment de "super, je joue dans le film ambitieux d'un réalisateur respecté et je vais pouvoir, peut-être, si je me donne bien du mal, obtenir une récompense pour ce second rôle". C'est déjà être dans une forme d'auto-satisfaction, je trouve.

Tout ça, vous me direz, c'est un peu le sujet du film. Pour autant, je doute que ça soit voulu.

Cet argument est-il plus compréhensible pour toi, cher forumeur ?
Forumeur n'est pas une insulte, et oui j'ai fait une grossière faute, que j'ai corrigée.
En attendant non je trouve ton argumentation non valable, et ça aussi "c'est mon droit le plus absolu" comme tu l'écris de manière fort grandiloquente : personne ici ne disait le contraire...
La filmo de Naomi Watts comporte de bonnes choses, et des choses que j'imagine intéressante pour une actrice (Funny Games US, The Impossible, Perfect Mothers, le Woody Allen, etc).
Si par contre tu as la clé pour voir de manière infaillible qu'un acteur prend son pied à tourner avec tel réalisateur ou n'est là que pour payer ses impôts, partage avec nous ! Comme l'argument "untel n'a pas sa place", il doit y avoir quelques exemples probants, mais assez peu nombreux pour justifier ce type d'assertions.
Watkinssien a écrit :La mise en scène en plans séquences peut devenir une négation du montage, je peux le comprendre. Cependant, le cinéma est aussi l'affirmation de la taille du plan dans le cadre. Or Birdman est aussi un contenu brillant de cet aspect constitutif du Septième art.
Et c'est oublié qu'un plan-séquence est aussi souvent (toujours ?) réfléchi avec une notion de "montage dans le plan", via le cadrage, la profondeur de champ, la mise en évidence de tel ou tel éléments de la séquence par le son ou la lumière, etc.
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wontolla
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par wontolla »

J'ai beaucoup aimé le film. Voici grosso modo ce que j'en ai dit dans mon émission. Source (14/01/15).

Que voilà une excellente surprise pour un cinéphile !
Je préviens d’emblée : il faudra faire un effort pour entrer dans le film qui ne se pare pas des plumes de la séduction sinon celle d’un super héros plus que vieillissant.

Dans le rôle de ce héros, quasiment anti-héros, Michael Keaton dont on comprend facilement que les Golden Globes 2015 l’aient consacré meilleur acteur dans un film musical ou une comédie pour ce film.

Au-delà de l’interprétation remarquable de Keaton (sans compter Edward Norton, excellent lui aussi dans le rôle d’un acteur... très sûr de lui et plus sûr - ou plus dur ? - encore sur scène que dans la vie réelle !) ce cinquième film Alejandro González Iñárritu est véritable réflexion (un jeu de miroirs !) sur l’acteur. Les mises en abîme se court-circuitent : entre théâtre, cinéma et littérature.

En effet, le roman What We Talk About When We Talk About Love de Raymond Carver est une des clés du film. Riggan met le roman en scène au théâtre, ce qui fait l’objet du film. Mais la pièce qui se joue sur scène... se joue ou se vit dans la « réalité » (entendons, telle que présentée à l’écran bien entendu). Car il y a des liens également avec le vie réelle de l’acteur qui interpréta jadis un super héros, oiseau de nuit, Batman... en 1989 et 1992, sous la direction de Tim Burton.

Il y a donc de multiples jeu de miroirs (présents aussi dans la loge de Riggan) entre le roman de Carver, la pièce de théâtre qui est mise en scène, la vie « réelle » des protagonistes du film, et celle de l’acteur dans la « vraie vie » mais aussi dans sa vie de super-héros cinématographique.

Et le film est lui-même une leçon de cinéma, nous faisant passer dans un même plan de la répétition de la pièce sans public à la représentation en avant-première devant le public. La quasi totalité du film se déroule d’ailleurs en un quasi huis clos, celui du théâtre dont on arpente la scène ; les loges et le toit. Le film ne quittera ces lieux que pour les airs où nous nous envoleront avec le héros, comme un oiseau dans une scène qui fera se fracasser (ou s’envoler !!!) le rêve-fantasme contre la réalité où l’atterrissage sera rappelé à la dure réalité du sol par la demande d’un chauffeur de taxi que sa course lui soit payée. Le film se donne à voir comme un unique « plan-séquence » (même s’il n’a pas été tourné comme tel).

Nous aurons droit à quelques scènes qui nous ferons découvrir les fantasmes du héros qui se rêve encore « super » capable de bien des prouesses de télékinésie mais qui, la robe de chambre coincée dans la porte du théâtre va se retrouver en slip dans la rue... Dur rappel de la réalité.

Le film ne manque pas non plus d’égratigner le milieu du cinéma et des acteurs renommés sans oublier non plus celui des critiques (de théâtre... mais bien sûr de cinéma également).

Le film déconcertera probablement mais il est une réflexion (je joue ici sur le double sens) sur ce qui se « joue » et se « trame » dans la vie d’acteur, sur scène et dans les coulisses. A recommander chaudement aux cinéphiles et à ceux qui veulent découvrir un cinéma intelligent, de qualité et qui demande un certain effort pour y entrer, probablement sans pop corn !
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Demi-Lune
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Demi-Lune »

-Kaonashi Yupa- a écrit :Et c'est oublié qu'un plan-séquence est aussi souvent (toujours ?) réfléchi avec une notion de "montage dans le plan", via le cadrage, la profondeur de champ, la mise en évidence de tel ou tel éléments de la séquence par le son ou la lumière, etc.
Bien sûr. Ce n'est pas l'objet de mon propos. Ce que je critique, c'est la valeur réelle du procédé, sa pertinence et sa justification. Qu'est-ce que ça apporte à l'histoire ou à la création d'une émotion que ce soit filmé en un plan et pas en un découpage de deux mille ?
On citait le Hitchcock de La corde plus haut : ben outre le fait que Hitch lui-même s'avouait rétrospectivement sceptique par rapport à la pertinence dramatique d'une telle expérimentation, pour moi il y a clairement un monde entre lui et Inarritu dans la façon de penser et de vendre leurs effets. Dans La corde, Hitchcock tâche de conditionner sa mise en scène en plan (pseudo) unique de telle manière que ce soit au service des ressorts de l'histoire et du suspense : l'assassin va cacher la corde dans un tiroir de la cuisine, la caméra le suit de pièce en pièce, parce qu'il faut que le spectateur le voie et le sache pour avoir un coup d'avance sur les convives ; la servante débarrasse le coffre où se trouve le cadavre, la caméra s'abaisse à son niveau et y reste jusqu'à que le suspense soit à son comble. Il y a une compréhension intuitive de la manière dont on peut raconter une histoire avec une caméra, derrière ça. Même si La corde a pu être vendu à l'époque comme un tour de force, le parti-pris du plan-séquence sert les situations.
Dans Birdman, le truc n'est pour moi que poudre aux yeux, ça n'est pas au service de l'histoire mais l'inverse. La réal' est là pour nous tirer la manche, pour signifier à quel point ça tient du tour de force. C'est une fin en soi, elle ne s'efface pas derrière son sujet, mais au contraire le dicte et le vampirise. On a l'impression que le cinéaste aurait pu chorégraphier ses mouvements de dix façons différentes, que ça n'aurait rien changé. Cette vampirisation, elle est flagrante à certains moments où le cut aurait permis l'émergence d'une émotion (le "truth or dare", par exemple : plutôt que de filmer les deux redescendre, le cut aurait permis de tarauder l'imagination, de suspendre cette scène dans l'incertitude) ou lorsque Inarritu filme longuement ce couloir vide parce qu'il est obligé d'attendre que le personnage sur scène remonte. C'est vraiment dans ces moments contreproductifs qu'il est fatal de voir dans ce système quelque chose de profondément arrogant.
Alors, tant mieux pour ceux qui apprécient le film si ça suscite leur admiration. Perso, cette tendance de vouloir en coller plein la vue avec des mouvements impossibles sans contenu derrière qui en vaille l'effort, ça me fatigue.
Quand Antonioni passait sa caméra entre les barreaux à la fin de Profession reporter, ce n'était certainement pas pour l'épate.
Et qu'on ne sorte pas De Palma en contre-argumentation (je sens le truc venir). :)
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Colqhoun »

Demi-Lune a écrit :Bien sûr. Ce n'est pas l'objet de mon propos. Ce que je critique, c'est la valeur réelle du procédé, sa pertinence et sa justification. Qu'est-ce que ça apporte à l'histoire ou à la création d'une émotion que ce soit filmé en un plan et pas en un découpage de deux mille ?
S'il y a une chose que je suis prêt à défendre dans ce film c'est l'utilisation du plan-séquence. Parce que si l'exercice finit par trouver ses limites, je pense qu'il reste pertinent pour en tout cas une bonne moitié de l'histoire. Et ce parce qu'il nous permet de rentrer pleinement dans les pensées et les divagations de Riggan. Birdman est un film-cerveau en puissance. Et les backstages du théâtre en sont le labyrinthe qu'il parcourt en long et en large, sans jamais pouvoir réellement en ressortir (toutes ses actions ne font que le ramener au même endroit). Pour moi elle est là la justification du plan-séquence, parce que en évitant tout cut visible, on accroît progressivement cette sensation d'étouffement et de lieu complètement replié sur lui-même. Et à ce titre, je pense que le choix du réalisateur était pertinent.
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Harkento »

Colqhoun a écrit :
Demi-Lune a écrit :Bien sûr. Ce n'est pas l'objet de mon propos. Ce que je critique, c'est la valeur réelle du procédé, sa pertinence et sa justification. Qu'est-ce que ça apporte à l'histoire ou à la création d'une émotion que ce soit filmé en un plan et pas en un découpage de deux mille ?
S'il y a une chose que je suis prêt à défendre dans ce film c'est l'utilisation du plan-séquence. Parce que si l'exercice finit par trouver ses limites, je pense qu'il reste pertinent pour en tout cas une bonne moitié de l'histoire. Et ce parce qu'il nous permet de rentrer pleinement dans les pensées et les divagations de Riggan. Birdman est un film-cerveau en puissance. Et les backstages du théâtre en sont le labyrinthe qu'il parcourt en long et en large, sans jamais pouvoir réellement en ressortir (toutes ses actions ne font que le ramener au même endroit). Pour moi elle est là la justification du plan-séquence, parce que en évitant tout cut visible, on accroît progressivement cette sensation d'étouffement et de lieu complètement replié sur lui-même. Et à ce titre, je pense que le choix du réalisateur était pertinent.
Complètement d'accord. Pour moi, la caméra d'Inarritu renvoie à la schizophrénie du personnage, mais aussi pour en faire un exercice purement cinématographique, et ce n'est pas parce que la caméra n'est pas au service du récit qu'il se montre arrogant ou démonstratif. Elle colle carrément au propos et à l'enfermement des personnages qui ne vivent qu'a travers le prisme du théâtre : tout part de là et tout y retourne. Ceci dit, je comprends que ce style ne parle pas à tout le monde, mais c'est vrai que j'ai toujours du mal à comprendre la sensibilité de Demi-lune concernant la réalisation .... parce que la virtuosité de De Palma ( :wink: ), perso, à la revision de certains de ses films, m'ont paru improbable justement parce qu'elle comblait ou cachait les incohérences de ces scénarios par le truchement du montage et de la sidération (je pense en fait à Fury, Body double ou Obsession qui m'ont un peu déçu en terme de dramaturgie et de caractérisation). Mais bon, je pense qu'on ne part pas, à la base, avec les mêmes exigences donc c'est marrant de voir ce qui fonctionne ou pas suivant les sensibilités.
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par zeotrope »

En regardant le film je n'ai même pas fait attention à cette histoire de plan séquence. Je me suis fait happer par le rythme soutenu, l'histoire, le jeu des acteurs. J'ai bien remarqué à 2-3 reprises la virtuosité technique sans que ça me sorte du récit. Je suis cinéphile mais je n'aime pas décortiquer pendant. Après ça peut m'arriver et dans le cas de Birdman, après avoir entendu des critiques qui ont les mêmes arguments négatifs écrits ici je n'arrive pas à changer mon avis: j'ai beaucoup aimé. Philippe Rouyer aussi.
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Mosin-Nagant »

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-Kaonashi Yupa- a écrit :
Mosin-Nagant a écrit : Faire un procès d'intention sur les acteurs cités plus haut, c'est mon droit le plus absolu. Je les ai trouvé mauvais et peu subtiles.
Par exemple, il n'y a qu'a voir la récente filmographie de N. Watts pour s'imaginer, sans peine, qu'elle doit bien vouloir se refaire une santé artistique avec un réalisateur qui a la carte. Voilà pourquoi elle me donne ce sentiment de "super, je joue dans le film ambitieux d'un réalisateur respecté et je vais pouvoir, peut-être, si je me donne bien du mal, obtenir une récompense pour ce second rôle". C'est déjà être dans une forme d'auto-satisfaction, je trouve.

Tout ça, vous me direz, c'est un peu le sujet du film. Pour autant, je doute que ça soit voulu.

Cet argument est-il plus compréhensible pour toi, cher forumeur ?
Forumeur n'est pas une insulte, et oui j'ai fait une grossière faute, que j'ai corrigée.
En attendant non je trouve ton argumentation non valable, et ça aussi "c'est mon droit le plus absolu" comme tu l'écris de manière fort grandiloquente : personne ici ne disait le contraire...
La filmo de Naomi Watts comporte de bonnes choses, et des choses que j'imagine intéressante pour une actrice (Funny Games US, The Impossible, Perfect Mothers, le Woody Allen, etc).
Si par contre tu as la clé pour voir de manière infaillible qu'un acteur prend son pied à tourner avec tel réalisateur ou n'est là que pour payer ses impôts, partage avec nous ! Comme l'argument "untel n'a pas sa place", il doit y avoir quelques exemples probants, mais assez peu nombreux pour justifier ce type d'assertions.

Forumeur, une insulte ? Non, quelle idée... J'ai juste cru déceler dans la phrase une légère teinte de condescendance, tout au plus.

Pour N. Watts, dans le genre bonnes choses, je pensais plus à Lynch.
Ah, zut, désolé, déjà évoqué... Y a rien d'autre qui me vient.

Affirmer son droit absolu d'être irrité par des acteurs, rien de bien grandiloquent. J'aurais écrit ça en lettres majuscules, passe encore... Mais, là, ce qualificatif me semble quelque peu mal adapté. Je précisais seulement ma pensée en précédant de possibles contradicteurs.

Je n'ai aucune clef, je ne vais pas pouvoir partager quoi que ce soit avec toi. Mon ressenti me suffit, sur ce point. Et je l'ai déjà dit. Ici :
Mosin-Nagant a écrit :Je ne suis pas dans leurs têtes, bien sûr, mais voilà ce que m'a inspiré leurs interprétations.
Certains acteurs n'ont pas leur place dans certains films. C'est certain. On appelle ça "erreur de casting" et, bon sang, il y en a toujours eu un sacré paquet dans cette industrie ! Ne pas le reconnaitre...
-Kaonashi Yupa- a écrit :(...)un plan-séquence est aussi souvent (toujours ?) réfléchi avec une notion de "montage dans le plan", via le cadrage, la profondeur de champ, la mise en évidence de tel ou tel éléments de la séquence par le son ou la lumière, etc.
Malheureusement, pas toujours...
Sans quoi, je trouve cette argumentation "valable".
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2015)

Message par Ouf Je Respire »

Colqhoun a écrit :
Demi-Lune a écrit :Bien sûr. Ce n'est pas l'objet de mon propos. Ce que je critique, c'est la valeur réelle du procédé, sa pertinence et sa justification. Qu'est-ce que ça apporte à l'histoire ou à la création d'une émotion que ce soit filmé en un plan et pas en un découpage de deux mille ?
S'il y a une chose que je suis prêt à défendre dans ce film c'est l'utilisation du plan-séquence. Parce que si l'exercice finit par trouver ses limites, je pense qu'il reste pertinent pour en tout cas une bonne moitié de l'histoire. Et ce parce qu'il nous permet de rentrer pleinement dans les pensées et les divagations de Riggan. Birdman est un film-cerveau en puissance. Et les backstages du théâtre en sont le labyrinthe qu'il parcourt en long et en large, sans jamais pouvoir réellement en ressortir (toutes ses actions ne font que le ramener au même endroit). Pour moi elle est là la justification du plan-séquence, parce que en évitant tout cut visible, on accroît progressivement cette sensation d'étouffement et de lieu complètement replié sur lui-même. Et à ce titre, je pense que le choix du réalisateur était pertinent.
+1.

Et je pense que ce plan-séquence amène une puissance particulière aux avant-dernières scènes du film (celles qui
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pour le coup, font du montage une science de l'ellipse
).
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2014)

Message par semmelweis »

Birdman or (The Unexpected Virtue of Ignorance), Alejandro González Iñárritu(2015)


Genre: Que d’ego,Que d’ego…

Après le pesant Biutiful qui valut le prix d’interprétation masculine à Cannes pour Javier Bardem, Alejandro González Iñárritu revient avec Birdman. Annoncé comme un chef d’oeuvre depuis son passage à Venise, le film a fait la razzia sur les Oscars principaux en février dernier avec le prix du meilleur réalisateur et du meilleur film. Qu’en est-il réellement ?
Birdman suit les derniers jours de la préparation d’une adaptation théâtrale de la nouvelle « Parlez-moi d’amour » (What We Talk About When We Talk About Love) de Raymond Carver se jouant à Broadway.

L’acteur « has been » Riggan Thomson (Michael Keaton) connu pour avoir incarné un célèbre super-héros au cinéma du nom de Birdman tente de revenir aux affaires en montant cette pièce tout en y interprétant le rôle principal. Pour se faire, il devra faire face à un acteur exigeant Mike Shiner (Edward Norton), à sa fille (Emma Stone) ex junkie, mais aussi et surtout à lui-même…
Le film a été très vendu sur le fameux faux plan-séquence qui le parcourt, modèle de virtuosité mais qui pouvait tourner à la démonstration technique vaine. On pouvait le craindre avec Inarritu dont la subtilité n’est pas la plus grande qualité.

Il n’en est rien…Le choix d’unir la narration au sein d’un même plan n’est que la résultante du projet du cinéaste. En effet, Birdman est littéralement un film-cerveau qui explore le labyrinthe de l’esprit névrotique et narcissique de Riggan. Car dans ce nouvel opus du réalisateur mexicain, il n’est question que d’Ego à la fois de son acteur principal et de sa troupe. On retrouve en parallèle le milieu de Broadway entre critiques qui s’écoutent parler, recherche de célébrité et de reconnaissance artistique et intellectuelle, et solitude existentielle.
Monstre d’égocentrisme, Riggan se focalise sur la montée de sa pièce inspirée de Carver comme solutions et causes de sa crise professionnelle et personnelle. Il espère qu’elle lui fera disparaître son mauvais génie, son « daimon » qui lui susurre à l’oreille d’abandonner ce projet et lui rappelle sa gloire passée. Car par moment, Riggan n’est ni plus ni moins que le super-héros qu’il a incarné comme un beau fantasme de lui-même.

C’est ainsi qu’Inarritu construit son film en jouant à la fois sur les rapports entre les différents acteurs de la création de la pièce et Riggan, sa famille mais aussi son « Birdman » intérieur. Ces interconnexions, ces « allers-venus » sont liés dans un grand maillage par le plan-séquence qui unit à la fois les répétitions de la pièce mais aussi la vie dans les coulisses. La grande ambition du film n’est ni plus ni moins que de créer une valse étourdissante entre mensonge, vérité, théâtralité, vie intérieure, image de soi-même et celle que l’on donne aux autres dans ce théâtre qu’est la vie ! D’ailleurs, dès que l’on sort de la salle de spectacle, la rue grouille et on se dit vraiment que le monde est une scène où la frontière entre rêve et réalité est poreuse.
On le note particulièrement lors de la première rencontre entre Norton et Keaton dont la caméra s’amuse par travelling arrière/avant interposé à croiser la part de jeu des acteurs et leurs vraies personnalités. D’ailleurs, il n’est pas nécessaire de dire que les deux acteurs sont éblouissants dans le film, jouant d’eux-mêmes mais trouvant toujours une complexité bienvenue dans le monde de marionnettes du réalisateur.

Devant tant d’éloges, que peut-on reprocher alors à cette grande oeuvre? Tout simplement, le fait que ce n’en est pas une…
Dans sa première heure, le film pique à vif et se montre séduisant dans son dispositif permettant une mise en scène en raccord avec l’ambition de l’oeuvre. Mais très vite, Inarritu retombe dans ses travers et laisse son film en plein vol incapable de construire un vrai vertige de cinéma. Une fois de plus, le cinéaste mexicain abandonne l’image pour montrer un scénario et nous faire écouter des dialogues surlignés où toute image doit être accompagné d’un sous-texte voulu brillant. Ne sachant que faire du dispositif qu’il a mis en place, le film se referme sur lui-même et assène les mêmes figures de style jusqu’au final.
Le plan séquence ne devient alors plus porteur d’une capacité de brasser un univers mais bien de tourner autour et de faire du sur-place. Par la fluidité de sa mise en scène, le film nous rappelle que le monde est un théâtre comme disait le dramaturge anglais, le cinéaste se sent obligé de faire déclamer la fin de Macbeth par un homme dans la rue avoisinante le théâtre comme une explication de texte.

Dans une volonté de contrôle du spectateur, Inarritu évente les fantasmes que pouvaient provoquer les « drôles de facultés » de Riggan en déplumant le Birdman en un simple gimmick. La visée cathartique de l’acte de Keaton sur la scène tombe comme un soufflet tellement celui-ci est annoncé à l’avance par les propos de l’acteur rappelant son épisode des méduses. Ce grand défilé d’acteurs névrotiques, caricaturés entre « actor’s studio » et « égo surdimensioné » qui était jouissive au début du film se retourne contre celui-ci en ne faisant jamais évoluer les personnages. On arrive alors à un propos éculé où les actrices sont toutes lesbiennes, où chacun se regarde jouer comme une version clownesque de lui-même. Heureusement pour nous, Keaton arrive par un jeu plus souterrain à maintenir un personnage consistant et s’éloignant du programme annoncé.

Le film refuse l’entre-deux et se doit de dicter le discours et la morale voulue par le réalisateur. Le spectateur devient donc prisonnier du logiciel idéologique de son auteur. On a donc droit à des critiques particulièrement insupportables, prônant plus une posture qu’une vision honnête de l’art. De la même façon, le cinéma de divertissement est dévalué face au théâtre même si cela correspond aussi à la vision de Riggan. Le vertige et la recherche métaphysique de Keaton se conclue finalement au fait qu’il ne s’est pas assez occupé de sa femme et de sa fille. De cette fanfare émet une réponse de vie dès plus commune. Il faut des réponses à tout prix même si la question reste plus intéressante que la réponse. On s’approche alors d’un moralisme à la Nolan dans Interstellar mais aussi à la Gravity. Il est nécessaire d’examiner Birdman à l’orée de son ainé car il partage le même chef opérateur Emmanuel Lubezski et sont construit sur le même schéma où l’illusion des plans est le fil rouge de la dramaturgie.
Mais là où on aurait envie de réévaluer le compatriote Cuaron, c’est qu’il fait le choix de ne pas mettre de sous texte explicatif à ses images. Gravity puisait sa force dans la viscéralité de sa situation et s’y tenait tellement que l’on pouvait espérer (par moment) une ébauche de vertige métaphysique sans que cela ne soit écrit ou souligné à chaque scène. Mais les deux oeuvres qui partagent une même grand ambition nous ramènent à un propos que tout blockbuster pourrait nous asséner de la même façon.

A se vouloir être trop profond, la ritournelle en devient vaine et simpliste sans apporter d’émotion et sa fameuse catharsis salvatrice. Par essence, ce n’est pas surprenant que le film ait gagné tant d’Oscars tellement il reste dans la performance et joue à une caricature de questionnement sur le milieu du show-business. Le film reste en l’état une blague pesante dans sa deuxième partie.
Mais remercions Inarritu de nous laisser un plan final plus ouvert permettant au film de respirer. De la même façon, les deux seules moments non montés comme un plan séquence au début et à la fin du film laisse entrevoir des fragments d’émotion qui aurait pu parcourir tout le film si Inarritu avait accepté de prendre des risques jusqu’au bout quitte à se perdre lui-même et son cinéma par la même occasion.
Au fond, « rien n’est plus illusoire que ce monde interne que nous observons à l’aide de ce fameux sens interne » écrivait Nietzsche. Inarritu aurait du suivre cette maxime jusqu’au bout…

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Père Jules
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2014)

Message par Père Jules »

semmelweis a écrit :A se vouloir être trop profond, la ritournelle en devient vaine et simpliste sans apporter d’émotion et sa fameuse catharsis salvatrice. Par essence, ce n’est pas surprenant que le film ait gagné tant d’Oscars tellement il reste dans la performance et joue à une caricature de questionnement sur le milieu du show-business. Le film reste en l’état une blague pesante dans sa deuxième partie.
Tout à fait mon ressenti à la sortie du film.
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Jeremy Fox
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Re: Birdman (Alejandro González Iñárritu - 2014)

Message par Jeremy Fox »

Passons vite sur l'exercice de style certes d'une immense virtuosité mais dont je ne suis pas certain d'avoir capté la pertinence ni l'intérêt (comme souvent chez le cinéaste d'ailleurs) ; intérêt que j'ai par contre trouvé dans cette galerie de personnages tour à tour pathétiques et drôles, dans les thématiques abordées sous un angle un peu différent (le retour d'un acteur has-been ; la réflexion sur l'art, le théâtre le cinéma, le rêve et la réalité, la schizophrénie...) et dans les dialogues souvent incisifs même si parfois au bord du cliché (la séquence néanmoins très forte avec la critique du NY Times).

Une vision de ce microcosme d'artistes assez désenchantée mais jamais déprimante et qui arrive souvent au contraire à grandement nous émouvoir. Grâce surtout -mais ce n'est pas une surprise- à une interprétation globalement formidable (et le mot est faible) de tous les comédiens présents à commencer bien évidemment par Michael Keaton qui m'a laissé sur le cul. Et puis voir Emma Stone, Naomi Watts, Amy Ryan et Edxward Norton dans le même film, ce ne fut pas non plus pour me déplaire. Beau soundtrack également avec l'une des plus belles séquences sur le trio avec piano de Ravel. N'étant pas du tout fan du cinéaste, ce fut une très agréable surprise même si je n'ai encore une fois pas été entièrement convaincu. Un peu plus de simplicité ne ferait pas de mal à son cinéma je trouve.
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