Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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G.T.O
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par G.T.O »

El Dadal a écrit : Je trouve justement que le contrepoint entre cette vie intime vidée de toute substance (on le voit à plusieurs reprises seul chez lui, en stand by) et des relations extra-professionnelles (tentative de nouer une amitié de la part de son employé esseulé, relations sexuellement tendues avec Rene Russo...) provoque suffisamment de moments permettant au spectateur de l'appréhender sous différents angles. De plus, si le film s'attarde assez peu sur les à-côtés, peut-être potentiellement au détriment d'un autre niveau de profondeur du scénario, c'est au bénéfice du rythme global du film, que j'avais trouvé très bien mené. Ça, plus un montage carré, et une mise-en-scène fluide ce faisant le prisme de l'évolution des techniques de filmage du personnage, et j'y vois autre chose qu'un film dénué de personnalité dans sa réalisation comme tu sembles l'insinuer!

C'est marrant que tu parles d'efficacité parce que je pense qu'elle explique, en partie, l'échec - relatif- du film dans le sens où ce dernier reste finalement très limité ou que le portrait établi reste tributaire d'une logique spectaculaire. Le film gagne en efficacité ce qu'il perd en finesse, en potentiel de perturbation...Rien de répréhensible en soi mais rien de renversant non plus. Et quant à l'argument selon lequel le personnage serait un proche cousin des personnages de vampire à la Easton Ellis, n'ayant aucune intimité, est une justification un peu large et facile pour expliquer la grossièreté du portrait. Pas besoin d'être Ellis, d'être écrivain, suffit d'être bon réalisateur, pour nous montrer en deux plans, comme dans Collatéral, un tueur qui doute, ambigu, gagne en humanité mais reste dangereux....Quant aux moments dont tu parles, je ne vois en quoi ils témoignent d'autres facettes du personnage...désolé. Pourtant, j'ai vu le film hier soir... :mrgreen:
Dernière modification par G.T.O le 5 févr. 15, 14:26, modifié 2 fois.
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G.T.O
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par G.T.O »

Colqhoun a écrit :Disons quand même que les intentions du film, j'ai un peu l'impression qu'on nous les hurle à la face pendant 1h30.
C'est vite fatigant.
Oui, c'est sur. Il n 'y va pas avec douceur...On est plus proche de la méthode Cauet
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avec la mort de son acolyte.
.
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Flol
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par Flol »

G.T.O a écrit :On est plus proche de la méthode Cauet
Pardon ?

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bruce randylan
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par bruce randylan »

Comme j'ai fini le boulot plus tôt que prévu, je reprends un débat jamais fini ! :)
Demi-Lune a écrit :
bruce randylan a écrit :Collateral reste le dernier bon Mann (encore que le dernier tiers me gonfle) Mais Night Crawler possède le gros avantage d'avoir une réalisation qui fonctionne totalement avec son personnage, l'un et l'autre évoluant en même temps et s'enrichissant mutuellement. Là où le Mann reste un brillant exercice de style (sous influence du cinéma hong-kongais... comme quoi :) )
Autant je souscris entièrement à ton commentaire sur Hacker, autant là je te suivrais difficilement. Je trouve que la réalisation de Night call est tout à fait fonctionnelle et dénuée de style
Pourtant la réalisation de Girloy n'a rien de fonctionnelle ni de gratuite. Elle est un pure prolongement de l’arrogance du personnage de Jake Gyllenhaal au fur et à mesure qu'il prend de l'assurance avec la maîtrise du discours cinématographique. C'est un personnage qui prend vie au contact de la caméra.
Je n'ai pas eut la bonne idée d'écrire un avis à chaud à la sortie de la salle donc j'ai plus tout les exemples en tête (et ça reste du ressenti) mais j'avais l'impression que le début du film est beaucoup tourné avec des longues focales qui rendent l'arrière plan flou et que plus le film avançait plus Jake Gyllenhaal s'intégrait dans le décor, au point de fusionner avec lui. Ca m'avait pour le coup sauté aux yeux dans la manière dont sont filmés les locaux de la chaîne de télé. La première fois qu'il s'y rend, on n'a aucune profondeur de champ, les plans sont assez statiques, les locaux vides etc... Plusieurs scènes plus tard, ces mêmes décors apparaissent plus colorés, les plans sont plus ouverts et aérés avec des travelling qui suivent le personnage littéralement s'approprier l'espace. Ca peut aussi vouloir dire l'inverse selon le contenu de la séquence : lors du dîner avec Renée Russo, la scène n'est pas vraiment introduite et commence presque directement dans le coeur du sujet. Sa manière de traiter ses interlocuteurs avec froideur est traduite par une découpage très basique et une volonté de réduire tous les facteurs extérieurs à une vague présence lointaine qui indique une négociation clinique et implacable. Tout le reste est superfl(o)u.

La caméra du film devient la caméra du reporter amateur et y gagne une sorte de puissance démonstrative narcissique (le mouvement de caméra virevoltant et tournoyant autour la rutilante nouvelle voiture de sport vers la fin apparaît comme l'égo même de Gyllenhaal). Quant à la longue séquence finale, Gyllenhaal a désormais assimilé tout le langage cinématographique : travellings, tournage à plusieurs caméra, importance de la composition du plan, caméra fixe, continuité et narration etc... Et la réalisation de Girloy amplifie tout ça en montrant systématique le tournage dans le tournage, en respectant la "mise en scène" du reportage, en restant toujours du point de vue de l'équipe vidéos, jamais de celles des personnes filmées.

Certes la critique des médias et du voyeurisme apparaît assez légers mais cette charge contre les institutions télévisuelles n'intéresse pas Gilroy qui fait avant tout le portrait d'un individualisme qui a désormais totalement assimilé le capitalisme, l'économie de marché, la demande et le besoin... et qui traite tout en parfait business man appliqué et réfléchi.

Le seul gros défaut qui m'est apparu devant le film est l'évolution du personnage dans le premier quart qui passe du petit voleur bidouilleur à un pro de la stratégie marketing un peu facilement. Le déclic sur son changement de carrière est bien amené mais pas son background à cet instant T.
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Jeremy Fox
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par Jeremy Fox »

Alors certes c'est très bien filmé et photographié (donc très agréable à regarder) et il est vrai que Jake Gyllenhall est impressionnant, s'étant fait pour l'occasion une tronche qui vaut vraiment le détour ; d'ailleurs le film tient avant tout sur ses épaules. Pour le reste, ce fut assez décevant surtout au vu de ce que j'en avais lu ici et là. Car oui le film est cynique mais tellement peu finaud et sans surprises qu'il ne m'a procuré aucun frisson de dégoût ni semblé ambigu. Moi qui ne suis habituellement pas très futé à deviner le scénario d'un film noir, j'ai sans cesse été en avance d'un quart d'heure sur les personnages, m'étant attendu à tout ce qui est arrivé. Des films comme Network ou Le grand Chantage furent bien plus puissants et dérangeants sur des thèmes proches.

Un film noir qui se regarde sans déplaisir mais finalement très attendu, pas si original que ça et surtout sans aucune profondeur.


EDIT : même avis que cinéphage et GTO en gros
Beck
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par Beck »

Moi je trouve que le film réussit à entretenir un certain "mystère" tout du long concernant le personnage de Gyllenhall et son sens moral. Je me suis demandé quasiment jusqu'à la fin "bon alors, un petite part de bien en lui ou complètement sociopathe ?"
Spoiler (cliquez pour afficher)
et la réponse finale nous ait donné avec la mort de son "partenaire"
. Je n'ai pas ressenti de dégoût non plus, à dire vrai, j'ai pris un énorme plaisir à voir les plans de Lou Bloom se passer sans accrocs, complètement plongé dans les mécanismes de ses méninges manipulatrices et égoïstes.
Critique du journalisme populaire américain (on peut bien sûr faire le parallèle avec le notre et ceux d'ailleurs) au travers de cet être au coeur froid non pas motivé par l'appât du gain, comme on peut le penser au début, mais par les sensations que lui procure le fait de chasser le fait divers tragique, d'en faire de belles images et de les voir diffusées dans tout le pays.
J'avoue avoir pensé "génial!" avec un grand smile au générique de fin !
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bronski
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Re: Night Call (Dan Gilroy - 2014)

Message par bronski »

Beaucoup aimé, un film efficace, nerveux, brillant. Et quelle prestation de Jake Gyllenhaal ! Il habite vraiment son personnage. Vraiment impressionnant.
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